- Opérateur compact
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En analyse, un opérateur compact (ou application compacte) est une application linéaire A entre deux espaces vectoriels topologiques localement convexes X et Y envoyant les parties bornées de X sur les parties relativement compactes de Y. Les applications compactes généralisent les applications linéaires continues de rang fini, qui en sont des cas particuliers. L'étude relève de l'analyse fonctionnelle à proprement parler.
La théorie est particulièrement intéressante pour les espaces vectoriels normés ou les espaces de Banach. En particulier, dans un espace de Banach, l'ensemble des opérateurs compacts est fermé pour la topologie forte. Mieux, dans un espace de Hilbert, un opérateur compact est la limite d'opérateurs de rang fini. Cette dernière propriété n'est pas vérifiée dans certains espaces de Banach.
Les premiers opérateurs compacts sont apparus avec les équations intégrales et l'étude des espaces fonctionnels. La résolution formelle d'équations intégrales simples font apparaître un opérateur à noyau dont la compacité tient à des propriétés d'équicontinuité. À travers ce problème est apparu une autre classe importante d'opérateurs, les opérateurs de Fredholm. La perturbation par des opérateurs compacts préserve la propriété d'être de Fredholm et l'indice de Fredholm : c'est le théorème de stabilité de l'indice.
Sommaire
Définition
Dans un espace vectoriel topologique localement convexe séparé (evtlcs) X, une partie de X est dite bornée lorsqu'elle est incluse dans k.V pour tout voisinage V de 0 avec k suffisamment grand. Un opérateur T de X dans Y est dit compact lorsque toute partie bornée de X est envoyée sur une partie relativement compacte de Y.
La somme de deux opérateurs compacts ou le produit d'un opérateur compact par un scalaire est encore un opérateur compact. L'ensemble K(X,Y) des opérateurs compacts de X dans Y forme donc un sous-espace vectoriel réel de L(X,Y). En outre, le composé d'un opérateur borné et d'un opérateur compact est un opérateur compact. En particulier, K(X)=K(X,X) est un idéal bilatère de L(X). Il est possible d'introduire la structure quotient L(X) / K(X), appelée algèbre de Calkin (en).
Si la topologie de X est définie par une norme, les parties bornées de X sont exactement celles incluses dans une boule. Sous cette condition, un opérateur T est compact ssi la boule unité de X est envoyée sur une partie relativement compacte de Y. De manière équivalente, on demande à ce que, pour toute suite bornée xn de X, la suite Txn admette une valeur d'adhérence.
Exemples
Opérateurs de rang fini
Soient X un espace de Banach et T un opérateur borné sur X. On dit que T est un opérateur de rang fini si ImT est un espace de dimension finie. Il existe alors un entier naturel n ≥1, des formes linéaires continues et des vecteurs tels que
Les opérateurs de rang fini sont compacts car dans un espace de dimension finie, les parties compactes sont les parties fermées bornées. Ainsi, si X est de dimension finie, tout opérateur borné de Y dans X est compact, car de rang fini.
Remarquons que l’ensemble des opérateurs compacts étant fermé, tout opérateur qui est limite dans B(Y,X) d’opérateurs de rang fini est compact. On dit que X a la propriété d'approximation ("PA") lorsque la réciproque est vraie pour tout espace de Banach Y. En particulier si X a la PA alors, dans B(X), les opérateurs compacts sont exactement les limites d'opérateurs de rang fini. Parmi les espaces ayant la PA, citons par exemple les espaces ayant une base de Schauder, comme les espaces Lp([0,1]), 1 ≤ p < +∞, ou les espaces de Hilbert séparables.
Opérateurs à noyau
Opérateurs compacts dans les espaces de Hilbert
Spectre des opérateurs compacts
Comme précédemment, on considère un opérateur compact L, endomorphisme de l'espace de Banach X sur le corps des complexes. On suppose que l'espace X est de dimension infinie. Le spectre de L est lui-même compact, au plus dénombrable, et ne comportant aucun point d'accumulation, à l'exception éventuelle de 0. Il s'agit donc
- soit d'un ensemble fini contenant 0 ;
- soit d'un ensemble infini contenant 0. Dans ce cas les éléments du spectre autres que 0 peuvent être ordonnés en une suite vérifiant
et de limite nulle.
Notamment, pour un réel δ > 0 donné, il n'y a qu'un nombre fini d'éléments λ appartenant au spectre et de module supérieur à δ.
Les complexes λ ≠ 0 appartenant au spectre jouissent de propriétés communes car l'opérateur L − λI est alors de Fredholm, d'indice 0. Notamment les éléments λ du spectre autres que 0 sont tous des valeurs propres, c'est-à-dire que L − λI est non injectif. Et la dimension du noyau de L − λI est finie, égale à la codimension de l'image.
Il est possible de définir, comme en dimension finie, le sous-espace caractéristique associé à une telle valeur propre λ : c'est la réunion des ker(L − λI)n, et on démontre qu'il existe un plus petit entier k tel que
- ker(L − λI)k = ker(L − λI)k + 1
(la suite croissante des noyaux est donc stationnaire à partir du rang k et le sous-espace caractéristique est simplement ker(L − λI)k, qui est de dimension finie).
Pour cette valeur de l'entier k, on a la somme directe
l'opérateur L − λI induisant sur le premier espace un endomorphisme nilpotent, sur le second une bijection.
Quant à l'élément 0 du spectre, il peut s'agir ou non d'une valeur propre.
Il peut arriver que le spectre soit réduit à 0, comme dans l'exemple[1] de l'opérateur de Volterra T défini sur L2([0,1]) par .
Voir aussi
Bibliographie
Walter Rudin, Analyse fonctionnelle [détail des éditions]
Notes et références
- R.G.Douglas, Banach algebra techniques in Operator Theory, Academic Press (1972), p. 133
Catégorie :- Théorie des opérateurs
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