- Massacre de Cana de 2006
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Bombardement de Cana de 2006
Opérations militaires lors du conflit israélo-libanais de 2006Bombardement de Cana — Bataille de Marjayoun — Bombardement de Qaa — Bombardement du convoi de Marjayoun — Bataille de Ayta ash-Shab
Un raid par avion conduit par l'armée israélienne sur la ville de Cana s'est produit dans la nuit du 30 juillet 2006 au cours des affrontements entre Tsahal et le Hezbollah au Liban Sud. L'attaque et l'effondrement d'un bâtiment ont fait 28 morts, dont 16 enfants (selon un premier bilan, la police libanaise avait annoncé plus de 62 morts civils dont 42 enfants[1] dont une quinzaine de handicapés physiques ou mentaux[réf. nécessaire]). Certains parlent de massacre et établissent un parallèle avec les circonstances de la mort de civils au cours du bombardement de Cana de 1996, où une centaine de civils avaient trouvé la mort.
Sommaire
Contexte du drame
L'événement survient après plusieurs semaines d'affrontements entre Tsahal et le Hezbollah, dans le contexte d'un nouveau conflit qui frappe le Liban et le nord d'Israël. Le gouvernement israélien et certains médias accusent le Hezbollah d'utiliser la population civile comme des boucliers humains.
Pendant deux semaines, Israël dit avoir prévenu les populations[2] d'évacuer les régions qui servent de bases de tir de roquettes et de missiles vers le territoire israélien. Dan Gillerman, ambassadeur israélien aux États-Unis, a déclaré qu’«Israël a répété aux résidents de Cana qu'ils devaient partir, et qu'il ne serait pas surprenant que le Hezbollah les ait fait rester.» [3], mais les routes qui relient Cana aux villages voisins étaient impraticables ou très dangereuses, étant soumises au pilonnage quotidien de l'artillerie israélienne.
Le drame de Cana intervient après deux semaines de bombardements israéliens, qui d'après l'Agence France-Presse auraient fait au moins 548 victimes au Liban, dont 465 civils [4].
Déroulement des faits
Israël considère la ville de Cana comme un site de tir du Hezbollah. L'armée a donc décidé de bombarder Cana entrainant ainsi le pilonnage de la ville pendant plus de deux heures[5]. Ce bombardement a détruit des dizaines de bâtiments dont un immeuble de 3 étages qui, d'après l'armée israélienne, était une base de lancement de missiles katioucha. Ce bombardement a provoqué la mort de 28 des 63 habitants de l'immeuble bombardé. On compte 16 enfants et plusieurs femmes parmi les victimes (selon les secouristes libanais). 20 personnes bloquées sous les ruines d'un abri en sont retirées.
Responsabilités du drame
Le bombardement a entraîné de nombreuses protestations, ainsi que l'annulation de la visite de Condoleezza Rice à Beyrouth, qui de source officielle libanaise, « n'est plus la bienvenue au Liban, tant qu'un cessez-le-feu n'aura pas été conclu ». Le premier ministre, Fouad Siniora, a exclu tout dialogue après le massacre et a indiqué qu'une enquête internationale doit avoir lieu sur le massacre[6]. À Beyrouth, des milliers de Libanais ont manifesté, certains sont entrés dans le QG de l'ONU à Beyrouth, en cassant les vitres[7].
D'après le gouvernement israélien, le nombre important de victimes civiles est imputable au Hezbollah qui se servirait de la population comme « bouclier humain ». Les habitants ont affirmé qu'il n'existait aucun membre du Hezbollah à Cana et contestent, avec le ministre de la défense libanais et Human rights watch, l'existence de quelque batterie de katioucha que ce soit dans le village. Selon des sources israéliennes également, l'immeuble en question aurait non seulement pu servir de cache pour des installations de lancement de missiles mais se serait effondré près de sept heures après les bombardements[8]. Un survivant infirme cette version des faits en affirmant que l'immeuble qui était bombardé à 1 heure du matin a subi deux raids de la part de l'armée israélienne et un correspondant d'al-Jazeera dit que l'immeuble s'est effondré tout de suite, les corps n'ayant pu être retirés que sept heures après le bombardement à cause des bombardements intenses[9],[10].
