- Danse bretonne
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Ce que l'on appelle aujourd'hui danse bretonne est un ensemble de pratiques gestuelles issues de l'ancienne danse traditionnelle, pratiquée essentiellement dans les milieux paysans de Bretagne jusque dans l'entre-deux-guerres. Cette première approche mérite toutefois d'être nuancée d'emblée : les influences et les emprunts ont en effet existé entre les petites villes, les bourgs et les campagnes. Le milieu où s'est développée la danse traditionnelle bretonne doit donc être entendu comme une société rurale, mais pas exclusivement paysanne. Enfin, précisons que la tradition s'est éteinte à des moments variables selon les pays, dès la Première guerre mondiale dans certains cas, ou plus tard, après 1945. Comme toute danse traditionnelle, la danse bretonne se caractérise par une forme (en ronde, en chaîne, en couples), un pas (souvent en 4, 6 ou 8 temps) et enfin, un style. La grande majorité des danses, surtout les plus anciennes, sont des danses collectives, en rond ou en chaîne. Le cortège de couples est une forme plus récente, apparue à la fin du XIXe siècle.
Sommaire
Contexte
Dans la société paysanne du XIXe siècle, les grandes occasions de danse étaient principalement les noces. Une noce moyenne rassemblait environ 200 à 300 convives. Certaines ont pu parfois réunir jusqu'à 1 000 ou 2 000 personnes, la fête se déroulant alors sur 4 jours. Certaines danses, comme les gavottes d'honneur, ne se pratiquaient qu'à cette occasion.
Outre ces réjouissances, seuls les dimanches pouvaient donner lieu à des danses, particulièrement lorsqu'il y avait des pardons, qui étaient toujours accompagnés de fêtes profanes[réf. souhaitée].
Travail et loisirs étaient intimement liés. On chantait et on dansait entre voisins pour se délasser après les travaux agricoles et les corvées. Les pratiques agricoles étaient communautaires et le délassement qui suivait également, regroupant par exemple, lors des récoltes de betteraves et des arrachages de pommes de terre en septembre, la population de plusieurs villages voisins.
Aussi les occasions de danser sont nombreuses :
- battre sur l'aire à battre
- durcir le sol de terre battue d'une maison neuve
- réparer un sol de terre battue
- les corvées
- les fêtes les soirs de travaux agricoles
- les noces
Les occasions de danse autres que les noces ne sont pas que des prétextes ; ainsi la réalisation d'une aire neuve ('al leur nevez') peut nous sembler étrange en ce début de XXIe siècle mais elle est attestée en 1801 par Cambry qui en laisse une description précise, des souvenirs de voyage remontant en fait à la fin du XVIIIe siècle. Cette fête, une des premières fêtes profanes de Bretagne, a commencé à disparaître dès la fin du XIXe siècle, l'aire à battre ne se justifiant plus en raison des nouvelles techniques employées en agriculture. Les dernières ont survécu dans certains terroirs jusque dans l'entre-deux-guerres.
Aujourd'hui, les danses bretonnes se pratiquent dans les bals folk en France et ailleurs, dans les festoù-noz et les cercles celtiques où elles représentent la principale activité, ainsi que dans une moindre mesure lors les mariages. Elles sont une distraction populaire très ancrée dans la culture bretonne.
Accompagnement
Traditionnellement, les danses bretonnes étaient accompagnées soit par un couple de sonneurs (biniou-bombarde ou une combinaison entre biniou, bombarde, accordéon et vielle à roue) soit par un ou plusieurs chanteurs. La clarinette et le violon ont eux aussi une place importante dans l'histoire de la musique bretonne même si leur arrivée est plus tardive.
Dans certains terroirs, les deux types d'accompagnement (chanté et musical) se rencontraient, notamment en Haute-Bretagne et dans le Pays vannetais.
Aujourd'hui, de nouveaux instruments de musique ont intégré les groupes de fest-noz, du plus traditionnel au plus moderne : percussions africaines, guitares du monde entier, violon aux accents de l'est, électro, cuivres... autant de sons différents et originaux qui intègrent et servent à merveille l'esprit des danses bretonnes.
