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Château de Hauteville
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Il est situé à Charchigné dans les environs de Javron-les-Chapelles, dans le département de la Mayenne. Ses ruines se dressent tristement, au sommet d'une colline, à 1 200 m de Charchigné, sur une terre seigneuriale qui relevait de Lassay. Elles nous laissent facilement imaginer la richesse et l'élégance de la demeure qui s'élevait là, au temps de sa splendeur et avant l'incendie accidentel qui devait l'anéantir à tout jamais en 1922. Hauteville a appartenu à Chevaigné-du-Maine jusqu'en 1838.
Sommaire
Féodalité
Ses premiers seigneurs portaient le nom de Livet et avant 1350, le chevalier Jean de Livet, seigneur d'Hauteville, donnait une rente aux moines de Beaulieu pour être inhumé dans leur abbaye. Plus tard, en 1508, Jean d'Hauteville fondait, de trois messes par semaine, la chapelle du château qu'il dédia à la Vierge. En 1526, Lancelotte d'Hauteville, unique héritière, apporta le domaine aux d'Arquenay en épousant Antoine d'Arquenay. À la suite du mariage de Julienne d'Arquenay, petite-fille de Jean, avec Nicolas d'Angennes (1581), Hauteville est devenu la propriété de cet homme qui, quoique catholique, devait resté attaché à Henri IV. Membre `d'une famille angevine, originaire de la terre du Hardas de Louvaines, Thomas du Hardas acheta Hauteville à Nicolas d'Angennes avant 1586. Ses successeurs conservèrent cette terre que Pierre de Hardas légua à Charles, en 1793.
La construction
Ce fut Charles du Hardas, qui commanda la construction du château d'Hauteville à l'architecte Pierre Pommeyrol, vers la fin du XVIIIe siècle. Pommeyrol est le créateur des châteaux : château de Craon, château de Bel-Air (Laval), l'ancien Hôtel Piquois (Laval), etc. Il édifia à Hauteville une splendide demeure « une œuvre classique et de belle ligne » qui devait rester inachevée dès les premières lueurs de la Révolution française, en 1789. Précédée d'une avenue de 800 m (due à André Le Nôtre qui conçut les jardins de Versailles), d'un perron de cinq marches, elle présentait un vaste corps de logis de trois étages percés de multiples fenêtres. Au milieu de la façade de 40 m de long, se dressait un fronton triangulaire, orné des blasons et des chiffres de la famille du Hardas et surmonté d'un belvédère. De chaque côté du château, des pavillons irréguliers complétaient tout un ensemble "d'une construction séreuse et solide". Sa somptueuse avenue bordée d'une double haie de hêtres était la troisième de France.
Charles du Hardas épousa Françoise-Perrine-Madeleine de La Corbière en 1769. Le 17 juin 1788, on le nomma représentant de la noblesse au bureau du district de Lassay. II avait prévu de construire une résidence somptueuse à Hauteville, une résidence que Pommeyrol ne put jamais achever, car, à cette époque, des troubles fréquents agitaient déjà la Mayenne, appauvrie par la rareté des grains, l'hiver très rigoureux et la misère générale. Charles Alexis du Hardas fut garde du corps personnel du roi Charles X. Il repose debout dans la crypte de la chapelle située dans le cimetière de Charchigné, une chapelle bâtie au siècle dernier, ornée de magnifiques vitraux, dus à un maître verrier de Tours et dont la toit est recouvert de cuivre.
La tourmente révolutionnaire
Le 28 juillet 1789, des émeutiers pillèrent et brûlèrent le château de la Motte de Madré et le château de Vaugeois. Un habitant de Neuilly-le-Vendin, François Desgnetais, qui disait avoir assisté au sac de ces deux châteaux, disait à qui voulait bien l'entendre "Il faut que le chartrier d'Hauteville ait son tour ; dès que vous entendrez le tocsin, rassemblez-vous et marchez sur Hauteville. Si vous restez sourd à mon appel, je viendrai avec deux mille normands qui y mettront tout à feu et à sang dans vos paroisses ». Le jeudi matin 31 juillet, ils furent 1500 à se rassembler sur la place du petit bourg de Chevaigné et malgré i'intervention des curés de Chevaigné et des Chapelles, venus leur faire entendre raison, « armés de fusils, brocs, fourches, piques et autres armes », sous les ordres de Desgenetais et de Lucien Loison, ils marchèrent sur Hauteville où ils arrivèrent à midi. L'intendant leur ayant échappé, les emeutiers décidèrent de fouiller eux-mêmes le château pour y découvrir le fameux chartrier qui fut livré aux flammes d'un feu de fagots et de genêts, "Rien ne fut soustrait à la destruction". Les responsables de ces actes de vandalisme furent d'abord arrêtés, puis, dans un second temps, condamnés à mort et enfin relâchés.
