Dynamique des populations

Dynamique des populations

La dynamique des populations s’intéresse au développement numérique de toutes les populations d’êtres vivants, et plus particulièrement de celles des animaux sexués. Les répartitions de poids, la composition par âge des individus, l'environnement, la biologie des groupes, et les processus qui influent sur ces changements font également partie de son champ d'étude. Ces études ont pour but, outre de prévoir les accroissements ou diminutions des populations, de comprendre les influences environnementales sur les effectifs des populations. Des études sur ces sujets sont incontournables par exemple pour la gestion de la pêche, la gestion cynégétique, le management des zones protégées, le contrôle des populations d'animaux dits nuisibles...

Sommaire

Démographie

La démographie se réserve l’étude des populations humaines, qui diffèrent des populations animales non pas tant par les valeurs des paramètres biologiques (durée de vie, intervalle entre générations, etc.), que par la conscience qu’en a chaque individu, et qui permet l’interrogation des intéressés. Les individus ont un âge, c’est-à-dire une date de naissance. Ils sont les sujets d’« événements », tels que mariage et procréation, dont le repérage suppose soit une enquête auprès des intéressés (recensement ou sondage), soit des institutions appropriées (état civil). Ce repérage exige que soit connu le nom des individus, qui disparaît ensuite dans le traitement des données. Les relevés des lieux de naissance, de séjour, de décès, supposent également, notamment pour l’étude des migrations, un découpage géographique reconnu. La qualité et le progrès des connaissances démographiques dépendent donc des institutions administratives nécessaires à la collecte des données et à la garantie du secret.

L’étude de la précision des effectifs de populations humaines, obtenus par enquête ou par calcul, ou celle de la datation des événements démographiques, en particulier naissances et décès, met ainsi en jeu la psychologie des individus, leur confiance ou leur méfiance envers les enquêteurs et agents recenseurs, leur mémoire sélective des événements familiaux, leur degré d’adhésion aux institutions classificatoires. Un « in-dividu » ne peut par définition être divisé. Le traitement « en continu », avec des décimales d’effectifs, s’oppose au traitement « discret », en nombres entiers. La confrontation des deux approches, nécessaires l’une et l’autre, conduit à mettre le doigt sur l’absolue singularité de l’individu humain. L’imprécision n’est pas une imperfection de la notion de population, c’en est un attribut.

Fluctuation dans le temps des populations naturelles

Populations stables

L'étude de la dynamique des populations s’articule autour de la notion de « population stable » : une population dans laquelle la probabilité de procréer et de mourir ne dépend que de l’âge tend vers une répartition par âge constant, indépendante des conditions initiales, et dite « population stable » (Lotka). Si les régimes de fécondité et de mortalité s’équilibrent, l’effectif est de plus constant. C’est le cas particulier de la « population stationnaire ».

Une population est dite stable lorsqu'elle ne varie pas dans le temps. Il s'agit d'un équilibre dynamique : le taux de natalité est égal à celui de mortalité. On peut parler de population stable suivant différentes échelles de temps. En effet, la stabilité d'une population est quelque chose de très relatif. Ainsi, la population de coquelicots dans un champ pourra être qualifiée de stable sur trois ou quatre ans, mais à l'échelle d'une année la population varie énormément.

Populations cycliques

Fluctuations saisonnières

Une population enregistre des fluctuations saisonnières lorsque il existe différentes tailles au fil des saisons. C'est le cas des flux migratoires ou lorsque que l'on observe un pic de mortalité après la reproduction.

Fluctuations annuelles

Fluctuations pluriannuelles

C'est le cas des lemmings qui suivent

Autres types de fluctuations

Il existe aussi des fluctuations apériodiques ou éruptives comme par exemple les invasions.

Comportement chaotique des populations

Chaos et dynamique des populations

Dans les sciences de la nature, la théorie du chaos ne s’applique qu’aux systèmes déterministes, c'est-à-dire des systèmes pour lesquels il n’existe qu’une et une seule description possible de l’évolution pour une condition initiale donnée. Le terme de chaos ne fait donc pas référence à une imprédictibilité intrinsèque du système, mais à l’incommensurable difficulté de prévoir l’état d’un système sous certaines conditions. On parle souvent de sensibilité aux conditions initiales couplée avec une évolution non périodique : une variation infime de ces dernières entraine un comportement non prédictible[1]. Un comportement chaotique peut apparaître pour des systèmes très simples, avec un petit nombre de degrés de liberté. Les premiers attracteur chaotiques ont d’ailleurs été montrés par May, notamment sur un modèle de Ricker avec une population à générations non chevauchantes[2], qui reste un modèle mathématique très simple, où la même équation peut conduire à des dynamiques stables, cycliques et chaotiques.

