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Le Village aérien
Le Village aérien est un roman d'aventures dans la jungle africaine, écrit par Jules Verne entre le 29 janvier et le 30 avril 1896 (paru sous forme de feuilleton en du 1er janvier au 15 juin 1901 sous le titre La Grande forêt dans le Magasin d'éducation et de récréation). Ces deux titres, du feuilleton puis du tiré à part en grand format, correspondent à deux des chapitres du livre.
De manière ludique, le roman est l'occasion de s'interroger sur le fameux « chaînon manquant » entre le grand singe et l'être humain, le débat étant à l'époque brulant depuis la parution des travaux de Darwin. Au premier degré, il s'agit d'un roman très agréable à lire, joyeux et égrénant pas mal de morceaux de bravoure, tels des attaques d'éléphants, de rhinocéros et de phacochères.
Pour un lecteur du XXIe siècle, Le village aérien fait inévitablement penser au succès cinématographique mondial des films La Planète des singes dont il fait figure de précurseur.
Sommaire
Synopsis
Au cœur de l'Afrique, dans une forêt impénétrable, celle de l'OUBANGHI, deux explorateurs blancs accompagnés d'un indigène et d'un enfant noir découvrent une peuplade inconnue, qui vit dans les arbres. Ces deux héros, un Français et un Américain, nommés Max HUBER et John CORT, les observent afin de savoir s'ils sont humains et tentent de rencontrer leur roi... Les explorateurs sont accompagnés d'un garçonnet, LLANGA, qu'ils ont recueilli au cours de leur pérégrination au CONGO, puisque leur voyage avait initialement pour but d'accompagner URDAX, un négociant d'ivoire PORTUGAIS, et que leurs aventures commencent au retour de ce périple. Le dernier accompagnant s'appelle KHAMIS, le "foreloper" c'est-à-dire le guide indigène qui sert à trouver les pistes et à orienter la caravane au sein de l'Afrique sauvage.
Il y a des épisodes épiques où notre quatuor de héros affronte successivement
- un troupeau d'éléphants déchaînés
- 2 rhinocéros : un des rhinocéros plante sa corne dans un arbre et n'arrive pas à se libérer
- des bandes de singes (gorilles et chimpanzés réunis)
Avertissement
Ce livre est facile à lire, même pour un enfant ; par contre, selon les critères du XXIe siècle, il est raciste. Jules Verne compare l'intelligence d'un noir adulte à celle d'un enfant blanc de six ans. Cet aspect de ce livre ne doit pas faire oublier que Jules Verne était contre l'esclavage, voir par exemple son livre Nord contre Sud. Il est donc indispensable de se rappeler qu'un écrivain, comme n'importe qui, est avant tout un homme de son temps, dans son siècle à la fois historique et naturaliste, si bien qu'il faut lire le roman en le resituant dans son époque, c'est-à-dire en évitant de chausser nos lunettes d'hommes du XXIème siècle. Une deuxième lecture, à l'âge adulte, est tout à fait enrichissante, à la fois pour saisir la perspective d'évolution géopolitique des territoires où se déroule l'intrigue et pour entendre le débat évolutionniste à la lumière des découvertes scientifiques réalisées depuis. A cet égard, le "fantasme" du chaînon manquant n'est plus d'actualité, Monsieur Yves COPPENS, comme tous ses confrères anthropologues, ayant la conviction, notamment après la découverte de Lucie et celle, plus récente, de TOUMAÏ par les chercheurs poitvevins, qu'il y a plutôt un ancêtre commun aux "grands" singes bimanes (CHIMPANZE, GORILLE, BONOBO, ORANG-OUTAN) et à l'homme moderne, qu'une descendance, si bien qu'il vaut mieux parler à présent de "cousinage".
Le Congo indépendant
Dans le premier chapitre, Jules Verne parle du Congo indépendant de l'époque : celui-ci n'attend que l'occasion de sacrifier son indépendance. Cette phrase témoigne du sens historique de l'auteur, qui annonce le mouvement des peuples à l'autodétermination qui se produira au siècle suivant.
