Korban haomer

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Le fauchage de lomer au kibboutz Guivat Hayim Meou'had, entre 1935 et 1945
Sources halakhiques
Textes dans la Loi juive relatifs à cet article
Bible Lévitique 23:9-16
Mishna Talmud de Babylone Menahot 65a-68b
Sefer Hamitzvot asse n°44
Sefer HaHinoukh mitzva n°302

Le korban ha'omer (hébreu : קורבן העומר « offrande de lomer ») ou min'hat ha'omer (hébreu : מנחת העומר « oblation de lomer ») est une offrande en oblation collective dun omer dorge, réalisée à lépoque des Temples au « lendemain du chabbat ». Le jour au cours duquel elle avait lieu et qui marque le début du décompte de lomer, est appelé yom hanef (hébreu : יום הנף « jour du balancement ») dans la littérature rabbinique.

De nombreuses controverses sur divers points de cette prescription, comme la nature de lomer ou la signification du « lendemain du chabbat », ont abouti à des différences de pratique significatives entre Pharisiens et Boéthusiens, juifs rabbanites et non-rabbanites ainsi que juifs et chrétiens.

Sommaire

Le korban ha'omer dans les sources juives

Dans la Bible hébraïque

Loffrande de la gerbe est prescrite aux Israélites lors du passage en revue des convocations saintes, alors quils stationnent dans le désert : ils devront, après être entrés en possession du pays de Canaan, prélever chaque année, « au lendemain du chabbat », un omer sur les prémices de leur nouvelle récolte pour loffrir au prêtre. Celui-ci le balancera afin de rendre la récolte propice.
Cette cérémonie saccompagne doffrandes particulières et marque le début du décompte des sept semaines qui séparent ces offrandes de celles de la fête de Chavouot. Elle autorise en outre les Israélites à consommer les produits de la nouvelle récolte[1].

Dans la littérature sur lère du Temple

À peine esquissé dans la Bible, le korban ha'omer fait lobjet dun rituel hautement organisé à lépoque du second Temple, abondamment caractérisé dans le dixième chapitre du Pessiktot.

Linterprétation rabbinique de lomer

Alors que la Septante traduit omer par « poignée » et les auteurs chrétiens ultérieurs par « gerbe », les rabbins considèrent quil sagit dune unité de mesure définie en Exode 16:36 comme un dixième depha (équivalant à environ 4 kilogrammes)[2]. Bien que la Bible ne précise pas le type de céréale à offrir, ils enseignent quil ne peut sagir que dorge[3]. Le « lendemain du chabbat » au cours duquel loffrande a lieu est, selon eux, le « lendemain de la fête » (du premier jour des Azymes), soit le 16 nissan[4].

Lomer est, selon Rabbi Akiva, un tribut offert à Dieu après Pessa'h afin dassurer une récolte abondante dans les champs au moment celle-ci commence[5]. Selon le Midrash, lhomme rembourse au moyen de cette modeste mesure la manne, dont chaque Israélite avait consommé un omer par jour. Cest par le mérite de cette prescription que Dieu aurait promis le pays de Canaan à Abraham, que les Israélites auraient été sauvés au temps de Midian au temps de Gédéon, des Assyriens au temps dÉzéchias, des Babyloniens au temps dÉzéchiel et des Amalécites au temps de Haman. Cest aussi par la vertu de lomer que la paix reviendrait dans les ménages, puisque loffrande de jalousie prescrite en Nombres 5:15 consiste en un dixième depha dorge[3].

Les interprétations non-rabbiniques

Bien que la pratique juive actuelle soit dérivée de linterprétation donnée par les rabbins au « lendemain du chabbat », celle-ci était loin dêtre la seule en cours à lère du second Temple. Son calendrier, basé sur lobservation des conjonctions lunaires, nétait pas accepté par tous[6] et si « Shabbat » a certes le sens de fête dans Lévitique 25:2 et Lévitique 25-46, il pourrait désigner le dernier jour de la fête des azymes ou être interprété selon le sens plus courant du chabbat hebdomadaire[7].

