- Carmélites de Compiègne
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Les carmélites de Compiègne sont des religieuses cloîtrées condamnées à mort en juillet 1794 par le tribunal révolutionnaire pour motif de fanatisme et de sédition.
Elles furent béatifiées en 1906.
Leur vie et leur arrestation a inspiré plusieurs œuvres (nouvelle, pièce, film, opéra) appelées pour la plupart Dialogues des carmélites.
Sommaire
Arrestation et jugement
Le 14 septembre 1792, les carmélites sont expulsées de leur couvent par les autorités civiles. Elles vivent alors leur vocation dans différentes maisons de Compiègne, où elles sont réparties en quatre groupes. Elles prononcent chaque jour un « vœu de consécration totale à la Volonté Divine » — fût-ce au prix de leur vie — pour obtenir la fin des massacres de la Terreur et la paix pour l'Église et l'État[1].
Elles sont arrêtées les 22-23 juin 1794 et incarcérées à l'ancien couvent de la Visitation, transformé en prison. La Terreur est alors au plus fort et touche notamment les ordres religieux. Ainsi à Arras, le 26 juin, quatre religieuses des Filles de la Charité sont exécutées et en juillet, 32 religieuses, Ursulines, sacramentaires et bernardines, ainsi que 30 prêtres, sont guillotinés[1].
Le 12 juillet 1794, les seize carmélites sont transférées de Compiègne à Paris, où elles sont jugées le 17 juillet sous l'accusation de « machiner contre la Révolution ». L'acte d'accusation est rédigé par Fouquier-Tinville. Elles sont condamnées à mort et exécutées le jour même comme « fanatiques et séditieuses »[1].
Exécution des seize carmélites
Elles sont guillotinées le 29 messidor an II (17 juillet 1794), à la barrière de Vincennes[1], sur la place du Trône-Renversé (ancienne place du Trône, dénommée ainsi depuis 1792, actuellement place de la Nation).
Les seize religieuses, conduites par leur supérieure, Mère Thérèse de Saint-Augustin, prennent le chemin de la guillotine en chantant des cantiques tout au long du parcours. Vêtues de leurs manteaux blancs, elles descendent des charrettes, puis se mettent à genoux et entonnent le Veni Creator. Les assistants du bourreau, Charles-Henri Sanson, viennent chercher la première, qui est aussi la plus jeune, Sœur Constance de Jésus, une novice. Elle fait une génuflexion devant la mère supérieure pour lui demander la permission de mourir. En montant les marches de l'échafaud, elle entonne le Laudate Dominum (le psaume 116, psaume chanté lors des fondations des carmels, avec la symbolique de fonder au Ciel une nouvelle communauté). Les quinze autres carmélites sont exécutées ensuite. Sœur Marie Henriette de la Providence, l'infirmière, est l'avant-dernière ; la mère supérieure passe en dernier. Les chants des religieuses gravissant l'échafaud impressionnèrent fortement la foule qui assistait à l'exécution.
Leurs corps et leurs têtes sont jetés de nuit dans l'une des deux fosses communes du cimetière de Picpus[1].
Elles sont béatifiées le 27 mai 1906 par le pape Pie X.
Noms des seize carmélites
Âge moyen des condamnées : 49 ans.
