Aire marine protégée

Aire marine protégée
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Une aire marine protégée (AMP) est une zone intertidale ou subtidale d'un terrain, associée à la colonne d'eau qui la recouvre, sa faune, sa flore, ainsi que ses particularités historiques et culturelles, qui a été réservée par la loi ou par d'autres moyens visant à protéger une partie ou l'entièreté de l'environnement qu'elle délimite. Il s'agit d'un exemple possible de stratégie de conservation utilisée dans la gestion des ressources naturelles[1].

L'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a défini des catégories numérotées de 1 à 6, qui peuvent caractériser chaque AMP suivant l'intensité de la protection (de 1 : protection totale à 6 : gestion des activités humaines dans un objectif de gestion, restauration et protection).

Le concept a été généralisé par la Convention sur la diversité biologique (CDB), qui recommande de protéger par des mesures spécifiques les zones marines et côtières particulièrement menacées, mais la plupart des conventions régionales pour la protection de l'environnement marin (OSPAR, Convention de Barcelone, etc.) préconisent la création de telles zones de protection.

En 2000, 4600 aires marines protégées dans le monde couvraient 0,6% de la surface des océans, contre 9% des surfaces terrestres[2]. Selon Daniel Pauly, en 2009, cette surface a augmenté, mais ne couvrirait qu'environ 0,8% de l'océan. Et seul 1/10e environ de ces 0,8 % environ est réellement et efficacement protégé. La croissance de la superficie classée en AMP n'est que de 5% par an, il faudra donc attendre à ce rythme 15 ans pour espérer un doublement de la surface théoriquement protégée.

Sommaire

Principes

Réglementations

Elles varient selon les zones concernées et les États, de même que les moyens et autorités de surveillance. Elles sont établies par les autorités compétentes, nationales, régionales ou locales selon les cas. Elles peuvent évoluer pour s'adapter à de nouveaux problèmes. Par exemple à Saint-Martin aux Antilles : les scooters de mer ont récemment été interdits par décret[3].

Intérêts

A condition qu'elles soient suffisamment grandes et judicieusement placées[4], et qu'on lutte aussi contre la dégradation générale de l'océan, les réserves sous marines et aires marines protégées présentent plusieurs intérêts :

  • intérêt écologique (protection et restauration du patrimoine naturel), et gestion restauratoire le cas échéant
  • intérêt touristique, culturel et pédagogique (via la plongée sous-marine, les études, films et images diffusés par les médias, les bateaux avec chambre de vision sous-marine...).
  • intérêt halieutique. Partout où des réserves sous-marines interdites à la pêche ont été créées, le nombre de poissons, mais surtout la taille de ceux-ci et leur capacité à se reproduire ont augmenté (les adultes femelles pondent beaucoup plus d'oeufs et les mâles en fécondent bien plus que les immatures[5]).
  • intérêt potentiel en termes d'auto-régulation de la pêche par sa rentabilité (Certaines modélisations bioéconomiques laissent penser qu'installer des réserves sur une part modérée du littoral sous-marin aurait un double avantage : conservation de populations-souches susceptibles de contribuer à la reconstitution de stocks, et accélération et accentuation des impacts de la surpêche hors des réserves ce qui diminuerait la rentabilité de la pêche en incitant plus rapidement à diminue la pression sur l'espèce-cible en régression. Selon ces modèles, ceci vaut aussi pour les espèces dont la pêche est coûteuse. Il faudrait cependant pour que cette stratégie soit efficace que les réserves soient assez nombreuses et qu'elles ne soient réellement pas pêchées (La pêche est autorisées dans de nombreuses aires marines protégées). Le rendement global de la pêche serait maximisé avec une pression de pêche modérée, entre les réserves, avec des bénéfices toujours plus élevés pour les pêcheurs que ceux qu'ils toucheraient dans le cadre d'une gestion halieutique classique, selon ces modèles[6]).

