- Obsolescence programmée
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L’obsolescence programmée (aussi appelée « désuétude planifiée ») est l'idée que les fabricants mettraient sur le marché des biens à la durée de vie (technique ou commerciale) délibérément réduite dès la conception pour obliger ou inciter les consommateurs à en acheter des remplacements. Le concept d'obsolescence programmée est discuté ; on y voit parfois un mythe empreint de complotisme[2].
Sommaire
Expression
Il est probable que l'idée sous-jacente est aussi vieille que la production et les plaintes des consommateurs sur la durée de vie des objets, mais il semble que l'expression « obsolescence programmée » (planned obsolescence en anglais) apparaît en 1932 aux États-Unis[3], et reprend son essor au milieu des années 1950, en conférant au design le rôle de rapidement démoder le produit. Elle fait l'objet de débats dans les colonnes de la revue Industrial Design, et sera popularisée par le designer industriel Brooks Stevens. Comme ses prédécesseurs, il souhaite non pas faire des produits de mauvaise qualité, mais les renouveler tous les ans via la mode. Il produit de nombreux objets (voitures, motos, tondeuses, aspirateurs[4] et autres articles ménagers…) dont les modèles sont sans cesse renouvelés. Selon B. Stevens, il faut « inculquer à l'acheteur le désir de posséder quelque chose d'un peu plus récent, un peu meilleur et un peu plus tôt que ce qui est nécessaire »[5]. Il crée une société de design Brooks Stevens Design Associates et se fait le chantre de cette approche, parcourant l'Amérique pour en faire la promotion au moyen de nombreux enseignements, articles et conférences.
Dans les années 1960, l'expression devient courante. Le constructeur automobile Volkswagen lance même une campagne de publicité sur ce thème[réf. nécessaire].
A contrario, des sociétés fabriquant des produits simples, durables et longtemps inchangés au fil du temps, comme Duralex et Seb, se sont trouvées en difficulté au début du XXIe siècle[réf. nécessaire].
Modèle économique
Microéconomie
La mise en œuvre d'un programme d'obsolescence programmée suppose que le fabricant soit sûr que l'achat de remplacement sera fait chez lui ; ce qui implique deux conditions
- une situation dominante, voire de monopole ou d'oligopole. En effet, lorsque le marché est dynamique et réellement concurrentiel, il est difficile d'imposer aux consommateurs des produits ayant une durée de vie limitée.
- La durée de vie programmée de l'objet doit rester secrète, sans quoi le consommateur aurait l'impression de se faire tromper et s'adresserait à un autre fabriquant avec une meilleure réputation. C'est ce qui distingue le modèle de l'obsolescence programmée de celui du produit jetable ou plus généralement dont il est clair pour le consommateur que sa durée de vie est limitée ( produit de saison comme un sapin de Noël par exemple), même si les logiques à l'œuvre sont proches (réduction des couts, augmentation du rythme de renouvellement) .
Ces conditions sont drastiques et c'est ce qui rend le concept d'obsolescence programmée si critiqué. En effet, si un fabricant (ou un groupe) dispose d'une situation dominante, il a d'autre choix que d'essayer d'augmenter son marché futur par une réduction de la qualité de son produit (au risque de sa réputation) ; à commencer par le plus profitable à court terme : simplement augmenter ses prix.
Macroéconomie
Les défenseurs de l'obsolescence programmée avancent que cette technique dynamise le marché et crée des conditions favorables aux entreprises innovantes. Connaître (et provoquer) la fin de vie d'un produit permet d'anticiper et prévoir l'évolution des ventes sur le long terme, ce qui réduit les risques économiques et donc facilite la planification des investissements industriels.
Bernard London a ainsi soutenu, à l'époque de la Grande Dépression et dans un but philanthropique (et non pas cynique), qu'il serait bon pour l'économie de rendre l'obsolescence programmée obligatoire, non pas en produisant des produits manufacturés de mauvaise qualité, mais en leur imposant une date limite légale, après laquelle les consommateurs devraient obligatoirement les renvoyer à un organisme ad hoc, de manière à entretenir un flux éternel de produits manufacturés. Un projet de loi visant à limiter la durée d'utilisation des produits manufacturés, prévoyant une peine d'amende en cas de non-respect, fut même proposé mais ne fut jamais voté[réf. nécessaire].
