Massacre de Maillé

Massacre de Maillé

Le massacre de Maillé est le meurtre, le 25 août 1944, pendant la Seconde Guerre mondiale, de 124 des 500 habitants[1] de la commune française de Maillé, dans l'Indre-et-Loire. Suite à une embuscade quelques jours avant et en représailles aux actions de la résistance locale contre l'occupant allemand, des troupes allemandes commirent un massacre contre les civils de Maillé[1]. Contrairement à Oradour-sur-Glane, le village a été reconstruit à l'identique après la guerre[2].

Sommaire

Déroulement

Le 24 août 1944 au soir, des accrochages entre FFI et troupes allemandes ont lieu à proximité d'une ferme sur la commune de Maillé. Dans la nuit, le sous-lieutenant, Gustav Schlüter, responsable du poste allemand de Sainte-Maure-de-Touraine, avertit la Feldkommandantur de Tours et reçoit vraisemblablement l'ordre d'exercer des représailles.

Le lendemain matin, jour de la Libération de Paris, une escadrille alliée bombarde à Maillé un convoi militaire et des pièces de DCA. Peu après, l'accès à Maillé est bloqué par les forces allemandes. Au sud-ouest, une cinquantaine de militaires allemands commencent le massacre dans les première fermes avec une cruauté inouie, puis pénétrent dans le village et poursuivent la tuerie et mettent systématiquement le feu aux bâtiments. Les assassins quittent le village vers midi, mais des sentinelles empêchent les survivants de quitter leurs cachettes. Deux heures plus tard, une pièce de 88 pilonne le bourg, tirant 80 obus. Sur les 60 habitations que compte Maillé, 52 sont détruites.

Un quart des habitants du bourg, soit 124 sur 500, sont tués par balle, à l'arme blanche, au lance-flammes, lors des tirs d'artillerie ou périssent dans les incendies. Parmi les victimes, âgées de 3 mois à 89 ans, on dénombre 40 hommes, 42 femmes et 42 enfants[1].

Commémorations

Pour commémorer ce drame, dès l'immédiate après-guerre, une plaque fut posée sur la mairie, un monument édifié sur la nationale 10 (sur la commune de Draché), une stèle dans l'église, une plaque sur la gare du village. Au début des années 1950, une pierre avec pour seule mention « 25 août 1944 » fut posée dans le petit square du village. À la fin des années 1970, lors de la reconstruction de l'autoroute A10 traversant la commune, un monument fut construit sur une aire à proximité de Maillé. Ce n'est qu'en 1984 qu'un monument fut réalisé dans le cimetière, mentionnant l'ensemble des noms des massacrés avec leurs âges.

La principale ressource bibliographique est le livre de Mémoires de l'abbé Payon[3], édité en 1945, réédité en 1974 puis en 1993 par le Conseil général d'Indre-et-Loire.

Les maisons reconstruites sont un rappel de la destruction du village. Tous les bâtiments ont été réédifiés selon le même ordonnancement : murs en moellons blancs alignés, toits en ardoises pour les particuliers et en tuiles pour les édifices communaux.

Deux expositions furent réalisées par les archives du département. La première fut organisée à l'occasion du cinquantième anniversaire du massacre, le 24 août 1994. La deuxième en 2001.

Depuis le 9 mars 2006, la Maison du souvenir a ouvert ses portes dans la commune de Maillé, dans le café Métais. Elle permet d'accueillir un public scolaire et non-scolaire autour de certains thèmes relatifs au massacre de Maillé.

Selon Christophe Prime, historien au Mémorial de Caen, « La mémoire collective s'était construite autour d'Oradour-sur-Glane et ses 642 villageois exécutés le 10 juin 1944 par les SS de la division Das Reich. Après la guerre, il fallait évacuer le passé pour reconstruire et se reconstruire[1] ».

Le président de la République Nicolas Sarkozy s'y est rendu le 25 août 2008, en présence de Jean-Marie Bockel (secrétaire d'État à la Défense et Anciens combattants), et d'Hervé Novelli (secrétaire d'État aux PME, président de la Communauté de communes du Pays de Richelieu et élu de la quatrième circonscription d'Indre-et-Loire dont fait partie Maillé)[4].