Le chef d'état-major de l'armée de l'Air, le général Amir Eshel, a cependant fait remarquer dans une conférence de presse à Tel Aviv dimanche soir qu'il n'y avait pas forcément de rapport de cause à effet entre le raid de Tsahal sur Cana et l'écroulement d'un immeuble du village. L'officier a laissé entendre que des armes entreposées par le Hezbollah dans l'édifice ont pu exploser quelques heures après le bombardement et provoquer alors l'effondrement du bâtiment[11]. Un média de l'extrême droite libanaise non lié au gouvernement israélien, Libanoscopie, rejoint l'idée d'une manipulation orchestrée par le Hezbollah pour utiliser le symbole de Cana et empêcher toute négociation israélo-libanaise [12].
Une investigation ordonnée par l'ONU est en cours et doit rendre ses conclusions.
Kofi Annan, le secrétaire général de l’ONU, a déclaré le 8 août 2006, que le bombardement par les forces israéliennes du village de Cana semble constituer un exemple des violations du droit international commises dans le cadre du conflit opposant Israël et le Hezbollah. Annan a plaidé pour une enquête approfondie sur les événements de Cana[13].
Crime de guerre ?
Louise Arbour, haut commissaire de l'ONU pour les droits de l'homme, a demandé une enquête indépendante pour déterminer s'il s'agit d'un crime de guerre. Une des difficultés est qu'aucun des belligérants n'a signé la convention instituant la Cour pénale internationale, et qu'il n'y a donc aucune juridiction internationale qui soit compétente.
Réactions internationales
Belligérants
Liban : Fouad Siniora, le premier ministre libanais a dénoncé « un crime de guerre israélien » et a demandé l'ouverture « d'une enquête internationale ». Les négociations au sujet d'un cessez-le-feu on également été rompues, le gouvernement libanais exigeant désormais une trêve sans conditions. Le premier ministre a par ailleurs remercié le Hezbollah pour sa lutte menée contre Israël.[14]
Israël : Ehoud Olmert a rejeté tout cessez-le-feu immédiat. Miri Eisin, la porte-parole du gouvernement a annoncé l'ouverture d'une enquête, tandis qu'un responsable de l'armée israélienne a rejeté la faute du bombardement sur le Hezbollah. Selon l'armée israélienne, l'effondrement du bâtiment se serait néanmoins produit 7 heures après l'attaque [15].
Hezbollah : Dans un communiqué, le Hezbollah a juré de venger la mort des civils libanais.
Pays arabes et/ou musulmans
Palestine : Le président palestinien Mahmoud Abbas, a qualifié le bombardement de "crime".
Hamas : Le Hamas a juré de perpétrer des attaques contre Israël, y compris éventuellement des attentats suicide. Le député Mouchir al-Masri a indiqué que "dans cette guerre ouverte déclarée aux pays arabes et aux musulmans, toutes les options sont possibles, y compris frapper au cœur de l'entité sioniste."[16]
Syrie : Bachar el-Assad a accusé Israël de pratiquer un "terrorisme d'État" [16].
Iran : Hamdi Reza Assefi, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères iraniens appelle au calme tout en condamnant le massacre, "les responsables du régime sioniste et certains dirigeants américains doivent être jugés pour les crimes commis au Liban". Yahya Rahim Sfavai le chef des Gardiens de la Révolution a appelé ses hommes à se préparer à combattre Israël et les États-Unis.[16]
Maroc : Le Maroc a fermement condamné "l'odieuse agression israélienne" contre le village de Cana et a exhorté la communauté internationale à agir en vue de mettre fin à la guerre contre le Liban.
Jordanie : Le roi Abdallah II de Jordanie a accusé Israël "d'agression criminelle" et a qualifié le bombardement de "crime répugnant". Il demande la mise en application d'un cessez-le-feu immédiat[17].
Algérie : Le gouvernement algérien a qualifié "d'acte criminel que rien ne saurait justifier" le bombardement de Cana. Le gouvernement demande la mise en application immédiate d'un cessez-le-feu[18]. L'Algérie a décrété un deuil national de trois jours.