Le château échappa de justesse à l'incendie du 30 juillet mais il fut pillé "révolutionnairement", son mobilier, ses portes, ses fenêtres (qui n étaient pas encore toutes placées) furent vendues à un prix dérisoire. Il fut à nouveau menacé le 14 novembre 1790. Le 26 juin 1791, deux détachements de gardes nationaux, sous les ordres de Beauvais et Durand, vinrent à leur tour enfoncer les portes des armoires qui restaient et casser les bouteilles dans les caves sans oublier d'emporter avec eux sept fusils de chasse. II subit encore une perquisition le 14 juillet 1793 et finit par devenir une salpétrière où l'on fabriquait du "salin". Le 27 juillet 1799, les Chouans enlevèrent, de sur le château, une charretée de plomb ; le reste (7 à 8 charretées) fut transporté à Lassay.
Le XIXe siècle
En 1847, Hauteville reçut une visite policière à l'occasion des prétendus complots légitimistes.
La splendeur
Le château à l'époque de sa splendeur employait une cinquantaine de domestiques. Il comprenait 99 chambres. L'entretien de l'aile principale occupait une personne l'année durant. Il permettait à plusieurs familles de vivre sur les terres. Les fermiers étaient en métayage. Ils n'étaient pas riches, mais ne manquaient cependant pas du nécessaire. Tout devait être partagé de moitié avec le château. Des règles étaient à respecter de façon draconienne : les fermiers n'étaient pas assurés de rester d'une année sur l'autre sur la même exploitation. L'intendant règnait en maître. Un certain Galereau, un novateur dans l'agriculture, qui introduisit le chou fourrager dans la région, et fit le premier coucher les vaches dehors, était particulièrement craint.
L'incendie
Le 13 novembre 1922, vers 3h du matin, on s'aperçut que le feu avait pris ; on sonna le tocsin pour alerter la population, à tour de bras. L'incendie s'était allumé dans les combles par une poutre près de laquelle se trouvait un tuyau de chauffage central qu'alimentait un immense calorifère, qui pouvait contenir un stère de bois. La veille, un maçon, M.Auffray, avait été mis en alerte, après vêpres, par le personnel qu'intriguait une forte odeur de brûlé. Il constata que le feu commençait à "couver" et qu'il prendrait vite de l'ampleur. "Si vous ne faites rien, dans quelques heures, le château sera en feu", dit-il avant de prendre congé de ses hôtes. Ses paroles ne furent pas entendues, et, par négligence, l'incendie se déclara. Les secours ne tardèrent pas trop, cependant le sinistre se propagea à une très grande vitesse, dévorant en premier les boiseries. Rien n'était ignifugé. L'aile droite seule put en partie être préservée. Le feu s'arrêta à la chapelle de l'aile gauche. Plusieurs compagnies de pompiers vinrent avec des pompes à bras. Une partie des meubles, plus ou moins endommagés, fut sorti par les pompiers et les personnes du village. Des fauteuils, une bibliothèque, des tableaux, des horloges, de la vaisselle, des tables furent ainsi mis à l'abri. D'autres quittèrent vraisemblablement les lieux sous le manteau. Le château se consuma ainsi pendant près de 3 semaines. Des objets mobiliers, des objets d'art d'une richesse inestimable ne purent être sauvés. 5 personnes furent blessées en combattant le feu : 3 pompiers, le gardien du château, et un habitant de Charchigné que l'on a dit "trop zélé" à sa tâche. Le tocsin se fit entendre pendant plus de 36 heures. Le château appartenait alors à Mathilde Widor, née Mathilde de Montesquiou-Fézenzac, fille de l'amiral Bertrand de Montesquiou-Fézenzac, épouse du célèbre compositeur Charles-Marie Widor.
L'agonie
Mathilde commença à le délaisser plus que de coutume. Elle ne fit jamais reconstruire la partie endommagée alors que ses moyens financiers le lui permettaient. En plus des terres d'Hauteville, elle possédait immeubles et hôtels à Paris. Elle laissa Hauteville en piteux état, sans doute parce qu'elle ne s'y plaisait pas et qu'elle n'avait que très peu de lien avec la souche de la famille D'Hauteville, qui de tout temps ce réfugia en terre de Cornouaille, dont les descendants au trône de Jérusalem menacés de mort restèrent en Asturies. La guerre d'Espagne les chassa et ils revinrent en France dans les années soixante. Le Comte d'Hauteville Emilio, étant encore enfant, ne put faire valoir ses droits et l'héritage spirituel étant plus important. Les fermes du château furent vendues une par une, en l'espace de très peu d'années. Suivant le souhait de Mathilde Widor, les fermiers qui les exploitaient eurent en général la possibilité de les acheter. La magnifique haie de hêtres fut malheureusement abattue en 1961, et une carrière de sable, ouverte à proximité, finit par défigurer le site. Le château, en ruines, est devenu dans les années 1960 la propriété de M. et Mme Roger Bordelet.
Références
- « Château de Hauteville », dans Alphonse-Victor Angot, Ferdinand Gaugain, Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne, Goupil, 1900-1910 [détail de l’édition]
- Le crime de Mathilde, Flammarion, par Guy des Cars. Roman dans lequel il retrace à sa manière toute la vie de Mathilde de Montesquiou-Fézenzac. Les noms de famille et de lieux sont modifiés. Quelques épisodes imaginaires sont intercalés dans des évènements réels.
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