- Genevieve Halevy
-
Geneviève Halévy
Geneviève Halévy, Madame Georges Bizet, puis Madame Émile Straus, est née à Paris le 26 février 1849 et morte en 1926.
Sommaire
Biographie
Fille du compositeur Jacques Fromental Halévy, elle connaît une enfance difficile : elle perd son père à treize ans, sa sœur aînée à quinze et voit sa mère internée dans un asile.
Dans son Journal, elle notera en 1868 : « Les années s'accumulent en vain sur le souvenir affreux des moments cruels qui m'ont séparée de tout ce que j'aimais. »
Elle épouse en juin 1869 l'élève préféré de son père, le compositeur Georges Bizet. Ils s'installent avenue Trudaine et ont un fils, Jacques, en 1871. Bizet meurt subitement dans leur maison de Bougival (Yvelines) le 3 juin 1875.
Avec son fils, elle s'installe alors chez son oncle, le polygraphe Léon Halévy, 22 rue de Douai, où son cousin, le librettiste Ludovic Halévy, l'introduit auprès de ses nombreux amis écrivains ou compositeurs.
Elle tient un premier salon où l'on trouve la baronne Alphonse de Rothschild, la comtesse Potocka, la duchesse de Richelieu, la comtesse de Chevigné. Très courtisée, elle a à ses pieds son cousin Ludovic Halévy, Henri Meilhac, Georges de Porto-Riche, Guy de Maupassant (qui en fait le personnage principal de Fort comme la mort), Paul Bourget, Paul Hervieu, Joseph Reinach…
En octobre 1886, à la surprise générale, elle se remarie avec Émile Straus, avocat des Rothschild dont la rumeur le donnait pour un frère illégitime. « C'était le seul moyen de m'en débarrasser », dira-t-elle pour expliquer son choix.
Disposant d'une fortune très confortable et de vastes relations, Straus nourrit une profonde affection pour Jacques Bizet. Tous trois s'installent dans un vaste appartement situé en entresol n° 134 boulevard Haussmann, à l'angle de l'avenue de Messine. Le vaste salon en rotonde s'orne de toiles de Nattier, de Quentin de La Tour et de Monet, ainsi que du portrait de la maîtresse de maison par Jules-Élie Delaunay (1876, aujourd'hui au Musée d'Orsay).
Mme Straus reçoit tous les dimanches et acquiert une grande influence dans Paris. Quoique juive et roturière, elle a de nombreuses relations dans le Faubourg Saint-Germain, tout comme dans le monde des Arts et des Lettres.
Parmi ses invités figurent des hommes de lettres comme Ludovic Halévy, Henri Meilhac, Edgar Degas, Forain, Paul Bourget, Jules Lemaître, Paul Hervieu, Georges de Porto-Riche, Antoine de Ganderax, Robert de Montesquiou, mais aussi des politiciens comme Léon Blum, des comédiens comme Lucien Guitry, Réjane ou Emma Calvé, des étrangers comme lady de Grey, lord Lytton ou George Moore, amené par Jacques-Émile Blanche. Mais elle reçoit aussi des notabilités mondaines comme le prince Auguste d'Arenberg, la comtesse Adhéaume de Chevigné, la princesse Mathilde, la princesse Edmond de Polignac, la comtesse Greffulhe, la comtesse de Pourtalès, la duchesse de Mouchy, la princesse Murat, le comte Louis de Turenne.
« Le salon de Geneviève, écrit Ludovic Halévy, le faubourg Saint-Germain y va comme au Chat Noir et le Chat Noir comme au faubourg Saint-Germain. »
Marcel Proust, ami et condisciple au lycée Condorcet de Jacques Bizet et de Daniel Halévy, y rencontre Charles Haas, futur modèle de Swann. Geneviève Straus est elle-même donnée comme l'un des modèles d'Oriane de Guermantes.
En avril 1898, les Straus s'installèrent au n° 104 rue de Miromesnil dans un hôtel particulier qu'ils venaient de faire construire.
Sous l'autorité de Joseph Reinach, le salon de Mme Straus devient le point de ralliement des partisans de Dreyfus. C'est là que s'organise la première pétition de L'Aurore, à l'instigation d'Émile Straus, de Porto-Riche, d'Hervieu et de Halévy.
À cette occasion, des anti-dreyfusards comme Jules Lemaître ou Forain, et nombre d'aristocrates, désertent la maison, à qui l'« Affaire » porte un coup sévère. Cela ne désarma pas Mme Straus qui intervint en 1899 auprès de Waldeck-Rousseau pour qu'il confiât le ministère de la Guerre au général Gaston de Galliffet, favorable à la révison du procès Dreyfus.
En 1900, rencontrant le capitaine Dreyfus enfin réhabilité, Mme Straus put lui lancer avec malice : « J'ai tellement entendu parler de vous Capitaine ! ».
À partir de 1910, Mme Straus, se partageant entre la rue de Miromesnil et sa maison de Trouville-sur-Mer, "Le Clos des Mûriers", sombra dans la neurasthénie et prit ses distances avec le monde.
En 1925, lorsqu'on lui suggéra de se convertir au catholicisme, elle eut ce mot fameux : « J'ai trop peu de religion pour en changer. »
« Cet esprit si délicat et si finement personnel était à la fois de charme et de bon sens, écrira d'elle Robert de Flers.
Ses réparties, où l'ironie savait si bien s'entourer de bienveillance, étaient justement célèbres. Plus d'une fut reprise dans des pièces fameuses. » Ainsi, à une dame notoirement avare qui lui demandait à propos d'un manteau qu'on lui connaissait depuis plusieurs saisons : « Comment trouvez-vous mon dernier Worth ? », elle répondit : « Je le trouve solide. ». Elle dit aussi d'une femme autrefois belle mais qui s'épaisissait en vieillissant : « Ce n'est plus une statue, c'est un groupe. »
Résidences
- 1869-1875 : avenue Trudaine (IXe arrondissement)
- 1875-1886 : 22 rue de Douai (IXe arrondissement)
- 1886-1898 : 134 boulevard Haussmann (VIIIe arrondissement)
- 1898-1926 : 104 rue de Miromesnil (VIIIe arrondissement)
Lien externe
Bibliographie
- C. Bischoff, Geneviève Straus (1849-1926), Paris, Balland, 1992
- Jean-Yves Tadié, Marcel Proust, Paris, Gallimard, 1996, pp. 100-104
Catégories : Naissance à Paris | Naissance en 1849 | Décès en 1926 | Modèle de Proust | Salonnière
Wikimedia Foundation. 2010.