Tunisie : Le gouvernement tunisien se déclare profondément choqué et consterné par le raid israélien sur Cana. Pour la Tunisie, Israël "viole ainsi ouvertement les principes humanitaires, les chartes et la légalité internationales " et le qualifie de "lâche agression criminelle" et "horrible massacre"[19]. Le gouvernement condamne le massacre et demande la mise en application d'un cessez-le-feu au Liban.[20] La Tunisie a décrété un deuil national de trois jours et la mise en berne des drapeaux sur les bâtiments officiels. Ainsi, toutes les manifestations culturelles ont été annulées pendant cette période.
Libye : La Libye qualifie le bombardement "d'agression barbare".
Égypte : Le ministre des affaires étrangères égyptien, Ahmed Abul Gheit, a exprimé « la colère » de l’Egypte face au bombardement de Cana. Il a déclaré que le Caire considérait le gouvernement israélien comme « entièrement responsable de l’incident de Cana.
Arabie saoudite : L'Arabie saoudite a dénoncé une "action sauvage".
Pays occidentaux
Canada : Le ministre des Affaires étrangères canadien, Peter MacKay, a qualifié de tragédie la mort de quelque civils, surtout des femmes et des enfants, lors du bombardement de Cana par l'armée israélienne. « Le coût pour le peuple au Liban est très haut », a-t-il dit.
M. MacKay a tout de même nuancé la position canadienne dans ce dossier. Le ministre a notamment déclaré qu'il favorisait une solution à long terme à un cessez-le-feu temporaire.
Union européenne : La Commission européenne à condamné ce bombardement qu'elle juge horrible, et a réitéré son appel à un cessez-le-feu.[21]
France : Jacques Chirac a exprimé sa "consternation" et a et condamné "cette action injustifiable, qui montre plus que jamais la nécessité de parvenir à un cessez-le-feu immédiat sans lequel d'autres drames ne peuvent que se répéter". François Hollande a condamné le bombardement au nom du Parti Socialiste. Il a demandé à ce que la France saisisse le Conseil de sécurité de l'ONU pour qu'un cessez-le-feu soit établi au Liban[22].
Royaume-Uni : La ministre des affaires étrangères britannique, Margaret Beckett à qualifié le bombardement de Cana de tragédie pour les familles et pour le peuple libanais.
Vatican : Le pape Benoit XVI demande à toutes les parties un cessez-le-feu immédiat.
Espagne : José Luis Zapatero a réitéré son appel à un cessez-le-feu immédiat pour "mettre fin à la violence et éviter d'assister à nouveau à des tragédies de ce genre"[23].
États-Unis : La secrétaire d'État américaine, Condoleezza Rice a demandé à ce qu'un cessez-le-feu soit instauré le plus tôt possible. Selon Nicholas Burns, numéro trois de la diplomatie américaine, le bombardement de Cana ne constitue pas un crime de guerre.[24]
Finlande : La Finlande qui préside l'UE s'est dite choquée et appelle à un cessez-le-feu.
Grèce : La Grèce s'est dite atterrée par le bombardement qu'elle qualifie de "tuerie massive".[25]
Autres pays
Venezuela : Le président vénézuélien, Hugo Chávez, a condamné l'attaque israélienne sur Cana, en qualifiant le massacre de "crimes de Nazi". [26]
Chine : La Chine a condamné et a demandé un cessez-le-feu immédiat.[25]
Afrique du sud : Le président sud-africain, Thabo Mbeki, a exprimé dans une lettre officielle « son intense indignation » et a souligné que l’Afrique du Sud soutiendrait tous les efforts des Nations Unies pour aboutir à un cessez-le-feu.
Sénégal : Le gouvernement sénégalais dénonce « l’usage disproportionné de la force et les tueries de civils innocents de la part de l’Etat d’Israël », exprime sa solidarité et appelle à « la cessation immédiate des dérives et surenchères de tout bord ».
Maurice : L’île Maurice dénonce, dans un communiqué, « les attaques israéliennes contre le Liban » et l’usage que fait Israël de sa force militaire pour frapper de « manière indiscriminée » le Liban.
Organisations internationales
Ligue arabe : Amr Moussa, le secrétaire général de la Ligue arabe, a dénoncé une "agression barbare".[25]
Organisation de la conférence islamique : L'organisation de la conférence islamique, dénonce un "crime de guerre" et a appelé le Conseil de sécurité des Nations unies à "agir d'urgence pour adopter une résolution proclamant un cessez-le-feu et amener Israël à stopper son agression".
