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Boule de Suif
Cet article concerne la nouvelle de Maupassant. Pour le film réalisé par Christian Jaque, voir Boule de suif (film, 1945).Boule de Suif Auteur Guy de Maupassant Genre Nouvelle Pays d'origine France Lieu de parution Paris Éditeur G. Charpentier Date de parution 15 avril 1880 Boule de Suif est une nouvelle de Guy de Maupassant, écrite dans le courant de l'année 1879, rendue publique en 1880, d'abord par une lecture faite en janvier par l'auteur devant ses amis du « groupe de Médan », puis par la publication, au sein d'un recueil collectif de nouvelles titré les Soirées de Médan, le 15 avril 1880.
Des rumeurs font état d’une publication antérieure de la nouvelle dans un journal ou une revue. Cette croyance est fondée sur la première phrase de la préface, qui dit que « les nouvelles qui suivent ont été publiées, les unes en France, les autres à l'étranger ». Aucun élément ne permet toutefois, plus de cent ans après les faits, d'étayer cette croyance en une prépublication de Boule de Suif.
Boule de Suif, des années après sa première publication en œuvre de collaboration, a donné son titre à divers recueils de nouvelles portant le même titre.
Sommaire
Le thème de la nouvelle
« Boule de suif […] est un chef-d'œuvre », écrivait Gustave Flaubert. Même si ce n'est pas la première nouvelle de Guy de Maupassant, c'est le récit qui l'a imposé comme un maître. D’abord parue dans le recueil collectif des soirées de Médan, l'histoire, inspirée d'un fait divers, se déroule pendant la guerre de 1870: dix personnes fuyant Rouen envahie par les Prussiens ont pris place dans une diligence. Parmi elles, Elisabeth Rousset, une prostituée surnommée Boule de suif à cause de son embonpoint, se donnera à un officier prussien pour sauver les autres voyageurs qui pourtant la méprisent. L'espace clos de la diligence fait ressortir l'hypocrisie et la bassesse des bourgeois. On peut alors distinguer plusieurs thèmes apparents dans cette œuvre tels que la guerre, l'alimentation, la liberté, le sexe…
Résumé
Pendant l'hiver 1870-1871, la ville de Rouen (Normandie) est envahie par les Prussiens. Pour fuir l'occupation, un groupe de dix personnes prennent la diligence de Dieppe: trois couples (des commerçants, des grands bourgeois, (des nobles), deux religieuses et deux marginaux: un « démocrate » et Boule de Suif, une prostituée.
Le voyage s'annonce difficile, la diligence n'avance pas. Les voyageurs ont faim et seule la jeune femme a pensé à emporter des provisions, qu'elle partage généreusement. Les voyageurs font étape dans une auberge à Tôtes (sur le modèle de l'Auberge du cygne), occupée par les Prussiens. Un officier qui occupe cette auberge leur interdit de repartir tant que Boule de Suif n'aura pas accepté ses avances. Patriote, elle refuse, approuvée de ses camarades. Mais ils perdent patience et trament un complot contre elle.
Boule de Suif finit par accepter de se sacrifier et, au sixième jour, la diligence peut repartir. Quand vient le moment du repas, tous les voyageurs, qui se sont fait préparer des plats sauf Boule de suif qui n'a eu le temps, se régalent, mais traitent avec mépris celle qui les a libérés, et refusent de partager leur repas avec elle, qui sanglote au fond de la diligence en direction du Havre.
Portrait des personnages (caractérisation directe)
Physiques
Psychologiques
Classe sociale
M. et Mme Loiseau
Lui :
- taille exiguë
- ventre en ballon surmonté d’une face rougeaude entre deux favoris grisonnants.
