- Sueurs froides
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Sueurs froides
Données clés Titre original Vertigo Réalisation Alfred Hitchcock Scénario Alec Coppel
Samuel A. Taylor
Pierre Boileau (roman)
Thomas Narcejac (roman)Acteurs principaux James Stewart
Kim Novak
Barbara Bel GeddesSociétés de production Paramount Pictures
Alfred J. Hitchcock ProductionsPays d’origine États-Unis Sortie 1958 Durée 128 minutes (2 h 08) Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Sueurs froides (Vertigo), souvent mieux connu en France sous son titre original, est un film américain réalisé par Alfred Hitchcock, sorti en 1958.
Sommaire
Synopsis
A San Francisco, Scottie est un homme qui ne supporte pas l'altitude et a souvent des crises de vertige (titre anglais du film), très gênantes dans sa fonction de policier. Après la mort d'un de ses collègues, accident qui déclenche son acrophobie, il quitte la police. Une de ses connaissances, Gavin Elster, le contacte afin de suivre sa femme, qu'il prétend possédée par son aïeule, Carlotta Valdes. D'abord réticent, Scottie finit par accepter. Après de longues scènes où il file la jeune femme, il se rend compte par lui-même qu'il y a une part de vérité dans ce que disait son ami d'enfance. Lorsque Madeleine, la jeune femme, tente de se suicider en se jetant dans la baie de San Francisco, il la sauve de la noyade in extremis et la ramène chez lui.
Il fait sa connaissance et est de plus en plus fasciné par la folie douce qui l'a poussée à tenter de se suicider. Ils tombent amoureux l'un de l'autre, mais Madeleine est la victime d'une nouvelle crise de folie, et se jette du haut de la tour d'une église ; Scottie, terrassé par son acrophobie, n'a pas pu la suivre et la sauver.
Après plus d'une année de dépression et de mutisme, il commence à retourner dans les rues, dans les endroits qu'il a connus avec Madeleine. Il croit la voir partout mais il est déçu. Au détour d'une rue, il rencontre Judy, aussi rousse que Madeleine était blonde, mais avec pourtant les mêmes traits, le sosie de la disparue. Après l'avoir suivie, hébété, il l'aborde et ils finissent par sortir ensemble. Il lui colore les cheveux en blond, lui achète le tailleur que portait la défunte, bref, il la remodèle de façon à la transformer en Madeleine. Judy, qui s'en rend compte est désespérée, mais se laisse faire parce qu'elle l'aime. Scottie finit par devenir fou lorsqu'il comprend, en découvrant un bijou ayant appartenu à Madeleine chez Judy, de quelle horrible machination il a été la victime...
Un film culte
Sueurs froides jouit d'une adoration particulière de la part des cinéphiles et des cinéastes du monde entier. Le film se classe d'ailleurs régulièrement au sommet des classements des meilleurs films de toute l'histoire du cinéma (la revue anglaise Sight & sound, par exemple, ou les revues françaises Positif et Les Cahiers du cinéma[1]). L'American Film Institute le classe dans la liste des 10 meilleurs films américains de tous les temps[2]. Le réalisateur Chris Marker en a fait son film préféré et le cite dans plusieurs de ses œuvres (La Jetée, Sans soleil, Immemory). Dans L'Armée des douze singes, Terry Gilliam fait entrer ses personnages, incarnés par Bruce Willis et Madeleine Stowe, dans un cinéma où le film est projeté. Brian de Palma considère Sueurs froides comme l'un de ses trois films préférés et bon nombre de ses propres films s'en inspirent, dans ses thèmes ou dans ses traits esthétiques. Le film a influencé beaucoup de films hollywoodiens, dont Sang chaud pour meurtre de sang-froid, Basic Instinct, Lost Highway de David Lynch ou The Game de David Fincher. Le plasticien Les Leveque a également détourné le film dans son œuvre homonyme (4 Vertigo), où les images d'Hitchcock sont reproduites et kaléidoscopiquées dans un montage hypnotique[3].