Les instruments
Le biniou kozh (cornemuse bretonne) est apparu au XVIIIe siècle et a supplanté la veuze avant d'être lui-même plus ou moins supplanté par le biniou braz (cornemuse écossaise) au XXe siècle.
Au XIXe siècle le violon a supplanté le biniou dans certaines régions avant d'être remplacé par l'accordéon. A la même époque, la clarinette fait sont apparition.
La vielle à roue était utilisée dans les Côtes-d'Armor.
Sans oublier bien évidemment la bombarde, instrument à vent à hanche double de la famille des hautbois. Elle produit, de même que le biniou braz, un son particulièrement fort permettant d'animer les grandes noces (pouvant atteindre un millier de personnes) du début du XXe siècle.
Le chant
Le Kan ha diskan, en Basse Bretagne.
On distingue les chants à répondre et les chants à compter (ou décompter) de Haute Bretagne et le ''Kan ha diskan''. Le chant à répondre diffère du Kan ha diskan par l'absence de tuilage). Les chants à compter (ou décompter) développés au XIXe siècle rythmaient les travaux. En pays vannetais gallo, le chant l'emportait nettement sur l' accompagnement instrumental.
Les sonneurs étaient souvent des professionnels qui officiaient en pays bretonnant et en pays gallo. Il s'agissait souvent de meuniers (qui avaient plus de temps libre) et qui étaient assez mal vus car ils étaient réputés pour séduire les jeunes filles[réf. souhaitée].
Les meneurs
Certaines danses comme la ''dañs tro'' commençaient par un "appel à la danse". Les chanteurs entonnaient la mélodie lentement, sans rythme particulier, d'abord sans paroles, puis avec quelques phrases improvisées ou préparées, ce qui leur permettait de s'adresser à l'assemblée des danseurs et de faire état de leurs talents de paroliers. Pendant ce temps, les danseurs se mettaient en place en suivant le rituel propre à chaque danse. Si aujourd'hui les chanteurs sont sur scène devant un micro, ils menaient autrefois la danse dans la ronde.
En Vannetais gallo, le chanteur (qui intègre souvent la danse), est le meneur de la danse et tout le groupe « répond ».
Origine
Les danses bretonnes sont principalement issues des branles de la renaissance. La danse étant un des piliers de la culture bretonne, les différentes danses ont continuellement évolué et atteignent aujourd'hui une très grande diversité. On peut en compter près de 500 si on retient toutes les variantes locales d'un même danse. Il faut cependant rappeler que les familles de danses sont nettement moins nombreuses puisqu'on peut tout ramener à une dizaine de danses "mères".
Le Moyen Âge
Historiquement, aussi loin que l'on peut remonter (c'est-à-dire à la Renaissance), il existait deux danses bretonnes :
Les gavottes (y compris le kost ar c'hoad ,dont nombreuses variantes existent, comme celle de Lescouët-Gouarec, Langoëlan du Pays Pourlet (encore dansé par le Cercle Celtique "Seiz Avel" de Trappes) et la suite fisel), dérivent peut-être des trihoris bretons décrits dans l'Orchésographie de Thoinot Arbeau.
Les passepieds trouveraient leur origine au Moyen Âge (ainsi que probablement l'équivalent en territoire bretonnant, le pach-pi).
Influences des branles de la Renaissance
À partir de la Renaissance, les branles se sont peu à peu propagés de la cour vers les classes populaires, probablement par l'entremise des nobles et de l'imitation.
Les branles simples ont donné l'hanter-dro, la trigotine gallo,...
Les branles doubles (qui dérivent de ronds plus anciens) ont donné l'an-dro, le tour, le pilé-menu, le rond de Saint-Vincent, les ronds guérandais, les contre-ronds, le rond pagan,...
La dañs Plinn, le rond de Landeda et le rond de Loudéac dériveraient également des branles gays d'influence française.
Les avant-deux, comme les guédennes, descendent des quadrilles (qui elles-mêmes dérivent des carrés lesquels dérivent eux-mêmes des contredanses d'influence française). Dans certaines guédennes, le cavalier soulève sa cavalière.
