Blocus de la bande de Gaza

Blocus de la bande de Gaza

Le blocus de la bande de Gaza désigne le plus récent blocus de la bande de Gaza imposé par Israël et par l'Égypte depuis sa prise de contrôle par le Hamas en juin 2007. Le 14 juin 2007, à la suite d'une lutte de pouvoir entre le Hamas et le Fatah, le Hamas, qui a remporté les élections législatives de janvier 2006, gouverne la bande de Gaza, évinçant totalement le Fatah du territoire[1].

Le Hamas dénonce les accords de sécurité conclus entre l'Autorité palestinienne, Israël et l'Égypte, négociés par Condoleezza Rice en novembre 2005 pour améliorer la liberté de mouvement des Palestiniens et l'activité économique dans la bande de Gaza[2].

Dans sa résolution 1860 du 8 janvier 2009, le Conseil de sécurité des Nations unies demande notamment « que l’aide humanitaire, y compris les vivres, le carburant et les traitements médicaux, puisse être distribuée sans entrave dans tout Gaza » et aux États membres de « prévenir le trafic d’armes et de munitions et [d']assurer la réouverture durable des points de passage »[3], ce que le Ministre des Affaires étrangères turc interprète comme une « demande [de] la levée du blocus dans tous ses aspects » tandis que le représentant israélien déclare que face au « refus [du Hamas] de prolonger la trêve et sa contrebande d’armes, Israël n’avait pas d’autre choix que d’exercer sa légitime défense »[3],[4]. Dans son rapport publié le 2 septembre 2011, la commission d'enquête diligentée par l'ONU suite à l'abordage de la flottille de Gaza estime quant à elle que le blocus est « légitime » et « approprié »[5],[6].

Sommaire

Chronologie des évènements

23 décembre 2004 - 16 décembre 2005 : le Hamas participe aux élections municipales palestiniennes de 2005 et remporte la majorité des sièges dans 7 conseils municipaux sur 9 dans la bande de Gaza et 30 conseils municipaux sur 72 en Cisjordanie[7].

25 janvier 2006- 29 janvier 2006 : le Hamas participe aux élections législatives palestiniennes de 2006, et remporte 76 des 132 sièges du Conseil législatif palestinien[8], entraînant une perte d'influence notable pour l'Autorité Palestinienne.

9 juin : un navire de l'armée israélienne bombarde une plage de Beit Lahia à Gaza faisant 7 morts et 35 blessés dont des 3 enfants, tous d'une même famille qui étaient en train de piqueniquer[9].

7 juin 2007 : une lutte armée se déclenche entre le Fatah et le Hamas.

14 juin : le président de l'autorité palestinienne Mahmoud Abbas dissout le gouvernement d'Ismael Haniyeh et décrète l'état d'urgence[10]. Le Hamas prend le contrôle de la bande de Gaza[11].

15 juin : en une semaine de combats, le bilan est d'au moins 116 morts et 550 blessés selon le CICR[12].

25 juin : des combattants palestiniens attaquent un tank de l'armée israélienne, tuent deux soldats et en capturent un, Guilad Shalit. L'attaque, qui a fait deux morts côté palestinien, est revendiquée conjointement par les Brigades Ezzedine Al-Qassam (branche armée du Hamas), le Comité de résistance populaire et l'Armée de l'islam (groupe créé fin 2005 se revendiquant du courant d'al-Qaida)[13].

Conséquences

Le cabinet de sécurité israélien déclare la bande de Gaza territoire hostile, boucle sa frontière avec Gaza, au motif que le Fatah n'est plus garant de la sécurité, et, en vertu de l'article 23 de la Quatrième Convention de Genève[Note 1],[14]impose un blocus sur le territoire, qui interdit une partie des exportations, permettant toutefois des actifs suffisants pour éviter une crise humanitaire ou de santé[15],[16]. D'après Eva Joly, sur les 6000 produits considérés comme d'importance vitale par l'ONU, Israël ne tolère l'entrée dans la bande de Gaza que de 81 d'entre eux ; elle affirme que trois quart des bâtiments détruits au cours du dernier conflit n'ont pas pu être reconstruits[17]. Israël n'a jamais établi de liste exhaustive des produits interdits, c'est la Matpash, une autorité militaire israélienne en charge des questions économiques et sécuritaires, qui les sélectionne hebdomadairement. Seuls trente à quarante produits de première nécessité sont mentionnés dans un liste « officielle »[18].

L'Égypte a également fermé sa frontière lorsque les combats entre le Fatah et le Hamas ont commencé 7 juin 2007, craignant un transfert de militants du Hamas sur son territoire.

D'après le rapport de la Commission européenne sur la bande de Gaza, publié en mars 2009, estime « les dommages causés par le blocus sur l'économie du territoire, tous secteurs économiques et sociaux confondus, à 514,3 millions d'euros. Le PIB du territoire palestinien a chuté de 5% en 2006 à 3% en 2007 et 2,7% en 2008[19]. »

Devant le Conseil de sécurité de l’ONU Daniel Carmon, l’ambassadeur adjoint d’Israël affirme qu’« Il n’y a pas de crise humanitaire à Gaza »[20]. Cependant, dans un rapport publié le 27 mai, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (BCAH) de l’ONU dénonce « des entraves à l’action humanitaire et réclame la levée du blocus »[21].

