- The Remains of the Day
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Les Vestiges du jour (film)
Les Vestiges du jour (The Remains of the Day) est un film américano-britannique de James Ivory sorti en 1993, inspiré du roman éponyme de Kazuo Ishiguro.
Sommaire
Synopsis
En 1959, Miss Kenton écrit à son ancien chef, Mr Stevens, au sujet du récent décès du maître de celui-ci, Lord Darlington, un comte anglais ; ils ont été tous deux à son service avant-guerre, elle comme intendante et lui comme majordome. Elle évoque également un scandale qui a éclaté après la Guerre ayant impliqué le comte. Afin d'aller rendre visite à Miss Kenton, Stevens obtient un congé de son nouveau patron, un riche américain nommé Lewis qui a racheté le domaine Darlington. Chemin faisant, dans la limousine que Lewis lui a prêtée, Stevens repense au jour où il a engagé Miss Kenton : c'était en 1936.
En 1936, le majordome Stevens, responsable de toute la domesticité du domaine Darlington, fait engager son père comme majordome-adjoint et Miss Kenton comme intendante. Celle-ci va se révéler une excellente professionnelle, dotée d'une forte personnalité, parfois même en conflit avec Stevens. Celui-ci – homme sérieux dans la quarantaine, réservé, autoritaire – est surtout totalement investi par les devoirs de sa charge, qui passe pour lui avant tout. S'il se surprend lui-même à apprécier la compagnie de Miss Kenton, il justifie toujours ces entrevues par leur intérêt professionnel.
Toujours en 1936, le comte organise à Darlington une conférence internationale : l'Allemagne souhaite recouvrer sa dignité d'antan et se remilitariser (dans le livre, cette conférence a lieu en 1922 ; en 1936, non seulement l'Allemagne était déjà remilitarisée, mais appuyait la guerre d'Espagne de toute sa force aérienne). Ses invités et lui désirent la soutenir politiquement. Seul un membre du Congrès américain, le sénateur Lewis, se manifeste fermement contre la menace nazie. Les intervenants présents, dont le Français Dupont d'Ivry, sont même accusés par Lewis d'être de simples amateurs dans un monde régi désormais par une cynique realpolitik. Stevens gère la logistique de cette manifestation avec une telle implication que le décès de son père, qui survient au même moment, passe au second plan.
1959. Sur la route de son rendez-vous, Stevens, interrogé sur son passé à Darlington, nie avoir connu Lord Darlington lorsque qu'un médecin fait allusion aux accusations de trahison de celui-ci. Il finit par reconnaître qu'il a bien servi lord Darlington, mais qu'il ne se sent pas qualifié pour le juger, et se dit en route précisément « pour corriger l'une de [ses] propres erreurs ».
Années d'avant-guerre : Stevens est contraint de licencier deux employées allemandes lorsque l'on découvre qu'elles sont juives, contre l'avis de Miss Kenton. Il ne semble pas approuver la décision de son maître, mais ne se sent pas qualifié pour exprimer son sentiment, et Miss Kenton, ne se sentant pas soutenue, menace de démissionner, sans toutefois passer à l'acte. Plus tard, Lord Darlington, pris de remords (« Ce que nous avons fait est mal »), cherche à les faire retrouver pour leur restituer leur emploi, en vain. Apprenant alors que Stevens partageait son avis depuis le début, Miss Kenton éclate en sanglots : « Monsieur Stevens, pourquoi ne dites-vous donc jamais ce que vous ressentez ? ».
1959. Dans un pub où il s'est arrêté, l'allure et les excellentes manières de Stevens le font prendre pour un respectable bourgeois par les clients, et il se laisse prendre à ce jeu : il admet avoir vu Churchill, en se gardant bien de préciser dans quel contexte. Le médecin du village n'est pas dupe et, lorsque tous deux se retrouvent seuls, pose une question concernant « le traître Darlington ». Stevens répète, fort gêné toutefois, qu'il n'avait pas à juger son maître, que chacun peut faire une erreur et que lui-même entreprend justement ce voyage pour essayer d'en réparer une.
1939. Lors d'une autre soirée de décideurs anglais, l'un d'eux veut tester la compréhension que peut avoir le peuple de la situation internationale tendue et il questionne à cet effet Stevens, lequel est incapable de donner quelque avis que ce soit. Un autre jour, Miss Kenton surprend Stevens en pleine lecture et viole son intimité en le forçant à révéler le livre qu'il lit ; ce n'est qu'un roman sentimental, à l'eau de rose, que Stevens affirme ne lire que pour travailler son anglais. Faute de réponse sentimentale de Stevens, qu'elle admire, elle commence à avoir des rendez-vous avec Benn, majordome d'un autre lord, qui finit par lui proposer le mariage. Quand elle l'annonce à Stevens d'un air de défi, celui-ci se contente de la féliciter sans chaleur. Peu après, il l'entend pleurer à travers la porte de sa chambre, mais se contente de lui faire remarquer la saleté d'une alcôve, sans intervenir ni poser de questions.
1939. Une nouvelle entrevue, quasi clandestine, a lieu à Darlington, à laquelle participent le premier ministre du Royaume-Uni, Neville Chamberlain, et l'ambassadeur d'Allemagne : la politique d'Hitler, en particulier ses visions sur la Bohême, est soutenue par tous les intervenants. Le discours autoritaire est désormais bien loin de l'esprit conciliant et amical de la conférence de 1936.
