- Willi Münzenberg
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Willi Münzenberg (né le 14 août 1889 à Erfurt - mort en 1940 à Saint-Marcellin) est un activiste communiste qui établit de nombreuses associations dans le but de favoriser la cause de l’URSS. Il est l'un des propagandistes les plus influents du parti communiste allemand pendant la république de Weimar. Certains analystes lui prêtent même une forte influence auprès des intellectuels occidentaux d’avant guerre. Münzenberg finit néanmoins par rompre avec le communisme en raison des grandes purges de Staline durant les années 1930.
Sommaire
Biographie
Jeunesse
Münzenberg est né le 14 août 1889 à Erfurt en Thuringe. Il est le fils d’un aubergiste, et grandit dans la pauvreté. Il commence son engagement au parti social-démocrate allemand (SPD). Personnage brillant il devient rapidement dirigeant de la jeunesse du parti. Lorsque le parti se fissure entre modérés socialiste et radicaux plus communistes, Münzenberg se range au côté de ces derniers. Pendant la première guerre mondiale, il refuse de s’engager dans l’armée allemande. Il s’enfuit à Zurich où il reste une majeure partie de la guerre. Il rencontre sur place Lénine avec qui il se lie d’amitié. Le futur leader repère en lui de grandes qualités de propagandiste. Expulsé par la Suisse en 1917, il rejoint le mouvement spartakiste. En 1918 Münzenberg est un des fondateurs du parti communiste allemand. Il est aussi le chef des jeunesses internationales communistes et en est le délégué à la deuxième internationale communiste en 1920.
Carrière politique
Débuts de propagandiste
Après que les bolchéviques ont pris le pouvoir, il part pour Moscou en 1921, répondant à l’appel de Lénine. Celui-ci lui demande d’organiser la propagande. Son premier succès majeur est de collecter de l’argent et des vivres pour les victimes de la famine russe de 1921.Pendant la république de Weimar, il acquiert la réputation d’un brillant propagandiste. En 1924 Münzenberg est élu comme député communiste au Reichstag et siège jusqu'à l’arrivée d’Hitler au pouvoir en 1933. Il est un des seuls chefs communistes d’origine ouvrière ce qui lui adonne un prestige important. Il lance le Journal illustré des travailleurs allemands qui devient le journal socialiste le plus couramment lu d’Allemagne.
Münzenberg et les intellectuels d'occident
En plus de cela, Münzenberg travaille secrètement avec le Komintern et la police secrète soviétique dans le but de faire progresser la cause communiste à l’étranger. D’après plusieurs analystes la stratégie de Münzenberg consiste à imposer le communisme comme la seule véritable forme d’opposition au fascisme. Pour cela il manipule des intellectuels et artistes occidentaux qu'il appelle ses innocents, à savoir: Dos Passos, George Grosz, Malraux, Gide, Brecht, Hemingway, Aragon, Sinclair Lewis, Dashiell Hammet. L’essayiste Philippe Muray fait de lui une description qui mêle critique et admiration « Manipulateur infatigable, écrit Muray, de tous les compagnons de route du bolchévisme. C’est lui, le maître d’œuvre du Soviéthon. Lui, le violoniste génial qui a su faire vibrer le stradivarius de la Vertu à travers l’Europe. » Stephen Koch affirme que Münzenberg met en œuvre l'idée de Staline. « Son objectif, écrit Koch, était de susciter chez les Occidentaux non communistes et bien pensants le préjugé politique qui allait dominer toute l’époque : la conviction que toute opinion favorable à la politique étrangère de l’union soviétique était fondée sur les principes de l’honnêteté la plus élémentaire. » Pour l’historien François Furet c’est « le grand chef d’orchestre du ‘‘compagnon de route’’ figure typique de l’univers communiste ». Furet cite le portrait que Manès Sperber fait de lui. « Münzenberg poussait des écrivains, des philosophes, des artistes de tout genre à témoigner, par leur signature, qu'ils se plaçaient au premier rang de combattants radicaux […] constituait ainsi des caravanes d'intellectuels qui n'attendaient qu'un signe de lui pour se mettre en route ; il choisissait aussi la direction. » Certaines sources affirment (voir article École de Francfort) qu’il aurait eu une influence dans la création de l'Ecole de Francfort. Ces théories peuvent être objets de controverses.