Nations unies : Le représentant de l'ONU au Liban a condamné le raid israélien, et a demandé l'ouverture d'une enquête immédiate. [27] Kofi Annan a demandé aux 15 membres du Conseil de sécurité de condamner les bombardements dans les termes les plus fermes. Le 8 août 2006 Kofi Annan déclare que le bombardement par les forces israéliennes du village de Cana, semble constituer un exemple des violations du droit international commises dans le cadre du conflit opposant Israël et le Hezbollah. Annan a plaidé pour une enquête approfondie sur les événements de Cana. [13]
Human Rights Watch considère le massacre de Cana comme un crime de guerre et en juge Israël responsable. HRW dit qu'Israël n'a pu fournir aucune preuve de l'existence d'installation militaire du Hezbollah.[28]
Références
- ↑ Lemonde.fr, Des milliers de Libanais et de nombreux pays dénoncent le massacre de Cana), Avec AFP et Reuters, 30.07.06
- ↑ Guysen Israel News
- ↑ Democracy Now!, Headlines for July 31, 2006
- ↑ Le Soir, 1er août, Bilan des victimes civiles libannaises d'après AFP
- ↑ Kathy Gannon, Raid israélien à Cana, dans le sud du Liban: au moins 50 morts, AP, 30.07.06
- ↑ EuroNews : Condoleezza Rice n'est plus la bienvenue au Liban
- ↑ Lemonde.fr, Des milliers de Libanais et de nombreux pays dénoncent le massacre de Cana, avec AFP et Reuters, 30.07.06
- ↑ Kana collapse was hours after attack, Jerusalem Post
- ↑ Human Rights Watch
- ↑ Vidéo d'aljazeera
- ↑ Tsahal : l'immeuble de Cana s'est effondré sept heures après le raid, Claire Dana Picard
- ↑ Cana 2, orchestré par le Hezbollah ?, Libanoscopie
- ↑ a et b L'Express
- ↑ Fouad Siniora remercie le Hezbollah pour ses « sacrifices », Reuters, 30.07.06
- ↑ Article du figaro
- ↑ a , b et c Hamas et Hezbollah appellent à des représailles, Téhéran prône un cessez-le-feu, lefigaro.fr (avec Reuters), 30.07.06
- ↑ Kathy Gannon, Raid israélien à Cana, dans le sud du Liban: au moins 50 morts, AP, 30.07.06
- ↑ Alger qualifie d'"acte criminel" le bombardement de Cana, Presse Canadienne, 30.07.06
- ↑ Liban: la Tunisie "profondément choquée" par le bombardement de Cana, AP, 30.07.06
- ↑ La Tunisie est «profondément choquée», AP, 30.07.06
- ↑ Liban: 51 civils tués dans un raid israélien, agences/ruc/sun, 30.07.06
- ↑ Cana : Hollande condamne et demande la saisine du Conseil de sécurité, AFP, 30.07.06
- ↑ La communauté international condamne le bombardement de Cana, RTL.be, 30.07.06
- ↑ Tuerie de Cana : pas un crime de guerre selon Washington, AFP, 30.07.06
- ↑ a , b et c Israël condamné après le drame de Cana, nombreux appels à une trêve, AFP, 30.07.06
- ↑ http://www.sana.org.sy/fra/55/2006/07/29/52417.htm
- ↑ Le représentant de l'ONU au Liban condamne le raid israélien sur Cana et demande une enquête, AP, 30.07.06
- ↑ (en) Israel/Lebanon: Israel Responsible for Qana Attack, Human Rights News, 30.07.06
Voir aussi
Liens internes
- Conflit israélo-libanais de 2006
- Bombardement de Cana de 1996
- Salam Daher (alias Casque Vert)
Liens externes
- (ar) Vidéo du lieu de l'attaque aérienne sur Al Manar TV
- (fr) Vidéo sur l'utilisation de Cana comme base de tir par le Hezbollah, selon l'agence de presse francophone Guysen News Israel
- (fr) Bombardement de Cana : le bilan revu à la baisse
- (fr) Human Rights Watch : Israël responsable de crimes de guerre
- (en) Hezbollywood Horror: 'Civil Defense Worker' doubles as Traveling Mortician - Israel Insider
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