Elle :- grande, forte, résolue, tête emplie d’opérations d’argent
- voix haute et décision rapide
Lui :
- réputation de filou, pusillanime
- apprécié pour ses farces et ses plaisanteries souvent odieuses
Elle :
- "eut une angoisse lorsque le patron revint avec quatre bouteilles" [de champagne] "aux mains" (pingre)
- "de la nature des orties" (mauvaise, sèche, dominatrice)
Les deux :
- "Cornudet s'aperçut que le ménage Loiseau s'entendait pour tricher" [aux cartes]
Marchands de vin en gros de la rue Grand-Pont
(Représentent les nouveaux riches; caricatures de Ténardier)
M. et Mme Carré-Lamadon
Lui :
- homme qui s'affiche comme un notable respectable, imbu de sa position sociale. Bourgeois prospère qui ne cache pas ses sympathies monarchistes orléanistes
Elle :
- Bien plus jeune que lui - petite, mignonne, jolie, pelotonnée dans ses fourrures
Elle :
- demeurait la consolation des officiers de bonne famille envoyés à Rouen en garnison (allusion à ces nombreuses infidélités et à son penchant pour les beaux militaires cf la chambre 11)
- certain dégoût pour la pauvreté
- Propriétaire de trois filatures de coton
- Officier de la Légion d’honneur et membre du conseil général
(Représentent la bourgeoisie établie)
M. le comte et Madame la comtesse de Bréville
Lui :
- vieux et hautain
- s’efforce de ressembler, par sa mise au roi Henri IV
Elle :
- grand air
Lui :
- gentilhomme de grande tournure
- Comte et comtesse de Bréville
- Portent un des noms les plus anciens et les plus nobles de Normandie
Lui :
- membre du conseil général
- représentant du parti orléaniste
Elle :
- son salon demeurait le premier au pays
(Représentent l'aristocratie de province)
Deux religieuses
- L’une était vieille avec une face défoncée par la petite vérole
- L’autre, très chétive, avait une tête jolie et maladive sur une poitrine de phtisique rongée par cette foi dévorante
Bonnes sœurs
(Représentent le clergé)
Cornudet le démocrate
- grande barbe rousse souvent moucheté de bière
- terreur des gens respectables
- vantard, lyrique, lâche, combattant par procuration
- serviable
- républicain, viscéralement anti-bonapartiste
- possède une assez grande fortune
- personnage engagé mais très imbu de sa personne.
(Représente les bourgeois républicains qui se clament patriote et homme du peuple; les Hommes de 1848)
Élisabeth Rousset surnommée « Boule de suif »
- embonpoint précoce, appétissante et fraîche (champs lexical de la gourmandise et du plaisir)
- petite
- ronde de partout
- grasse à lard
- doigts bouffis, étranglés aux phalanges
- peau luisante et tendue
- une gorge énorme
- figure comme une pomme rouge
- yeux noirs magnifiques, ombragés de grands cils épais
- une bouche charmante, étroite, humide pour le baiser, meublée de quenottes luisantes et microscopiques
- pleines de qualités inappréciables, disait-on
- serviable, généreuse, compatissante, patriote, têtue, pas très maline, fière.
- regardée de travers et méprisée par tous ses compagnons de voyage; qualifiée de « honte publique »
- prostituée
Les recueils de nouvelles
Boule de Suif a ultérieurement donné son nom à plusieurs recueils de nouvelles :
- d’abord en 1897 (la liste des nouvelles restant à préciser), dans un in--8 ° de VII+110 pages, orné de compositions de François Thévenot, avec gravures sur bois de A. Romagnol, dans la « Collection des Dix », chez A. Magnier éditeur, Paris ;
- puis, à partir de 1899, avec la publication d’un nouveau recueil de ce titre chez P. Ollendorff éditeur, Paris, réunissant, outre Boule de Suif, 20 nouvelles publiées, publiée le 15 avril 1880, dans le volume collectif les Soirées de Médan,
- l’Ami Patience, publiée le 4 septembre 1883, dans Gil Blas, sous le titre l’Ami,
- la Dot, publiée le 9 septembre 1884, dans Gil Blas,
- la Moustache, publiée le 31 juillet 1883, dans Gil Blas,
- le Lit 29, publiée le 8 juillet 1884, dans Gil Blas,
- le Protecteur, publiée le 5 février 1884, dans Gil Blas
- la Chevelure, publiée le 13 mai 1884, dans Gil Blas,
- le Crime au Père Boniface, publiée le 24 juin 1884, dans Gil Blas,
- Rose, publiée le 29 janvier 1884, dans Gil Blas,
- l’Aveu, publiée le 22 juillet 1884, dans Gil Blas,
- la Parure, publiée le 17 février 1884, dans le Gaulois,
- le Bonheur, publiée le 16 mars 1884, dans le Gaulois,
- la Vendetta, publiée le 14 octobre 1883, dans le Gaulois,
- Coco, publiée le 21 janvier 1884, dans le Gaulois,
- Auprès d’un Mort, publiée le 30 janvier 1883, dans Gil Blas,
- la Serre, publiée le 26 juin 1883, dans Gil Blas,
- Un Duel, publiée le 14 août 1883, dans le Gaulois,
- Une Soirée[1], publiée le 21 septembre 1883, dans le Gaulois,
- le Vengeur, publiée le 6 novembre 1883, dans Gil Blas,
- l’Attente, publiée le 11 novembre 1883, dans le Gaulois,
- Première Neige, publiée le 11 décembre 1883, dans le Gaulois.
