- Arthur Rimbaud par Carjat
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Le portrait que réalisa le photographe Étienne Carjat (1828-1906) d'Arthur Rimbaud est l'image la plus universellement connue du jeune poète de Charleville. Elle a été si reproduite et si souvent utilisée pour symboliser la poésie, la jeunesse, la rébellion ou le romantisme, qu'elle a acquis un statut d'icône.
Sommaire
Historique
Arthur Rimbaud est à Paris depuis quelques mois, venu à l'appel de Verlaine, il a connu le photographe Carjat lors des dîners des Vilains Bonshommes. D'après Verlaine[1], le cliché aurait été pris en octobre 1871.
Carjat avait un atelier photographique rue Notre-Dame-de-Lorette et était, à cette époque, à l'instar de Nadar, un des portraitistes du milieu artistique. Il laissait ses modèles choisir leur pose et leur expression, sans leur imposer le moindre artifice[2]. On peut donc penser, que la pose de poète, le regard dans le lointain comme c'était courant à l'époque, a été le choix de Rimbaud. La photo est de petite taille, 8 × 4,2 cm en forme de médaillon.
Dans Avertissement à propos des portraits ci-joint de l'édition de 1884 des Poètes maudits de Verlaine, ce dernier la commente en ces termes :
« N'est-ce pas bien « l'Enfant Sublime » sans le terrible démenti de Chateaubriand, mais non sans la protestation de lèvres dès longtemps sensuelles et d'une paire d'yeux perdus dans du souvenir très ancien plutôt que dans un rêve même précoce ? Un Casanova gosse mais bien plus expert ès aventures ne rit-il pas dans ces narines hardies, et ce beau menton accidenté ne s'en vient-il pas dire : « va te faire lanlaire » à toute illusion qui ne doive l'existence à la plus irrévocable volonté ? Enfin, à notre sens, la superbe tignasse ne put-être ainsi mise à mal que par de savants oreillers d'ailleurs foulés du coude d'un pur caprice sultanesque. Et ce dédain tout viril d'une toilette inutile à cette littérale beauté du diable ! »
Postérité
On sait que suite à une grave brouille survenue entre Rimbaud et Carjat, ce dernier aurait détruit tous les clichés qu'il avait du jeune poète. Il reste cependant plusieurs, (huit ?), tirages anciens de cette photo, un au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France, qui avait appartenu à Paul Claudel. Un autre au Musée-Bibliothèque Arthur Rimbaud de Charleville-Mézières.
Sa première large publication a été faite en 1922 comme frontispice des Œuvres compètes de Rimbaud dans l'édition de la Bauderole.
Un autre portrait photographique, montrant un Rimbaud à l'allure plus jeune, serait peut-être aussi de Carjat, celui-ci en a effectivement réalisé des retirages. Mais le cliché original, un positif direct sur verre conservé au musée-bibliothèque de Charleville pourrait avoir été réalisé un ou deux ans avant la célèbre photo de Carjat par un photographe de Charleville[3], quoi qu'il en soit, cette photo, publiée dès 1906, n'a pas eu l'impact et la célébrité de celle de Carjat. Deux de ces clichés sont passés en vente publiques récemment : « En 1998, une photo-carte de visite de Rimbaud de 1871 a été vendue 191 000 francs. Le 24 janvier 2003, un autre portrait d'Arthur Rimbaud également de 1871 fut adjugé pour la somme de 69 000 euros (81 000 euros, frais inclus), toutes deux prises par Carjat »[4].
Ernest Pignon-Ernest s'en sert notamment en 1978-1979 pour un photomontage où il l'habille de manière contemporaine, dans une sérigraphie qu'il a affichée aux murs de plusieurs villes[5].
Autres photos de Rimbaud
Avec la photo découverte en 2008 et publiée le 15 avril 2010[6] le représentant sur le perron de l'hôtel de l'Univers à Aden et datée vers 1880, on connaît désormais neuf photos authentiques de Rimbaud :
- La photo de groupe de l'institution Rossat à Charleville, vers 1864
- La photo de premier-communiant, 1866
- Le premier portrait de Carjat dont il est fait état plus haut, vers 1870/1871
- La célèbre photo, sujet de cet article, 1871
- Trois photos au Harrar prises par Rimbaud lui-même, 1883
- La photographie prise à Scheick-Otman, près d'Aden, découverte en 1998[7], vers 1880
Exposition
La Galerie des bibliothèques de Paris organise, du 7 mai au 1er août 2010, l'exposition Rimbaudmania[8] consacrée à la présentation de la construction de l'image de Rimbaud, principalement le cliché de Carjat, comme icône universelle et à sa réutilisation moderne dans tous les secteurs culturels ou non.
Bibliographie
- Jean-Jacques Lefrère, Face à Rimbaud, Paris, Phébus, 2006, 184 p. (ISBN 978-2-7529-0217-7).
Étude de l'iconographie historique de Rimbaud
- Henri Matarasso et Pierre Petitfils, Album Rimbaud, Paris, Gallimard, coll. « Albums de la Pléiade », 1967
Iconographie commentée
- Martine Boyer-Weinmann, « Le Rimbaud de Carjat : une photofiction biographique », dans Recherches & Travaux, vol. 68 « Fictions biographiques et arts visuels, XIXe ‑ XXIe siècles », 2006, p. 87–95 (ISBN 2-9518254-8-X)(ISSN 0151-1874) [texte intégral]
Actes du colloque à l'Université Stendhal-Grenoble 3, 11–14 mai 2004
- Claude Jeancolas, Rimbaudmania, Paris, Textuel, 2010, 350 p. (ISBN 2845973683).
L'éternité d'une icône : étude et recensement de l'utilisation moderne de l'image de Rimbaud, notamment du cliché de Carjat
Notes et références
- Charles Morice et dans l'introduction des Poètes maudits publié en 1884. Dans une lettre de 1883 à
- Lefrère 2006, p. 36.
- Lefrère 2006, p. 28.
- Étienne Carjat », sur caricaturesetcaricature.com. Jean-Marc Pau, «
- Rimbaud 1978-1979 », sur le site d'Ernest Pignon-Ernest. «
- Article sur le site Histoire-Littéraire [PDF]
- Notice lors de sa mise en vente publique
- Site officiel de l'exposition
Liens externes
- Alain Bardel, « Les photos de Rimbaud », sur abardel.free.fr
Catégories :- Portrait photographique
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