Lutte contre les pays occidentaux et fascistes
Münzenberg fonde de nombreuses organisations telle la ligue mondiale contre l’impérialisme, ou encore le fonds d’aide international aux travailleurs et « l’international labor defense » aux états unis, dans le but de propager les idées communistes. Il envoie un agent du Komintern, Otto Katz, aux Etats Unis pour soutenir des organismes pro communistes et anti nazi (Katz fondera plus tard la ligue antinazi d’Hollywood avec Dorothy Parker). Dans le but d’obscurcir ses opérations, Münzenberg crée de nombreuses organisations de façade qui en contrôlent d’autres. Les organismes de renseignement de l’ouest et des états fascistes utilisent le terme de « Münzenberg Trust ou compagnie » pour désigner ces différents organismes. Celui-ci profite des ces entreprises pour faire des investissements économiques. Il profite ainsi de la vie de luxe ce qui lui vaut le surnom de « Millionnaire rouge »
Après avoir supervisé le traitement de l’affaire Sacco et Vanzetti par le Kominterm, Münzenberg est en charge de la ligue contre l’impérialisme fondée à Bruxelles en 1927. Il parvient ensuite à son plus grand succès : il organise à Londres un contre procès au cours duquel il soutient la thèse que l’incendie du Reichstag est un fait du aux Nazis. Avec son personnel il parvient à fabriquer des preuves assez convaincantes pour qu’elles soient acceptées par tous les historiens jusqu'en 1960. A cette période le journaliste Fritz Tobias rouvre la controverse en démontrant que les preuves de Münzenberg sont fausses. Il prouve que les tunnels qui avaient du servir de passage au nazis selon lui n’étaient que des conduites d’eau. Münzenberg vit de manière intermittente à Paris entre 1933 et 1940. Il a été suggéré que pendant ses années en France, il aurait eu un rôle dans le recrutement de Kim Philby (un agent double britannique à la solde du KGB), il n’y a cependant aucune preuve à cela. Les arguments de cette théorie consistent à dire que Philiby aurait été recruté par une des compagnies à savoir la « Société mondiale pour l’aide aux victimes du fascisme allemand » basée à Paris. En 1934 l’influence du propagandiste atteint les antipodes de la planète quand le kominterm envoi Egon Kisch (un écrivain Tchèque) pour fonder une compagnie et transmettre les idées du Komintern. Ce dernier est déclaré comme indésirable par le gouvernement Australien, mais les preuves manquent pour le faire expulser. Cette tentative reste cependant par la suite un échec pour Kisch.
Fin de vie et mort
Rupture avec Staline
Jusqu’en 1936 Münzenberg reste fidèle à Staline et à sa politique à l’étranger. Il est tout à fait au courant des énormes crimes Staliniens, il est témoin de la construction du Canal de Moscou où vingt-deux mille travailleurs forcés perdent la vie et d’une multitude d’autres massacres. Il reste malgré cela fidèle à Staline. Appelé à retourner à Moscou par un camarade du parti, Walter Ulbricht, Münzenberg refuse et désobéit soudainement car il redoute d’être victime d’une des purges de Staline. Il continue à travailler pour la cause antifasciste à travers l’ouest de l’Europe. Il joue un rôle dans le recrutement des brigades internationales qui vont combattre en Espagne dans le camp des républicains. Cependant en 1937 la situation se complique pour Münzenberg : il est officiellement exclu du parti communiste allemand et fait l’objet de nombreuses accusations. Il s’oppose alors pour la première fois à Staline de manière ouverte. Il devient un véritable leader d’opposition au fascisme, au stalinisme et fonde un nouveau journal d’opposition « Die Zukunft (le futur) ».