Concernant l'insécurité alimentaire, elle touche 61% soit 1,5 million de gazaouis[22], en 2009, contre 56% en 2008, selon la FAO (Food and Agriculture Organisation) alors que la Commission européenne souligne que plus de 90% de la population dépend de l'aide alimentaire des agences onusiennes[23].

Dans ce contexte, des organisations non gouvernementales comme Free Gaza Movement et l'İnsani Yardım Vakfı, (IHH : Fondation pour le secours humanitaire), une ONG turque, tentent de briser le blocus en envoyant de nombreux navires dans la bande de Gaza. Cinq expéditions d'aide avaient été autorisées auparavant à passer avant la guerre de Gaza de 2008-2009, mais toutes les expéditions qui ont suivi l'opération Plomb durci ont été bloquées par les forces israéliennes. En mai 2010, sous la coordination de Free Gaza, l'organisation Perdana Global Peace de Malaisie et la Campagne européenne pour mettre fin au siège de Gaza décident d'expédier huit cargos d'aide humanitaire à Gaza. Ce convoi transporte 10000 tonnes de matériel médical, de maisons préfabriquées, de chaises roulantes électriques, de fournitures scolaires et de ciment, matériau dont les autorités israéliennes interdisent la livraison dans la bande de Gaza, selon les organisateurs[24].

Les 27 ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne réitèrent, le 14 juin, leur appel à la levée du blocus, estimant celui-ci « inacceptable », que « la politique continue de fermeture est inacceptable et politiquement contreproductive » et la situation à Gaza « insoutenable ». Ils lancent un appel « à une ouverture immédiate, soutenable et inconditionnelle des points frontières pour le passage de l'aide humanitaire, des marchandises commerciales et des personnes de et vers Gaza, incluant les marchandises de la Cisjordanie »[25],[26].

Réactions

Richard Falk a commenté ainsi la décision israélienne : « Le blocus que subissait déjà depuis dix-huit mois la population de Gaza au moment où Israël a lancé ses attaques équivalait à une punition collective, en violation des articles 33 et 55 de la quatrième convention de Genève qui réglementent la conduite d’une puissance occupante vis-à-vis des populations civiles. Cette politique a été largement condamnée comme un crime contre l’humanité et un grave manquement au droit international humanitaire. Elle a provoqué de sérieuses déficiences nutritionnelles et des désordres psychiques au sein de la population, la rendant particulièrement vulnérable à l’opération Plomb durci[27]. »

Pour Noam Chomsky, les Palestiniens sont punis par Israël et les États-Unis pour avoir commis « un crime véritablement abominable : [avoir] voté « de la mauvaise manière » au cours d'une élection libre »[28].

Le 2 juin 2010, dans la foulée de l'assaut israélien meurtrier sur la flottille de la liberté qui a tenté vainement de briser ce blocus, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a demandé à Israël de « lever immédiatement » ce blocus qui est « contre-productif, intenable et immoral »[29].

Suite à l'abordage de la flottille pour Gaza, Alain Gresh déclare qu'« il y a quelques années, le premier ministre israélien Itzhak Rabin confessait que son rêve était de voir sombrer Gaza dans la Méditerranée. En 2010, cet espoir est en train de devenir réalité. Malgré les condamnations de l’opinion internationale, ce territoire semble destiné à poursuivre sa mort lente[30]. »

Selon le Comité international de la Croix-Rouge, « pour sortir le million et demi de Gazaouis de la situation précaire dans laquelle ils se trouvent, l’assistance humanitaire à elle seule ne suffit pas. La seule solution durable consiste à lever le blocus »[31].

Le conseil des Global Elders, dont fait partie Nelson Mandela, condamne comme « complètement inexcusable » l'abordage de la flottille pour Gaza par l'armée israélienne qui a fait plusieurs morts civils le 31 mai 2010 et demande la fin du blocus de Gaza, rappelant que la moitié de son million et demi d'habitants a moins de 18 ans et que le blocus est « internationalement illégal et contre-productif car favorisant les extrémistes »[32].

Le 14 novembre 2011, en réponse à la demande de levée du blocus par la France, Avigdor Lieberman déclare à des députés israéliens qu'il n'a « pas d'objection à lever le blocus demain du moment qu'il y a une force pour inspecter tout ce qui entre dans la bande de Gaza et empêcher l'activité terroriste ». Il aurait dit à Alain Juppé en visite en Israël en juin 2011 : « Au lieu que nous le fassions nous-mêmes, envoyez la Légion étrangère française » puis de rajouter « N'envoyez pas des filles avec des branches d'olivier », faisant référence à une des flottilles d'activistes français ayant tenté de relier Gaza malgré le blocus[33],[34].

Allégement du blocus par l’Egypte

Article connexe : Flottille de la Liberté II.

