- Brunet (acteur)
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Jean-Joseph Mira, dit Brunet, né le 17 novembre 1766 à Paris, rue Aubry-le-Boucher et mort le 21 février 1853 à Fontainebleau, est un acteur comique français.
D’un père maître boulanger qui joignit, quelques années plus tard, la perception d’un bureau de loterie à son commerce, le jeune Mira reçut l’éducation que tout enfant d’honnêtes bourgeois recevait à cette époque, c’est-à-dire qu’on l’enseignement de la lecture, l’écriture, et les quatre premières règles de l’arithmétique. Il eut pour condisciple Talma qui devait lui aussi illustrer la scène française un jour. Le petit Mira montra, dès son enfance, un goût assez prononcé pour le spectacle, et il parut quelquefois lui-même en comédie bourgeoise. Sa pensée n’avait pas franchi l’horizon du comptoir paternel lorsque, la suppression des loteries ayant restreint les ressources de sa famille, Joseph Mira résolut de tirer parti de son talent d’amateur en demandant à la profession de comédien des moyens d’existence.
Il obtint, non sans avoir eu à combattre une vive opposition, le consentement de ses parents, sollicita et, après avoir adopté le pseudonyme de Brunet, il s’engagea dans une troupe de comédiens ambulants qui se rendaient à Mantes. Véritable reflet du Roman comique, l’emploi qui lui fut dévolu dans cette association, était des plus humbles : Brunet cumulait, avec les rôles accessoires, les fonctions de copiste, de souffleur, au besoin même d’allumeur de chandelles. Un vieux comédien nommé la Rotière, traversant Mantes, eut occasion de voir jouer Brunet, dont il devina le talent futur. Arrivé au Havre, où l’avait amené son engagement, il parla du jeune acteur comique, des services qu’il rendait, et réussit à décider le directeur du théâtre à l’admettre au nombre de ses acteurs.
Deux ans après, Brunet alla à Rouen, qu’il quitta ensuite en novembre 1795, pour entrer dans la troupe de Mademoiselle de Montausier, où il débuta, dans le Désespoir de Jocrisse, par le rôle principal, que Baptiste Cadet avait établi avec un très grand succès. Lorsque cette salle fut fermée en vertu du décret de 1807, Brunet, qui avait suivi la fortune de Mademoiselle Montansier au théâtre de la Cité, devint acquéreur d’un quart de propriété dans la nouvelle salle du Variétés qu’on venait d’élever sur le boulevard Montmartre.
Peu d’acteurs ont montré une si grande activité : il établit plus de six cents rôles. Le naturel et la franchise de son jeu le rendirent justement populaire. Il excellait à rendre les types de la bêtise : Jocrisse, Cadet-Roussel, Innocentin, Agnelet, mais son talent était d’une souplesse qui lui permit d’heureuses tentatives dans un répertoire varié, et on le vit, à cinquante ans, produire, sous le costume féminin, l’illusion la plus complète dans le rôle de Cendrillon. Quoiqu’il se montrât un des administrateurs les plus actifs du théâtre des Variétés dont il était l’un des propriétaires et des administrateurs, jamais ses devoirs d’acteur ne souffrirent de ce cumul. En effet, pendant sa longue carrière théâtrale, il établit plus de six cents rôles, dont un très grand nombre ont inarqué sa place parmi les acteurs d’un comique vrai, franc et naturel. Il était infatigable et, hormis le jour de sa fête, qu’il consacrait à sa famille, il se serait fait scrupule d’être une seule soirée sans paraître devant le public. On a prétendu qu’il portait si loin la conscience de sa profession, que dans les Couturières, vaudeville de Désaugiers, où il n’avait à débiter que quelques mots hors de la vue des spectateurs, il allait jusqu’à revêtir le costume du rôle. Le fait est controuvé. Ce qui est plus positif, c’est que, s’étant chargé dans le même ouvrage d’imiter les aboiements d’un chien, il ne voulut, pendant plus de trente représentations, abandonner à personne le droit d’aboyer : il ne céda que devant un enrouement. Ceci peut assurément passer pour de la bizarrerie, pour de la puérilité, mais un fait plus concluant vient à l’appui de la sollicitude qu’il apportait aux intérêts des auteurs et de ses camarades. Dans l’Égoïste par régime, comédie où Potier remplissait le rôle principal, Brunet tint à se charger d’un simple accessoire n’ayant, pour ainsi dire, qu’une lettre à porter, afin que l’exécution de la pièce n’eût point à souffrir de l’inexpérience ou de la maladresse d’un figurant. Il avait près de cinquante ans lorsqu’il joua Cendrillon.
Brunet resta, malgré l’affaiblissement de sa mémoire, attaché au théâtre des Variétés jusqu’en mai 1830, époque à laquelle il céda sa part dans la direction à M. A. Dartois, et continua son service comme pensionnaire pendant dix-huit mois encore. Il fit une rentrée le 11 novembre 1832, et donna quelques représentations. Le 8 juin 1841, à l’âge de soixante-quinze ans, il reparut sur la scène, et joua jusqu’à sa représentation de retraite, Ie 21 décembre 1841. Ce fut la dernière fois qu’il parut en public. Cet acte de faiblesse ne laissa pas d’inspirer un sentiment pénible à ceux qui, voyant un vieillard caduc se battre les flancs pour provoquer le rire, ignoraient que c’était afin de remédier à des malheurs de famille qu’il était venu, septuagénaire, redemander au théâtre des ressources que le théâtre n’eût pu lui refuser sans ingratitude, puisqu’après avoir acquis dans l’exercice de sa profession une fortune assez considérable, des événements désastreux étaient venus le frapper dans son bien-être et dans ses affections.
Source
- Ferdinand Hoefer, Nouvelle Biographie générale, t. 7, Paris, Firmin Didot frères, 1857, p. 616-8.
- Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littératures, Paris, Hachette, 1876, p. 332.
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