- Une nouvelle édition du recueil de 1897 fut publiée, en 1902, chez le même éditeur (Ollendorff), agrémentée d’illustrations de Jeanniot et de gravures sur bois de G. Lemoine, dans un in-12 de 336 pages.
Divers recueils ont paru dans les décennies suivantes, dans des compositions parfois différentes, agrémentés ou non de nouvelles illustrations.
Notes
- ↑ ne pas confondre cette nouvelle avec une autre nouvelle de Guy de Maupassant, qui porte exactement le même titre, mais dont l’histoire est totalement différente, et qui fut publiée d’abord dans les colonnes de Gil Blas, le 29 mai 1887, puis reprise ultérieurement dans le recueil de nouvelles le Rosier de Madame Husson.
Adaptation théâtrale
Boule de Suif a été adaptée, au théâtre, par Oscar Méténier (1859-1913), dans une comédie en 3 actes et 4 tableaux, dont la première représentation eut lieu le 5 mai 1902 au Théâtre Antoine, dirigé par André Antoine (1858-1943), par ailleurs metteur en scène de la pièce. Les décors étaient signés Menessier. On notait dans la distribution : Dumény dans le rôle de Bréville, Matrat dans celui de Loiseau, Luce Colas dans celui de Boule de Suif et Ellen Andrée dans celui de Madame Loiseau.
Le texte de la pièce a été publié, en 1903, chez P. Ollendorff, dans un volume de [6]-87 pages.
Adaptations cinématographiques
Ernst Haycox s’inspirera de la nouvelle pour écrire Stage to Lordsburg, qui déplace l’action aux États-Unis. John Ford en fera le western la Chevauchée fantastique. En France, il faut attendre 1945 pour voir cette nouvelle portée à l’écran. Le scénario d’Henri Jeanson, Louis Hée et Christian-Jaque fait directement référence à la situation de 1939-1945. Le film engagé est un hommage à la patrie et à la Résistance. Cornudet devient le symbole du résistant, défendant et consolant Boule de suif. Le comique n’est pas absent de l’adaptation qui se veut une satire des collaborateurs et des occupants, avec une Boule de suif magistralement incarnée par Micheline Presle.
- 1928 : the Woman disputed (Une femme rejetée), USA, Henry King (muet)
- 1932 : Shangaï Express, USA, Josef von Sternberg (80 minutes)
- 1934 : Pychka, URSS, Mikhaïl Romm (muet)
- 1935 : Maria no Oyuki (Oyuki la vierge), Japon, Kenji Mizoguchi (72 minutes)
- 1939 : Stagecoach (la Chevauchée fantastique), USA, John Ford (97 minutes), film inspiré de Boule de suif
- 1943 : Night Plane from Chungking, USA, Ralph Murphy
- 1944 : The Silent Bell (mademoiselle Fifi), USA, Robert Wise (69 minutes)
- 1945 : Boule de suif, France, Christian-Jaque (103 minutes), sur une adaptation et des dialogues signés Henri Jeanson, avec notamment Micheline Presle
- 1951 : Pékin express, USA, William Dieterle
- 1966 : Stagecoach (la Diligence vers l’ouest), USA, Gordon Douglas (114 minutes)
- 1983 : dans l’an 40, France, TV, Claude Santelli (12 minutes)
- 1986 : Stagecoach (la Chevauchée fantastique), USA, TV, Ted Post (100 minutes)
Adaptation télévisée
Boule de Suif a aussi été adaptée à la télévision, en 1989, dans un téléfilm musical soviétique titré Руанская дева по прозвищу Пышка (Ruanskaya deva po prozvishchu Pyshka), réalisé par Yevgeni Ginzburg et Rauf Mamedov, sur un scénario de Kim Ryzhov, avec notamment Natalia Lapina dans le rôle de Pyshka (Boule de Suif). Note : IMDb rapporte également, au sujet de cette œuvre, un titre anglophone (A Girl from Rouen Nicknamed Doughnut) et un titre francophone (Boule de Suif).
Lien externe
- (fr) Livre audio mp3 gratuit 'Boule de suif' de Guy de Maupassant.
- Guy de Maupassant, Boule de Suif, L’Épave, Découverte, etc., P. Ollendorff, Paris, 1907.
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