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Chaîne de Ponzi
Une chaîne de Ponzi, dynamique de Ponzi, pyramide de Ponzi ou jeu de Ponzi, est un système de vente pyramidale, une forme d'escroquerie[1] par cavalerie, fonctionnant par effet boule de neige, consistant en la promesse de profits très intéressants, financés par l'afflux de capitaux investis progressivement, jusqu'à l'explosion de la bulle spéculative ainsi créée. Ce système tient son nom de Charles Ponzi qui est devenu célèbre après avoir mis en place une opération immobilière frauduleuse en Californie fondée sur ce principe.
Sommaire
Ponzi
Charles Ponzi utilisa ce système en 1921 à Boston, ce qui fit de lui, personne anonyme, un millionnaire en six mois. Les profits étaient censés provenir d'une spéculation sur les Coupons-réponse internationaux, avec un rendement de 40 % en 90 jours. Environ 40 000 personnes investirent 15 millions de dollars, dont seulement un tiers leur fut redistribué[2].
L'Union Postale Universelle (UPU) qui regroupe les administrations postales du monde depuis 1878, avait répondu à la demande de l'émission d'un timbre-poste universel par la création des Coupons-réponse internationaux le 1er octobre 1907. Un particulier achetait dans son pays un Coupon-réponse international au prix de 0,28 Franc (ou son équivalent) et l'envoyait à son correspondant, partout dans le monde. Ce destinataire se rendait dans un quelconque bureau de poste où, contre la remise de ce coupon, il recevait un ou plusieurs timbres-poste de son pays, d'une valeur correspondant à l'affranchissement d'une lettre en service international (0,25 Franc ou son équivalent). La différence de 0,03 Franc servait à couvrir les frais de compensation entre les administrations postales, l'une ayant reçu la totalité de l'argent du coupon, l'autre ayant vendu un timbre-poste sans perception d'argent. Comme il y avait à cette époque une bonne stabilité de la parité de change des monnaies, le système pouvait fonctionner sans problème.
La sortie de la Première Guerre mondiale et ses conséquences financières dans l'économie mondiale ont totalement ébranlé le système de par les dévaluations fréquentes constatées et l'augmentation des tarifs postaux qui s'ensuivirent. Des administrations postales devenaient déficitaires dans ces échanges et durent prendre des mesures restrictives à l'utilisation de ce service.
Mise en situation
Imaginons que quelqu'un propose un investissement à 100 % d'intérêts : vous lui donnez 10 euros, il vous en rend 20 en utilisant l'argent déposé par les clients suivants (il lui suffit d'ailleurs de proposer un rendement double des rendements connus du marché pour s'attirer de la clientèle et pour durer). Le système est viable tant que la clientèle afflue, attirée en masse par les promesses financières (et d'autant plus tentantes que les premiers investisseurs sont satisfaits et font une formidable publicité au placement). Les premiers clients, trop heureux de ce formidable placement, reviennent dans la chaîne eux aussi, s'ajoutant à tous ceux auxquels ils ont prêché.
Le phénomène fait alors boule de neige, entretenu tant que l'argent rentre et permet de payer à 100 % les nouveaux investisseurs. L'organisateur prend une commission, bien compréhensible lorsque l'on voit les promesses qu'il fait, et qu'il tient. La chaîne peut durer tant que la demande suit la croissance exponentielle imposée par ce système, les clients arrivant par 2, 4, 8, 16, 32, etc. Lorsque la chaîne se coupe, la bulle éclate : tous les derniers investisseurs sont spoliés. Sont gagnants ceux qui ont quitté le navire à temps et, surtout, l'organisateur qui est très rarement un banquier.
Chaînes de Ponzi célèbres
En 1962, un comptable américain, Bernie Cornfeld (en), créa Investor Overseas Services, dont le produit vedette était le "Fond des Fonds", promettant des dividendes exceptionnels aux investisseurs. Jusqu'à 25 000 vendeurs particulièrement entraînés placèrent ce produit dans un large public. Les dividendes étaient prélevés sur les apports récents. Cornfeld écuma l'Amérique du Nord et une grande partie de l'Europe. Le système s'écroula en 1970. Bernie Cornfeld fut arrêté en Suisse en 1973, écopa de 11 mois de prison préventive, mais fut finalement acquitté en 1979, et conserva une part de ses gains qui lui permirent de mener grand train de vie jusqu'à sa mort, en 1995.
En 1997, l'Albanie a connu l'effondrement de « banques pyramidales » qui ont provoqué des émeutes causant des milliers de morts[3].