Ce genre de réflexion (selon lesquelles une destruction est favorable aux affaires) reste assez fréquent et même soutenus par de grandes voix de l'économie, même si elles sont dénoncées de longue date comme économiquement ineptes par d'autres grandes voix[6]. Elles ne tiennent notamment pas compte de la consommation définitive de ressources limitées comme les énergie fossiles ou les minerais facilement exploitables, ni de leur impact sur l'environnement.
Cependant, certains estiment que la péremption rapide des produits est le pendant de l'industrie de masse, une conséquence inévitable du progrès technologique tel qu'il est conçu actuellement. Pour l'historien et critique social Christopher Lasch par exemple « la production [...] est dirigée par des stratégies marketing reposant sur la technique bien connue de l'obsolescence programmée » et « l'idéal de la publicité est un univers de biens jetables, où l'on se débarrasse de choses dès qu'elles ont perdu leur attrait initial. Que quoi que ce soit doive être réparé, rénové ou remplacé est une notion étrangère à l'éthique publicitaire »[7].
Différents types d'obsolescence programmée
Il existe différentes variantes d'obsolescence programmée. Certaines impliquent d'ajouter sciemment des défauts de conception au produit vendu (il ne s'agit pas alors à proprement parler d'obsolescence, mais de défectuosité) ; d'autres formes plus psychologiques tentent plutôt de dévaloriser l'image du produit auprès des consommateurs. Voici un tour d'horizon non exhaustif des mécanismes attribués aux industriels.
Défaut fonctionnel
Lorsqu'une pièce ne fonctionne plus, l'ensemble du produit devient inutilisable. Si le coût de réparation, constitué du prix de la pièce de remplacement, du coût de la main d'œuvre (en particulier dans les pays développés) et des frais de transport, s'avère supérieur au prix d'un appareil neuf vendu dans le commerce, il devient alors onéreux de vouloir réparer l'appareil endommagé.
L'utilisation de plastique au lieu du métal fera en sorte que le produit se brisera plus facilement.
Néanmoins, les contraintes de production ou d'ergonomie du produit fini peuvent également conduire indirectement à compliquer les réparations. Les conceptions "monobloc" de certains appareils (réfrigérateurs ou appareils portables) peut d'ailleurs au contraire les rendre plus simples à produire, plus compacts mais aussi plus résistants. En contrepartie, les réparations sont plus difficiles, voire impossibles.
Obsolescence par péremption
Certains produits possèdent une date de péremption à partir de laquelle ils sont annoncés comme « périmés ». Cela s'applique principalement aux aliments et aux boissons, qui ont une date limite de consommation ou une date limite d'utilisation optimale, ainsi qu'aux produits cosmétiques, pharmaceutiques et chimiques. Cependant, dans certains cas, les produits restent utilisables après cette date. Par exemple, un aliment ayant une DLUO risque de voir ses qualités organoleptiques diminuées au-delà de la date indiquée, tout en restant consommable sans risque pour la santé. Une DLC est par contre plus stricte, car elle indique un risque pour la santé du consommateur s'il utilise le produit au-delà.
L'ignorance de la différence entre DLUO et DLC peut psychologiquement soit entrainer des mises à la poubelle prématurées, soit des prises de risques inconsidérées.
Obsolescence indirecte
Certains produits deviennent obsolètes alors qu'ils sont totalement fonctionnels de par le fait que les produits associés ne sont pas ou plus disponibles sur le marché. C'est le type d'obsolescence programmée le plus courant en ce qui concerne les téléphones mobiles : un téléphone en parfait état devient inutilisable lorsque sa batterie ou son chargeur ne sont plus offerts sur le marché, ou simplement parce que racheter une batterie neuve serait économiquement non rentable. De la même façon certaines imprimantes deviennent de facto obsolètes lorsque le fabricant cesse de produire les cartouches d'encre spécifiques à ces modèles. On peut également citer l'exemple d'un vieux moteur de voiture rendu inutilisable du simple fait qu'il est impossible de trouver des pièces de rechange. Autre exemple, les traceurs à plumes, dont la plupart fonctionnent encore parfaitement, mais dont les outils de traçage ne sont plus fabriqués.
L'arrêt de la production de pièces détachées est un levier puissant à la disposition des industriels. Le choix d'abandonner la production ou la commercialisation des produits annexes (cartouches, pièces détachées, batteries, etc. ) complique la tâche de maintenance et de réparation, jusqu'à la rendre impossible.
