Expédition britannique en Éthiopie (1868)

Expédition britannique en Éthiopie (1868)
Expédition britannique en Éthiopie
Magdala burning.jpg
L'incendie de la forteresse de Magdala
Informations générales
Date 1868
Lieu Province du Wello, Empire éthiopien
Casus belli Refus de Téwodros II de libérer des prisonniers européens
Issue Défaite et suicide de Théodoros
Belligérants
Forces de Téwodros II Union flag 1606 (Kings Colors).svg Royaume de Grande-Bretagne
Kassa Mercha
Pertes
700 morts

L'Expédition britannique en Éthiopie de 1868 était une expédition punitive menée par les forces armées de l' Empire britannique contre le Negusse Negest de l'Empire éthiopien Téwodros II. Ce dernier retenant captifs plusieurs missionnaires et deux représentants du gouvernement britannique, Londres lance un corps expéditionnaire sur plusieurs milliers de kilomètres à travers un terrain montagneux dépourvu de routes. L'historien Harold G. Marcus a décrit cet évènement comme "une des plus chères affaires d'honneur dans l'histoire"[1]. L'expédition, soutenue par Kassa Mercha (futur Yohannes IV), favorable à la chute du Negusse Negest, s'achève par la défaite et le suicide de Tewodros II.

Sommaire

Contexte

Britannia menace le "geolier" Théodore

À partir d'octobre 1862, la position de l'Empereur Théodore devient de plus en plus précaire : la majorité de l'Éthiopie était en révolte contre son souverain, à l'exception d'une petite région s'étendant du Lac Tana jusqu'à l'est de sa forteresse à Magdala. Dans une tentative finale pour réaffirmer sa légitimité, Théodore demanda de l'aide aux puissance européennes de Russie, Prusse, Autriche, France et Grande-Bretagne[2]. Le gouvernement français répondit par l'entremise d'une mission lazariste dans l'Hamasien, aux confins du royaume de Théodore. Cependant, le premier européen à croiser le roi après l'absence de réponse, fut Henry Stern, un missionnaire britannique, qui avait mentionné dans un livre les origines modestes du roi. Ce fait bien que dépourvu d'insultes s'avéra dangereux alors que le roi insistait sur sa descendance de la dynastie salomonide et Théodore manifesta sa rage en enchainant le missionnaire et faisant battre à mort les serviteurs de Stern[3].

Le consul britannique Charles Duncan Cameron, aux côtés de l'Abouna Salama et un groupe de missionnaires basés à Gafat, intercédèrent tous en faveur de la libération du prisonnier ; si les efforts furent sur le point d'aboutir le 2 janvier 1864 Cameron fut lui aussi capturé, et enchaîné. Peu après, Tewodros ordonna que la plupart des Européens présents dans le camp royal soient eux aussi enchaînés[4].

Le gouvernement britannique mandata Hormuzd Rassam pour négocier une issue à cette crise diplomatique, mais la sécurité dans le Tigré, l'indécision du roi, et les palinodies sur les instructions à donner à l'envoyé retardèrent l'arrivée de Rassam auprès du roi jusqu'en janvier 1866[5]. Dans un premier temps, Rassam sembla avoir réussi en recevant les faveurs de l'empereur qui lui permit de s'établir à Qorata, sur les rives méridionales du Lac Tana, lui envoyant des présents et libérant Cameron, Stern, et les autres otages dans le campement. Toutefois, pendant cette période C.T. Beke, arriva à Massawa, et transmis des lettres de familles d'otages au roi Théodore et demandant leur libération. Cette demande sema la confusion auprès du roi suspicieux[6]. et son attitude devint de plus en plus erratique, alternant entre gestes d'amitié et des accusations paranoïaques voire violentes. Finalement, Rassam finit lui aussi prisonnier et transféré avec les autres vers la forteresse de Magdala (juin 1866). Les négociations se poursuivirent jusqu'à l'annonce de la reine Victoria de l'envoi d'une expédition militaire le 21 août 1867.

La campagne militaire

L'armée des Indes, sous le commandement du Lieutenant-Général Sir Robert Napier composa l'essentiel du corps expéditionnaire. Doté de 13 000 soldats britanniques et indiens, et de 26 000 suiveurs et de près de 40 000 animaux, incluant des éléphants. Les premiers ingénieurs débarquèrent à Zula au sud de Massawa, où ils commencèrent la construction d'un port pendant que des éclaireurs dirigés par Sir William Lockyer Merewether, se dirigèrent vers le lit asséché de la Kumayli River jusqu'à Senafe.

