- Harry Peuleve
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Harry Peulevé
Harry Peulevé (1916-1963) fut, pendant la Seconde Guerre mondiale, un agent secret britannique du Special Operations Executive qui aida la résistance française. En tant que chef du réseau AUTHOR, il fut à la tête de plus de 3 000 résistants dans la Corrèze à partir de septembre 1943. Arrêté en mars 1944, son réseau continue sous la direction de Jacques Poirier, sous le nom de DIGGER. Il fut déporté au camp de Buchenwald. Des 43 agents du SOE envoyés dans ce camp, Peulevé fut l’un des sept à avoir survécu.
Sommaire
Identités
- État civil : Henri Léonard Thomas André Peulevé
- Comme agent du SOE, section F :
- Nom de guerre (field name) : « Hilaire », puis « Jean »
- Nom de code opérationnel : AUTHOR
- À Buchenwald : Poole.
Pour accéder à des photographies d'Harry Peulevé, se reporter au paragraphe Sources et liens externes en fin d'article.
Famille
- Son père : Anglais
- Sa mère : Anglaise
Biographie
Jeunesse
1916. Harry Peulevé naît à Worthing, Sussex, le 29 janvier.
Éducation en Angleterre, Rye Grammar School.
Il étudie l’ingénierie électrique à Londres. Il obtient sa licence.
Il est employé à la BBC comme cadreur à Alexander Palace.
Quand la guerre est déclarée, il n’y a que 7000 personnes qui possèdent un poste de télévision en Grande-Bretagne, il perd son emploi. Il rejoint l’armée britannique, qui l'envoie dans les Royal Electrical and Mechanical Engineers, récemment formés.
Agent du SOE
Son français excellent le fait recruter par le Special Operations Executive (SOE).
Pendant son entraînement special d’agent secret, il côtoie Claude de Baissac, Francis Suttill, Roger Landes et Gilbert Norman[1]. Il rencontre Violette Szabo, avec qui il se lie d’amitié.
1942.
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- Première mission en France. Sous le nom de guerre « Hilaire », il doit être l'opérateur radio du réseau SCIENTIST de Claude de Baissac dans le sud-ouest.
- 30 juillet. Claude de Baissac « David » et Harry Peulevé « Hilaire », qu’il a choisi pour être son opérateur radio, embarquent sur un bombardier Halifax et sont parachutés en France, à Caissargues, près de Nîmes. Malheureusement ils sont lâchés trop bas et les deux hommes sont sérieusement blessés. Peulevé s’est cassé la jambe. La résistance française doit organiser son retour en Angleterre.
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- Bilan de sa mission : échec.
- Pour se faire soigner, il trouve refuge dans une ferme des environs de Bordeaux, qui sert de relais à une filière d'évasion. Claude de Baissac le confie à Raymond, un anarchiste espagnol pour assurer sa sécurité.
- Un jour, en l'absence de Raymond, se présente un « officier de la RAF » se prétendant envoyé par la filière d'évasion. Mais en quelques minutes, Peulevé réussit à le confondre. Quand Raymond rentre quelques heures plus tard, il trouve Peulevé allongé sur sa chaise longue, tenant en respect l'inconnu au bout de son pistolet[2].
- Quelques jours plus tard, encore convalescent, il va se réfugier à Cannes. Il y rencontre Jacques Poirier, un jeune résistant qui va le suivre à Londres.
- Il traverse les Pyrénées (sur des béquilles[3]), arrive en Espagne où il est emprisonné au camp de Figueras, puis Jaraba.
1943.
- 11 avril. Il parvient à s'échapper de Jaraba et à rentrer à Londres.
- Il suit un entraînement complémentaire.
- Août. Contexte : Claude de Baissac s'est mis en rapport avec un groupe de FTP autour de Tulle dans le département de la Corrèze, qui reconnaissent le romancier André Malraux comme leur chef et veulent se procurer des armes. Quand de Baissac est arrivé à Londres en août, il a proposé d'ajouter ces nouvelles recrues à SCIENTIST. Mais la section F a objecté à juste titre que son réseau était déjà assez étendu comme ça et lui a demandé de transmettre à Harry Peulevé les adresses de ses contacts en Corrèze, ce qu'il fait bien volontiers car il a confiance en lui.