Cette pratique ne se limite pas aux produits consommables et aux pièces dérivées. Le même mécanisme d'obsolescence indirecte est possible également pour l'industrie des services et des logiciels. Par exemple, en juillet 2006, Microsoft abandonne le service d'après-vente et de maintenance corrective pour les logiciels Windows 98 et Millenium[8]. Cette décision implique que, depuis cette date, les bogues et les failles de sécurité ne sont plus corrigés par Microsoft. Par cette mesure, Microsoft tente d'inciter ses clients à acheter la nouvelle version de son système d'exploitation. Par effet de bord, Microsoft pousse aussi les consommateurs à se débarrasser du vieux matériel incapable de faire tourner les versions récentes de Windows (quantité de mémoire vive insuffisante, etc.)
Une telle pratique est appuyée par la non-communication des spécifications, et la lutte juridique au travers des brevets qui empêchent un tiers de satisfaire la demande volontairement créée par l'industriel.
Obsolescence par notification
Proche de l'obsolescence indirecte, l'obsolescence par notification est une forme évoluée d'« auto-péremption ». Elle consiste à concevoir un produit de sorte qu'il puisse signaler à l'utilisateur qu'il est nécessaire de réparer ou de remplacer, en tout ou en partie, l'appareil. On peut citer l'exemple des imprimantes qui avertissent l'utilisateur lorsque les cartouches d'encre sont vides. En soi ce mécanisme n'est pas un mécanisme d'obsolescence. Cependant si les cartouches ne sont pas complètement vides lorsque le signal est émis, il s'agit bel et bien d'une obsolescence programmée de la cartouche.
L'aspect insidieux de ce type de péremption forcée réside dans l'interaction entre deux produits : dans l'exemple de l'imprimante, un produit « consommable » (la cartouche) est déclaré obsolète par un autre produit (l'imprimante elle-même). Cette technique est plus efficace lorsque le constructeur produit à la fois la machine et les recharges.
On peut aussi noter le cas des imprimantes affichant un message d'erreur bloquant leur fonctionnement normal (« réservoir d'encre usagée plein ») et où le fabricant n'assure aucun service et invite à renouveler le matériel. L'utilisateur se retrouve avec une imprimante qui ne fonctionne plus, et il ne peut aller au-delà de ce message. L'imprimante s'est ainsi rendue inutilisable elle-même, et l'utilisateur est contraint de renouveler son matériel ou de nettoyer son imprimante et d'utiliser un logiciel permettant de remettre le compteur d'impressions à zéro.
La Communauté Européenne a en revanche interdit désormais la commercialisation de cartouches d'encre à puce électronique refusant tout service après un certain nombre de pages (même après remplissage d'encre), n'y voyant pas d'intérêt pour le consommateur et moins encore pour l'écologie des pays.
Obsolescence par incompatibilité
Principalement observée dans le secteur de l'informatique, cette technique vise à rendre un produit inutile par le fait qu'il n'est plus compatible avec les versions ultérieures. Dans le cas d'un logiciel, le changement de format de fichier entre deux versions successives d'un même programme suffira à rendre les anciennes versions obsolètes puisque non compatibles avec le nouveau standard.
Les changements de formats ou de standards sont souvent nécessaires pour prendre en compte les innovations d'un produit. Cependant ils peuvent aussi être provoqués artificiellement.
On retrouve encore une fois ce type d'obsolescence dans les imprimantes, dans lesquelles les cartouches qui ne sont pas ou plus produites par le fabricant ne peuvent être remplacées efficacement. La raison en est que les cartouches fournies par le fabricant disposent d'un circuit d'identification indiquant à l'imprimante que c'est bien une cartouche officielle. Si ce n'est pas le cas, l'imprimante refusera d'imprimer ou imprimera avec une qualité moindre. Pour parer à cela, il existe des logiciels permettant de passer outre cette protection de l'industriel et permettre l'usage de cartouches reconditionnées (à la maison, ou par des professionnels). À noter que certains vendeurs fournissent directement des cartouches génériques reprogrammées pour simuler une cartouche officielle à moindre coût pour l'utilisateur final.
