Soka Gakkai

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Sōka Gakkai

La Sōka Gakkai (創価学会? littéralement « société pour la création de valeurs  ») est une organisation bouddhiste laïque qui fonde ses pratiques religieuses et son socle doctrinal sur les enseignements de Nichiren, moine bouddhiste japonais du XIIIe siècle, fondateur du bouddhisme de Nichiren et notamment de la Nichiren Shoshu, à laquelle Sōka Gakkai était liée jusqu'en 1991.

Créée en 1930 au Japon comme mouvement pédagogique, la Sōka Gakkai s'est transformée après la Seconde Guerre mondiale pour devenir un mouvement religieux laïc, comme le décrit dans le détail l'historien Richard H. Seager dans son étude de la Soka Gakkai [Encountering the Dharma: Daisaku Ikeda, Soka Gakkai, and the Globalization of Buddhist Humanism, University of California, 2006]. L'organisation s'est développée à l'international et dispose aujourd'hui d'un réseau étendu à 192 pays qui revendique près de 12 millions de fidèles.

Son activité religieuse comporte notamment la pratique du gongyo matin et soir (récitation d'extraits du Sûtra du Lotus et de Nam Myoho Renge Kyo), l'étude de lettres et traités de Nichiren et d'encouragements de Daisaku Ikeda ou autres responsables, et de la foi en cette religion, dans le cadre ou non de réunions de discussion (zadankai).

En France, la Sōka Gakkai a été désignée comme secte par plusieurs rapports parlementaires français[1],[2] et par l'UNADFI[3],[4]. Mais depuis 2007, l'organisation n'est plus citée dans les rapports consécutifs de la MIVILUDES de 2007 [5] et de 2008 [6].

Le mouvement est, depuis 2007,organisé en trois associations spécialisées : l'A.C.S.B.N (Association Cultuelle Soka du Bouddhisme de Nichiren), l'A.C.S.F (Association Culturelle Soka de France) et l'A.C.E.P (Association de Commerce, d'Edition et de Prestation)[7]

Sommaire

Présentation de l'organisation

Bref historique

Le mouvement est fondé en 1930 sous le nom de Sōka Kyōiku Gakkai (創価教育学会) (Littéralement cette dénomination signifie « société pour une éducation créatrice de valeurs ») par Tsunesaburo Makiguchi (牧口常三郎), éducateur et directeur d’école primaire.

Inspiré par plusieurs auteurs occidentaux, Tsunesaburo Makiguchi cherche à développer une méthode pédagogique originale basée sur l’individu et son rapport à l’environnement. Converti au bouddhisme de Nichiren transmis par la Nichiren Shoshu de l'époque, il rapproche ses théories pédagogiques des enseignements de Nichiren.

Persécutés pendant la seconde guerre mondiale par le gouvernement Japonais, Tsunesaburo Makiguchi et Josei Toda (戸田城聖, son disciple, sont arrêtés en 1943 pour crime de lèse-majesté (pour refus de se plier au Shintoïsme devenu religion d’état obligatoire). La Sōka Kyōiku Gakkai est déclarée hors la loi et dissoute. Ses principaux responsables sont également incarcérés. Le temple principal de la Nichiren Shoshu est réquisitionné et transformé en garnison. En 1944, à l’âge de 74 ans, Makiguchi meurt pendant son incarcération.

Après la capitulation du Japon, les prisonniers politiques sont libérés et Josei Toda est le dernier membre encore incarcéré (refusant toujours de se plier au shintoïsme). Malgré un état de santé difficile, il engage une action de prosélytisme intense en faveur de l'enseignement de Nichiren et de la Nichiren Shoshu. Dans un pays ravagé et appauvrit par la guerre, Josei Toda établit une nouvelle organisation, la Sōka Gakkai, littéralement société pour la création des valeurs. Entre 1946 et 1958, la Sōka Gakkai a converti 700 000 foyers et gagné en influence au sein de la société Japonaise. Lorsque Toda meurt le 2 avril 1958, à l’âge de 58 ans, la Nichiren Shoshu est devenue l’une des premières confessions bouddhistes du Japon.

