- Reconstruction (Première guerre mondiale)
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Reconstruction en France et en Belgique après la Première Guerre mondiale
La reconstruction en France et en Belgique après la Première Guerre mondiale, aussi appelée la Reconstruction, est la période lors de laquelle, durant une dizaine d'année et après une période de désobusage, il a fallu remettre en état les terres agricoles, les habitations et les infrastructures urbaines, portuaires, de transport, etc. Une partie du travail s'est faite sous l'égide du « Ministère des régions libérées », en lien avec le ministère des armées, avec l'aide dans un premier temps des alliés (et même sous l'autorité britannique dans le nord de la France, pour le désobusage), l'aide de prisonniers de guerre et d'une main d'œuvre immigrée. En France, la plupart des départements sinistrés (Ardennes, Meuse, Aisne, Somme, Vosges, Marne) ont bénéficié de la création de préfectures hors classes (d'août 1919 à février 1921), qui ont évalué et quantifié les dommages de guerre
Cette période semble assez mal représentée par les archives, et peu prise en compte par les nombreux historiens de la Première Guerre mondiale, probablement parce que la reconstruction mobilisait toutes les énergies et qu'on manquait de tout dans les zones rouges. Ceci pose problème pour le suivi des séquelles environnementales et sanitaires. Les communes comme les services de l'État ont par exemple oublié où ont été enterrés ou immergés des millions d'obus ou de déchets toxiques récupérés lors de la reconstruction des villes industrielles et des usines du nord de la France, et sur les champs de bataille.
Sommaire
Localisation en France
Fin 1918, 4 000 communes sont dévastées ou dégradées sur 3 337 000 ha dans dix départements ([1]).
En 1919, dans le cadre de la reconstruction le Ministère des régions libérées a publié produit une cartographie en trois niveaux de séquelles, représentés par trois couleurs.
- Zone bleues : Caractérisées par des dégâts moyens, ce sont les zones de passage ou de stationnement des armées, avec d’éventuels restes dépôts de munitions, de matériels, casemates ou déchets divers,
- Zones jaunes : Ce sont les zones brièvement ou ponctuellement touchées par les combats, généralement derrière les lignes de front ou éloignées, où les infrastructures routières sont à peu près fonctionnelles après l’armistice, malgré les tranchés, trous d’obus, ou des sols localement criblés de projectiles « souvent non éclatés »,
- Zones rouges : Ce sont les zones correspondant aux lignes de front des armées, où sont concentrés les dommages majeurs. Les sols y sont bouleversés, et les infrastructures routières, ferroviaires, industrielles, ainsi que ponts, ports et canaux y sont généralement totalement détruits (la dénomination Zone Rouge n’a donc pas pour origine principale le sang versé, ni le rouge des coquelicots qui poussaient sur la terre labourée et cent fois retournée par les obus, mais elle les évoque néanmoins inévitablement dans l’esprit de l’époque).
Il a fallu dans la Zone rouge nettoyer les sols des milliers de cadavres et de restes humains, qui seront - quand leur état le permettait - transportés dans les cimetières ou ossuaires. Une troisième priorité a été le désobusage qui s'est fait dans les onze départements touchés en même temps qu'était entamée, dans l'urgence souvent, la reconstruction des patrimoines bâtis et agricoles (le cheptel du nord et du nord-est de la France était décimé, et il a fallu reconstituer les poulaillers, les stocks de graines, etc.)
Image de désolation du bourg picard de Moreuil, totalement rasé lors de la seconde bataille de la Somme en mars 1918 (combats Castel et du bois Sénécat en particulier) et de la 3e bataille de Picardie en août 1918
Verdun, rue Saint-Pierre
Pont de chemin de fer de Bouillonville. Les infrastructures ont été systématiquement détruites, afin de rendre plus difficile les déplacements et l'approvisionnement de l'ennemi
Localisation en Belgique
Dans la continuité de la zone rouge française et pour les mêmes raisons, de vastes territoires ont été dévastés en Belgique. S'y poseront les mêmes problèmes qu'au nord de la France, sauf le manque de charbon fin 1918 et début 1919 grâce au fait que les réserves et infrastructures charbonnières belges avaient été relativement préservées par les Allemands, pour leurs besoins.
