Staphylococcus aureus résistant à la méticilline

Staphylococcus aureus résistant à la méticilline
Souche de SARM, en microscopie électronique
Microscopie électronique, colorée
Rupture d'un kyste infecté par une souche MRSA

Le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM) ou Methicillin-resistant Staphylococcus aureus (MRSA, souvent prononcé « mersa ») est un Staphylococcus aureus (couramment appelé « Staphylocoque doré ») caractérisé par sa résistance à un antibiotique, la méticilline (ou méthicilline).

Sommaire

Maladie émergente

Il a été découvert en 1961 en Grande-Bretagne[1], soit deux ans à peine après le début de l'utilisation de la méthicilline. Les premières résistances étaient de type « hétérogène »[2], c'est-à-dire, identifiées uniquement après mise en culture à une température inférieure à 37°. Des souches résistantes ont ensuite été isolées également dans des pays n'ayant pas accès à cet antibiotique, probablement par acquisition de résistance croisée aux bêtalactamines naturelles[2]. Les premières souches américaines apparaissent dans les années 1970[2].

Il peut être identifié de manière classique par mise en culture en présence de méticilline (antibiogramme avec un résultat en 1 à 2 jours).

L'utilisation d'une méthode basée sur la réaction en chaîne par polymérase (PCR) permet d'avoir une identification en quelques heures, mais a une moindre spécificité[3].

Les infections à SARM sont généralement plus graves, avec une mortalité plus élevée[4].

Une nouvelle souche de SARM, d'origine bovine a été trouvée chez des malades d'hôpitaux irlandais, et par une autre équipe chez des patients du Royaume-Uni et du Danemark. Ce SARM, est (sept 2011) non détectable par les moyens habituels d'analyse. Un des auteurs de la découverte le Pr. Coleman précise que c'est une nouvelle lignée de SARM, d'un type complètement différent des SARM découverts dans les années 60, proche des SARM bovins, mais aussi résistant aux antibiotiques et de virulence semblable aux SARM humains nosocomiaux existants, risquant de produire de nombreuses nouvelles lignées par mutations[5],[6],[7],[8].

Zone de prévalence

Le SARM, désormais courant en milieu hospitalier, était responsable de 37 % des cas fatals de septicémie au Royaume-Uni en 1999, soit 4 % de plus qu'en 1991. En 2003, il était responsable de près des deux-tiers des septicémies à staphylocoques aux États-Unis[9].

La moitié de tous les staphylocoques dorés aux États-Unis sont résistants à la pénicilline, la méticilline, la tétracycline et l'érythromycine. En 2005, les deux tiers des infections non hospitalières à staphylocoques concernent des souches résistantes à la méticilline[10].

Deux souches SARM hautement résistant aux antibiotiques qui n’étaient connues qu’aux États-Unis se sont répandues dans plusieurs villes colombiennes où elles causent des maladies graves, souvent mortelles[11].

Épidémiologie, écoépidémiologie

L'industrialisation de l'élevage porcin associée à l'usage préventif ou en complément alimentaire d'antibiotiques est une des sources probables d'apparition de l'antibiorésistance chez plusieurs pathogènes dans les années 1960 à 2000.
L'élevage industriel (ici de poulets) est une des sources de Staphylococcus résistant à la méticilline.

En Europe, l'EFSA[12] estime en 2010 que les principaux réservoirs animaux du SARM (staphylocoques antibio-résistants) dans les pays touchés sont les cochons, veaux, et poulets de chair, dans les élevages industriels surtout.

Les infections sont parfois discrètes ou tout à fait asymptomatiques. Parmi les lignées de SARM, La souche « CC398 » est la plus souvent associée à un portage asymptomatique dans les élevages intensifs d'animaux producteurs de denrées alimentaires[12].

Le CC398 a été associée dans quelques cas à des infections profondes de la peau et des tissus mous, des pneumonies ou septicémies chez l'homme. Là où le CC398 est fréquent chez des animaux producteurs de denrées alimentaires, les éleveurs, vétérinaires et leurs proches risquent plus la colonisation et l'infection que la population générale[12].

Le SARM est souvent porteur de gènes d'entérotoxine mais il n'y a eu avant 2010 qu'un seul rapport d'intoxication alimentaire identifiée comme due à SARM.