1959. Stevens rencontre Miss Kenton ; cela fait vingt ans qu'ils ne se sont pas vus. Ils discutent de tout et de rien, de son mariage raté à elle, mais également du procès que Lord Darlington a perdu après la Guerre alors qu'il voulait défendre son honneur. Stevens offre une place à Miss Kenton, qu'elle refuse, venant d'apprendre la grossesse de sa fille. Ils se quittent… mais les frustrations liées à leur attirance réciproque sont toujours bien présentes.
A la fin, alors que Stevens discute avec Lewis, un pigeon parvient à rentrer. Ils parviennent finalement à le ressortir et là, on voit Stevens mélancolique : tandis que le pigeon peut vagabonder où il veut, Stevens, lui est "cloîtré" à l'intérieur du château où il a laissé sa vie. Le film se termine sur un plan éloigné du château.
Fiche technique
- Titre original : The Remains of the Day
- Réalisation : James Ivory
- Scénario : Ruth Prawer Jhabvala, d'après le roman de Kazuo Ishiguro
- Image : Tony Pierce-Roberts
- Musique : Richard Robbins
- Son : Colin Miller
- Montage : Andrew Marcus
- Production : John Calley, Ismail Merchant, Mike Nichols
- Distributeur : Columbia Pictures
- Pays : Royaume-Uni - États-Unis
- Durée : 134 min
- Format : 2.35X1 Couleurs
- Date de sortie : 5 novembre 1993 (É.-U.), 23 février 1994 (France)
Distribution
- Anthony Hopkins : James Stevens, majordome de Darlington Hall
- Emma Thompson : Sally Kenton, intendante
- James Fox : Lord Darlington
- Christopher Reeve : Lewis, sénateur de Pennsylvanie
- Peter Vaughan : William Stevens, le père de James, majordome-adjoint
- Hugh Grant : Cardinal, filleul de Lord Darlington
- Tim Pigott-Smith : Mr. Benn
- Ben Chaplin : Charlie
- Patrick Godfrey : Spencer
- Terence Bayler : Trimmer
- Lena Headey : Lizzie
- Michael Lonsdale : Giscard Dupont d'Ivry, le représentant français à la conférence
Autour du film
Niveaux du film
Le film joue en permanence sur trois niveaux imbriqués :
- l'Histoire, politique, avec un grand H.
- L'histoire relative à la vie de Darlington Hall, anecdotique.
- Et, enfin, l'histoire personnelle qui aurait pu exister entre Stevens et miss Kenton, animés par le même idéal de perfection; cet idéal a cependant chez Stevens relégué au second plan sa vie personnelle, malgré les efforts de Miss Kenton dès son arrivée.
Le livre de Kazuo Ishiguro
Le film suit de très près le livre, à deux détails près :
- en a été supprimée la scène de la colline (qui contient dans le livre la première référence au titre)
- le réalisateur et la scénariste ont jugé préférable de remplacer le personnage de M. Farraday, acquéreur du château après guerre dans le livre, par M. Lewis, qui était le participant protestataire de la conférence. L'échelle de temps a également été concentrée (la première conférence a lieu en 1936 dans le film, en 1924 dans le livre; de ce décalage résulte une anomalie : l'Allemagne demande son réarmement en 1936, alors qu'en réalité elle l'engageait déjà dans la guerre civile espagnole).
Kazuo Ishiguro, Japonais de culture britannique, a expliqué dans une interview avoir voulu réaliser une fable sur la colonisation : à tort ou à raison, le colonisé garde un vague sentiment que son colon lui est, dans un domaine ou un autre, supérieur. La même relation se retrouve entre Stevens et lord Darlington, et est pour ainsi dire décrite de l'intérieur, à l'insu même de l'intéressé, Stevens. Le thème est cousin de celui de La route des Indes, autre film de James Ivory.
Réalisation
James Ivory et Anthony Hopkins ont veillé à ce que non seulement Stevens ne soit jamais ridicule dans son attachement à sa fonction, mais qu'au contraire son idéal ne soit pas exempt de grandeur. Quant à Lord Darlington, James Fox le campe dans le film comme un brave homme abusé à la fois par ses interlocuteurs et ses bons sentiments. Il est le digne représentant de l'Ancien Monde, celui de l'ordre, domaine de la règle, et non pas de la realpolitik, domaine de la lutte, comme le rappelle le participant Lewis, étatsunien. Les conséquences dramatiques de ces malentendus sont rappelés à plusieurs reprises. On apprendra par exemple que M. Cardinal, son filleul, est décédé à la guerre. Pendant son voyage, Stevens se montrera pensif et mal à l'aise en considérant la chambre du fils de ses hôtes, décédé lui aussi à la guerre. L'ensemble évoque une fatalité qui dépasse les protagonistes et rappelle le mécanisme de la tragédie grecque.
Pour la petite histoire, ni Kazuo Ishiguro (qui a été présent sur le tournage du film) ni James Ivory ne savaient exactement en fait quel était le travail exact d'un majordome. C'est un majordome retraité de Buckingham Palace qui accepta de leur servir de conseiller technique et leur apprit une technique exposée dans le film : utiliser une règle graduée pour mettre la table afin que l'alignement des verres ne souffre d'aucun défaut.
Récompenses
Ce film a fait l'objet de plusieurs nominations aux Oscars, notamment celle de meilleur film, de meilleur réalisateur pour James Ivory ou encore celle de meilleur acteur pour Anthony Hopkins, mais il n'en a reçu à l'époque aucun. Ce n'est qu'avec le temps qu'il a pris une stature de classique du cinéma.
Liens externes
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