Du côté d'Apple, le même phénomène se produit. En effet, en 2011, le nouveau système d'exploitation Lion n'intègre plus de module Rosetta qui permettait d'exécuter les programmes compilés pour un processeur Power PC sur un Mac équipé d'un processeur Intel. Ceci se traduit par une incompatibilité des programmes compilés avant 2006. Par ailleurs, la période de 2006 à 2011 est appelé période de transition car les développeurs ont été encouragés à abandonner le Power PC pour l'Intel. Cependant, tous n'ont pas fait ce pas et des programmes datant de cette période ne peuvent être exécutés sur Lion. L'abandon de Rosetta est contesté car lors du passage de Snow Leopard à Lion, les programmes PPC devinent inutilisables. De plus, bien que les programmes les plus populaires ont été convertis, il reste une importante ludothèque, inutilisable aujourd'hui.
Obsolescence esthétique
Certains produits (notamment les chaussures et les vêtements) subissent une obsolescence subjective. Les modes vestimentaires et les critères d'élégance évoluent rapidement, et les vêtements perdent leur valeur simplement parce qu'ils ne sont plus « à la mode ». Certains fabricants exploitent ce principe en lançant des opérations marketing et des campagnes publicitaires dont le but est de créer des modes et d'en discréditer d'autres. A noter tout de même l'effet "boomerang" de l'obsolescence esthétique : un objet qualifié de démodé pourrait très bien revenir au goût du jour quelques années plus tard.
Exemples
Quelques exemples sont cités par Cosima Dannoritzer dans son documentaire Prêt à jeter de 2010 :
- L'ampoule électrique à incandescence : sa durée de vie a été « harmonisée » et maintenue par les industriels (Cartel de Phœbus) à 1 000 heures, dans le monde entier, alors que des brevets existaient sur des ampoules d'une durée de vie allant jusqu'à 100 000 heures. Le reportage présente une ampoule de 1901, qui brille sans interruption depuis plus d'un siècle dans une caserne de pompier à Livermoore (centenaire fêté en 2001 par le « comité de l'ampoule », qui la surveille. Deux des webcams qui l'ont filmée sont tombées en panne, alors que l'ampoule fonctionne toujours, commente C. Dannoritzer dans le documentaire). La validité de cet exemple semble contestable, l'augmentation de la durée de vie d'une ampoule diminuant son rendement et donc augmentant la consommation énergétique à luminosité constante[9].
- L'automobile : pour concurrencer Henry Ford et sa Ford T volontairement vendue comme modèle unique, à portée du consommateur moyen, fiable, facile à réparer et très robuste, Alfred P. Sloan a inventé pour General Motors une Chevrolet conçue avec un châssis et un moteur uniques, mais selon le concept du changement de gamme à raison de trois nouveaux modèles de carrosserie, formes, couleurs et accessoires par an. En démodant rapidement les produits par la publicité, il pousse l'automobiliste à sans cesse abandonner son véhicule « démodé » au profit d'un modèle plus à la mode. C'est ainsi que General Motors a forcé Ford à changer de stratégie pour se lancer dans la course aux nouveaux modèles.
Il semble qu'il s'agisse là du début du modèle d' obsolescence programmée par l'esthétique et le design. - Le bas nylon : mis sur le marché par DuPont dans les années 1940, il était si résistant que les ventes se sont effondrées, faute de besoin de renouvellement. En modifiant la formulation (notamment en réduisant le dosage de certains additifs destinés à protéger le polymère des UV), les bas se remirent à filer[réf. souhaitée]. Ce thème est évoqué dans le film L'Homme au complet blanc.
- La batterie de l'iPod des première, deuxième et troisième générations (et non l'iPod dans son ensemble) : elle est prévue pour durer 18 mois. Une fois la panne survenue, les services de soutien technique d'Apple suggéraient de remplacer l'appareil tout entier, ne proposant pas de vendre séparément une nouvelle batterie. À la suite du procès en recours collectif intenté par Elizabeth Pritzker devant la justice américaine, Apple mit en place un service de remplacement des batteries périmées.
- Les imprimantes : certaines sont équipées d'une puce compteur, bloquant l'impression au-delà d'un nombre convenu de feuilles. Ces données figurent bien souvent dans le cahier des charges de l'imprimante. Certaines cartouches d'encre sont également équipées d'une puce comptant le nombre d'impressions, indiquant alors un faux niveau d'encre dans le logiciel d'impression, ce qui amène à jeter des cartouches contenant encore de l'encre[10]. Leur commercialisation est désormais interdite dans l'Union Européenne.