À partir de 1960, c’est Daisaku Ikeda (池田大作), proche disciple de Josei Toda, qui devient président de la Sōka Gakkai. Il lance une campagne internationale pour faire connaître le mouvement et ses idéaux hors des frontières du Japon. En 1975, il fonde la Sōka Gakkai Internationale qui a pour mission de superviser les activités de toutes les organisations locales qui ont été créées dans de nombreux pays occidentaux. Il fonde également plusieurs institutions à vocation artistique et culturelle, et des universités et écoles Sōka. En 1983, l’ONU lui décerne la médaille de la paix.

Avec le développement international, puis son admission au sein des Nations Unies comme ONG, la Sōka Gakkai place la Nichiren Shoshu parmi les principaux mouvements bouddhistes du monde. En 1991, après plusieurs différends notables au cours des quinze années précédentes, la Nichiren Shoshu et son grand patriarche, Nikken Abe, décident d’expulser l’ensemble des membres et des croyants de la Sōka Gakkai. Cette dernière se retrouve dès lors indépendante de toute organisation monastique. La majorité des croyants ayant suivi le mouvement laïc, la Nichiren Shoshu se retrouve isolée, au Japon et sur le plan international.

Aujourd’hui, la Sōka Gakkai internationale revendique 12 millions de fidèles dans plus de 190 pays. Dans nombre d'entre eux, elle est reconnue comme un mouvement religieux et s’implique dans de nombreuses initiatives culturelles, artistiques et patrimoniales. Elle organise des actions humanitaires et entretient des échanges avec des institutions académiques, universitaires et gouvernementales.

En 2006, Henry Hank Johnson, membre de la Soka Gakkai, démocrate, est élu à la Chambre des Représentants du Congrès des Etats-Unis, représentant une circonscription de Géorgie. C’est le premier élu bouddhiste de Nichiren au Congrès américain. Le Washington Post a commenté cette élection comme une expression de la nouvelle diversité religieuse[8].

Croyances et pratiques

La Sōka Gakkai (et ses membres) fondent leur action et leur pratique religieuse sur les enseignements du moine Nichiren (1222-1282). Moine bouddhiste de l'école Tendai, Nichiren a proposé, dans le contexte féodal du Japon du XIIIe siècle, une pratique centrée sur la récitation exclusive du titre du Sutra du Lotus assortie d'un ensemble de commentaires et exégèses (le gosho) qui forment le corpus doctrinal de cet enseignement.

Sortant des cadres traditionnels du bouddhisme Tendai, Nichiren a diffusé une approche plus prosaïque et plus proche du profane. Son article de foi central est que chaque individu dispose de la capacité de manifester l'éveil du Bouddha au cours de sa vie, sokushin jobutsu. Chacun peut donc obtenir le bénéfice et les attributs du Bouddha sans avoir à passer par les diverses écoles monastiques du bouddhisme historique.

Nichiren a donc proposé une approche simplifiée de la pratique bouddhique. Elle s'appuie sur une liturgie comprenant une pratique rituelle bi-quotidienne, appelée gongyo, composée de la récitation des chapitres II et XVI du sutra du Lotus et de la récitation, d'une durée libre, d'un mantra tiré du titre Japonais du Sutra du Lotus (nam-myoho-renge-kyo, ou Daimoku), de l'étude des enseignements bouddhiques (Sutras et commentaires) selon la classification chinoise de Tendai, et de la profession de foi par le principe de la conversion antagoniste (Jap. Shakubuku).

Son antagonisme vis-à-vis des autorités politiques et sa critique verbale énergique des autres écoles bouddhiques de son époque valent à Nichiren d'être la cible privilégiée de ses détracteurs religieux et d'être considéré comme un fanatique séditieux par la classe dirigeante du Shogunat de Kamakura. Il est exilé à deux reprises et manque d'être exécuté sommairement lors de son deuxième exil. Persuadé de sa mission de « Pratiquant du Sûtra du Lotus » (Hokke gyoja) ainsi qu'il se définit d'abord, avant de se présenter implicitement, après son exécution jugée providentiellement manquée, comme le Bouddha des Derniers Jours de la Loi (du moins selon la tradition commune à la Nichiren Shoshu et à la Soka Gakkai, mais qui n'est pas partagée par d'autres organisations nichiréniennes), Nichiren n'a de cesse de chercher à démontrer la supériorité de sa doctrine sur l'ensemble des écoles bouddhiques japonaises. Imprécateur sans armes ni armée, Nichiren a la violence verbale des réformateurs. Cette véhémence de Nichiren est dirigée contre ses concurrents des écoles bouddhiques plus proches des pouvoirs politiques et militaires alors en place. Ce trait de caractère s'est longtemps perpétué dans les écoles qui se réclament de son enseignement avec plus ou moins d'intensité.