La souche CC398 a aussi été isolée chez les animaux de compagnie (chiens et chat) et des chevaux dans les fermes ayant du bétail infecté, avec des cas sporadiques chez « de nombreux autres animaux de compagnie ». Cependant, selon l'EFSA, aucune étude n'a spécifiquement évalué les risques de transmission à l'homme à partir de petits animaux ou suite aux contacts avec des chevaux ou de la viande chevaline[12].

Les infections à SARM chez les animaux de compagnie sont de plus en plus fréquentes, et presque toujours, les souches responsables de l'infection de ces animaux sont les mêmes que celles fréquemment rencontrées dans les hôpitaux de la même région géographique. Les êtres humains sont donc susceptibles de propager des infections à SARM aux animaux de compagnie et ceux-ci peuvent être un réservoir de la maladie pour l'homme[12].
Les chevaux peuvent être colonisés et/ou infectés par le SARM à partir de l'homme ou via d'autres sources animales dans leur milieu (chiens, chats...). Il existe des rapports sporadiques de cas de maladie chez l'homme concernant des infections cutanées généralement mineures attribuables à une source équine[12].

La souche CC398 peut entrer dans l'abattoir et circuler via les animaux vivants ou de la viande crue. Sur la base des données disponibles en 2008/2009, même si cette souche peut faire partie de la microflore endémique de certains abattoirs, le risque d'infection pour les travailleurs des abattoirs et les personnes y manipulant la viande semble rester faible[12].

Conséquences

Ce germe n'entraîne pas d'infection spécifique.

Les infections par les SARM entraînent des séjours hospitaliers plus longs et un coût de traitement plus important[13].

La mortalité par septicémie semble n'être supérieure qu'en cas d'infection par staphylocoque doré résistant à la méticilline[14].

Traitement

La vancomycine est l'antibiotique qui reste efficace dans ce cas pour l'instant, même s'il existe des souches résistantes à ce dernier (SARV).

Une nouvelle classe d'antibiotiques, les oxazolidinones, est disponible depuis les années 1990 et la première application commerciale, le linézolide est comparable à la vancomycine pour son efficacité contre le SARM.

Prévention

SARM dans les échantillons de sang humain dans les pays qui ont pris part à l'étude de 2008
  • Prévenir la diffusion des germes à autrui implique notamment l'hygiène (en particulier des mains) et la mise en isolement de la personne infectée, même si cette dernière mesure repose plus sur de l'empirisme que sur une efficacité réellement démontrée[15].
  • L'utilisation raisonnée et limitée des antibiotiques permet également de réduire la prévalence de ces germes[16].
  • Selon l'EFSA et son groupe d'experts sur les risques biologiques[12], les 4 phases d'interaction de la bactérie avec son environnement (y compris non-humain ou humain porteur sain) devraient être mieux suivies et comprises (infection, transport, colonisation et contamination).
    L'usage raisonné des antibiotiques concerne donc aussi l'activité vétérinaire et surtout les élevage porcins[12].
    Selon l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) (juin 2010), des aliments peuvent être contaminés et contaminants pour cette maladie. Il faudrait mieux surveiller les exploitations de porcs et le transport des porcs au sein de l'Union européenne, et notamment les porcheries industrielles qui présentent plus de risque en raison de leurs grandes tailles[12].

Dépistage

Le dépistage systématique des SARM chez certains patients est préconisé afin de tenter de diminuer le taux d'infection à ce germe. La présence de ce staphylocoque dans la sphère ORL (nez le plus fréquemment[17], gorge, oreilles) peut conduire à une décontamination et/ou à un isolement du patient porteur. L'intérêt de cette attitude n'est cependant pas formellement étayé[18],[19].

Les pays scandinaves préconisent le dépistage et le traitement systématique des porteurs, aussi bien parmi les patients que parmi le personnel soignant. Les raisons de la très faible prévalence du SARM dans ces pays ne sont pas clairement établies. On ignore si cela est dû à cette politique hospitalière agressive ou si cela provient d'autres causes[20].