Circonstances de décès
Mais les événements s’accélèrent pour Münzenberg. Ses plus fidèles collaborateurs Karl Radek, Heinz Neumann et un nombre incalculable de communistes allemands sont assassinés ou envoyés au goulag. Sa belle-sœur Margarete Buber-Neumann est emprisonnée à Karaganda. Finalement la NKVD décide de la livrer à Hitler sauvant ainsi sa vie par mégarde. Après avoir passé la guerre dans le camp de concentration allemand de Ravensbrück, celle-ci parvient à s’échapper avec l’avancée des troupes alliées. En juin 1940, en raison de ses activités antinazi, Münzenberg s’enfuit de Paris craignant les troupes allemandes. Parti dans le sud de la France, il est emprisonné par le gouvernement de Daladier au camp pour étranger de Chambaran près de Lyon. Sur place il se lie d’amitié avec un prisonnier communiste qui lui propose de profiter du chaos de l’armistice pour s’échapper. Certaines sources mènent à penser que son nouvel ami est en fait un agent de la NKVD. Dans les jours qui suivent le propagandiste, l’homme en question et d’autres individus disparaissent du camp.
Le 21 octobre 1940 des chasseurs découvrent le corps de Münzenberg, partiellement décomposé au pied d’un chêne, avec une corde autour du cou, le tout à quelques kilomètres du camp. Le gouvernement de Vichy fait une enquête rapide et conclue à un suicide. D’après les témoignages de ses amis du camp, Münzenberg ne semblait pas déprimé lors de son séjour. Cela laisse à croire qu’il a été assassiné par la NKVD sur ordre de Staline.
Bibliographies
En langue anglaise
- Babette Gross, Willi Münzenberg: A Political Biography. Translated by Marian Jackson. East Lansing: Michigan State University Press, 1974
- Sean McMeekin, The Red Millionaire: A Political Biography of Willi Münzenberg, Moscow's Secret Propaganda Tsar in the West, 1917-1940.
New Haven, CT: Yale University Press, 2004.
- Stephen Koch, Double Lives: Stalin, Willi Munzenberg and the Seduction of the Intellectuals. New York: Free Press, 1994.
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- Fritz Tobias, The Reichstag Fire. Arnold J. Pomerans, trans. New York: Putnam, 1963.
Boris Volodarsky, The Orlov KGB File: The Most Successful Espionage Deception of All Time. New York: Enigma Books, 2009.
- Arthur Koestler, The Invisible Writing. The Second Volume of an Autobiography: 1932-40. (1954) London: Vintage, 2005; pp. 250–259, 381-386.
- Martin Mauthner, German Writers in French Exile, 1933-1940, London: Vallentine and Mitchell, 2007; ISBN : 978 0 85303 540 4.
- Christopher Andrew, Oleg Gordievsky, KGB: The inside story of its foreign operations from Lenin to Gorbachev, London, Hodder &
Stoughton. ISBN 0-06-016605-3 1990,
En langue francophone
- Annie Kriegel et Stéphane Courtois, Eugen Fried, Le Seuil, 1997
- Arthur Koestler, La Corde raide, 1952
- Arthur Koestler, Hiéroglyphes 1 , 1954
- Collectif, Willi Münzenberg, un homme contre, Colloque international Aix-en-provence, Actes 26-29 mars 1992, Le Temps des cerises, 1993
- François Furet, Le Passé d'une illusion, pp.254 et suivantes, 1995
- Annie Kriegel et Stéphane Courtois, Eugen Fried, Le Seuil, 1997
- Philippe Muray, Désaccord parfait, Gallimard Tel, 2000
- Alain Dugrand et Frédéric Laurent, Willi Münzenberg : artiste en révolution (1889–1940), Librairie Arthème Fayard, Paris, 2008
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