Chaos à travers l'expérimentation

Du point de vu expérimental rares sont les expériences qui ont démontré la présence de chaos[3] dans la dynamique d'une population ou d'une communauté. Ces expériences ont été mises en place pour montrer expérimentalement la cohérence des modèles mathématiques qui décrivent, en fonction des paramètres intrinsèques de la population, différentes dynamiques allant de la stabilité (coexistence à l’équilibre), à la cyclicité jusqu'au chaos. Les quelques expériences réalisées utilisent des communautés d'organismes simplifiées (pas plus de 3 espèces afin de réduire la complexité de l'écosystème) ayant des taux de reproduction rapides (comme le couple bactéries – ciliés[4]) afin que les expériences ne prennent pas trop de temps. De plus les conditions de ces expériences sont contrôlées (pour pouvoir négliger les paramètres extrinsèques à la population qui pourraient affecter sa dynamique). Néanmoins ces expériences présentent de nombreuses limites car elles ne représentent pas les conditions telles qu'elles sont observées en milieux naturels. En effet les conditions sont contrôlées il n'y a donc pas l'influence de la fluctuation des facteurs environnementaux. Peu d'espèces interagissent ce qui ne prends donc pas en compte la complexité des vrais chaines trophiques observées dans la nature. Les espèces utilisées ont des taux de croissance et de reproduction rapides ce qui n'est pas le cas de toutes les espèces (grands mammifères, oiseaux.....) et peut donc faire varier la dynamique des patterns observés.

Modèles de dynamique des populations et chaos

Un exemple de modèle simple

De manière générale, nombreux sont les modèles qui tendent mathématiquement, en fonction des paramètres, vers des comportements dits chaotiques. C'est le cas par exemple du modèle discret de Ricker qui définit ainsi le nombre d'individus d'une population au pas de temps t+1 par rapport à t :

N_{t+1}=N_{t}.e^{r(1-\frac{N_{t}}{K})}, où Nt est la population à l'instant t, r est le taux de croissance, et K la capacité de charge.

Par le calcul, on obtient :

  • pour 0 < r < 2, la population convergera vers un équilibre stable ;
  • pour 2 < r < 2,692, la population évoluera selon des cycles périodiques ;
  • pour r > 2,692, la population aura un comportement chaotique, avec des retours ponctuels à la périodicité.

Une population dont la croissance peut être modélisée selon une suite de Ricker aura ainsi un comportement convergent, périodique, ou chaotique, en fonction des paramètres.


Le chaos est-il néfaste à l'évolution des populations ?

Dans un environnement vu comme un processus stochastique, une dynamique de population chaotique peut conduire de manière aléatoire à l'extinction, au maintien ou à l'invasion par des mutants. Dans ce contexte, une population peut-elle s'éteindre de façon non prévisible ?

Mais deux faits vont à l'encontre de ce constat :

  • ces conditions menant au chaos sont rares dans la Nature[5].
  • certains auteurs suggèrent que des espèces mutantes peuvent exercer un contrôle sur ces infimes variations des conditions environnementales pour envahir des populations qui n'ont pas cette capacité, et ainsi tirer un bénéfice de ce comportement chaotique, ce qui en fait un avantage évolutif[6].

Les modèles de croissance de populations

Loi de Malthus

Article détaillé : Thomas Malthus.

Forme discrète : Malthus considère que s'il n'y a pas de pression du milieu (si le milieu n'est pas limitant) la population grandira de façon exponentielle. Par exemple, la population, en s'affranchissant de facteur limitant (guerre, famine, …) observe une croissance qui suit une loi géométrique, illimitée et donc exponentielle :

\frac{N_{t+1} - N_t}{N_t} = R = \mathrm{constante},

avec Nt l'effectif de la population étudiée à l'instant t.

Forme continue : La population N(t) est associée à l'équation différentielle

\frac{dN}{dt}=rN

avec r, une constante, représente le taux intrinsèque d'accroissement naturel. Il s'ensuit :

N(t) = N0exp(rt).

Croissance avec facteur limitant

Modèle de Verhulst

Article détaillé : Modèle de Verhulst.

Régulation des populations

La densité-dépendance

Influence des facteurs dépendant de la densité

Compétition intra-spécifique

La compétition intraspécifique correspond à la recherche par les individus d'une même espèce des ressources du milieu identiques.

Compétition inter-spécifique

La définition et le rôle de la compétition interspécifique ont fait l'objet de nombreux travaux contradictoires, voire polémiques.

Interaction positives entre les espèces

voir les articles : commensalisme, mutualisme, coopération, symbiose, prédation, parasitisme

Outils d'acquisition de données

Les populations animales sont plus difficiles à étudier car souvent mobiles et discrètes. De nombreuses espèces sont discrètes ou ne sont actives que la nuit, ou vivent à grande profondeur, ce qui rend leur observation difficile.
Des modèles existent, mais qui demandent souvent à être confirmés par des observations de terrains. Ceci se faisait autrefois par le piégeage et/ou via des indices de présences (chant, terrier, empreinte (avec ou sans "piège à trace"), épreinte, marquage du territoire, poils, pelote de réjection, etc.). Une technique souvent utilisée consiste à évaluer les évolutions spatiotemporelles de population par la méthode dite de capture-recapture, qui est néanmoins stressante pour l'animal, et qui pour cette raison pose problème pour des espèces vulnérables ou menacées.