Merewether transmit alors deux lettres, la première demandant à l'Empereur de libérer les otages fut détruite avant sa réception, la seconde adressée au peuple éthiopien visait à préciser le but de l'expédition des Britanniques dans le but de la libération des otages. Napier arriva à Zula le 2 janvier 1868, où il finalisa sa stratégie avant d'arriver à Senafe.

Les forces Britanniques mirent 3 mois à atteindre la forteresse de l'empereur à Magdala. Arrivés à Antalo, Napier parlementa avec le Ras Cassa (le futur empereur Yohannes IV), et gagna son soutien précieux pour franchir les plateaux éthiopiens sans hostilité locale. Le 17 mars, l'armée atteignit le Lac Achangi et dut désormais se contenter de rations allégées. Pendant ce temps, l'Empereur devait faire face à la défection de ses soldats et à l'hostilité des populations lorsqu'il décida d'aller à la rencontre des troupes britanniques.

Les troupes se rencontrèrent le 9 avril, jour du Vendredi saint, en dehors de Magdala et les forces britanniques mirent en déroute les défenseurs éthiopiens. Au bout des deux jours qui suivirent, les otages furent libérés et l'Empereur préféra se suicider plutôt que d'avoir à se rendre.

Les troupes britanniques dans leur marche de retour vers Zula


Conséquences

Les britanniques rentrèrent dans la capitale et Sir Robert autorisa ses troupes à piller Magdala, et aussi ses églises, comme mesure de représailles, avant de repartir d'Éthiopie sans recevoir de marque de gratitude des populations locales[7].

À Senafe, les Britanniques récompensèrent le Ras Cassa, notamment en armements, ce qui favorisa son accession au pouvoir. Sir Robert Napier rentra en Angleterre par le Canal de Suez, et, bien que son expédition ait été qualifiée de "réparation de point d'honneur le plus onéreux de l'histoire", fut fait Baron Napier de Magdala par la Reine Victoria.

Un tabot, caché dans une riche custode, est porté en procession par un prêtre orthodoxe éthiopien lors de la célébration de l' épiphanie

Parmi le butin emporté par les Britanniques figuraient de nombreux manuscrits, et des accessoires religieux spécifiques du rite orthodoxe éthiopien : les tabots, reproductions ornées des tables de la Loi, faites de pierre ou de bois d'acacia. L'apparition de ces objets de culte, profondément vénérés en Éthiopie, chez les antiquaires et dans les musées anglais suscita un grand intérêt chez les historiens des religions - cependant que leur vol resta longtemps un sujet de rancœur dans la population éthiopienne. Certains tabots, ainsi que la couronne de Théodore, furent rendus ultérieurement à l'Éthiopie.

Notes

  1. Harold G. Marcus, The Life and Times of Menelik II: Ethiopia 1844-1913, 1975 (Lawrenceville: Red Sea Press, 1995), p. 32
  2. Sven Rubenson, King of Kings: Tewodros of Ethiopia (Addis Ababa: Haile Selassie I University, 1966),p. 84
  3. Crummey, Priests and Politicians, p. 135
  4. Crummey, Priests and Politicians, p. 137. A l'exception d'un groupe d'artisans allemands qui restaient en bons termes avec l'Empereur et ne fut jamais menacé d'emprisonnement.
  5. Crummey, Priests and Politicians, p. 138
  6. Alan Moorehead, The Blue Nile, revised edition (New York: Harper and Row, 1972), pp. 232f
  7. Moorehead, The Blue Nile, pp. 309f

Documents historiques

  • Henry Blanc, Ma captivité en Abyssinie : avec des détails sur l'empereur Théodore, traduit par Mw Arbousse-Bastide, Société des traités religieux, Paris, 1870 [lire en ligne]
  • Henry Blanc, Les captifs de Théodoros, d'après la relation du Dr Blanc, traduit et abrégé par Ferdinand de Lanoye, Hachette, Paris, 1869 [lire en ligne]
  • Charles Bussidon, Abyssinie et Angleterre (Théodoros) : perfidies et intrigues anglaises dévoilées, souvenirs et preuves, A. Barbier, Paris, 1888 [lire en ligne]

Liens externes


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