Aujourd'hui, la pratique religieuse au sein de la Sōka Gakkai est, sur le fond, la même que celle instituée par la Nichiren Shoshu, créée en 1912, elle-même issue d’une mouvance plus large connue sous le nom d’« Ecole Fuji », et qui se réclame de Nikko (1246-1333), jugé par celle-ci le plus fidèle disciple de l’enseignement de Nichiren. Pour ce qui est des formalités, elle se veut adaptée à la vie quotidienne des laïques, notamment en ce qui concerne le lieu de culte, l'ordre de récitation de la liturgie et le type de mandala conféré aux croyants. Depuis 1991, le schisme entre la Sōka Gakkai et son école bouddhique de référence, la Nichiren Shoshu, a supprimé le rôle de l'ordre monastique dans la pratique et les formalités religieuses. La croyance est cependant restée la même en s'articulant sur le Gohonzon, le Daimoku (Titre-mantra du Sûtra du Lotus) et le Gosho (recueil des enseignements de Nichiren).

L'apport de la Sōka Gakkai dans la pratique et la croyance dans les enseignements de Nichiren porte essentiellement sur la diffusion laïque des principes du bouddhisme de Nichiren auprès de toutes les couches de la population japonaise, et étrangère dans une seconde étape. Héritant de la vocation pédagogique de ses fondateurs, la Sōka Gakkai propose une lecture contemporaine et actualisée d'un bouddhisme populaire mais très empreint des valeurs japonaises traditionnelles. Cette lecture introduit des concepts tels que la révolution humaine, les valeurs Sōka (beauté, bonté, bénéfice) ou encore une pratique religieuse qui se fonde sur la vie quotidienne. Enfin, la Sōka Gakkai a élargi le champ de son action à des activités humanitaires et associatives dans la société civile à l'instar des grandes organisations laïques apparentées aux principales confessions du monde contemporain[réf. nécessaire].

Structures et fonctionnements

La Sōka Gakkai Internationale

La Sōka Gakkai Internationale fédère l'ensemble des organisations locales au sein d'une ONG ayant un statut consultatif auprès du Conseil économique et social et du Département de l'information publique des Nations unies. Au travers de plusieurs associations culturelles et pédagogiques (Ecoles et Universités Sōka, concerts Min-on, musées Fuji, institut de philosophie orientale, etc.), elle entretient des échanges culturels avec des institutions universitaires. Elle participe également aux actions humanitaires internationales menées par les institutions de l'ONU.

En France

En France, la Sōka Gakkai est constituée selon le modèle associatif en vigueur pour les associations religieuses ou d'utilité publique. Segmentée sur trois associations distinctes (ACSBN, ACSF et ACEP), elle sépare ainsi formellement ses activités cultuelles de ses activités culturelles. Cette distinction repose essentiellement sur la nécessité d'être reconnue comme association cultuelle à part entière.

Concrètement, les trois associations sont placées sous la tutelle d'une autorité morale, le Consistoire Soka du Bouddhisme Nichiren. Cette entité assure la représentation nationale des intérêts du culte du bouddhisme de Nichiren. Les trois associations sont dirigées essentiellement par des dirigeants français, d'origine française pour la plupart. Cette nouveauté a pour objectif de contrer les accusations qui désignaient la Sōka Gakkai comme une émanation locale d'un culte strictement japonais.

Sur le terrain, l'organisation est déployée sur l'ensemble de la France à peu près de la même manière depuis les origines du mouvement. Elle est constituée d'un réseau de réunions de discussions locales (zadankai) tenues par les fidèles, qui ont lieu chez les particuliers. Ces réunions, ouvertes à tous et libres d'accès, ont lieu une fois par mois et réunissent les fidèles, des amis ou de simples visiteurs autour d'une thématique d'étude ou d'un sujet d'ordre général. Les participants sont invités à relater leur expérience de la pratique au quotidien qu'elle soit ou non liée au sujet.