- Le marché informatique : l'un des secteurs les plus soumis à l'obsolescence est la production de microprocesseurs pour les ordinateurs personnels, dont le marché est dominé par deux constructeurs mondiaux. L'obsolescence est ici le résultat d'un progrès des performances de ceux-ci (progrès très important puisque exponentiel en ce qui concerne le nombre de transistors par microprocesseur, voir l'article sur la loi de Moore). La vérification surprenante dans les faits de la loi (conjecture) de Moore sur une longue période peut avoir plusieurs explications :
- rythme de progression régulier conséquence de cycles de recherche et développement puis validation des nouveaux process de microgravure selon des calendriers à peu près identiques dans le temps et pour tous les constructeurs ;
- stratégie délibérée de rythme de progression planifié des performances pour les produits commercialisés à destination du grand public. Il y aurait un intérêt économique au contrôle de la demande par répartition distillée de l'offre. En maîtrisant dans le temps la diffusion des progrès technologiques, il est possible que les géants des semi-conducteurs définissent eux-mêmes un modèle stable de consommation et s'assurent ainsi d'une correspondance entre leurs efforts d'innovation et les désirs de renouvellements de leur clientèle. L'autolimitation de l'offre obligerait ainsi les consommateurs à mettre à jour régulièrement leur matériel. Pour être effective, il faut néanmoins qu'une telle autolimitation de l'offre puisse s'appuyer sur une cartellisation forte du marché et brider la mise sur le marché de l'innovation, ceci afin d'assurer à l'ensemble du secteur concerné une rente ou un simple retour sur investissement, étant donnés les coûts colossaux de la recherche et de la construction/mise à niveau des usines nécessaires (ces coûts expliquant notamment la concentration du secteur).
De plus, les constructeurs, pour s'assurer de pouvoir écouler leur production, se basent sur un accord tacite avec les éditeurs de logiciels. Ceux-ci mettent en place des mécanismes qui bloquent parfois l'installation de leurs logiciels sur des ordinateurs anciens ou de faible puissance. Ces ordinateurs, bien que parfaitement fonctionnels, sont donc rendus obsolètes par le fait que les nouvelles versions imposent des critères de performance trop élevés.
Réciproquement, les constructeurs informatiques offrent souvent les dernières versions pré-installées de certains logiciels pour chaque achat de matériel. Ils augmentent ainsi le degré de péremption des versions antérieures.
Histoire
redite : déjà cité en exemple Dans l'histoire de l'économie, le premier objet à avoir été massivement et mondialement concerné par l'obsolescence programmée[1] semble avoir été la lampe à incandescence classique, selon la volonté de grands industriels du secteur regroupés sous le nom de Cartel de Phœbus. Celui-ci, créé spécifiquement dans ce but[réf. nécessaire] le 23 décembre 1924, regroupait alors les principaux fabricants mondiaux d'ampoules. Devant l'augmentation de la durée de vie des ampoules (2 500 heures en moyenne en 1924) et donc face à un moindre renouvellement des lampes par les consommateurs, les industriels éditent une charte commune indiquant qu'il ne pourra plus être fabriqué d'ampoule ayant une durée de vie supérieure à 1 000 heures. Ils se dotent pour cela d'une instance commune de vérification et de répression éventuelle au moyen d'amendes d'autant plus élevées que la vie constatée des ampoules est longue. En 1927, dans le monde entier, la durée de vie des ampoules des grandes marques était alignée sur 1 000 heures en moyenne. À titre de comparaison, l'ampoule centenaire, une ampoule de la caserne des pompiers de Livermore, serait restée allumée pratiquement en continu depuis 1901, et a donc brillé près d'un million d'heures[11]. Après 1939, le Cartel de Phœbus changea plusieurs fois de nom et de forme.
voir partie économique
Ce modèle économique basé sur un vieillissement (et non une obsolescence, qui concerne des produits au contraire parfaitement opérationnels, mais déjà dépassés techniquement) rapide et volontaire des produits semble d'abord avoir été le fruit de la réflexion de
Principe
L'obsolescence programmée regroupe l'ensemble des techniques visant à réduire la durée de vie ou d'utilisation d'un produit afin d'en augmenter le taux de remplacement. Cette demande profitera au producteur, ou à ses concurrents — ce qui explique certains cas de cartels. Le secteur bénéficie alors d'une production plus importante, stimulant les gains de productivité (économies d'échelle) et le progrès technique (qui accélère l'obsolescence des produits antérieurs).