En novembre 2008, 500 000 Colombiens ont été victimes de la société d'investissement Proyecciones DRFE Dinero rapido, facil y en efectivo (argent facile, rapide et en liquide) qui reposaient sur un système de Ponzi[4].
L'homme d'affaires américain Bernard Madoff, qui n'est pas banquier mais président-fondateur d'une société d'investissements et très actif dans le NASD et NASDAQ, a créé un schéma de Ponzi qui a fonctionné pendant 48 ans, de 1960 à la crise financière de 2008[5]. C'était un gérant de hedge fund qui promettait des retours sur investissements relativement élevés, de l'ordre de 8 à 12% par an. Mais ce qui sortait le plus de l'ordinaire avec les performances qu'affichaient ses fonds était l'absence de retours négatifs sur de très longues périodes et une volatilité (l'équivalent du risque de l'investissement) très faible. Autre indice alarmant, à la clôture de chaque exercice, Madoff déclarait être liquide, c'est-à-dire détenir tous ses avoirs en liquidités, et ainsi ne publia jamais de relevés indiquant la quelconque possession de titres financiers. Enfin, les titres sur lesquels il disait investir, notamment des options sur indices, n'étaient pas assez liquides pour "absorber" les volumes qu'un fonds de la taille de celui de Madoff aurait engendré. L'utilisation de modèles mathématiques financiers, des clients réputés, des postes élevés dans l'administration, l'assuraient d'un prestige important. Lorsque de nombreux clients ont souhaité retirer leurs avoirs de sa société d'investissement lors de la crise financière de 2008, ils se rendirent compte que les caisses étaient vides et qu'ils avaient perdu tout leur argent. Avant son arrestation, Bernard Madoff gérait officiellement 17 milliards USD.
En février 2009, le Japonais Kazutsugi Nami a été arrêté avec 20 autres personnes[6], car il est soupçonné d'avoir détourné 126 milliards de yens (un peu moins d'un milliard d'euros) en organisant une chaîne de Ponzi. Dans ce cas précis, le mécanisme utilisé faisait appel à un investissement minimum de 100 000 yens, investi dans une monnaie virtuelle appelée l'enten, avec un retour sur investissement annoncé de 36% par an[7].
Fin février 2009, Allen Stanford, un milliardaire texan est suspecté d'avoir monté une escroquerie bancaire approchant les 9 milliards de dollars (6,8 milliards d'euros). La Stanford International Bank (SIB), l'un des établissements au coeur du dispositif, a été nationalisée le 24 février 2009 par le gouvernement d'Antigua. L'opération, basée en partie sur une chaîne Ponzi, aurait fait autour de 50 000 victimes.
Dans la littérature
L'intrigue de départ du roman policier L'Odore della notte (2001 ; trad. fr. L'Odeur de la nuit, 2003) du romancier italien Andrea Camilleri repose sur une escroquerie type « chaîne de Ponzi » montée par le comptable Gargano et dont sont victimes des habitants de Vigata où exerce le commissaire Salvo Montalbano[8].
Le roman Little Dorrit (en) de Charles Dickens mentionnait déjà en 1857 une escroquerie basée sur ce principe.
Notes et références
- ↑ Ventes ou prestations « à la boule de neige » dans le Code de la consommation Français
- ↑ Présentation du Ponzi scheme par l'US Securities and Exchange Commission
- ↑ http://www.senat.fr/rap/r05-287/r05-2872.html
- ↑ http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2008/11/14/des-milliers-de-petits-epargnants-colombiens-ont-ete-escroques_1118665_3222.html
- ↑ (en) personnel de rédaction, « Ponzi squared », dans The Economist, 15 décembre 2008 [texte intégral (page consultée le 16 décembre 2008)]
- ↑ Article de Libérationdu 7 février 2009 (consulté le 9/2/2009)
- ↑ Géostratégique.net, en date du 5 février 2009 (consulté le 9/2/2009)
- ↑ Montalbano se fait expliquer ainsi le système par son adjoint Augello : « Mettons que tu me confies un million pour le faire fructifier. Moi, au bout de six mois, je te donne deux cent mille lires d'intérêt, soit vingt pour cent. C'est un taux très élevé et le bruit se répand. Arrive un autre ami à toi qui me confie son million. À la fin du deuxième semestre, moi je te donne encore deux cent mille lires et autant à ton ami. À ce point, je décide de disparaître. Et je me suis gagné un million quatre-cent-mille lires. » (trad. Serge Quadruppani)
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- (en) Présentation du Ponzi scheme par l'US Securities and Exchange Commission
- (fr) « Dette publique – Du risque d'insoutenabilité au risque d'illiquidité », Revue économique, juillet 2003.
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