Éléments d'analyse
La technique au service de la mise en scène
Pour illustrer les scènes de vertige, Alfred Hitchcock utilise la caméra subjective, mais d’une façon particulière : alors qu’il filme, vers le bas, la profondeur de la cage d’escalier que James Stewart est censé voir avec angoisse, la caméra opère deux mouvements simultanés : un mouvement d’appareil vers l’arrière (travelling arrière) et un zoom avant (diminution de la longueur focale de l'objectif de la caméra). Le résultat de cet artifice technique appelé travelling compensé, utilisé ici pour la première fois dans un film, est une image qui se déforme, comme si la cage d’escalier s’allongeait.
Vertige et sexualité
Dans le roman de Pierre Boileau et Thomas Narcejac, D'entre les morts, le personnage principal est impuissant. Les auteurs écrivent explicitement, dès le premier chapitre, qu'il n'a jamais connu de femme alors qu'il a plus de 30 ans. Dans l'adaptation cinématographique Alfred Hitchcock s'amuse à multiplier les clins d'œil ironiques sur la sexualité de Scottie, incarné par James Stewart. Ainsi dès la deuxième scène, un dialogue interminable dans l'appartement de Midge, il joue avec une canne pendant que Midge fait allusion à leurs courtes fiançailles rompues parce qu'il ne s'est rien passé. Il la pointe même vers un soutien-gorge car Midge travaille dans la fabrication de lingerie féminine, ce qui contribue à érotiser encore plus la scène. Cette canne est donc un substitut de son sexe dont il ne sait que faire en présence d'une femme qui veut l'aimer charnellement. Midge lui parle comme à un enfant "you are a big boy now !". À la fin de la séquence, Scottie essaie de lutter contre le vertige en grimpant progressivement sur un escabeau. Hitchcock montre, dans un plan très bref, des dessins de femme au pied des marches. C'est une tentative d'érection qui est ainsi suggérée. Elle se termine par un fiasco dans les bras de Midge, éternelle insatisfaite.
L'ironie atteint son comble par l'utilisation de la tour Coit (un tel nom ne s'invente pas) bien connue par tous les habitants de San Francisco et dont l'érection a été financée par une dame qui s'appelait Lillie Hitchcock Coit (aucun lien de famille avec Sir Alfred !). La tour, évident symbole phallique, représente une lance d'incendie car Lillie voulait rendre hommage aux pompiers de la ville. La tour apparaît constamment par la fenêtre de l'appartement de Scottie comme pour se moquer de son manque de vigueur sexuelle. Quand Madeleine, après sa tentative de suicide, vient le remercier de l'avoir sauvée, elle lui dit qu'elle a retrouvé son appartement grâce à elle. Scottie répond que c'est la première fois qu'elle lui est utile à quelque chose.
Quelques plans plus tard, ils finissent par coucher ensemble, scène suggérée et non montrée. Scottie est alors persuadé qu'elle est une réincarnation et c'est avec un fantôme, avec une morte donc, qu'il a une relation. Dans l'interview qu'il a accordée à François Truffaut, Hitchcock parle de nécrophilie du personnage. Scottie est convaincu de la réincarnation de Carlotta après la magnifique séquence dans la forêt de séquoias, arbres sempervirens comme il le souligne lui-même. Dans le plan suivant, ils s'embrassent au pied d'un arbre tortueux (symbole de la sexualité vacillante de Scottie comparé à la vigueur insolente des arbres millénaires) et le déferlement des vagues ne laisse aucun doute sur le fait qu'ils se connaissent au sens biblique du terme.
Scottie Pygmalion
Quand Scottie découvre par hasard dans la rue Judy, le sosie de sa regrettée Madeleine, il entreprend de la transformer à l'image de son amour disparu. Il ignore que c'est la même personne et qu'il est victime d'une machination diabolique. Une fois la transformation terminée, il l'aime à nouveau. Or Madeleine n'a jamais existé. Il est donc amoureux d'une image qu'il a créée lui-même. Quand il découvre la vérité la jalousie le submerge et il cause la mort de Judy. C'est aussi un châtiment divin, Hitchcock est très moral, car une religieuse contribue à provoquer l'accident. Les questions que l'on peut se poser sont les causes du malaise de Scottie. Est-il malade parce qu'en définitive il a eu des relations avec une femme de chair et de sang ? Ou bien est-ce d'Elster qu'il est jaloux ? Ce que Scottie a fait en créant Madeleine, Elster l'a fait avant lui mais sans tomber amoureux de sa création. Son but machiavélique était qu'un autre succombât à ses charmes et tombât dans son piège maléfique.