Cette stratégie n'est pas sans risques : elle implique un effort de recherche et développement, n'allant pas toujours dans le sens d'une amélioration du produit. De plus, elle fait courir un risque à la réputation du fabricant (son image de marque) ; enfin, elle implique un pari sur les parts de marché futures de la firme (sur les produits de remplacement).
Cette stratégie a également un impact écologique direct. L'obsolescence programmée visant la surconsommation, elle est la cause d'un surplus de déchets, indépendamment de l'état de fonctionnement effectif des produits techniques mis au rebut ou de l'état d'usure des objets d'usage. Les circuits de recyclage ou de conditionnement des matières plastiques et des métaux, en particulier, ne prennent pas en charge le stockage des déchets informatiques, malgré l'abondance de matières premières de valeur qu'ils peuvent contenir (fer, aluminium, mais aussi tantale pour les condensateurs et métaux rares, etc.). L'exportation en masse de déchets des pays de grande consommation vers des zones géographiques où le stockage est négociable à moindre coût (Chine, Asie subhimalayenne, Afrique Noire,…[réf. nécessaire]) est d'autant plus problématique et expose classiquement les pays receveurs à des pollutions spécifiques sur les sites de décharge de grande envergure.
Vidéographie
- Cosima Dannoritzer, Prêt à jeter, documentaire, 2010, 75 minutes (The Light Bulb Conspiracy).
- L'Histoire des choses (The story of Stuff – Film documentaire gratuit au sujet du cycle de vie des produits de consommation), 2007.
Notes et références
- The Light Bulb Conspiracy », 16 octobre 2010 Cosima Dannoritzer, «
- Le mythe de l'obsolescence programmée » sur Le blog d'éconoclaste, 8 mars 2011 Alexandre Delaigue, «
- (en) Giles Slade, Review: Made to Break, 8 octobre 2006 [(en) lire en ligne (page consultée le 3 décembre 2007)].
- Exemple du modern hygene vacuum cleaner, aspirateur au design soigné, mais conçu pour rapidement se démoder.
- (en) Industrial Strength Design: How Brooks Stevens Shaped Your World, Milkwaukee Art Museum Biography : « Instilling in the buyer the desire to own something a little newer, a little better, a little sooner than is necessary. »
- sophisme de la vitre cassée pour une dénonciation de l'idée qu'une destruction est favorable à l'économie. voire par exemple
- Christopher Lasch, Les femmes et la vie ordinaire (1997), Climats, 2006, p. 164-165.
- 01net le 10 juillet 2006 [lire en ligne (page consultée le 3 décembre 2007)]. Julie de Meslon, Microsoft tire un trait sur Windows 98 et Millenium dans
- Lampe à incandescence classique Voir l'article de
- SSC Service Utility for Epson Stylus Printers.
- Le site de l'ampoule centenaire validée par le Guinness Book » Le comité de l'Ampoule., «
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- L’obsolescence programmée remet en cause les politiques de prévention des déchets, Les Amis de la Terre et le Centre national d'information indépendante sur les déchets, septembre 2010.
- (fr) Avons-nous vraiment besoin de l'obsolescence programmée, un point de vue économique, Juillet 2011
- (fr) Obsolescence programmée : Avènement du prêt à jeter, D'après le film "prêt à jeter", Avril 2011
- (fr) De l’obsolescence programmée à l’obsolescence perçue : comment peut-on lutter ?, GreenIT.fr, 25 novembre 2010.
- (fr) Le film "Prêt à jeter" sur youtube
- (en) Consumer Society Is Made To Break, Adbusters, 20 octobre 2008.
- (en) Companies Slash Warranties, Rendering Gadgets Disposable, Wall Street Journal, 16 juillet 2002.
- (en) The story of stuff, vidéo de 20 min à propos de l'ère du jetable.
- (en) Ending the Depression Through Planned Obsolescence (« Mettre fin à la dépression économique par l'obsolescence programmée »).
- (en) The man who said no to Wal Mart (« L'homme qui a dit non à Wal Mart », entreprise américaine multinationale spécialisée dans la grande distribution), étude de cas, 19 décembre 2007.
- (en) Designed to fail (« Produits destiné à tomber en panne »).
- Chronique du WE : Obsolescence Programmée (« Sujet épineux et enfin médiatisé de l’Obsolescence Programmée »).
- (fr) [1] Parlement européen - Doc.: A5-0438/2002
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