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- Deuxième mission en France : il vient organiser le réseau AUTHOR en Corrèze. Son nom de guerre est « Jean ». Il doit assurer lui-même la fonction d'opérateur radio. Au début, il sera le seul agent du réseau entraîné outre-Manche. La tâche de Peulevé est assez difficile, vu l'hostilité habituelle de la plupart des communistes envers les Britanniques, qu'ils méprisent et qu'ils accusent même d'être des bellicistes capitalistes.
- 17/18 septembre. Dans la nuit, un Lysander d'Henri Déricourt le dépose près d'Angers[4].
- 19 septembre. Conformément aux consignes, il prend contact avec Marc O'Neill (alias Blatin) installé 2, avenue Champaubert, à Paris, qui doit le mettre en rapport avec André Grandclément. Il apprend l'arrestation de Grandclément le jour même.
- 20 septembre. Il est mis en relation successivement avec Jean Charlin, Maurice Arnouil, Gontrand Royer et René Vaujour (alias Hervé, responsable pour la Corrèze de l'AS), et quelques semaines plus tard avec André Malraux[1].
- Ses difficultés se multiplient quand il arrive à Bordeaux dans les moments initiaux et les plus agités de l'affaire Grandclément. Avec une sûreté et une maîtrise de ses nerfs peu communes, il est allé sur la pointe des pieds parmi les fragments qui venaient de s'écrouler de SCIENTIST et n'a gêné personne, et encore moins les Allemands. Il disparaît vers l'est, de façon aussi discrète qu'il était arrivé dans la vallée de la Loire.
- Arrivant dans la zone choisie en Corrèze, il trouve un groupe de guérilla actif.
- Mi septembre-mi novembre. Les forces locales de résistance (FTP et Armée Secrète), sont engagées dans des combats furtifs presque continuels avec l'ennemi, qui essaie déjà, sans succès, de pacifier une partie turbulente de la France, comme il a essayé de pacifier les parties turbulentes des Balkans et de la Russie de l'ouest.
- Fin octobre. Il commence à communiquer par radio : il annonce qu'il est déjà installé et qu'il est prêt à recevoir des avions.
1944.
- Hiver. Les survivants de la guérilla se sont retirés dans la clandestinité. AUTHOR reste compact et sûr malgré son effectif important, parce que c'est un réseau de campagne, où donc tout le monde connaît tout le monde.
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- Bilan de sa mission. En Corrèze et en nord-Dordogne, pendant six mois, il a armé et entraîné les forces séparées d'environ 1500 FTP, par l'intermédiaire de Roland Malraux, et un groupe d’environ 2000 de ses propres partisans.
Aux mains de l'ennemi
- Mars. Le 21, il est arrêté à Brive-la-Gaillarde. Il a été dénoncé pour marché noir par un voisin.
Arrestation du 21 mars[5]Non loin de la maison de Lamorie, où les arrestations vont avoir lieu, il y a un nommé Dufour, qui réside avec son épouse dans une petite maison. Ce Dufour est un milicien et les allées et venues dans la maison de Lamorie ont attiré ses regards.
- « Je crois bien, dit-il à sa femme, que nous avons des voisins qui font un trafic de marché noir. »
Devenant de plus en plus soupçonneux, il va rendre visite un jour au dénommé Walter, chef du SD à Brive et lui fait part de ses soupçons. Ce dernier, tristement connu à Brive pour sa cruauté, est beaucoup plus intéressé par l'arrestation de quelques « terroristes » que de quelques trafiquants.
Le 21 mars, deux heures après le départ de son second Jacques Poirier à qui il a accordé quelques jours pour aller voir ses parents en Savoie, Harry est à la villa de Lamorie (171, route de Tulle, à Brive-la-Gaillarde), au premier étage, avec Louis Bertheau qui établit le contact radio avec Londres. Delsanti et Roland Malraux sont assis autour de la table et devisent calmement. Harry surveille à la fenêtre, mais relâche probablement son attention quelques minutes. Car...