Fiche technique
- Titre : Sueurs froides
- Titre original : Vertigo
- Réalisation : Alfred Hitchcock
- Scénario : Alec Coppel et Samuel Taylor, d'après le roman D'entre les morts de Pierre Boileau et Thomas Narcejac
- Musique : Bernard Herrmann
- Direction musicale : Muir Mathieson
- Direction artistique : Hal Pereira et Henry Bumstead
- Décors : Sam Comer et Franck McKelvy
- Costumes : Edith Head
- Maquillage : Wally Westmore
- Coiffures : Nellie Manley
- Photographie : Robert Burks et (seconde équipe, non-crédités) Loyal Griggs, Irmin Roberts
- Ingénieurs du son : Harold Lewis et Winston Leverett
- Montage : George Tomasini
- Sociétés de production : Paramount Pictures et Alfred J. Hitchcock Productions, Inc.
- Producteurs : Alfred Hitchcock et Herbert Coleman
- Distribution : Paramount Pictures
- Budget : 2 479 000 $
- Format : Noir et blanc / couleurs (Technicolor) - 1,50:1 - Mono (Westrex Recording System) - 35 mm (VistaVision)
- Genre : drame, policier
- Durée : 2h08
- Pays d'origine : États-Unis
- Langue : anglais
- Dates de sortie :
- Tout public
Distribution
- James Stewart (VF : Roger Tréville) : John Ferguson (Scottie)
- Kim Novak (VF : Nadine Alari) : Madeleine Elster / Judy Barton (Lucie Barton dans la version française)
- Barbara Bel Geddes (VF : Lily Baron) : Marjorie Wood (Midge, Betty dans la version française)
- Tom Helmore (VF : Jacques Beauchey) : Gavin Elster
- Henry Jones (VF : Camille Guérini) : le coroner
- Raymond Bailey (VF : Maurice Dorléac) : le docteur
- Ellen Corby (VF : Marie Francey) : la tenancière de l'hôtel McKittrick
- Jean Corbett : la véritable Madeleine Elster
- Sarah Taft : la nonne
- Lee Patrick : La conductrice prise pour Madeleine
Galerie
Autour du film
- Caméo : À la dixième minute 50 secondes, Alfred Hitchcock passe devant le portail d'entrée du chantier naval.
- Une erreur s'est glissée dans le film ; quand Scottie et Madeleine ou Judy vont vers la mission espagnole, la voiture roule à gauche.
- Hitchcock aurait forcé Kim Novak à faire semblant de se noyer alors qu'il savait qu'elle ne savait pas nager, lors de la scène au Presidio de San Francisco.
- Tourné en VistaVision, le film a été tiré sur film 70 mm avec un son stéréophonique à 6 pistes magnétiques. La version sur DVD utilise également une stéréophonie 5.1.
- Le générique de Vertigo a été utilisé pour le début du clip de Lady Gaga Born This Way
- Le thème du film est également utilisé dans la dernière scène du film The Artist avec Jean Dujardin.
Notes et références
Bibliographie
- (fr) Jean Douchet, Hitchcock, L'Herne, Paris, 1985 (ISBN 2-85-197-201-4), en particulier p. 15-48, « Le suspense érotique ».
Liens externes
- Sueurs froides sur l’Internet Movie Database - Version plus complète en anglais
- Sueurs froides sur AlloCiné
- (en) Histoire de la tour Coit
- (fr) Ébauche d'analyse Extrait Apparition
- (fr) The Coit Tower et le fantasme de Scottie
- (fr) De Vertigo à Eyes Wide Shut
- (fr) Vertigo à la lumière de Sylvie
- (fr) Le vertige de Carlotta Valdes (JL Chinaski)
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