Les réunions de discussion sont animées par une équipe d'encadrement qui a la charge de l'organisation et de l'entretien de ces réunions. Elles sont ensuite regroupées en structures plus grandes de 3 à 5 réunions (les districts), elles-mêmes regroupées en chapitres, puis en centres régionaux, puis en régions. L'ensemble du dispositif est centralisé dans la région parisienne. A chaque échelon, une nouvelle équipe supervise l'échelon inférieur. Ces équipes sont constituées de responsables, cooptés et nommés par les équipes des échelons supérieurs. L'ensemble du dispositif national est coordonné par le C.E.P. (Comité Exécutif Permanent).

Les fidèles n'ont pas de statut officiel, et ne participent donc pas à la gestion de l'organisation dans le sens juridique du terme. Leur lien avec l'organisation reste informel et ne repose que sur la réception de l'objet de culte (le Gohonzon) qui est octroyé après quelques semaines, voire quelques mois de présence régulière aux réunions de discussion. Le réseau tient essentiellement sur des contacts personnels et des rencontres d'encouragement qui viennent s'ajouter aux réunions mensuelles au cours desquelles les équipes locales rencontrent individuellement les fidèles. Il est demandé aux fidèles une pratique quotidienne, et sont encouragés en fonction de leur ancienneté, ou de leur implication, à inviter des nouveaux venus en réunion de discussion.

Ne disposant pas d'une structure associative de membres, l'organisation repose sur les dons libres pour constituer son budget de fonctionnement. Ces dons libres sont encouragés une fois par an (sous le nom de zaimu) et lors de la remise des Gohonzons. L'organisation propose à la vente des articles religieux et des publications. Le budget couvre l'entretien du patrimoine immobilier de l'organisation, les frais de fonctionnement et une vingtaine de salaires. Il couvre aussi certains événements annuels tels que conférences, etc. L'essentiel des activités (réunions, déplacements, festivités, encadrement, accueil, etc.) est donc assuré par des bénévoles non-rémunérés. Le principe de cooptation des responsabilités et des critères de sélection interne sont basés sur la « qualité spirituelle et l'expérience bouddhique », et une grande concertation entre les différents départements (homme, femme, jeunesse) pour toutes les décisions importantes.

Après trente ans de présence sur le territoire français, la Sōka Gakkai, rebaptisée ACSBN (Association Cultuelle Sōka du Bouddhisme de Nichiren) revendique entre 10 000 et 20 000 participants [Thierry Mathé, Le bouddhisme des français..., L'Harmattan, 2005][9] à ses réunions mensuelles.

Au Japon

Au Japon, la Sōka Gakkai dispose d'un poids financier important, d'un groupe de presse et d'édition comprenant le Seikyo Shinbun (3e quotidien national japonais), et elle est à l'origine d'une formation politique présente dans les deux chambres de l'appareil législatif Japonais. Ce parti, le Nouveau Kômeitô, est composé de membres de la Sōka Gakkai et de personnalités politiques n'appartenant pas au mouvement, et représente la troisième force politique du Japon. Daisaku Ikeda et le Komeito ont joué un rôle important dans le rétablissement des relations diplomatiques entre le Japon et la Chine en 1972. Le Komeito s'oppose, entre autres, à la révision de la Constitution en vue de l'établissement du droit d'autodéfense collective - c'est-à-dire le rétablissement d'une armée japonaise. Les élections de juillet 2007 à la Chambre des Conseillers, ont divisé la Diète, avec d’un côté la coalition au pouvoir de centre droit Parti Libéral Démocrate-Nouveau Komeito qui contrôlait plus des deux tiers des sièges à la Chambre des Représentants et de l’autre l’opposition qui détient la majorité à la Chambre des Conseillers[10]. Depuis le 1er septembre 2009, la victoire du DPJ (Democratic Party of Japan) aux élections législatives a vu s'opérer un renversement historique du gouvernement en faveur de l'opposition qui détient désormais la majorité dans les deux chambres. Le Nouveau Komeito a perdu un tiers des sièges qu'il détenait et ne fait plus partie de la coalition au pouvoir.

