- Pierre-François Moreau (écrivain)
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Pierre-François Moreau, né en 1954 à Alger, est un écrivain, réalisateur, scénariste français.
Sommaire
Biographie
Pierre-François Moreau fait ses débuts comme nouvelliste[1] et auteur de théâtre[2]. En 1981, il est à l’origine d’Acte Gratuit[3], l’un des premiers gratuits parisiens de textes littéraires[4] et d’images[5]. Au cours des décennies suivantes, il collabore à bon nombre de journaux et magazines[6] essentiellement sur des sujets culturels, avec une prédilection pour la chronique d’art[7] et la chronique littéraire[8]. Il publie plusieurs livres, recueil de nouvelles, roman, biographie, livres d’artistes[9]. À partir des années 2000, il se concentre sur des activités artistiques autour de l’écriture, l’image et le son, réalise un film documentaire de création, et collabore à d’autres pour diverses maisons de production[10], participe à des spectacles chorégraphiques[11], effectue des recherches formelles en photographie[12].
Noirceur et dérision
En dépit d’un apparent foisonnement formel auquel l’auteur paraît s’ingénier, on retrouve cependant dans l’ensemble de ses œuvres le fil rouge de la noirceur et de la dérision, le sens de la chronique, un style tendu non dénué de poésie[13].
Ce goût pour l’univers du polar est donc récurrent. Un certain nombre de textes publiés dans Acte Gratuit sont des nouvelles noires[14]. Avec le photographe Serge Van Poucke, disparu tragiquement en 1986, il réalise Ni Est Ni Ouest[15], un roman photo polar en polaroïd noir et blanc où, dans un climat de guerre froide, se mêlent services secrets, trafic d'héroïne et dérision. Un même type d’univers est à l’épreuve dans Vertige de l’inaction, publié en 1999, dans des nouvelles comme Naples, calibre 7.65, ou Transe sibérienne, ou encore À louer, le plus bel endroit pour mourir. Dans un texte de la même époque, publié en 2010, Le Duende frappeur[16], se croisent la noirceur, la recherche de l’extase, le trouble de la nuit andalouse et l'ironie d’existences dérisoires.
Ce même grincement, souvent nappé d’une fausse naïveté, est aussi à l’œuvre dans sa pièce télévisuelle, Agression nocturne[17], qui tranche d’ailleurs avec le reste de la série. Et plus encore dans son film Vigàta dov’è ? (Vigàta, c’est où ?) un documentaire de création, réalisé en 2003 avec Costanza Matteucci, sur Vigàta, une ville qui n'existe pas sinon dans l'œuvre de l’écrivain sicilien Andrea Camilleri, dont il compose la musique. "Ces musiques sont ce qui m'a le plus frappé, me rappelant les premiers Tuxedomoon (un groupe que j'aime beaucoup) et soulignant les vagabondages de ce personnage anguleux (Pierre-François Moreau) qui met en crise tous les vieux Siciliens qui ne savent expliquer où se trouve cette fantomatique Vigàta", écrit Pietro Izzo[18]. Ce film est surtout l’occasion de déployer autour d’une dérive d’apparence poétique tout un registre de l’univers noir : les mafieux siciliens, les escroqueries aux bâtiments et infrastructures inachevés, le trafic, les clandestins…, dans la région d’Agrigente, l’une des plaques tournantes de la pègre du sud de la Sicile. Rappelons qu’Andrea Camilleri n’est pas seulement l’un des écrivains de polars les plus appréciés d’Italie, mais aussi une sorte de dandy octogénaire excentrique, à rebours de l’affairisme berlusconien.