Un examen scientifique exhaustif[7] des données disponibles sur l'efficacité des réserves créées sur la Grande barrière de corail, publié en 2010 a montré que la mise en réserve naturelle était efficace pour la protection et restauration des espèces, mais plus pour les petites espèces peu mobiles, inféodées aux récifs que pour les espèces plus mobiles telles que les requins. Les réserves semblent aussi améliorer la santé globale de l'écosystème et sa résilience écologique, même dans ce cas face à l'étoile de mer invasive, qui semble moins fréquentes sur les récifs ou tout prélèvement est interdit. Les réserves nécessitent cependant d'être bien surveillées, car le braconnage peut y causer un effondrement de la population de poissons[7]. Quand elles jouent leur rôle, elles présentent donc un intérêt pour la pêche durable et la conservation de la biodiversité[7]. L'application des principes généraux (bonnes pratiques) de la conservation semblent donner de bons résultats, même là où on manquait de données (pour le dugong par exemple. L'augmentation du réseau des réserves marines en 2004 a eu un impact pour les pêcheurs, mais des études préliminaires d'analyse économique suggèrent des bénéfices nets considérables, en termes de protection des valeurs environnementales et du tourisme. Relative aux recettes générées par le "tourisme de récif", les dépenses courantes en matière de protection sont mineures. « Compte tenu des menaces graves induites par le changement climatique, l'extension du réseau de réserves marines fournit une contribution essentielle et rentable à l'amélioration des capacités de résilience de la Grande Barrière de Corail selon les auteurs de cette étude [7] ».

Efficacité

L'étude de l'efficacité d'une Aire Marine Protégée se base sur l'étude d'indicateurs, en accord avec ses goals et objectifs. Cette étude se déroule en 4 étapes consécutives:

  • Sélection des indicateurs
  • Organisation de l'évaluation
  • Conduite de l'évaluation proprement dite
  • Communication des résultats et adaptation de la méthode de gestion[1]

Indicateurs

Un indicateur est une information mesurée sur une période de temps et donnant une information sur des changements spécifiques de certaines caractéristiques de l'Aire Marine Protégée. Il permet d'estimer des aspects qui ne sont pas directement mesurables, comme par exemple son "efficacité". Il est, en outre, nécessaire de faire appel à une batterie d'indicateurs afin de mettre en évidence la réalisation (ou non) des goals et objectifs annoncés[1]. Un indicateur se doit de répondre à 5 critères: mesurabilité (en termes qualitatifs et quantitatifs), précision (définition identique par tous), constance (dans le temps), sensibilité (variations proportionnelles aux changements de l'attribut mesuré), simplicité[8].
Les services s'occupant du littoral au sein de l'administration américaine des Océans et de l'atmosphère (NOAA) ont assemblé un inventaire d'outils d'aide à la décision pour AMP basé sur le SIG. Ce rapport se concentre essentiellement sur les outils SIG utiles pour les Aires Marines Protégées[9].

Indicateurs bio-physiques

Une Aire Marine Protégée étant avant tout un outil de conservation, les indicateurs de type bio-physique sont généralement les premiers auxquels s'intéressent les gestionnaires[1].

Les paramètres biologiques peuvent considérer l'abondance ou la structure de la population d'une espèce précise (que ce soit une espèce d'une importance culturelle important, une espèce clé de voûte, endémique, ou encore particulièrement vulnérable). L'étude de composition en espèces des communautés présentes dans la zone protégée et le taux de recrutement de celles-ci. L'intégrité des relations trophiques entre ces différentes espèces permet de vérifier s'il n'y a pas eu de dérèglement entre niveau (par exemple suite à la disparition d'une espèce surexploitée prédatrice ou au contraire d'une proie).
Un objectif courant des Aires Marines Protégées est d'augmenter le rendement de pêcheries. Ce type d'objectif peut être vérifier en mesurant l'efficacité et le niveau de l'effort de pêche des activités situées au sein ou en bordure de la zone.

Les paramètres abiotiques ou structuraux concernent la qualité de l'eau et la distribution et la complexité des habitats d'une part, et les mesures spatiales d'autres part. Ces dernières peuvent être la proportion de l'Aire Marine "restaurée" du point de vue de la population, de la biomasse ou de la communauté (par rapport à un état initial réel ou supposé), ou encore la proportion de la zone ne subissant pas d'impact anthropique (ou un impact réduit).

Les gestionnaires et scientifiques utilisent divers outils afin d'étudier ces paramètres et de cartographier les Aires Marines Protégées, tel que les systèmes d'information géographique ou la télédétection (imagerie satellite et radar, photographie aérienne ou données acoustiques).