Linterprétation du lendemain de chabbat comme lendemain du premier jour de la fête des azymes était celle de la Septante, de Flavius Josèphe[8] et de Philon dAlexandrie[9]. Cependant, le Livre des Jubilés ainsi que la version syriaque de Lévitique 23:11 et 23:15 prescrivent de réaliser loffrande au lendemain du dernier jour[7]. Les Boethusiens affirmaient quil avait lieu au lendemain du chabbat pascal car « Moïse, aimant les enfants dIsraël, a[vait] voulu leur donner un jour saint étendu en annexant la fête de Chavouot (qui a lieu sept semaines après le jour de loffrande) au chabbat »[10].

Le rituel à lère du second Temple

Le fauchage de lomer doit être idéalement fait de nuit, ainsi que le décompte des jours écoulés depuis ce fauchage[11],[12].

Trois mesures dorge doivent être fauchées par trois hommes, équipés chacun dune faucille et dun panier ; le fauchage de lomer, étant réalisé en un temps fixé, a priorité sur linterdiction de faucher à chabbat[12] et les Sages ont décidé, contre lavis de Rabbi Ishmaël et Rabbi Hanina Segan Hacohanim, que la procédure à suivre était la même, que le 16 nissan ait lieu à chabbat (cette configuration est impossible dans le calendrier hébraïque actuel[13]) ou en semaine[14].

Lomer est prélevé sur les épis mûrs de la nouvelle récolte, idéalement près de Jérusalem mais on peut le prendre ailleurs si lorge na pas encore mûri (le champ doit cependant appartenir à un Juif[15]). La veille de Pessa'h, les émissaires du Sanhédrin sortent dans les champs et lient les sommets des épis dorge encore attachés au sol, afin den faciliter le fauchage. Le lendemain, les gens des alentours se rendent en grande pompe à cet endroit. Chaque faucheur leur demande deux fois si le soleil sest couché, deux fois sil peut faucher avec cette faucille quil tient, deux fois sil peut récolter dans ce panier et deux fois sil peut le faire ce chabbat ; il leur demande alors trois fois lautorisation de faucher et, à chaque demande, on lui répond trois fois par laffirmative, tout ce cérémonial ayant pour but de montrer aux Boethusiens que leur opinion sur « le lendemain du chabbat » nétait pas acceptée[16].

Les épis fauchés sont rangés dans les paniers et menés dans la cour du Temple ; on les bat avec des tiges humides pour en faire tomber. On les broie et on les empile dans un tuyau percé pour les torréfier. On les moud et on les étend au vent pour en nettoyer la balle. On en extrait, après treize tamisages, le dixième de lepha (soit un omer tout rond). Le reste de la farine peut être racheté et consommé par le tout-venant, après avoir prélevé les dîmes. Lomer est mélangé à de lhuile et des aromates ; on le place dans les mains tendues du prêtre qui lagite à lorient de lautel, davant en arrière puis de haut en bas pour conjurer les vents mauvais et les rosées néfastes. Il le présente ensuite au coin occidental-méridional de lautel et, après que loffrande supplémentaire et lagneau en holocauste ont été offerts, en prend une poignée quil fait brûler. Le reste de lomer peut être consommé par les prêtres[3],[17].

À lépoque du Temple, loffrande de lomer rend le hadash permis à la consommation dans tout le pays mais en pratique, seuls les habitants de Jérusalem et des alentours en consomment après loffrande de lomer ; les habitants des cités plus éloignées, ignorant à quel moment sest déroulée loffrande, attendent jusquà la mi-journée. Après la destruction du Temple, Rabban Yohanan ben Zakkaï décrète le hadash interdit pour tous pendant toute la journée, en souvenir du Temple[18].

Observance du korban haomer

Le second Temple ayant été détruit, loffrande de lomer ne peut plus avoir lieu dans les courants qui se réclament du judaïsme, quils en suivent ou non linterprétation rabbinique (cette contingence ne concerne cependant pas le samaritanisme, un mosaïsme non-juif qui continue à pèleriner sur le mont Garizim). Cependant, la prescription du décompte de lomer et la prohibition du hadash qui en dépendent sont encore observées de nos jours et suscitent des divergences entre ces différents courants.

Dans le judaïsme rabbinique

La tradition rabbinique situant le jour de loffrande de lomer au lendemain de Pessa'h, le décompte de lomer est initié en ce jour, en terre dIsraël comme en diaspora et ceci bien que la diaspora observe un second jour férié. En effet, commencer le décompte un jour plus tard reviendrait à déplacer Chavouot dun jour alors que lon dispose, contrairement à lère du second Temple, dun calendrier fondé sur des calculs astronomiques laissant peu de place au doute[19].

