- Condition des femmes en Inde
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La condition des femmes en Inde a longtemps été considérée comme une des plus difficiles du monde[1]. Entre les milliers de « dowry deaths » (femmes tuées parce que leur dot est insuffisante pour un mariage) et l'accession à la fonction de Premier Ministre d'Indira Gandhi pendant 16 ans, les possibilités peuvent sembler variées mais elles restent profondément marquées par une discrimination de genre dans ce pays ancrée dans des traditions moyenâgeuses[2]. En 2006, une loi votée contre la violence faite sur les femmes (en particulier visant les dowry deaths) est seulement entrée en vigueur en octobre 2007[1]. Le rapport de 2007 du forum économique mondial indiquant l’écart entre les sexes place l’Inde à la 114e place sur 128 pays étudiés (la Suède étant en première position et le Yemen en dernière position)[1],[3].
Sommaire
Histoire
Inde védique et médiévale
Certains auteurs pensent qu'il existait une égalité sociale entre les hommes et les femmes dans l'Inde ancienne et en particulier durant la période védique[4],[5] mais d'autres font une description plus sombre de cette époque[6]. Certains passages du Rig-Véda semblent indiquer que la femme était libre de choisir son mari[7] et plusieurs femmes étaient des Rishis, soit un statut parmi les plus éminents dans la tradition religieuse de cette époque.
Mais dans la période médiévale, plus récente, ce statut s'est néanmoins détérioré, en particulier avec la pratique de la sati (bûcher funéraire où les veuves se jetaient plus ou moins volontairement à la mort de leurs maris[8]), l'interdiction du remariage des veuves et le mariage des enfants.
Quelques femmes de cette époque avaient cependant des statuts élevés, comme Razia Sultana qui fut la seule femme a régner sur Delhi, ou Durgavati qui a régné pendant 15 ans sur le peuple Gond au XVIe siècle. D'autres, comme les princesses Mogoles Jahanara et Zebunnissa étaient des poètes réputées et participaient au règne de leur mère Shivaji et dans le sud de l'Inde, de nombreuses femmes administraient les villages et les institutions religieuses.
L'apparition du mouvement de la Bhakti (mouvement religieux dévotionnel) a contribué à une moindre discrimination des femmes pendant un temps.
Mais ces exemples ne changent pas les perspectives de la majorité des femmes qui vivaient un statut peu enviable et profondément enraciné dans les traditions.
Sous le règne britannique
Certaines études européennes du XIXe siècle présentaient les femmes indiennes comme « naturellement chastes » et « plus vertueuses que les autres femmes»[9]. Mais cette perception ne traduisait que le regard extérieur de l'Occident et de sa culture car, au sein de la société indienne, le combat de certaines femmes donnait des signes d'un besoin de changement. Ishwar Chandra Vidyasagar a lutté pour l'amélioration des conditions des veuves et son combat est à l'origine du Widow Remarriage Act (loi sur le remariage des veuves) de 1856.
Rani Lakshmi Bai, la reine de Jhansi, a mené la révolte des Cipayes de 1857 contre les britanniques. Elle est considérée comme un « héros nationaliste » en Inde.
Après l'indépendance
La constitution de l'Inde garantit en principe l'égalité à toutes les femmes indiennes (article 14), aucune discrimination de la part du gouvernement (article 15 (1)), l'égalité des chances (article 16), l'égalité des salaires (article 39 (d)) et le renoncement aux pratiques qui rabaissent la dignité des femmes (article 51 (A)(e))[10].
En 1959, Anna Chandy devint la première femme Juge à la cour suprême du Kérala[11], en 1966, Indira Gandhi devint la première femme à accéder au poste de Premier Ministre. En 1989, M. Fathima Beevi est devenue la première femme Juge à la cour suprême de l'Inde. En 2002, Lakshmi Sahgal fut la première femme à se présenter aux élections présidentielles indiennes. En 2007, Pratibha Patil est la première femme Présidente de l'Inde.