Comme en France, la reconstruction sera l'occasion de moderniser et industrialiser l'agriculture, et d'étendre la pénétration du téléphone, de l'électricité et de l'eau courante dans les campagnes.
Croquis de Léon Huygens, peintre belge, montrant les ruines de l'église de Nieuport.
Les étapes de la reconstruction
La reconstruction est urgente. Elle est rendue plus difficile par la grippe espagnole et le manque de tout dans le nord de la France.
Elle implique une recherche de fonds et des appels à la solidarité et au paiement des dommages de guerre, qui seront une préoccupation constante jusqu'à la fin des années 1920.
Alors qu'il faut aussi reconstituer les filières et moyens administratifs civils, accueillir les flots de milliers de réfugiés et déportés qui rentrent chez eux, aider les familles à se recomposer et à faire le deuil des très nombreux disparus, différentes étapes se sont succédé pour la reconstruction ; pas toujours dans le même ordre selon les lieux, les contextes, les besoins, les urgences et opportunités. La relative discipline apprise au cours de 4 ans de guerre a souvent facilité les choses, ainsi qu'un immense mouvement de solidarité de la part des pays alliés. Les sous-préfets rétablis dans leurs fonctions dressent mensuellement un état du moral de la population qu'ils adressent aux préfets qui en font une synthèse pour le ministre de l'intérieur.
Ces rapports montrent que les premières urgences ont été :
- la réquisition (ou réparation) de véhicules (dont carrioles à cheval) et de compétences (y compris chez les personnes âgées et les prisonniers de guerre, mais aussi chez des entrepreneurs étrangers, américains notamment qui offrent leurs services. Des ferrailleurs obtiendront des concessions pour la récupération des métaux, y compris des munitions, sous le contrôle des armées anglaises et américaines. Certains feront ainsi fortune.
- le nettoyage et un premier déminage des lieux stratégiques (l'armée allemande a souvent dans sa retraite saboté des installations et piégé des bâtiments, dont mairies et bâtiments administratifs)
- le rétablissement des axes de communication : Avec l'aide des armées alliées, de la population et de prisonniers de guerre, de milliers de coolies chinois (arrivés à partir de mi 1917 par trains spéciaux) puis de travailleurs immigrés du sud de l'Europe et d'ailleurs, on déblaye et répare (d'abord sommairement) les centaines de kilomètres de linaires de routes, de voies ferrées et chemins de halages localement ensevelis sous les ruines ou détruit par la guerre, en nivelant les sols et en comblant les trous d'obus et entonnoirs de mines avec le "tout-venant" récupéré sur place.
Cette étape a été entamée dès avant l'armistice là où cela était possible, et a bénéficié de l'aide des soldats encore présents et du travail de prisonniers de guerre. La restauration des voies ferrées et des gares a été dans ce cadre une priorité.
- Les industriels de retour commencent à relever leurs installations, ce qui prendra plus de 10 ans pour l'activité houillère. Il faut notamment restaurer les tuileries et briqueteries dont les carrières sont parfois truffées de munitions non explosées.
- Les agriculteurs et de nombreux habitants n'obéissent pas aux consignes du préfet qui demande qu'on attende les démineurs anglais avant de toucher aux munitions non explosées. Ils commencent, souvent avec l'aide des enfants à nettoyer leurs champs des ferrailles et parfois de cadavres qui les encombrent encore et à reboucher les tranchées. Des empilements d'obus et autres munitions se forment le long des routes, devant les mairies. Les maires en appellent aux sous-préfets. Le maire de Bailleul proteste ainsi parce qu'en février 1919, il attend toujours les 400 démineurs anglais qu'on lui a promis. Le préfet lui demande d'être patient et d'attendre les démineurs anglais sans toucher aux obus. Les soldats encore présents font pétarder des munitions dangereuses. Des centaines de milliers de tonnes de munitions s'accumulent dans des dépôts et chargées dans des trains ou camions vers des centres éloignés des maisons (dans les dunes de Zeebrugge en Belgique).