Biographe de malfaisants
Entre autres biographies écrites par Pierre-François Moreau, on compte celle, remarquée à sa parution en 1987, de Porfirio Rubirosa « le plus doué des étalons du monde occidental…/… gendre du dictateur Trujillo, un des plus sanguinaires du siècle, diplomate-sic, homme de main du Benfactor, indic à ses heures… Sa biographie est exemplaire » écrit le Canard Enchaîné[19]. Autre personnage que Pierre-François Moreau a passé au crible, est Richard Chanfray[20] le faux chanteur d’opérette des années 70, amant entre autres conquêtes de la chanteuse Dalida, plus connu sous le sobriquet de Comte de Saint-Germain, prétendument détenteur de l’élixir de vie éternelle, mais véritable escroc qui finit suicidé le 20 juillet 1983. Ou encore, Claude Buffet[21], voleur fétichiste de sacs à main, avant de passer assassin, notamment lors d’une célèbre prise d’otages à la prison de Clervaux, et qui terminera sur la guillotine le 28 novembre 1972, après avoir réclamé son exécution.
Recherches formelles
En 1995, il publie Feu le manifeste[22] qu'on retrouve dans le recueil Vertige de l'inaction ; une "plongée en apnée dans les affres de la création littéraire"[23]. Ce "manifeste" est un ensemble de pensées, d’anecdotes, d’aphorismes sans narration apparente, qui trouve sa cohérence dans sa diffraction. Cette approche se retrouve dans d’autres textes Mais comment devenir un homme belvédère ? ou Le cercueil de ma petite mort, publiés en bilingue dans la revue italienne Private[24], ou encore Bilan de compétences [25]. Il compose une œuvre chargée d’intensité, que des critiques comme Jean-Luc Bitton[26] ont présenté comme "savoureuse, teintée d'humour et d'autodérision, au fil desquels l'auteur fait montre d'un sens avéré de la formule".
En 2001, il publie Les Mal Passés, chez Jean-Paul Rocher éditeur, roman en forme de récit sur son enfance en Algérie durant la guerre et le retour en France avec sa famille. Comme le détaille le critique Jean-Luc Moreau de Bibliomanie[27], on y retrouve une composition par diffraction : "Il s'agit d'une suite de tableaux qui compose une chronique, un roman. Alger d'abord, Paris, ensuite, durant la période 58-62. C'est la vie d'un petit garçon par petites scènes, mais qui sont chacune un tout. Il y a à la fois une continuité qui est celle de la chronologie, de l'ambiance de l'époque, de la vie familiale, et aussi une atmosphère particulière à chaque scène qui ont chacune leur autonomie, comme des miniatures, avec des échos, des parallèles qui sont posés comme autant d'indices qui composent une mosaïque. Et c'est extrêmement bien fait. Il y a bien sûr les souvenirs d'Alger, mais les souvenirs de la venue en France sont aussi très intéressants, parce qu'il y a beaucoup de signes ressentis par le jeune garçon, et par sa sœur, qui découvrent sans comprendre pour quelles raisons ils sont en fait mal acceptés, mal passés…[28]" Le texte est salué par la critique pour son style[29] et « une vision poétique du pire », selon Valérie Colin-Simard, que Psychologies magazine classe parmi les "1000 livres essentiels"[30].
Bibliographie
- Romans, nouvelles, document
- Les Mal Passés, roman, Jean-Paul Rocher, éditeur, Paris, 2001, (ISBN 2-911361-39-3)
- Vertige de l'inaction, nouvelles, Jean-Paul Rocher, éditeur, Paris, 1999, (ISBN 2-911361-20-2)
- Bilan de compétence, nouvelle, recueil Freak Wave, éditions Orbis Pictus club, Paris, 2008, (ISBN 2-913063-25-X)
- 42,195, recueil Les Ironies du sport, Hachette, Paris, 1998, (ISBN 2012093505)
- Feu le manifeste, nouvelle, illustré par Jean Murgue, édition Yéo, un livre d'Alin Avila, Paris, 1995
- Ricardo, connais pas, recueil Titre en cours, illustré par Ricardo Mosner, éditions Champfleury, Paris, 1993
- Just a gigolo, Rubirosa, le dernier des play-boys, biographie en collaboration avec Pierre Delannoy, ouvrage sous la direction de Gilles Hertzog, éditions Olivier Orban, Paris, 1987, (ISBN 978-2855653679)
- Carnet d’un fétichiste, dans le recueil Paris Mode d’Emploi, éditions Autrement, 1983, (ISBN 2-86260-055-5).
