- Arnold Pannartz et Konrad Sweynheim
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Arnold Pannartz et Konrad Sweynheim[1] sont deux imprimeurs allemands du XVe siècle., qui ont introduit l’imprimerie en Italie.
Leurs dates de naissance et de mort sont inconnues[2]. Arnold Pannartz[3] vient des environs de Francfort, dans la localité de Schwanheim : Sweynheim vient d’Eltville à côté de Mayence. On ne sait s’ils se connaissaient avant de partir en Italie ; ils ont vraisemblablement été formés à la typographie à Mayence dans le ou les ateliers de Gutenberg, Fust et Schöffer, et obligés de la quitter après le sac de la ville les 27-28 octobre 1462 ; mais il n’y a aucune certitude à ce sujet.
C’est Juan de Torquemada, dominicain, ancien étudiant à Paris et défenseur des prérogatives de la papauté aux conciles de Constance, Bâle et Florence, cardinal depuis 1439, qui les fait venir en Italie : il est abbé commendataire du monastère bénédictin Santa Scholastica à Subiaco depuis 1455, un monastère qui accueille beaucoup de moines étrangers, allemands notamment. Subiaco dispose d’une bibliothèque et d’un scriptorium, avec la présence de copistes.
Pannartz et Sweynheim arrivent à Subiaco en 1464. Ils y ont peut-être imprimé un Donat dès 1464[4], mais le premier livre imprimé sur les presses de Subiaco et conservé est l’édition latine de Lactance en 1465 ou celle du De Oratore de Cicéron paru la même année.
Ils impriment dans un caractère romain hybride : dans le De Civitate Dei de 1465, ce romain est encore marqué par l'épaisseur et l'étroitisation du tracé des caractères gothiques ; à partir du Lactance imprimé en 1468, le tracé est plus fin et plus arrondi, proche de l'écriture humanistique manuscrite des Italiens[5].
Impressions de Subiaco Date Auteur, œuvre Remarques 30 octobre 1465 Lactance, Institutions divines et autres œuvres édition princeps 1465, avant le 30 septembre ? Cicéron, De Oratore 12 juin 1467 saint Augustin, De Civitate Dei édition princeps En 1467, les deux imprimeurs quittent Subiaco pour s’installer à Rome où Francesco et Pietro de’ Massimi mettent leur palais à leur disposition[6].
Beaucoup des impressions de Pannartz et Sweynheim sont des éditions princeps d’auteurs classiques. Pour la préparation de leurs éditions, ils travaillent en étroite collaboration avec Giovanni Andrea Bussi, évêque d'Aléria, qui est leur éditeur scientifique et correcteur d’épreuves. Bussi s’était fixé pour objectif la publication de tous les grands textes latins, afin de mettre rapidement les textes de base à la disposition des étudiants et érudits les moins fortunés, le coût des livres imprimés étant inférieur à celui des manuscrits[7]. Bussi cherchait les manuscrits, en obtenait de leurs possesseurs le prêt, déterminait les meilleures versions, établissait le texte et corrigeait les épreuves. Ses contemporains lui ont reproché la hâte avec laquelle préparait l'édition scientifique des textes : Niccolò Perotti (1430-1480) critique ainsi vivement l’édition de 1470 de l’Histoire naturelle de Pline, et la seconde édition de ce texte en 1473 chez Pannartz et Sweynheim sera celle de Perroti[8]. Bussi était lui-même conscient de ces imperfections et cherchait à améliorer ses rééditions.
Impressions de Rome Date Auteur, œuvre Remarques Rééditions 1467 Cicéron, Epistolae ad familiares 4 novembre 1469 ; 5 septembre 1472 13 décembre 1468 saint Jérôme, Lettres éd. de Bussi 1470 ; 28 mars 1476 1468 saint Augustin, De civitate Dei 1470 1468 Lactance, Institutions divines et autres œuvres 1470 1468 Rodrigo Sanchez de Arevalo, Speculum vitae humanae 1468-1469 Cicéron, De oratore 12 janvier 1469 Cicéron, Brutus 24 janvier 1469 Cicéron, Des Devoirs 28 février 1469 Apulée, Œuvres édition princeps ; traduction latine de Pietro Balbo 11 avril 1469 Aulu-Gelle, Œuvres édition princeps ; éd.de Bussi 6 août 1472 12 mai 1469 César, Commentaires éd. par Bussi 25 août 1472 avant le 13 septembre 1469 Bessarion, Adversus calumnatiorem Platonis édition princeps 4 novembre 1469 Cicéron, Epistolae ad familiares éd. par Bussi 5 septembre 1472 1469 Lucain, Pharsale édition princeps ; éd. de Bussi 1469 Virgile, Œuvres : Bucoliques, Géorgiques, Énéide édition princeps ; éd. par Bussi 1471 circa 1469 Tite Live, Décades édition princeps par Bussi des livres 1-10, 21-32, 34-39 16 juillet 1472 avant le 30 août 1470 Cicéron, Lettres à Brutus, à son frère Quintus, à Atticus éd. de Bussi 7 décembre 1470 Thomas d'Aquin, Catena Aurea 1470 Léon Ier, Sermons et 'Lettres 1470 Pline l'Ancien, Histoire naturelle texte éd. par Bussi 7 mai 1473 (texte édité par Niccolo Perroti) 1470 Suétone, Vie des douze Césars éd. de Bussi 17 septembre 1472 circa 1470 Martial, Épigrammes 30 avril 1473 circa 1470 Quintilien, Institution oratoire éd. de Bussi 5 avril 1471 Silius Italicus, Punica éd. de Bussi 1471 Bible, latin éd. par Bussi 1471 Cicéron, Discours éd. par Bussi 1471 Cicéron, Œuvres philosophiques 1471 saint Cyprien, Œuvres éd. de Bussi 1471 Ovide, Œuvres éd. par Bussi 1471-17472 Nicolas de Lyre, Postilles sur la Bible éd. de Bussi 6 septembre 1472 Justin, Épitome 6 octobre 1472 Térence, Comédies 17 novembre 1472 Roberto Caracciolo, Sermons 10 décembre 1472 Donat, Commentaire sur les Comédies de Térence 1472 Cicéron, Philippiques circa 1472 Hésiode, Œuvres en latin 2 janvier 1473 Aristote, Éthique à Nicomaque en latin ; édition princeps 12 février 1473 Strabon, Géographie éd. de Bussi 19 mars 1473 Niccolo Perroti, Rudimenta grammatices 25 septembre 1473 Salluste, Œuvres 30 décembre 1473 Polybe, Histoires en latin ; traduction de Niccolo Perroti 1473 Plutarque, Vies parallèles en latin ; éd. de Bussi 20 avril 1475 Hérodote, Histoires 13 août 1475 Stace, Silves On sait par une supplique adressé au pape Sixte IV en 1472[9] qu’ils sont confrontés à la mévente de leurs livres dans un marché qui n’est pas encore organisé, avec des stocks d’invendus. Ils pâtissent par ailleurs de la concurrence d'un autre imprimeur d'origine allemande, Ulrich Hahn, qui éditait comme eux les textes de l'Antiquité grecque et latine[10].