- mise en sécurité des ruines (c'est à dire souvent achever de les démolir)
- récupération de matériaux (dont le bois utile au chauffage pour l'hiver qui arrive, l'acier, les tuyaux de plomb, les briques et tuiles en assez bon état pour être réutilisés
- désobusage : c'est une des 3 priorités exprimées par le préfet du nord au ministre de l'intérieur, car on manque de tout mais surtout de démineurs, alors que des millions de munitions non explosées jonchent l'ancienne ligne de front et ses abords (de très nombreux obus n'explosaient pas à l'impact, et de nombreux stocks n'ont pas été tirés)
- Déminage, désobusage et remise en état des ports (Dunkerque, Boulogne, Calais, Ostende, Zeebrugge et des voies ferrées qui y conduisent. Ceci se fait sous le contrôle des armées anglaises et américaines. Le port de Dunkerque restera un temps anglais, puis pour moitié sous contrôle de Douglas Haig). On veut et doit utiliser ces ports pour accueillir les vivres, matériels et matériaux qui seront nécessaire à la reconstruction.
- Organisation de l'accueil des premiers habitants retournant chez eux (qui dès la fin 1918 affluaient avec leurs bagages dans les gares encore fonctionnelles, alors parfois que leur commune avait été littéralement rayée de la carte. Des bâtiments provisoires sont construits, dont préfabriqués en tôle ou en bois.
- rétablissement des moyens de communication (poste, téléphone, télégraphe)
- sommairement réparer les préfectures, sous-préfectures et mairies pour préparer le retour des habitants réfugiés dans d'autres régions. Les préfets réclament du charbon, du papier et du carton bitumé (pour remplacer les toitures crevées et vitres cassées, alors que l'hiver arrive). Les belges envoient une partie de leur charbon dans le nord où le bassin minier a été rasé par les allemands (sabotage méthodiquement organisé depuis plusieurs années)
- Le préfet du nord réclame des trains de viande congelée, et une assistance pour la reconstitution d'un cheptel bovin pour reconstituer celui qui avait disparu (à plus de 90 %)
- En Flandre maritime, il faut remettre en état les 7 000 hectares inondés entre Watten et Ghyvelde en 1914-1915, puis en 1918 à partir des eaux de l’Aa et de l’Yser
Notes et références
- ↑ A Demangeon, Le déclin de l'Europe, Paris, 1920 , p. 34
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Concernant le devenir des obus et munitions récupérées lors de la reconstruction :
- (en) Rapport OSPAR sur les munitions immergées - (carte en page 9 pour l'UE et la zone OSPAR) Titre : Overview of Past Dumping at Sea of Chemical Weapons and Munitions in the OSPAR Maritime Area / Version 2005 ......................(ou en format compressé)
- (en) Rapport OSPAR / Evaluation 1998 – 2006 (voir page Page 62 et suivantes)
Bibliographie
- La reconstitution des Régions libérées du Pas-de-Calais, situation au 1er janvier 1927, Hénin-Liétard et Carvin, imprimerie Plouvier et Chartreux, 1927.[AD PdC]
- Schommer P., La reconstruction des places d'Arras, L'Architecture 25 octobre 1924, p.276-282.