- Film documentaire
- Vigàta dov'è? (Vigàta, c'est où?), 53 min, 2003, un film documentaire réalisé par Costanza Matteucci et Pierre-François Moreau, production La Luna, diffusion La Huit Production.
Nominations
- Sélectionné en compétition française au 26e festival international, Cinéma du Réel, 2004, Centre Georges-Pompidou, Paris : Vigàta dov'è? (Vigàta, c'est où?), 53 min.
- Sélectionné en compétition italienne au 21e Torino Film Festival, festival international du film de Turin, 2003 :Vigàta dov'è? (Vigàta, c'est où?), 53 min.
- Sélectionné en compétition italienne au 1er festival de Syracuse, Il Premio Speciale, Sud-Est Sicilia, 2004 :Vigàta dov'è? (Vigàta, c'est où?), 53 min.
- Invité spécial 4e festival international du film insulaire de l'île de Groix, 2004 :Vigàta dov'è? (Vigàta, c'est où?), 53 min.
- Invité spécial du Mois du documentaire, Aubenas, novembre 2004 :Vigàta dov'è? (Vigàta, c'est où?), 53 min.
Bourses et distinctions
- 2000 : Pierre-François Moreau a obtenu une bourse du Centre national du livre (CNL).
- 2000 : Pierre-François Moreau a obtenu une Mission Stendhal du ministère des Affaires Étrangères.
- 2004 : Pierre-François Moreau a obtenu une bourse du Centre national du livre (CNL).
Notes et références
- Libération 18 mai 1981. Rencontre dans une fête, Libération, 19 juin 1981. Rêve d’autoroute, Libération, 27 juillet 1981. Réveil matin chagrin!
- Avignon, où "deux femmes se font et se défont au travers de leurs rêves et de leurs illusions", Le Provencal, 21 juillet 1979. Avec Marie Giamarchi et Myriam Dumaine, pièce en six tableaux conçue par Marie Giamarchi, écrite par Pierre-François Moreau au Foyer Intra-Muros. En 1985, il écrit une pièce radiophonique La sincérité ne se vend pas en tube Les Mille et Un Jours, France-Inter. Avec Didier Rousset, Michel Bonnet, Michèle Matis, Claris Lernoux, réalisation Bernard Latour, première diffusion, 29 mai 1985. En 1979, Lazy Cargo, sa pièce à deux personnages est jouée au Festival off d’
- 6 numéros parus entre décembre 1981 et mars 1984.
- Thierry Marignac et le photographe Serge Van Poucke, dans lequel on retrouve les signatures d’Hervé Prudon, Édouard Limonov, Alain Bashung, Christian Vila, Jean Baudrillard… Avec l’écrivain
- Xavier Lambours, Stephane de Jaeger… Les signatures des peintres Pascal Doury, Tolsti, Alain Braun… Celles des photographes
- Libération, Actuel, Zoulou, Globe, Marianne, Mouvement, Frictions… Notamment :
- Notamment à City Magazine, 7 Paris, Reflex, Vis-à-vis international… Voir aussi les catalogues sur les artistes : Kishida, Affaires culturelles de Fontenay-sous-Bois, janvier 1994, Jean Murgue, galerie Sud, mars 1994, Laurent Thomas, le Duc des Lombards, Paris, 1993, Laurie Karp, Centre culturel de la Visitation, Périgueux, novembre 1999, Salon de l'Ephémère, 10 ans, 1999.
- Notamment à l'Événement du jeudi.