Exemple du corail rouge
Deux estimations de l'efficacité de 3 Aires Marines Protégées (la Réserve naturelle nationale de Cerbère-Banyuls, le Parc Marin de la Côte Bleue et la Réserve naturelle de Scandola), menées à trente ans d'intervalle, ont démontrées qu'une protection correcte des coraux rouges permet à cette espèce à haute valeur commerciale de produire de grandes colonies dans des eaux de moins de 50 mètre de profondeur, et ce malgré sa croissance lente. Les colonies de faible profondeur situées hors de ces zones sont extrêmement réduites[10].
Indicateurs socio-économiques

Les facteurs socio-économiques et culturels jouent un rôle plus important que les facteurs bio-physiques dans l'aménagement ou l'efficacité d'une Aire Marine Protégée[11].
L'utilisation d'indicateurs socio-économiques permet de prendre en compte les intérêts de toutes les parties prenantes au projet, de déterminer l'effet que les décisions prises ont sur eux et de démontrer la valeur des Aires Marines Protégées au public et aux décideurs[1].

Aires Marines Protégées dans le monde

Europe

Environ 1/3 des pays riverains concernés sont européens (Chypre, Espagne, France, Grèce, Italie, Malte, Slovénie) ont déjà des aires protégées dans leurs eaux territoriales, mais sans atteindre les seuils de la CBD. L'Europe tente d'encourager la protection des milieux marins et des espèces par la création du réseau Natura 2000 en mer, les états ayant jusque mi-novembre 2008 pour proposer leurs sites.

France

En France, la coordination en matière d'AMP est assurée par l'Agence des aires marines protégées, créée en 2006[12]. Cette agence est présidée par Jérôme Bignon, député français, spécialiste du littoral.

Relèvent ainsi de cette agence les :

Bilan 2008 : Outre certains sites Natura 2000 ayant une façade maritime, en novembre 2008 la France avait proposé 76 sites marins (sur 24 000 km²) au réseau "Natura 2000 en mer", avec des sites sur les trois façades maritimes viennent ainsi d’être inclus au réseau Natura 2000. Quatre projets de parcs naturels marins et trois projets de parcs nationaux, dont le premier à être officialisé pourrait être le parc national des calanques doit, par exemple, pouvoir faire l’objet d’une prise en considération par le Premier Ministre dès le début 2009 ».

objectifs : "L’objectif de la stratégie nationale est de parvenir à couvrir par des AMP 10 % des zones sous juridiction française d’ici 2012 et 20 % d’ici 2020, dont la moitié en moyenne globale en réserves ou cantonnements de pêche." les objectifs de la politique maritime française sont énoncés dans le livre bleu, stratégie nationale pour la mer et les océans[13].

Gouvernance : : En 2011, un Groupement d’Intérêt Scientifique « Fréquentation, Usages et Gouvernance des aires marines protégées » sera lancé les 8 et 9 novembre 2011[14], après un bilan et un état de l’art sur ces thèmes fait à échelle nationale[15]. Les sciences citoyennes sont invitées à participer, via notamment un réseau des observateurs en plongée [16] et une opération « 20 000 yeux sous les mers »[17]

Italie

Les zones marines protégées italiennes sont actuellement au nombre de 20 suivant la réglementation EUAP (5 ° modernisation de 2003), auxquelles il faut ajouter depuis 2004 l'Aire naturelle marine protégée du Plemmirio en Sicile. Elles sont de deux type, les aires naturelles et les réserves. Elles couvrent au total une superficie de 192 500 hectares.

Amériques

Canada

Au Canada deux types de protection sont comprises comme aire marine protégée. La première sont les aires marines nationales de conservation (AMNC) dont le niveau de protection ressemble à celui des parcs nationaux[18]. Il y a actuellement 3 AMNC au Canada. Une autre désignation existe, soit les réserves marines de faune, dont le statut ressemble aux réserves nationales de faune. Il n'y a actuellement aucune réserve marine de faune bien que cette désignation existe depuis 1994[19].

États-Unis

  • le premier parc sous-marin américain est le Parc d'État de John Pennekamp Coral Reef inauguré le 10 décembre 1960, qui attirait en 2010 plus d'un million de visiteurs par an avec 130 km2 de fonds sous-marins protégés.
  • La plus vaste et longue aire marine protégée du monde a été créée le 15 juin 2006, au large des littoraux des îles du nord-ouest d'Hawaii par le gouvernement américain. Le « Monument national marin de Papahānaumokuākea » ou « Monument national marin des îles du Nord-Ouest d’Hawaï ». Il recouvre environ 36 millions d’hectares marins, dont 1,16 million d’hectares de récifs coralliens. Il abrite plus de 7 000 espèces marines (endémiques à 25% environ). 1 400 phoques hawaïens, les derniers de cette espèce menacée de disparition, ainsi qu'environ 90 % des tortues vertes d'Hawaii (également espèce menacée). Les embarcations non autorisés, extractions de matériaux marins, le déversement de déchets, et même la pêche commerciale devraient y disparaître en cinq ans, ainsi que les activités commerciales et touristiques[20].

