Virement de bord

Virement de bord

Sur un voilier, un virement de bord est une manœuvre qui consiste à faire virer le bateau de manière à changer d'amure (côté du bateau qui reçoit le vent) en passant par le vent debout ou par le vent arrière (virement lof pour lof) le changement d'amure en passant par le vent arrière est également appelé un empannage, cette dernière manœuvre peut être volontaire ou involontaire[1].

Le virement de bord est généralement une manœuvre réalisée lorsque le voilier doit remonter contre le vent pour se rendre à sa destination. Ne pouvant naviguer à la voile à moins de 45° (en moyenne) de part et d'autre de la direction du vent, il doit adopter une trajectoire en zig-zag, le louvoyage, qui nécessite à chaque changement de trajectoire d'effectuer un virement de bord.

Sommaire

Description de la manœuvre

Le virement de bord consiste à :

  • Changer de cap pour changer d'amure ce qui nécessite de virer d'environ 90° pour franchir le secteur ou les voiles ne sont pas efficaces
  • Faire passer la ou les voiles d'avant d'un bord sur l'autre et la régler sur le nouveau bord
  • Faire passer la grand-voile d'un bord sur l'autre et la régler sur le nouveau bord

Après le virement le côté du bateau qui était sous le vent passe au vent et vice-versa

Cette manœuvre, pour être réussie, nécessite une bonne coordination des membres de l'équipage qui auront chacun une tâche différente :

En équipage réduit ou en dériveur de sport une même personne réalise séquentiellement plusieurs de ces tâches.

Les étapes

Virement à bord sur un bateau moderne

La description qui suit s'applique à un voilier quillard doté d'un gréément classique (Marconi). Sur un dériveur de sport, une planche à voile ou un multicoque de compétition, un voilier gréé avec une voile latine, au tiers, etc. les moments cruciaux et les gestes techniques peuvent être différents.

Partir du près

Pour réaliser le virement de bord il est préférable d'être au près pour que le voilier puisse franchir le secteur de 90° où les voiles ne sont plus efficaces : si le voilier démarre la manœuvre d'une allure plus arrivée (par exemple bon plein), le bateau va devoir parcourir une plus longue distance sur l'erre (lorsque le voilier sera au près les voiles ne seront pas suffisamment bordées) et risque un manque à virer  : le virement de bord échoue, le voilier se retrouve immobile, non manœuvrant dans une situation inconfortable (le bateau est chahuté par les vagues qui arrivent par l'avant), petit à petit, il reprend de la vitesse en repartant naturellement sur le bord initial mais beaucoup de temps a été perdu. Le manque à virer guette particulièrement le voilier si le vent est faible (le voilier a peu d'élan), si la mer est forte et courte (le bateau est rapidement stoppé par les vagues) ou si le bateau vire avec difficulté par manque d'inertie (multicoque).

Préparer le virement de bord

L'équipier chargé de larguer l'écoute sous le vent de la voile d'avant se met en position. Les chariots d'écoute de grand-voile et de foc au vent sont réglés dans la position qu'ils devront occuper après le virement de bord; pour le chariot d'écoute de grand-voile ce réglage peut ne pas être possible avant le virement. Les équipiers chargés de border la voile d'avant sous la nouvelle amure se mettent en position au vent et embraquent le bout libre de leur écoute. Le barreur met le bateau au près si ce n'était déjà fait. Si le voilier est pourvu d'un habitacle, on s'assure que tous les objets (vaisselle, bouteilles, instruments…) susceptibles de tomber après le changement de côté de la gîte sont bien calés, que les vannes actuellement au vent sont bien fermées. Les dormeurs allongés du côté au vent sur des couchettes dépourvues de toile anti-roulis sont invités à se préparer eux aussi à changer de côté.

Déclencher le virement de bord

Le skipper - c'est généralement à lui qu'est dévolu ce rôle - après s'être assuré que tous les équipiers sont en position et que les préparatifs sont achevés, lance un ordre « paré à virer » auquel tous les équipiers doivent répondre « paré »… si c'est le cas. Lorsque tous les équipiers sont effectivement prêts, le skipper déclenche alors le virement en annonçant « on vire » ou plus conventionnellement « envoyez ». Le skipper peut différer un peu l'exécution du virement de bord pour des raisons tactiques (en régate), pour profiter au maximum du bord en cours (dans un passage étroit) ou pour parer un obstacle (bateau, bouée).