- Attagnant Sébastien, La Société coopérative de reconstruction des églises dévastées du diocèses d'Arras (1921-1943). Classement et présentation institutionnelle. Répertoire de la sous-série 10R21. 1998, 321 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Barbieux Guislain, Les entreprises de bâtiment et de travaux publics au sortir de la première guerre mondiale dans le département du Pas-de-Calais. 1999, 173 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Barbieux Stéphanie, Le service d'évaluation de dommages de guerre des communes : présentation et répertoire. 1999, 2 tomes, 44 p. et annexes, 277 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Beaucamp Philippe, La reconstruction du réseau électrique du Pas-de-Calais pendant l'entre-deux guerres (1918-1928). 1998, 198 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Bellanger Vincent, La reconstruction des mines de Lens (1918-1928). 1999, 304 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Bezeau Alain, Les chantiers de la reconstruction et la main-d'œuvre étrangère. 1999, 124 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Carpentier Philippe, La reconstruction agricole des champs de bataille de l'Artois (1915). 2000, 188 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Coquerelle Romuald, Les problèmes du ravitaillement en céréales dans le Pas-de-Calais à l'époque de la reconstruction (1919-1924). 1999, 164 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Cuvelier Laurence, La reconstruction de l'habitat urbain (à Carvin) après la première guerre mondiale. 1999, 166 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Desmedt Guillaume, La reconstruction de l'industrie métallurgique du Pas-de-Calais après la première guerre mondiale. 1999, 175 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Duquenoy Céline, Les sociétés coopératives de reconstruction dans le Pas-de-Calais au lendemain de la première guerre mondiale. 1999, 183 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Fauqueur Benjamin, Le retour des réfugiés et la reprise de la vie locale dans le Pas-de-Calais au lendemain de la première guerre mondiale. 1999, 183 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Fouache Julien, La reconstruction des hôpitaux du Pas-de-Calais après la première guerre mondiale : entre inertie et dynamisme d'une reconstruction. 1998, 193 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
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- Hollain Laurent, L'organisation administrative, technique et financière des compagnies minières sinistrées et de l'Etat dans l'œuvre de dénoyage des houillères du bassin du Nord-Pas-de-Calais : 1915-1927. 1998, 122 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
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- Lefevre Christophe, la reconstitution de Lens, un urbanisme timoré ? 1998, 238 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Legrand Sandrine, La reconstitution des voies ferrées d'intérêt local dans le Pas-de-Calais après la première guerre mondiale. 1998, 229 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Marconi Mireille, La reconstruction industrielle dans le Pas-de-Calais après la première guerre mondiale pour les entreprises de la filière bois. 1999, 84 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Normand Bertrand, L'aide étrangère au ravitaillement et à la reconstruction dans le Pas-de-Calais (1915-1924). 1998, 150 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
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- Sergeant Emmanuel, La reconstruction à Montigny-en-Gohelle après la première guerre mondiale. 1998, 111 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Theret Xavier, L'apurement des comptes de guerre des communes envahies du Pas-de-Calais (1920-1937). Répertoire de la sous série 10R3 et analyse institutionnelle. 1998, 188 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Trupin Samuel, La reconstruction agricole dans le canton de Bapaume de 1919 à 1929. 1999, 213 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Vaast Mathieu, Les mouvements sociaux sur les chantiers de reconstruction dans le Pas-de-calais (1919-1926). Grèves et syndicalisme. 1999, 110 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Vivard Doriane, La reconstruction à Hénin-Liétard après la première guerre mondiale. 1998, 110 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- Wiszkielis Karine, La reconstruction des écoles après la première guerre mondiale dans le Pas-de-Calais. 1998, 131 p. (Mémoires de maîtrise, Université d'Artois)
- (en) Smith, Corinna Haven & Hill, Caroline R. Rising Above the Ruins in France: An Account of the Progress Made Since the Armistice in the Devastated Regions in Re-establishing Industrial Activities and the Normal Life of the People. NY: GP Putnam's Sons, 1920: 6.
Images
- Archives départementales du Pas-de-Calais, Images de la reconstruction, Arras 1918-1934, Archives départementales du Pas-de-Calais, 1997.
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