De méthodes récentes permettent un monitoring plus fiable et moins impactant sur les populations ; Elles peuvent combiner les avantages de deux progrès techniques :

  • Les appareils automatiques de détection (dont écoute ou vision nocturne ou sous-marine, amplification lumineuse, vision infrarouge et autres dispositifs de mesure automatique, compteurs d'entrée sortie d'un nid, d'une tanière, d'un gîte collectif, etc)
  • Les analyses d'ADN, qui permettent de mieux évaluer - sans contact direct avec l'animal, via les poils ou des excréments - l'état et la dynamique des populations[7]. Par exemple, le Waterford institute of technology a dans les années 2000 mis au point une méthode utilisant un simple tube de plastique (diamètre : 100 mm, longueur : 250 mm ou 500 mm), positionné presque verticalement et au fond duquel est présenté un appât (aile de poulet). Seule la martre est assez agile pour aller y chercher l'appât. L'appareillage, comprend un dispositif (bande collante) collectant un ou quelques poils de la martre ayant pénétré dans le tuyau, ce qui permet par l'étude de l'ADN de ce poil, en utilisant la logique de la méthode « capture-recapture » d'évaluer le sex-ratio, la population locale de cet animal (On a par exemple constaté que les martres visitent chaque nuit les tubes qu'elles ont repéré, tant qu'il contiennent de la nourriture). On peut enregistrer automatiquement l'heure à laquelle la martre vient manger, les conditions de température ou d'hygrométrie, etc. Un dispositif infrarouge associé peut aussi déclencher un appareil photo ou une caméra (infrarouge ou à amplification lumineuse) et/ou compter les allers-et-venues (jusqu'à 5000 "évènements" mémorisables sur 6 mois). Ces études permettent de mieux évaluer la sensibilité d'une espèce animale discrète à la fragmentation de leur territoire, au roadkill, le type d'habitat qu'elles fréquentent, qu'elles choisissent pour élever leurs petits. Elles donnent des informations précises sur la présence/absence de l'espèce, le sexe-ratio, les liens familiaux des individus se nourrissant au même endroit)[8]. Divers programmes d'études[9],[10], et de mieux la connaître y compris dans des milieux à forte naturalité comme la forêt de Bialowieza en Pologne[11]. Cette connaissance améliore les chances de réussite des programmes de réintroduction[12] ou de confortement des populations[13] la concernent ou sont en projet en Europe.

Voir aussi

Bibliographie

  • Nicolas Bacaër : Histoires de mathématiques et de populations, Cassini, Paris, 2009, 160 p., (ISBN 978-2842251017).

Sources

  • Dajoz R. (1974) Dynamique des populations. Masson et Cie, Paris, 301 p.
  1. Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_du_chaos
  2. R. May, Simple mathematical models with very complicated Dynamics, Nature Vol.261 June 10 1976
  3. Beck et al,Experimental demonstration of chaos in a microbial food, Nature 435|30 June 2005
  4. Jost, J. L., Drake, J. F., Frederickson, A. E. & Tsuchiya, H. M.,Interactions of Tetrahymena pyriformis, Escherichia coli, Azotobacter vinelandii, and glucose in a mineral medium. J. Bacteriol. 113, 834–-840 1973
  5. K.McCann & P.Yodzis, Biological Conditions for chaos in three species food chain, Ecology, Vol 57, No2 pp561-574, March 1994
  6. M. Doebeli, The evolutionary advantage of controlled Chaos, Proceedings: Biological Sciences, Vol 254, No 1341 (Dec. 22, 1993, 281-285)
  7. Statham, M., Turner, P.D. and O’Reilly, C. 2005. Use of PCR amplification and restriction enzyme digestion of mitochondrial D-loop for identification of mustelids in Ireland. Irish Naturalists Journal 28: 1-6.
  8. Dispositifs mis au point par le Laboratoire Molecular Ecology (Dr Peter Turner, Dr Catherine 0'Reilly, Mark Statham, Tom Roche & Jacinta Mullins) et testé dans le Kent (Wildwoodland).
  9. Balharry, E. A., G. M. McGowan, H. Kruuk, and Halliwel, E. 1996. Distribution of pine martens in Scotland as determined by field survey and questionnaire. SNH Survey and Monitoring Report No. 48. Scottish Natural Heritage, Edinburgh, UK.
  10. Hughes, D. 1993. Mammal survey of five species: Red Squirrel, Grey Squirrel, Pine Marten, Irish Hare and English Hare. Ulster Wildlife Trust and Forest Service DANI, Crossgar, Northern Ireland.
  11. Zalewski, A., W. Jedrzejewski, and B. Jedrzejewska. 1995. Pine marten home ranges, numbers and predation on vertebrates in a deciduous forest (Bialowieza National Park, Poland). Annales Zoologici Fennici 32: 131-144.
  12. Bright, P. W., and Harris, S. 1994. Reintroduction of the pine marten: feasibility study (étude de faisabilité). English Nature / Contract Report.
  13. Bright, P.W. and Smithson, T.J. 1997. Species recovery programme for the Pine Marten in England: 1995-96. English Nature Research Reports Volume 240

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