Le 25 mai 2011, l'Égypte a annoncé la réouverture de manière permanente du terminal routier de Rafah, servant de point de passage avec la bande de Gaza pour «  alléger le blocus imposé par Israël ». l'État hébreu se dit «  inquiet  » du rapprochement entre l'Égypte et l'Iran, et par « le rehaussement des relations » entre l'Égypte et le Hamas »[35]

Notes et références

Notes

  1. Elle concerne la protection des civils en temps de guerre et indique clairement que si les marchandises entrant sur le territoire ennemi sont susceptibles de contribuer à l'effort de guerre de l'ennemi, elles peuvent être bloquées

Références

  1. La prise du pouvoir par le Hamas à Gaza
  2. (en)Jeruslem Post
  3. a et b Résolution 1860 du Conseil de sécurité
  4. « La résolution 1860 de l'ONU appelant à un cessez-le-feu à Gaza », dans Le Point, 9 janvier 2009 [texte intégral (page consultée le 9 février 2009)] .
  5. http://www.lemonde.fr/international/article/2011/09/01/flottille-pour-gaza-l-onu-juge-le-blocus-legal-mais-critique-le-raid-israelien_1566630_3210.html#xtor=AL-32280184
  6. (en) http://www.un.org/News/dh/infocus/middle_east/Gaza_Flotilla_Panel_Report.pdf
  7. http://www.elections.ps/template.aspx?id=351&sndx=5
  8. http://news.bbc.co.uk/2/hi/middle_east/4650196.stm
  9. (en) « Death on the beach: seven Palestinians killed as Israeli shells hit family picnic », The Guardian, 10 juin 2006.
  10. « Gaza : Abbas limoge le gouvernement et décrète l'état d'urgence », TF1 News, 14 juin 2007.
  11. « Le Hamas contrôle la bande de Gaza, le président Abbas a décrété l'état d'urgence », LeMonde.fr avec l'AFP et Reuters, 15 juin 2007.
  12. Gaza et Cisjordanie – CICR Bulletin n° 22 / 2007
  13. P. S.-P., « Cette Armée de l'islam issue du clan Doghmosh », Le Figaro, 14 octobre 2007. Consulté le 12 septembre 2009
  14. (en)The Sydney Morning HeraldFlotilla sailed for confrontation,BREN CARLILL,2juin 2010
  15. (he)Réunion du cabinet de sécurité du 19 septembre 2007
  16. (en)Abbas’s Premier Tells Israel to Reopen Gaza,ISABEL KERSHNER, 14 décembre 2007
  17. http://evajoly.blogs.nouvelobs.com/archive/2010/06/03/retour-sur-le-blocus-de-gaza-et-l-assaut-contre-la-flotille.html
  18. Anne-Laurence Gollion, « Cinq questions sur le blocus israélien de Gaza », L'Express. Mis en ligne le 3 juin 2010, consulté le 26 janvier 2011.
  19. Isabelle de Foucaud, « Gaza : l'économie du blocus israélien en chiffres », Le Figaro. Mis en ligne le 2 juin 2010, consulté le 26 janvier 2011.
  20. http://www.rtl.fr/actualites/article/gaza-que-s-est-il-passe-lors-de-l-assaut-israelien-5941745941
  21. Marion Solletty, « Les conséquences du blocus de la bande de Gaza », Le Monde. Mis en ligne le 1er juin 2010, consulté le 26 janvier 2011.
  22. Le Monde, « Bande de gaza : la réalité du Blocus » 2 juin 2010, Marion Solletty
  23. Gaza : le poids économique du blocus israélien
  24. http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/06/02/le-rachel-corrie-vient-defier-le-blocus-naval-de-gaza_1366434_3218.html
  25. (fr) Le blocus de Gaza "insoutenable" pour l'UE qui propose 1 solution Bruxelles2, 14 juin 2010
  26. (en) Council conclusions on Gaza, sur le site du Conseil de l'Union européenne.
  27. Richard Falk, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, « Nécessaire inculpation des responsables de l’agression contre Gaza », Le Monde diplomatique, mars 2009.
  28. « [...] Palestinians committed a truly heinous crime: they voted "the wrong way" in a free election » Noam Chomsky, « "Exterminate all the Brutes": Gaza 2009 », 6 juin 2009.
  29. http://www.europe1.fr/International/L-ONU-exige-la-levee-du-blocus-de-Gaza-207240/
  30. http://blog.mondediplo.net/2010-06-02-Que-Gaza-sombre-dans-la-Mediterranee
  31. Blocus de Gaza : pas une année de plus, Icrc.org, 2010-06-14. Consulté le 2010-06-01.
  32. (en) Nobel-winning Elders deplore Gaza flotilla attack, The Hindu, 31/5/2010
  33. AFP, « Lieberman prêt à lever le blocus de Gaza si la France envoie la Légion », dans Libération, 14 novembre 2011 [texte intégral (page consultée le 15 novembre 2011)] .
  34. (en) AFP, « Send Legion to Gaza, Israeli minister tells France », dans France 24, novembre 2011 [texte intégral (page consultée le 15 novembre 2011)] .
  35. http://www.romandie.com/news/n/_Israel_inquiet_de_la_reouverture_de_la_frontiere_entre_l_Egypte_et_Gaza290420111304.asp

Annexes

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