- Alin Avila, 1995. Titre en cours, illustré par Ricardo Mosner, éditions Champfleury, 1993. Feu le manifeste, illustré par le peintre Jean Murgue, éditions Yéo, un livre d'
- La Huit Production, avec les réalisateurs Gilles Le Mao, Guillaume Dero, Fleur Albert, Leila Morouche… ainsi que Scherkhan Production, Lambart Productions… Depuis 2006, il collabore à plusieurs longs métrages documentaires et de fiction, notamment pour
- Brest, 2004, avec la danseuse Christine Quoiraud. "Christine Quoiraud formule une conception originale de la danse qui replace le corps dans le paysage par la marche. Pour elle, la marche est une errance attentive, un vagabondage expérimentale, une déambulation rituelle, un nomadisme poétique" (extrait du catalogue). Chercheurs d'art en mouvement, La Soufflerie, Poitiers, 2003, avec les danseurs Christine Quoiraud et Julien Bruneau, atmosphères musicales issues du synthétiseur de Pierre-François Moreau", Centre Presse, 19/21 avril 2003. Festival les Antipodes de
- Images visibles sur le site Phovoir-images.com
- Notons qu'il a écrit plusieurs textes de chansons, notamment pour le groupe Pierrot le Fou, et le chanteur Tao Ravao, sur les albums Love Call, Tany Manga, Lazao Izy, ou encore Anis Trio. Une sélection de ses œuvres, paroles et musiques, sont disponibles à l'écoute sur www.myspace.com/pierrefrancoismoreau
- Entre autres nouvelles noires publiées : Etre un vautour sans elle, Caméra manivelle, Sous le signe du Cancer.
- L’Écho des Savanes, n°31, 1985, 8 pages.
- [1] Accessible sur Chroniques Marignac
- TF1, 6 mars 1990. Multi-diffusée notamment sur la chaîne 13 eme Rue. Agression nocturne, un épisode de la série Tribunal, production TéléImages. Première diffusion
- [2] Pietro Izzo sur
- Bernard Frank, Le Monde, juillet 1987. Le Canard Enchaîné, 29 juillet 1987. "Je vous (la) recommande" Digressions par
- Mortelles Vanités, enquête sur Richard Chanfray,Rolling Stone, n°12, décembre 1988, 7 pages, ISSN 0988-4939.
- Claude Buffet, Autoportrait à la guillotine, enquête publiée dans Libération magazine n°9, 4 février 1995, 5 pages.
- Un texte illustré par le peintre Jean Murgue, éditions Yéo, un livre d'Alin Avila
- Jean-Luc Bitton, Spray.fr, 23.12 1999
- [3] Private n°19, 2000, et n°22, 2001. ISSN 1126-4349.
- Aux éditions Orbis Pictus Club, Freak Wave, 2008
- Jean-Luc Bitton, Routard.com, novembre 2001. Page des Libraires, septembre 1999 : "Des textes savoureux teintés d'humour et d'autodérison, au fil desquels l'auteur fait montre d'un sens avéré de la formule". Encre Vagabonde, décembre 1999 : "Ces textes, unis par une cohérence de ton, montrent bien les diverses facettes du travail de nouvelliste et la richesse de ce genre exigeant". Spray, Jean-Luc Bitton, décembre 1999 : "Assurément Pierre-François Moreau possède tout ce qui fait le talent d'un bon nouvelliste : une plume ciselée, nerveuse et évocatrice".
- Radio Libertaire, 15 novembre 2001.
- Malpasset, la rupture du barrage près de Fréjus en décembre 1959. Le titre fait référence à la tragédie de
- Jean-Marc Adolphe, Mouvement n°15, janvier 2002. "Un livre qui sonne juste". Jean-Luc Porquet Le Canard Enchaîné, 13 mars 2002. "Délicieuse chronique",
- Psychologies magazine, n°203, décembre 2001, p.28. 1000 livres essentiels,
Catégories :- Écrivain français du XXIe siècle
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