Le féminisme en Inde a trouvé son essor à la fin des années 1970. Le déclencheur de ce mouvement fut le viol d'une jeune femme, Mathura, dans un poste de police et pour lequel les policiers incriminés furent acquittés. Les manifestations qui s'ensuivirent furent couvertes par les médias et ont contraint le gouvernement à apporter un amendement à différents textes de lois du pays[10]. Un autre viol en 2006, dans une famille musulmane, celui d'Imrana, a été traité par la Justice en condamnant le beau-père coupable de l'acte, ce qui était une première dans le pays (dans un premier temps, la tradition demandait que la jeune femme soit mariée au beau-père, puisque l'acte scellait en quelque sorte leur alliance)[12].
Le gouvernement de l'Inde a déclaré l'année 2001 Swashakti, « année de la restitution du pouvoir aux femmes » (empowerment)[13].
Éducation
Selon une étude de 1997, seuls les États du Kérala et de Mizoram ont un taux de femmes ayant reçu une éducation qui approchent les moyennes mondiales. Dans les zones rurales, les femmes continuent à être moins éduquées que les hommes[10].
Travail
Dans les zones rurales, les femmes fournissent de 55% à 66% du travail produit dans les fermes. Dans les zones urbaines, par exemple dans le domaine de l'informatique, elles représentent 30% du personnel. Leurs salaires y sont égaux à ceux des hommes.
Il existe dans ce domaine également quelques histoires à succès, comme celle de Shri Mahila Griha Udyog Lijjat Papad ou celle de Kiran Mazumdar-Shaw, la femme la plus riche d'Inde. Lalita Gupte et Kalpana Morparia se sont trouvées sur la liste de Forbes des femmes d'affaires les plus puissantes de l'Inde, elles dirigent la seconde banque la plus importante du pays ICICI Bank[14]
Les conditions du changement
Malgré une augmentation des cas, au XXIe siècle les violences faites aux femmes en Inde ne sont pas toujours rapportées aux autorités, à cause d'une habitude ancrée dans les traditions de considérer les femmes comme inférieures[10]. La population masculine en Inde est supérieure à la population de sexe féminin, la cause principale étant l'élimination des filles avant la naissance: les couples indiens ont recours à l'échographie et à l'avortement pour sélectionner les naissances au profit des garçons, afin d'éviter de payer la dot des filles, très coûteuse, et de perpetuer le nom de la famille grâce à une descendance masculine (voir à ce sujet une enquête de référence : "Quand les femmes auront disparu. L'élimination des filles en Inde et en Asie, Bénédicte Manier, La Découverte, 2006)[15] La forte mortalité des femmes avant l'âge adulte, pour des raisons rarement élucidées[10] et la mortalité maternelle à l'accouchement en Inde (la seconde en importance dans le monde) expliquent également en partie cet important déficit de femmes en Inde (plus de 35 millions d'hommes que de femmes au recensement de 2001)].
Des personnalités importantes se manifestent de plus en plus ouvertement pour dénoncer « un probléme dans les habitudes sociales et les perceptions en Inde »[16]. Malgré les progrès de ces dernières décennies, et comparé aux avancées dans les autres pays, l'Inde reste un des pays où la volonté d'un changement de la condition féminine n'est pas assez répandue dans les populations pour qu'il se produise de manière radicale.
Bibliographie
- Le livre enquête de Bénédicte Manier sur le déficit de femmes en Inde: Quand les femmes auront disparu. L'élimination des filles en Inde et en Asie, La Découverte, 2006.
Références
- L'Inde des femmes
- Étude de Stéphanie Tama Lama-Rewal
- Lire le rapport entier ici
- Mishra R. C. Towards Gender Equality, 2006
- InfoChange women: Background & Perspective
- Pruthi Raj Kumar, Status and Position of Women: In Ancient, Medieval and Modern India, 2001, Vedam books
- R. C. Majumdar The history and culture of the Indian people. Volume I, The Vedic age. Bharatiya Vidya Bhavan 1951, p.394
- Sur religiologiques
- Jean Antoine Dubois et Henry King Beauchamp, Hindu manners, customs, and ceremonies, Clarendon press, 1897
- United Nations, 2001
- [1]
- Imrana
- National Policy For The Empowerment Of Women (2001)
- India's Most Powerful Businesswomen
- http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Quand_les_femmes_auront_disparu-9782707156242.html. [
- Jamshed J. Irani directeur d'une entreprise du Tata Group sur women's news
Liens externes
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