...Au même moment, Walter décide de rendre visite à la villa de Lamorie. Il prend avec lui quatre soldats et deux voitures Citroën traction-avant pour ce travail. Walter monte dans la première voiture et s'arrête pratiquement devant la maison. Les Allemands descendent aussitôt des voitures et foncent vers la porte d'entrée qui s'ouvre immédiatement. Ils entendent des voix au premier étage. Ils s'y précipitent. En trois secondes, c'est un jeu de faire prisonniers les quatre occupants de la pièce. Mais Walter s'arrête stupéfait en apercevant le poste émetteur radio. Il comprend aussitôt qu'il vient de faire une prise extraordinaire et a du mal à cacher sa joie. Il se reprend aussitôt, car il n'a avec lui que quatre soldats et ses prisonniers peuvent bien tenter de s'échapper. Il agit donc avec grande prudence, il les fait descendre les mains en l'air et il ouvre la malle d'une voiture. Il y fait monter Harry et Delsanti, puis il fait monter Louis Bertheau dans une voiture et Roland Malraux dans la seconde.
Maurice Arnouilh, comme toujours est en retard ; il presse le pas. Il n'a que cent mètres à franchir de sa maison à celle de Lamorie. Il arrive sur la route de Tulle et son cœur se met à battre à toute volée : deux tractions avant sont arrêtées devant la maison de Lamorie. La porte s'ouvre et, entourés d'Allemands avec des mitraillettes, sortent un par un, ceux dont le calvaire commence. Maurice fait demi-tour et se rue sur sa voiture garée devant sa villa. Il s'enfuit à Quatre-Routes chez les Verlhac.
- « Il faut prévenir Jacques », dit-il.
Les quatre prisonniers sont emmenés à Tulle, où ils restent peu de temps car, dès la nouvelle de cette prise énorme, la Gestapo de Limoges les réclame. C'est donc dans la prison de cette ville qu'ils passent leur première nuit de captivité.
Dès le lendemain, après avoir subi un interrogatoire relativement aisé, ils sont acheminés sous bonne escorte à Paris et sont séparés. Harry Peulevé est conduit à la prison de Fresnes.
- Mars (suite). Son assistant Jacques Poirier « Nestor » peut reprendre le travail là où il l'a laissé, avec un nouveau nom de réseau, DIGGER.
- Tentative d’évasion. De retour à Fresnes d’un interrogatoire infructueux avenue Foch, il parvient à se fondre dans un groupe de visiteurs français qui quittent la prison. Avec eux, il file droit sur l’entrée principale, montre à la sentinelle un papier blanc en guise de laissez-passer et se met à courir. Mais la sentinelle donne l’alarme. Il est blessé, puis repris dans un jardin des environs. Laissé sans soins, il parvient à extraire avec une cuillère la balle qui l’a atteint.
- Il s’entend dire par les Allemands : « Bien sûr, vous réalisez que nous avons un agent à nous qui travaille à Orchard Court, et que nous connaissons l’identité de tous vos agents ». Peulevé comprend qu’il s’agit d’un bluff et continue à ne livrer aucune information. Il parvient à faire croire qu’il est un simple opérateur radio qui a vécu dans un isolement strict. Les Allemands ne se douteront jamais qu’il était chef d'un réseau qui avait plus de 3000 hommes sous ses ordres.
- Pendant ses interrogatoires, il croise Violette Szabo un court moment. Mais ils sont séparés.
- Septembre ( ?). Peulevé est envoyé au camp de concentration de Buchenwald.
- De nombreux agents prisonniers dans le camp sont exécutés. Eugen Kogon et Alfred Balachowsky (1901-1983), qui travaillent dans le bloc des expériences médicales, persuadent Ding-Schuler, le docteur SS responsable, de permettre à trois agents prisonniers d’échanger leurs identités avec trois Français en train de mourir du typhus et dont le corps doit être incinéré dès leur décès. Il est convenu que cela serait mis à crédit de Ding-Schuler auprès des alliés[6]. Alfred Balachowsky choisit Forest Yeo-Thomas comme premier survivant, qui, à son tour, choisit Harry Peulevé et un agent du BCRA, Stéphane Hessel. Avec leurs nouvelles identités, ils peuvent aller dans les blocs de prisonniers français et sortir du camp en tant que commandos de travail.