Asie

Inde

En 2008, l'Inde compte 3 aires marine protégée reconnue par l'UNEP-WCMC, le Parc national marin du Golfe de Kutch, le Parc national marin du Golfe de Mannar, le Parc national marin Mahatma Gandhi.

Notes et références

  1. a, b, c, d et e (en) Robert S. Pomeroy, John E. Parks, Lani M. Watson, How is your MPA doing? : A Guidebook of Natural and Social Indicators for Evaluating Marine Protected Area Management Effectiveness, Gland, Suisse & Cambridge, Royaume-Uni, UICN, 2004 (réimprimé 2007), 216 p. (ISBN 2-8317-0735-8) [lire en ligne] 
  2. Jean-Michel Cousteau / Philippe Vallette, Atlas de l'océan mondial, Éditions Autrement, 2007, p. 50.
  3. Le Journal de la Réserve naturelle nationale de Saint-Martin, avril 08
  4. Stephen R. Palumbi ; Marine reserves and ocean neighborhoods : The Spatial Scale of Marine Populations and Their Management; Annu. Rev. Environ. Resour. 2004. 29:31–68 ; doi: 10.1146/annurev.energy.29.062403.102254
  5. Article (en anglais) sur la surpêche et l'intérêt des réserves naturelles marines
  6. Crow White et al. ; Marine reserve effects on fishery profit ; 2008 Blackwell Publishing Ltd/CNRS ; Department of Ecology, Evolution and Marine Biology, University of California, Santa Barbara, CA 93106, États-Unis;  ; DOI:10.1111/j.1461-0248.2007.01151.x
  7. a, b, c et d L. J. McCook, T. Ayling, M. Cappo, J. H. Choat, R. D. Evans, D. M. De Freitas, M. Heupel, T. P. Hughes, G. P. Jones, B. Mapstone, et al. (2010) ; Marine Reserves Special Feature: From the Cover: Adaptive management of the Great Barrier Reef: A globally significant demonstration of the benefits of networks of marine reserves. ; PNAS 107, 18278-18285 ; ([Résumé])
  8. (en) Margolius, R, and N. Salafsky, Measures of success: designing,managing and monitoring conservation and development projects, Washington, D.C, Island Press, Margolius, R, and N. Salafsky (ISBN 1-55963-612-2) [lire en ligne] 
  9. http://www.mpa.gov/pdf/publications/FINAL_Decision%20Sup%20Rpt.pdf
  10. (en) « Marine Protected Areas Conserve Mediterranean Red Coral », dans Science Daily, FECYT - Spanish Foundation for Science and Technology, 11 Mai 2010 [texte intégral (page consultée le 22 septembre 2010)] 
  11. (en) C.M. Roberts, « Selecting marine reserve locations: optimality versus opportunism », dans Bulletin of Marine Science, vol. 66, no 3, 2000, p. 581-592 
  12. loi n° 2006-436 du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux
  13. le livre bleu, stratégie nationale pour la mer et les océans http://www.sgmer.gouv.fr/IMG/pdf/2009-12-08_-_Livre_bleu.pdf
  14. Déminaire de lancement à BREST, Institut Universitaire Européen de la Mer Groupement d’Intérêt Scientifique « Fréquentation, Usages et Gouvernance des aires marines protégées »
  15. Document de référence « Etat de l'art sur les "dispositifs de suivi de la fréquentation des espaces marins, littoraux et insulaires et de ses retombées socio-économiques »
  16. Portail du programme Réseau des observateurs en plongée, initié par l’Agence des aires marines protégées
  17. 20 000 yeux sous les mers : un programme pour la communauté des plongeurs sous-marins
  18. Aires marines nationales de conservation, Parcs Canada, consulté le 10 février 2008
  19. Réserve nationale de faune, service canadien de la faune, consulté le 10 février 2008
  20. (en) President Sets Aside Largest Marine Conservation Area on Earth, US National Oceanic and Atmospheric Administration, Northwestern Hawaiian Islands Marine National Monument. Consulté le 14-09-2006

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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