Là encore, cet aspect de ce livre ne doit pas faire oublier que Jules Verne n'était pas aveugle face aux méfaits du colonialisme : par exemple, dans l'un de ses premiers livres, Le Tour du monde en quatre-vingt jours, il rappelle que le commerce de l'opium par les Britanniques fait des ravages chez les Chinois.
Les personnages
- L'explorateur américain John Cort, passionné de sciences naturelles
- L'explorateur français Max Huber, pratiquant l'art cynégétique et l'humour français : au début du livre, il se plaint que leur exploration de l'Afrique manque d'imprévu au grand dam de son ami John Cort
- Le foreloper Khamis, le troisième membre
- L'enfant-singe, Li-Maî, fils de Lo-Maï (son père) et de La-Maï (sa mère), qu'il appelle "Ngora", ce qui signifie mère à la fois dans leur idiome et en congolais
- L'enfant noir Llanga, le quatrième membre, il sauve l'enfant-singe et le protège avec générosité.
- Le père-miroir, (Msélo-Tala-Tala en langue du pays), roi du peuple-singe dont le nom fait référence aux lunettes qu'il chausse
- Le trafiquant d'ivoire portugais, Urdax, âgé de cinquante ans, chef de la caravane dont font partie Cort et Huber. Il meurt piétiné par une harde d'éléphants.
Darwinisme et catholicisme
Jules Verne cite plusieurs fois la théorie de Darwin, il en reconnaît la logique, tout en insistant sur le fait qu'on ne trouvera jamais le maillon manquant entre l'homme et le singe car il n'existe pas. En cela, la science moderne lui donne raison ; c'est un nouveau point sur lequel Jules VERNE témoigne de son incroyable propension à l'anticipation et justifie sa réputation de visionnaire. C'est aucun préjugé religieux que l'auteur impose. Il n'est pas difficile de déterminer si Jules Verne voulait éviter d'effaroucher le lecteur chrétien ou si cela reflétait ses convictions car il parle pas comme un religieux mais comme un biologiste de son époque;pourtant dans deux de ses livres, Famille-sans-nom et la version initiale de Les Naufragés du « Jonathan », il donnait un grand rôle aux prêtres catholiques. Il est sûr qu'il attribue en tout cas l'édification des indigènes au travail incessant et colossal des missionnaires.
Jules Verne insiste sur le fait que les hommes-singes n'ont pas de queue, comme les grands singes que sont le gorille et le chimpanzé. Il insiste aussi sur le fait que les hommes-singes sont bimanes (deux mains, comme l'homme) et non pas quadrumanes (quatre mains) comme les singes. Mais le fait le plus important c'est bien sûr la possibilite de parler une langue humaine. Du point de vue d'un scientifiques moderne, les ancêtres de l'homme (à partir de l'Homo erectus) avaient effectivement cette caractéristique.
Prédécesseur des hommes-singes de l'écrivain Edgar Rice Burroughs
Ce livre a été peut-être une des sources d'inspiration de l'écrivain Edgar Rice Burroughs, le créateur de TARZAN, cet écrivain parle dans certain(s) de ses livres d'un peuple d'homme-singe. En revanche, Burroughs est moins rigoureux que Verne, ses hommes-singes ont une queue, ce qui est une aberration pour un scientifique : seul l'ancêtre commun du gorille, du chimpanzé, de l'orang-outang et de l'homme avait une queue. Le roman est également le précurseur des films LA PLANETE DES SINGES. Conan DOYLE avait également lu le roman, lui qui a repris cette idées d'un monde perdu retiré de tout à cause de barrières naturelles, dans son livre LE MONDE PERDU (1912), nouvelle sur laquelle s'est basé le cinéaste SPIELBERG pour réaliser ses films dénommés JURASSIC PARK.
Références bibliographiques
Charles-Noël MARTIN, préface de l'édition RENCONTRE (Lausanne, 1969) d'Un capitaine de quinze ans ; il nous apprend notamment la lecture du roman de Jules VERNE par sir Conan DOYLE.
MELLOT et EMBS, Guide Jules VERNE, édition de L'amateur
François ANGELIER, Dictionnaire Jules Verne, édition Pygmalion
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