Responsabilités et poursuites pénales

Selon un document des archives départementales découvert après 1995, le sous-lieutenant Gustav Schlüter a été condamné à mort par contumace à Bordeaux en 1952[1], lors d'un procès sans témoin[1]. Il est mort chez lui en Allemagne en 1965, sans être inquiété. Pour Sébastion Cheverau et Luc Forlivesi[5], le rôle exact de Schülter n'est pas éclairci : « Un simple sous-lieutenant aurait-il pu organiser tout seul le déplacement d'une centaine d'hommes ainsi que de deux canons de DCA, pour des représailles alors que la Feldkommandantur préparait activement son départ du département ? »

Le 1er août 2005, le procureur général de Dortmund, Ulrich Maass, rouvre officiellement une enquête qui justifie sa visite à Maillé en juillet 2008[6]. En effet, les crimes de guerre sont imprescriptibles en Allemagne, la justice allemande possède un droit d'initiative en ce domaine et l'unité responsable du massacre n'étant pas formellement identifié. L'historien Peter Lieb estime qu'il est très probable que les responsables soient des hommes du Feld-Erstatz-Bataillon (bataillon de réserve) de la 17e Panzer Grenadier Division SS Götz von Berlichingen[7], cantonné à Châtellerault.

Cette hypothèse a été confirmée par Ulrich Maass, qui a déclaré, le 9 octobre 2008 qu'il était pratiquement sûr que le massacre avait été perpétré par un bataillon de SS basé à Châtellerault[8]. Il s'est basé sur des documents de la Gestapo qui se trouvaient dans les archives de la ville de Tours et du département. Il a indiqué avoir retrouvé les noms de trois sous-officiers allemands qui auraient pu jouer un rôle[8]. Deux sont morts en 1952 et en 1965 et le sort du troisième est encore inconnu. Le procureur a demandé à pouvoir consulter les archives de Fontainebleau.

Notes et références

  1. a, b, c, d, e et f Mathieu Delahousse, « Maillé, ce village martyr qu'on avait oublié », Le Figaro, 24 juin 2008 [lire en ligne sur le site lefigaro.fr].
  2. Élise Vincent, « Enquête sur un crime de guerre oublié », Le Monde, 26 juin 2008 [lire en ligne sur lemonde.fr].
  3. André Payon, Un village martyr, Maillé : récit du massacre du 25 août 1944, Tours, Arrault, 1945, 105 p. 
  4. « Nicolas Sarkozy à Maillé : « réparer une injustice » sur lefigaro.fr, 25 août 2008.
  5. Voir la section « Bibliographie ».
  6. Édouard Launet, « Ulrich Maass Exhumeur d'un « massacre oublié », Libération, 18 juillet 2008, sur le site liberation.fr.
  7. Peter Lieb, « Répression et massacres – L’occupant allemand face à la résistance française, 1943-1944 », in Gaël Eismann et Stefan Maertens (dir.), Occupation et répression militaires allemandes, 1939-1945,  éd. Autrement, coll. « Mémoires/Histoire », Paris, 2006, p. 178.
  8. a et b « Un bataillon SS à l'origine du massacre de Maillé », Le Figaro, 10 octobre 2008 [lire en ligne sur le site lefigaro.fr].

Bibliographie

  • [PDF] Histoire et mémoire d’un massacre – Maillé, Indre & Loire, par Sébastien Chevereau (chef du projet Maison du Souvenir de Maillé) et Luc Forlivesi (directeur des Archives départementales d’Indre-et-Loire), fondation de la Résistance, Paris, 2007.
  • « Maillé, j'avais cinq ans » ou un survivant édite de la correspondance familiale redécouverte en 2004 (article de la Nouvelle République 37 du 22 aout 2009.
  • Maillé Martyr – Un village Martyr, Maillé – Récit du massacre du 25 Août 1944, par l'abbé André PAYON, curé de la Celle-Saint-Avant, Draché et Maillé, publié sous le patronage du Comité de Libération d'Indre-et-Loire, 1945.

Filmographie

  • « 25 août 1944, Maillé : un crime sans assassins », documentaire (79 minutes, 2011) de Christophe Weber, diffusé dans l'émission Infrarouge, France 2, le 23 juin 2011[1],[2]
  1. Présentation sur le site tvmag.lefigaro.fr, consulté le 24 juin 2011.
  2. Consultable sur le site pluzz.fr (un site de France Télévisions).

Annexes

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