1945.
- 11 avril. Ensemble, Forest Yeo-Thomas et Harry Peulevé s'échappent du camp. Yeo-Thomas est repris.
- Peulevé est repris par deux SS Belges, presque à portée de fusil des Américains. Il les persuade qu'il vaudrait mieux pour eux ne pas tomber entre les mains des Alliés dans cet uniforme. Les Belges le forcent à se déshabiller pour pouvoir se partager ses vêtements. Peulevé attrape un pistolet que l'un d'eux a posé pour se changer, et les fait prisonniers. Quelques heures après, il remet ses deux prisonniers aux Américains qui avancent.
Après la guerre
Peulevé travaille à la Shell Oil Company. Puis il est nommé directeur de Handy Angle à l’étranger.
1963. Le 18 mars, Harry Peulevé meurt d’une crise cardiaque à Séville, en Espagne.
Reconnaissance
- Royaume-Uni : Ordre du service distingué (DSO)
- France : Chevalier de la Légion d'honneur, Croix de Guerre 1939-1945, Médaille de la Résistance.
Liens internes
Sources et liens externes
- Fiche Harry Peulevé, avec photographies : voir le site Special Forces Roll of Honour
- Michael Richard Daniell Foot, Des Anglais dans la Résistance. Le Service Secret Britannique d'Action (SOE) en France 1940-1944, annot. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Tallandier, 2008, ISBN : 978-2-84734-329-8 / EAN 13 : 9782847343298. Traduction en français par Rachel Bouyssou de (en) SOE in France. An account of the Work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944, London, Her Majesty's Stationery Office, 1966, 1968 ; Whitehall History Publishing, in association with Frank Cass, 2004. Ce livre présente la version officielle britannique de l’histoire du SOE en France. Une référence essentielle sur le SOE en France.
- Guy Penaud, Histoire de la Résistance en Périgord, Éditions Fanlac, 1985
- Guy Penaud, André Malraux et la Résistance, Éditions Fanlac, 1987
- Guy Penaud, Histoire secrète dans le Sud-Ouest, Éditions Sud Ouest, 1993.
- Hugh Verity, Nous atterrissions de nuit, 5ème édition revue et augmentée, Éditions Vario, 2004.
- Jacques R.E. Poirier, La Girafe a un long cou..., Fanlac, 1992.
- Nigel Perrin, Spirit of Resistance: The Life of SOE Agent Harry Peulevé, foreword by Professor M.R.D. Foot CBE, Pen & Sword, 2008, (ISBN 9781844158553). Voir le site de l'auteur
- Pierre Durand, Les Armes de l'Espoir. Les Français à Buchenwald et à Dora, Éditions sociales, 1977, p. 154-164.
Notes
- ↑ a et b Source : Guy Penaud.
- ↑ Raymond, prenant le relais, obtient des aveux complets de l'inconnu, qui est bien un agent allemand. Après que l'agent a été exécuté, Raymond se serait débarrassé du cadavre en l'expédiant anonymement dans une caisse au quartier général de la Gestapo à Paris, avec un carton épinglé sur le veston du mort, disant :« With the compliments of British Intelligence ... »
- ↑ Source : Verity.
- ↑ Sur le terrain d'Henri Déricourt appelé INDIGESTION, situé près de Vieux Briollay, au N/NE d'Angers, à 3,5 km O/NO de Villevêque. C'est un doublé de Lysanders, qui amène aussi trois autres personnes : Yolande Beekman « Yvonne » (courrier SOE affectée au réseau MUSICIAN de Guy Biéler vers Saint-Quentin), Harry Despaigne (radio SOE affecté au réseau DETECTIVE d’Henri Sevenet près de Carcassonne)et Derringer (agent gaulliste, de la section RF).
- ↑ Source : Poirier, p. 79-83.
- ↑ Quand ce sera le cas, un an plus tard, Ding-Schuler se suicidera, avant qu’aucun argument pour ou contre lui ait pu être exprimé.
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