Virer

L'enchainement des manœuvres est initié par le barreur qui fait loffer le voilier. La voile d'avant se dévente progressivement; l'équipier chargé de l'écoute au vent largue celle-ci franchement ni trop tôt ni trop tard. S'il la largue trop tôt, la voile d'avant n'aidera pas à faire pivoter le bateau. De plus elle va battre plus longtemps avec le risque d'abimer ou fatiguer la voile d'avant et de coincer l'écoute dans un obstacle sur le pont avant. Si la voile est larguée trop tard, l'écoute sous l'autre amure sera bordée dans de mauvaises conditions alors que la voile est déjà gonflée sur l'autre bord.

Dès que l'écoute au vent est larguée, les équipiers chargés de l'écoute sur l'autre amure commencent à l'embraquer. Là également il faut agir au bon moment. Si l'écoute est reprise trop tôt, la voile peut se gonfler à contre et entraîner un manque à virer ; trop tard, la voile est gonflée au moment de la manœuvre et nécessite de déployer de grands efforts pour embraquer une grande partie de l'écoute ; en régate une manœuvre trop longue fera perdre des places. Pour embraquer l'écoute sur un voilier d'une certaine taille (dépend aussi de la force du vent), l'écoute est passée autour du winch d'écoute : au début, lorsqu'il faut embraquer à la main de grandes longueurs, 1 tour suffit (il faut éviter de surpatter) puis quand l'écoute se durcit sous la traction de la voile, 3 ou 4 tours sont passés et la manivelle de winch est utilisée. Durant toute la manœuvre le barreur a viré progressivement. Si le voilier n'est pas en régate, le barreur peut aider les équipiers qui bordent la voile d'avant, en gardant un cap qui maintient celle-ci légèrement déventée (mais cette manœuvre nécessite un bon barreur car il y a un grand risque de manque à virer).

Si le voilier en comporte, la bastaque sous le vent a été larguée en même temps que l'écoute et la bastaque au vent est bordée avant que la voilure porte à plein. Le chariot d'écoute de grand-voile est si nécessaire réglé, de préférence au moment où la grand-voile ne porte pas, la manœuvre consiste donc à déplacer le chariot d'écoute dans une position symétrique par rapport à l'axe du bateau.

Reprendre la route

Une fois le virement de bord achevé, le bateau ayant perdu de la vitesse, le barreur doit souvent relancer, en abattant au-delà du cap qui doit être suivi en cas de louvoyage (à 45° du vent). Une fois le bateau relancé, le barreur se remet au près.

Virement de bord sur un multicoque

Les multicoques ont beaucoup de mal à virer à cause de la largeur de leur coque, de leur manque d'inertie. Pour faciliter le virement de bord, l'écoute de la voile d'avant peut être choquée plus tard : la voile gonflée à contre va alors contribuer à faire pivoter le voilier dans la bonne direction. Un manque à virer peut avoir des conséquences curieuses sur ce type de voilier. Lorsque celui-ci se retrouve bloqué face au vent, du fait de sa faible surface mouillée (surface de la coque immergée), il se met à culer (partir à reculons) à des vitesses qui peuvent atteindre plusieurs nœuds sur les multicoques de compétition. Les safrans peuvent souffrir de ce mode de navigation non orthodoxe.

Virement de bord sur un dériveur

Dans le petit temps, les équipages de dériveurs légers pratiquent parfois ce qu'on appelle le virement-bascule, consistant à se servir de leur poids pour faire immédiatement gîter le bateau sur la nouvelle amure, afin de le mettre directement dans une position idéale par rapport à sa forme de carène ; ils arrivent ainsi à ne perdre aucune vitesse lors du virement.

Virement de bord et gréement carré

Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, les bateaux remontaient souvent très mal au vent à cause de leur gréement carré qui créait, face au vent, un “angle mort” beaucoup plus important que sur les bateaux modernes. Il était alors parfois plus efficace et plus sûr de réaliser un empannage en perdant beaucoup de terrain sous le vent dans la manœuvre, plutôt que de risquer un manque à virer et d'en perdre encore plus.

Notes et références

  1. [Petit dictionnaire de marine R.Grüss-1943]

Voir aussi

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