Voir aussi

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Articles connexes


Notes

  1. Jevons MP, “Celbenin”-resistant staphylococci, BMJ, 1961;i:124-125
  2. a, b et c Cookson B, Five decades of MRSA: controversy and uncertainty continues, Lancet, 2011;378:1291-1292
  3. De San N, Denis O, Gasasira MF, De Mendonca R, Nonhoff C, Struelens MJ, Controlled evaluation of the IDI-MRSA assay for the detection of colonization by methicillin-resistant Staphylococcus aureus in diverse mucocutaneous specimens, J Clin Microbiol, 2007;45:1098-101
  4. Cosgrove SE, Sakoulas G, Perencevich EN et Als. Comparison of mortality associated with methicillin-resistant and methicillin-susceptible Staphylococcus aureus bacteremia: a meta-analysis, Clin Infect Dis, 2003;36:53-59
  5. Dick Ahlstrom, "New strain of MRSA superbug discovered in Dublin hospitals"- Irish Times - 03/06/2011
  6. "Trinity Scientists Identify A New Type of MRSA" - Trinity College Dublin - 03/06/2011
  7. "Detection of Staphylococcal Cassette Chromosome mec Type XI carrying Highly Divergent mecA, mecI, mecR1, blaZ and ccr Genes in Human Clinical Isolates and Clonal Complex 130 Methicillin-Resistant Staphylococcus aureus"
  8. Anna C. Shore, Emily C. Deasy, Peter Slickers, Grainne Brennan, Brian O'Connell, Stefan Monecke, Ralf Ehricht, David C. Coleman - Antimicrobial Agents and Chemotherapy - 08/2011 - volume 55 - numero 8 - pages 3765 à 3773 (Résumé)
  9. Klevens RM, Edwards JR, Tenover FC et Als. http://www.journals.uchicago.edu/CID/journal/issues/v42n3/38050/38050.html Changes in the epidemiology of methicillin-resistant Staphylococcus aureus in intensive care units in U.S. hospitals, 1992-2003], Clin Infect Dis, 2006;42:389-391
  10. Klevens M, Morrison MA, Nadle J, Invasive methicillin-resistant staphylococcus aureus infections in the United States, JAMA, 2007;298:1763-1771
  11. Arias C, MRSA USA300 Clone and VREF — A U.S.–Colombian connection?, N Eng J Med, 2008;359:2177-2179
  12. a, b, c, d, e, f, g, h, i et j Assessment of the Public Health significance of meticillin resistant Staphylococcus aureus (MRSA) in animals and foods Question number: EFSA-Q-2008-300 Adopted: 5 March 2009 Résumé et étude d'évaluation (Avis de l'EFSA), 3 juin 2010
  13. Engemann JJ, Carmeli Y, Cosgrove SE, Fowler VG, Bronstein MZ, Trivette SL et als. Adverse clinical and economic outcomes attributable to methicillin resistance among patients with Staphylococcus aureus surgical site infection, Clin Infect Dis, 2003;36:592-8
  14. Laupland KB, Ross T, Gregson DB, Staphylococcus aureus bloodstream infections: risk factors, outcomes, and the influence of methicillin resistance in Calgary, Canada, 2000-2006, Clin Infect Dis, 2008;198:336-43
  15. Cooper BS, Stone SP, Kibbler CC, Cookson BD, Roberts JA, Medley GF et als. Isolation measures in the hospital management of methicillin resistant Staphylococcus aureus (MRSA): systematic review of the literature, BMJ, 2004;329:533-40
  16. Charbonneau P, Parienti JJ, Thibon P, Ramakers M, Daubin C, du Cheyron D et als. Fluoroquinolone use and methicillin-resistant Staphylococcus aureus isolation rates in hospitalized patients: a quasi experimental study, Clin Infect Dis, 2006;42:778-84
  17. Kluytmans J, van Belkum A, Verbrugh H, Nasal carriage of Staphylococcus aureus: epidemiology, underlying mechanisms, and associated risks, Clin Microbiol Rev, 1997;10:505-20
  18. Cooper BS, Stone SP, Kibbler CC, et als. Isolation measures in the hospital management of methicillin resistant Staphylococcus aureus (MRSA): systematic review of the literature, BMJ, 2004;329:533
  19. Loeb M, Main C, Walker-Dilks C, Eady A, Antimicrobial drugs for treating meticillin resistant Staphylococcus aureus colonisation, Cochrane Database Syst Rev 2003;(3):CD003340
  20. Kluytmans J, Struelens M, Meticillin resistant Staphylococcus aureus in the hospital, BMJ, 2009;338:b364

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