Le hadash est en revanche interdit jusquà la nuit du 18 nissan[20] car sa proscription a force de loi biblique, que lon se trouve[21].

Dans les traditions non-rabbiniques

Les Karaïtes, membres dun mouvement scripturaliste et les Samaritains, adeptes dun mosaïsme non-juif, ont adopté une position similaire à celle des Boethusiens, commençant de ce fait le décompte lors du premier dimanche qui suit Pessa'h[22],[23].
Les Beta Esraël dÉthiopie, dépositaires dun judaïsme pré-rabbinique (dont la plupart des membres se sont convertis au judaïsme orthodoxe), semblent se baser sur la traduction syriaque de la Bible, commençant le décompte au lendemain du septième jour de Pessa'h[7],[24].

Loffrande de lomer en Israël

Délaissée pendant des siècles, loffrande de lomer redevint une fête champêtre dans le mouvement pionnier du kibboutz qui la célébrait en sinspirant des sources bibliques et mishnaïques. Hommes, femmes et enfants se rendaient dans les champs en procession, fauchaient lomer et le ramenaient dans la salle commune, il faisait partie des décorations de Pessa'h[25]. Cette cérémonie tomba en désuétude dans les années 1970s, du fait du désintérêt des nouvelles générations et des nouvelles technologies agricoles qui, pour être plus efficaces, ne permettaient pas de maintenir le lien romantique de lhomme à la terre[26].

Notes et références

  1. Lévitique 23:9-16 ; voir aussi Josué 5:11
  2. (he) Sefirat Haomer : heibetim latkoufa oulahalakha
  3. a, b et c Pessikta Rabbati (éd. Ish-Shalom), piskat ha'omer (n° 18) – cf. T.B. Menahot 68b et Vayikra Rabba 28:1-6
  4. Meguilat Taanit (éd. Lichtenstein), scholion sur le 8 nissan ; Sifra Emor, parasha 10, chap. 12cf. T.B. Menahot 65a-b
  5. T.B. Roch Hachana 16a
  6. Cf. Jubilés 6:22 & 32, 16:3, cité in Jewish Encyclopedia (2) 1906
  7. a, b et c Jewish Encyclopedia (2) 1906
  8. Antiquités, livre 3, chapitre 10, paragraphe 5, cité in Jewish Encyclopedia (2) 1906
  9. De Septenario, §20, cité in Jewish Encyclopedia (2) 1906
  10. T.B. Menahot 65a-b, cité in Jewish Encyclopedia (2) 1906
  11. Mishna Sota 2:1
  12. a et b cf. Mishna Menahot 10:9
  13. Choulhan Aroukh Orah Hayim 428:1
  14. Mishna Menahot 10:1
  15. T.B. Roch Hachana 13a
  16. Mishna Menahot 10:2-3 ; voir aussi T.B. Roch Hachana 22b
  17. Mishna Menahot 10:4-5
  18. Mishna Menahot 10:6
  19. Ran al HaRif, Soucca 47a ; Sefer Aboudraham, seder tefillot haPessa'h, p.242 ; Ritva sur T.B. Roch Hachana 18a ; cités in Encyclopedia Talmudit, Yom tov sheni shel galouyot, Bar Ilan's Responsa Project, 2009 
  20. Choulhan Aroukh Orah Hayim 489:10
  21. Choulhan Aroukh Yore Dea 293:1 & Biour HaGr"a ad loc.
  22. Shavuot (Feast of Weeks) sur Karaite Korner. Consulté le 2 mai 2011
  23. Samaritans Shavuot sur Shomronim.com (the Samaritans Community in Israel). Consulté le 2 mai 2011
  24. (en) Wolf Leslau, Falasha Anthology : Yale Judaica Series, vol. 6, New Haven & London, Yale University Press, 1951 (ISBN 0-300-03927-1), p. xxxi 
  25. Kibbutz Festivals sur Jewish Virtual Library. Consulté le 11 mai 2011
  26. (en) Shalom Lilker, Kibbutz Judaism : a new tradition in the making, Associated University Presses, 1982 (ISBN 978-0845347409), p. 179-182 

Annexes

Bibliographie


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Korban haomer de Wikipédia en français (auteurs)

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