- Sœur Constance de Jésus - Marie-Geneviève Meunier, 29 ans, novice
- Sœur Saint Louis - Marie-Anne Brideau, 42 ans
- Sœur Euphrasie de l’Immaculée Conception - Marie Claude Cyprienne Brard, 58 ans
- Sœur Julie-Louise de Jésus - Rose Chrétien de Neuville, 53 ans
- Sœur Sainte Marthe - Marie Dufour, 51 ans
- Sœur de Jésus Crucifié - Marie-Anne Piedcourt, 78 ans
- Sœur Marie du Saint Esprit - Angélique Roussel, 52 ans, sœur converse
- Sœur Saint François-Xavier - Juliette Verolot, 33 ans, sœur converse
- Sœur Thérèse de Saint Ignace - Marie Gabrielle Trézel, 51 ans
- Sœur Charlotte de la Résurrection - Anne Marie Madeleine Françoise Thouret, 78 ans
- Sœur Thérèse du Cœur de Marie - Marie-Anne Hanisset, 52 ans
- Sœur Catherine - Catherine Soiron, 52 ans, tourière, n'était pas religieuse mais « femme gagée »
- Sœur Thérèse - Thérèse Soiron, 49 ans, tourière, même statut que sa sœur Catherine
- Mère Henriette de Jésus - Marie Françoise Gabrielle Colbert de Croissy, 49 ans
- Sœur Marie-Henriette de la Providence - Marie-Anne Pelras, 30 ans
- Mère Thérèse de St. Augustin - Marie-Madeleine-Claudine Lidoine, 41 ans
Dans l'art et la culture
- En 1937, Gertrud von Le Fort publie la nouvelle La Dernière à l'échafaud (Die Letzte am Schafott). Gertrud von Le Fort s'est inspirée de La Relation du martyre des seize carmélites de Compiègne, manuscrits de Sœur Marie de l'Incarnation (Françoise-Geneviève Philippe, 1761-1836), seule rescapée[2]. Le personnage de Blanche de La Force, est une création romanesque. Son nom est une transcription transparente du nom de Gertrud von Le Fort.
- En 1949, la pièce (posthume) de Georges Bernanos, Dialogues des Carmélites, inspirée de la nouvelle de Gertrud von Le Fort, immortalise cet épisode de la Révolution et, fait exceptionnel, entre dès les années suivantes au répertoire de la Comédie Française.
- En 1957, Francis Poulenc en tire un opéra : Les Dialogues des Carmélites, créé en 1957.
- En 1960, le père Bruckberger et Philippe Agostini réalisent le film Le Dialogue des Carmélites mettant en scène, entre autres, Madeleine Renaud, Alida Valli, Jeanne Moreau, Pascale Audret, Anne Doat, Judith Magre et Georges Wilson.
- En 1984, Pierre Cardinal réalise le téléfilm : Dialogues des Carmélites, diffusé le 15 février 1984, avec Anne Caudry, Marie-Christine Rousseau, Madeleine Robinson, Nicole Courcel et Suzanne Flon.
Notes et références
- Stéphane-Marie Morgain, L'amour sera toujours vainqueur ; Les carmélites martyres de Compiègne, pensées et témoignages, éd. du Carmel, 2000, p. 14-24
- Il existe une édition critique des manuscrits originaux, Apaiser la terreur, commentaire et notes par William Bush, Paris, Cerf, 1993.
Bibliographie
- Jean Tulard, Jean-François Fayard et Alfred Fierro, Histoire et dictionnaire de la Révolution française. 1789-1799, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », Paris, 1987, 1998 [détail de l’édition] « Les victimes de Picpus (1794-1994) »
- William Bush, Apaiser la terreur, édition critique des manuscrits originaux de Sœur Marie de l'Incarnation, commentaire et notes par William Bush, Paris, Cerf, 1993
- Stéphane-Marie Morgain, L'amour sera toujours vainqueur ; Les carmélites martyres de Compiègne, pensées et témoignages, éd. du Carmel, 2000, 132 p. Biographie des religieuses et extraits de leurs écrits (lettres, témoignages, prières).
Voir aussi
Articles connexes
- Ordre du Carmel
- Les Dialogues des Carmélites (œuvre de Francis Poulenc)
- Le Dialogue des Carmélites (film)
- Église de l'Immaculée Conception, Paris 12e
- Cimetière de Picpus, Paris 12e
Liens externes
- Partie du site du Carmel consacrée aux Carmélites de Compiègne
- Paroisse de l'Immaculée Conception, Paris 12e : paroisse sur le territoire de laquelle les Carmélites sont inhumées au cimetière de Picpus
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