Controverses et polémiques

Au Japon

Bien que les différents courants se réclamant de Nichiren soient anciens, aucun d'eux n'a connu de réel essor avant la fin de la deuxième guerre mondiale. Les organisations laïques bénéficièrent des dispositions législatives mise en place par l'administration américaine, et connurent alors un fort développement. La Sōka Gakkai fondée par Josei Toda, comme de nombreuses autres organisations laïques, a su tirer profit de ces dispositions qui ont mis un terme à la consubstantialité institutionnelle entre la tradition Shintoïste et l'autorité impériale.

La Nichiren Shoshu et ses émanations monastiques se sont enrichis grâce à la force financière et la notoriété de la Sōka Gakkai. Ceci a entrainé au Japon essentiellement, de nombreuses luttes d’influences intérieures entre factions politiques et religieuses, et extérieures contre les courants religieux rivaux et les groupes financiers qui les soutiennent. La Sōka Gakkai dispose d'un puissant groupe d'édition qui lui permet d'entretenir une image publique positive et de mener plusieurs campagnes médiatiques au sein de la sphère publique japonaise. En 2000, la sociologue Florence Lacroix déclarait que « La Soka Gakkai, c'est (...) une fortune estimée entre 500 et 700 milliards de francs, ce qui en fait la secte la plus riche au monde. » Elle concluait en affirmant que « la Soka Gakkai, première secte au monde par sa logistique et le degré de sophistication de sa stratégie, me semble être le prototype des sectes à venir. ».

La Sōka Gakkai est, depuis sa création, au cœur de nombreuses controverses politiques et financières. Ces controverses sont évoquées par les principaux organes de presse et de télévision japonais. Certains observateurs reprochent à la Sōka Gakkai un manque total de transparence et, paradoxalement, un désintérêt pour les rouages de la communication institutionnelle dans un pays où la collusion entre pouvoir politique, pouvoir économique et médias est régulièrement citée comme un modèle du genre[11].

En France

En France, la Sōka Gakkai s’est heurtée au modèle français de la laïcité, à sa tradition de vigilance face aux manipulations mentales, et à la méfiance des milieux catholiques ou laïques des organisations anti-sectes comme l'UNADFI. De nombreux traits de caractères spécifiques de la philosophie de l'organisation ont, d'emblée, rebuté les institutions françaises[12] et une grande partie de la sphère religieuse bouddhiste[13].

Au niveau social et local, la profession de foi par la conversion antagoniste (Jap. Shakubuku) est devenu le trait de caractère le plus rebutant. La réfutation systématique et le prosélytisme militant des débuts du mouvement en France, puis une certaine exclusivité doctrinale, ont entretenu la méfiance et l'hostilité du public vis-à-vis de la Sōka Gakkai française et de son action. Ce fait est reconnu implicitement par le président actuel de la Sōka Gakkai, qui signale en 2008 aux adeptes français que le langage véhément de Nichiren est à comprendre à la lumière du contexte de son époque, et dans le cadre de conflits entre bouddhistes, et qu'il ne doit pas être pris pour modèle par les adeptes occidentaux dans leurs relations avec les croyants d'autres religions[14].

En 1999, l'obligation de la récitation du mantra a été relevée aussi comme « dangereuse et objectivement déshonorante » pour la Sōka Gakkai par le Tribunal de Grande Instance d'Annecy, qui l'a donc déboutée sur le fond d'une plainte pour diffamation déposée en 1999[15]. Ce tribunal a même repris à son compte d'autres jugements du journaliste [réf. nécessaire] que l'organisation attaquait comme diffamatoires : outre les « effets aliénants » et « déséquilibre psychologique » générés par le mantra, « l'intolérance de la doctrine ajoutée aux sentiments de persécution » qui « envahit peu à peu les adeptes »[16].

Dans d'autres affaires, la justice a donné raison à la Sōka Gakkai dans des procès en diffamation contre des organes de presse, notamment pour des soupçons d'espionnages[17]. D'autre part, la Sōka Gakkai cite six autres jugements rendus entre 2003 et 2007 qui ont débouté les plaignants qui voulaient, selon elle, instrumentaliser l'appartenance du parent adverse à la Sōka Gakkai dans les contentieux de divorce[17],[18].