Les branles ont influencé les terroirs de danse dans toute l'Europe (Asturies, Roumanie,...) et même le Brésil.
Des danses de groupe aux danses de couple
Les danses bretonnes sont des danses dites communautaires : tout le monde danse ensemble. Mais aujourd'hui, rondes et chaînes côtoient également danses en couple ou en quadrette.
À partir du milieu du XIXe siècle, l'évolution des danses a été de plus en plus rapide, suivant l'évolution de la société (révolution industrielle, modification des moyens de transport, influence grandissante des villes,...). En ce qui concerne la danse, on note l'apparition de nouvelles danses, la création de variantes locales (à mettre en parallèle avec la diversification et l'évolution brutale des coiffes) et une uniformisation des costumes dans chaque pays qui ont ainsi au final créé une identification à un terroir beaucoup plus marquée.[réf. souhaitée]
L'accélération des transports et le décloisonnement des pays[réf. souhaitée] (par exemple, le défrichement des landes de Lanvaux par des Nantais) ont permis un brassage des danses et des airs les accompagnant. Le collectage ainsi que le travail des cercles celtiques ont aussi beaucoup contribué à cette diffusion à travers toute la Bretagne.
À côté de ces nouvelles danses apparaissent des danses en couple, qui permettent de mettre en valeur les cavalières[réf. souhaitée]. Elles sont soit :
- créées à partir de danses traditionnelles[réf. souhaitée]
- introduites depuis d'autres terroirs (le plus souvent sous l'influence de la mode des villes[réf. souhaitée]) : avants-deux, mazurkas, polkas, scottishes.
Autres dérivations
Les ridées dérivent de l'hanter-dro : elles sont apparues au XIXe siècle.
Le Rond de Landeda a pour danse-mère le laridé 6 temps du pays vannetais dont il se différencie par un mouvement de bras réduit à un simple balancement. Il est ainsi plus proche de la danse mère de l'ensemble des laridés qui est l'hanter dro.
La ''dañs Leon'' est sans doute la danse la plus ancienne du Léon. Identique à la suite de danse du Trégor dans sa forme en double front, elle en diffère par un pas en 8 temps de la famille des gavottes tandis que la suite de danse du Trégor utilise le pas des terroirs du Penthièvre, du pays Plinn et de Loudéac.
La ''dañs Sizun'' et le bal de Jugon dérivent des bals et aéroplanes anciens.
Le kas a-barh dérive de l'an-dro sous l'influence de l'évolution de la société.
Évolution
La plupart des danses anciennes étaient en ronds ; les danses en couples (dañs kof ha kof, ventre contre ventre) étant mal vues dans la plupart des endroits.
Depuis la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, la mode et le style des danses suivent l'évolution de la société qui passe progressivement de la vie en communauté à l'individualisme. Les rondes s'ouvrent en chaînes, les couples ont droit de cité dans la danse, les bals à 2, les danses en couples... se multiplient.
Un certain nombre de rondes (notamment les gavottes) se sont ouvertes et ont donc accéléré.
La ronde du Bas-Léon devient un cortège de couples dans la Gavotte de Lannilis.
A la veille de la Première Guerre mondiale, l'an-dro a évolué avec des figures en couple (retournement l'un vers l'autre, saut de la cavalière, faire tournoyer sa cavalière, ...). Après la guerre, cette évolution avait abouti en Kas-a-barh qui était devenu une danse distincte de l'an-dro.
Le Kas-a-barh et le cercle circassien (originaire d'Ecosse) connaissent des évolutions en cortèges.
La dérobée de Guingamp (fin du XIXe), la Dañs Kef et le Jimnaska (début du XXe) sont également des danses récentes.
Voir aussi
Articles connexes
- Musique bretonne
- Festival de la Saint-Loup - Concours national de la danse bretonne
- Bretagne, celte,
Bibliographie
Jean-Michel Guilcher, La Tradition populaire de danse en Basse-Bretagne, Mouton, 1963
Nicolas Millot, Dans, les chemins de la tradition, Editions Hengoun, 2002, ISBN 2-9518533-00
Notes et références
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