En 1475, Pannartz et Sweynheim ont publié au total plus de 40 titres en latin : auteurs classiques grecs et latins essentiellement ; une Bible ; quelques Pères de l’Église et quelques textes religieux. Leurs éditions ont un tirage de 275 à 300 exemplaires, ce qui représente au total entre 12000 et 14000 volumes imprimés.
Leur association est dissoute en 1475.
Arnold Pannartz publie en 1474-1476 neuf titres sous son nom seul :
- Niccolo Perroti, Rudimeta grammatices, 1474 ; réédition le 25 février 1476 ;
- Sénèque, Lettres à Lucilius, 1er février 1475 ;
- Indulgences des principales églises de Rome, 1er février 1475 ;
- Lorenzo Valla, Elegantiae linguae latinae, 2 juillet 1475 ;
- Thomas d’Aquin, De veritate fidei, 10 septembre 1475 ;
- Flavius Josèphe, De Bello judaico, 25 novembre 1475 ;
- Thomas d’Aquin, Quaestiones de veritate, 20 janvier 1476 ;
- saint Jérôme, lettres, 28 mars 1476 ;
- Boninus Mombritius, De origine et temporibus urbis Romae, sans date.
Domizio Calderino, dans la préface de son édition de la Cosmographia de Ptolémée, imprimée à Rome en 1478 par Arnold Bucking, indique que c’est Konrad Sweynheim qui a supervisé la gravure des 27 cartes gravées sur métal.
Bibliographie
- Giovanni Andrea Bussi, Prefazioni alle edizioni di Sweynheym e Pannartz, prototipografi Romani, é. M. Miglio, Milan, 1988.
- Edwin Hall, Sweynheym and Pannartz and the Origins of printing in Italy : German technology and Italian humanism in Renaissance Rome, Phillip J Pirages, 1991
- M. Davies, « Two book-lists of Sweynheym and Pannartz », dans Libri tipografi biblioteche. Ricerche storiche dedicate a Luigi Balsamo, Leo S. Olschki, 1997.
Notes
- ou Sweynheym.
- Il est parfois indiqué que Pannartz meurt vers 1476, Sweynheim en 1477. En fait d'après les éditions conservées, leur collaboration semble avoir cessé après 1475, Pannartz publiant encore sous son nom seul en 1476.
- Il est parfois indiqué comme né à Prague.
- D'après leur supplique de 1472.
- Yves Perrousseaux, Histoire de l'écriture typographique, 2005, p. 100-101.
- Les éditions portent à l’adresse : « In domo Francisci et Petri de Maximis » ou « In domo Petri de Maximo ».
- Paul II des Lettres de saint Jérôme, Bussi loue l’imprimerie qui « en multipliant les chefs-d’œuvre de l’antique littérature, en a tellement abaissé les prix, qu’un ouvrage qui coûtait autrefois cent écus d’or en vaut à peine vingt, et bien imprimé encore, et purgé de ces fautes grossières qui le déshonoraient quand il était à l’état de manuscrit. » En 1468, dans sa dédicace à
- John Monfasani, « The First Call for Press Censorship : Niccolo Perotti, Giovanni Andrea Bussi, Antonio Moreto, and the editing of Pliny's Natural History », dans Renaissance Quarterly, 41:1, printemps 1988, p. 3.
- « (…) nous avons imprimé, pendant notre séjour à Rome, un grand nombre d’ouvrages dont nous allons vous rappeler les titres dans l’ordre de leur publication : Donat, notre premier livre, à l’usage de l’enfance, tiré à 300 exemplaires, Lactance, tiré à 825 ; les Épîtres familières de Cicéron, tirées à 550 (…). Désormais il nous est impossible de subvenir aux dépenses énormes de notre établissement, si les acheteurs nous manquent ; notre maison, bien vaste pourtant, est encombrée de piles de ballots, c’est la meilleure preuve que nous ne vendons pas. Que votre inépuisable charité vienne à notre aide, afin que nous puissions vivre et faire vivre les nôtres. » ; ils indiquent posséder un stock de 12475 feuilles invendues.
- Henri-Jean Martin, La naissance du livre moderne (XIVe-XVIIe siècle), 2002, p. 29. À la suite de cette crise de surproduction, Hahn s'oriente vers l'édition de type administratif : mandements, brefs et autres documents pontificaux.
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