La suspicion qui entoure l'organisation conduit des associations anti-sectes comme l'UNADFI à déclarer : « La paix dans le monde est l’un des thèmes de base de la campagne de communication mise en place par la Sōka Gakkai dans le cadre de sa stratégie d’expansion mondiale. Afin de cultiver cette image, elle s’appuie sur l’ONU dont elle est une ONG, comme d’autres grands mouvements sectaires, et elle finance des projets culturels et éducatifs. »

Dans le cadre des commissions d'enquête parlementaires sur les sectes en France, le rapport de la MILS en 1995 stipule que : « la Sōka Gakkai prétend enseigner (malgré le schisme de 1990 [en fait, 1991] avec Nichiren Shoshu) la doctrine de Nichiren, moine bouddhiste du XIIIe siècle qui professait une version nationaliste et intolérante du bouddhisme ». Dans son rapport de 1999[19], elle indique : « la Sōka Gakkai est, par sa richesse, la troisième secte implantée en France : son patrimoine, acquis en partie grâce aux apports venant de l'organisation mère, représente 240 millions de francs [env. 36 millions d'euros], et son budget annuel atteint, certains exercices, une vingtaine de millions de francs [env. 3 millions d'euros] ». La Sōka Gakkai est de nouveau mentionnée dans le rapport 2005 de la Miviludes[20]. A la suite d'une action institutionnelle de la part de l'ACSBN et du Consistoire Soka du Bouddhisme Nichiren [21], il n'a plus été fait mention de la Sōka Gakkai dans les rapports successifs de la MIVILUDES dont la présidence a été renouvelée avec l'élection de Nicolas Sarkozy.

Notes et références

  1. Rapport parlementaire de 1999
  2. Rapport parlementaire de 1996
  3. Soka Gakkai sur le site de l'UNADFI
  4. Soka Gakkai sur le site de l'UNADFI
  5. Rapport parlementaire de la MIVILUDES 2007
  6. Rapport parlementaire de la MIVILUDES 2008
  7. Voir publications au Journal Officiel[1]
  8. Article du Woshington Post (Eng)
  9. Estimation 2008 d'après Th. Mathé et données ACSBN
  10. Ambassade du Japon en France
  11. Sōka Gakkai et les médias japonais, Takesato Watanabe, in Citoyens du monde, sous la direction de D. Machacek et B. Wilson, 2000, L'Harmattan
  12. Voir par exemple le rapport parlementaire de 1996, l'article du Dauphiné libéré du 11 octobre 1999, et le jugement rendu par le TGI d'Annecy le 13 décembre 2001.
  13. En France, la Sōka Gakkai n’est pas membre de l’Union des Bouddhistes de France.
  14. Troisième Civilisation (revue mensuelle de la Sōka Gakkaï), numéro de février 2008.
  15. Sôka Gakkaï, Jugement du 13 décembre 2001, Annecy
  16. Extrait du jugement du Tribunal de Grande Instance d'Annecy : « Attendu que le paragraphe consacré à l'éducation des enfants ne peut être qualifié de diffamatoire dans le mesure où il reprend des extraits du magazine "troisième civilisation" édité par la Sōka Gakkai; Attendu par contre que les méfaits de la pratique par la répétition à l'infini des mantras et la dénonciation de leur effet aliénant provoquant une rupture radicale des membres de l'association avec leur famille et des déséquilibres psychologiques appuyés par des interviews constituent des faits précis de nature à porter atteinte à la considération et contraires à l 'honneur puisqu' elles renvoient aux pratiques des sectes dangereuses pour les libertés individuelles; Attendu qu'il en va ainsi de la répétition des mantras décrit comme un "phénomène d'hypnose auto-suggestive qui crée des accoutumances et peut produire des effets aliénants", du "déséquilibre psychologique" qui résulte de la fréquentation de la Sōka Gakkai, de l'adhésion à cette religion qui "provoque, presque à coup sûr, ce genre de rupture radicale" avec les proches non pratiquants, de "l'intolérance de la doctrine ajoutée aux sentiments de persécution" qui "conduit les membres au "rejet de toute forme d'opposition. Petit à petit, la Sōka Gakkai envahit complètement leur vie" »
  17. a  et b Réponses de la Soka Gakkai, extraits des jugements.
  18. Extrait de l'arrêt de la Cour d'Appel de Douai : « Ainsi que précédemment relevé dans l’arrêt du 12 janvier 2006, si M. X… reconnaît être adepte du mouvement de pensée développé par l’Association Sōka Gakkai fondée sur une philosophie bouddhiste, il n’est pas démontré que ce choix qui relève de la seule liberté de pensée de conscience de l’intéressé aurait une influence néfaste sur sa fille, ni que celle-ci serait contrainte d’adhérer à des pratiques ou de supporter des règles contraires à son équilibre personnel et à son bon développement. Il convient d'ailleurs de rapporter que la mère était elle-même par le passé adepte du même mouvement. Celle-ci ne justifie par aucun élément que l'équilibre psychologique de l'enfant ait été malmené au domicile paternel.»
  19. http://www.assemblee-nationale.fr/dossiers/sectes/r1687.pdf Rapport parlementaire de 1999
  20. [http://www.miviludes.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_MIVILUDES_2005-2.pdf Rapport parlementaire de la MIVILUDES 2005
  21. Copie de la lettre officielle adressée à M. Roulet, président de la Miviludes

Voir aussi

Liens internes

Bibliographie

  • Travaux de chercheurs sur la Sōka Gakkai :
    • Karel Dobbelaere, La Sōka Gakkai, un mouvement de laïcs de l'école bouddhiste de Nichiren devient une religion, 2001, Elledici, Turin.
    • Louis Hourmant, « La relation à l'objet sacré dans un culte néo-bouddhique. La Sôka Gakkai française », Systèmes de pensée en Afrique noire (Paris), 12, 1993.
    • Louis Hourmant, « La Soka Gakkai, un bouddhisme "paria" en France ? », in F. Champion et M. Cohen, Sectes et Démocratie, Paris, Seuil, 1999.
    • Louis Hourmant, « Transformer le poison en élixir. L'alchimie du désir dans un culte néo-bouddhique, la Soka Gakkai française », in Françoise Champion, Danièle Hervieu-Léger, (dir.), De l'émotion en religion. Renouveaux et traditions, Paris, le Centurion. 1990, pp. 71-119.
    • David Machacek, Bryan Wilson, Citoyens du monde, le mouvement bouddhiste Sōka Gakkai au Japon, 2004, L'Harmattan, Paris.
    • Thierry Mathé, Le bouddhisme des Français : Le bouddhisme tibétain et la Sōka Gakkaï en France, contribution à une sociologie de la conversion, 2005, L’Harmattan, Paris.
    • Bruno Etienne, Raphaël Liogier, Etre bouddhiste en France aujourd'hui, 1997, Hachette, Paris.
  • Travaux de chercheurs étrangers :
    • Richard Hughes Seager, Encountering the Dharma: Daisaku Ikeda, Soka Gakkai, and the Globalization of Buddhist Humanism, 2006, University of California Press.
    • David Machacek et Bryan Wilson (sous la direction de), Global Citizens: The Soka Gakkai Buddhist Movement in the World, 2001, Oxford University Press.
    • Daniel A. Metraux, The International Expansion of a Modern Buddhist Movement: The Soka Gakkai in Southeast Asia and Australia, 2001, University Press of America.
    • Phillip Hammond et David Machacek, Soka Gakkai in America--Accommodation and Conversion, 1999, Oxford University Press.
  • Ouvrages de référence :
    • Gaston Renondeau, Histoire des moines guerriers au Japon, 1957, PUF
    • Gaston Renondeau, La doctrine de Nichiren, 1953, PUF
    • Henri-Charles Puech (sous la direction de), Histoire des religions, 1976, Gallimard (Pléïade)

Liens externes


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  • Soka Gakkai International — Sōka Gakkai (jap. 創価学会, dt. „Werteschaffende Gesellschaft“) ist eine buddhistische Religionsgemeinschaft, die 1930 in Japan gegründet, auf den Nichiren Buddhismus des Gelehrten und Reformers Nichiren (1222–1282) zurückgeht. Ursprünglich der… …   Deutsch Wikipedia

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