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Martyrs de la guerre d'Espagne
Les martyrs de la guerre d'Espagne sont des catholiques espagnols, principalement des religieux, exécutés par les républicains durant la guerre d'Espagne (1936-1939), et reconnus comme tels par l'Église catholique. Ces catholiques sont morts en raison de leur foi selon l'Église catholique, en raison de leur soutien au camp nationaliste selon les républicains. L'église catholique reconnait 977 martyrs pendant la guerre d'Espagne.
Sommaire
Contexte historique
Au début du XXe siècle, les courants laïques et républicains sont honnis par les religieux qui entreprennent une "croisade" à leur encontre, prémice de la future "croisade" franquiste contre la "vermine rouge" [1]. Ainsi, le général franquiste Moscado déclare en 1938 à Saint-Jacques-de-Compostelle : "Devant toi, saint Jacques, qui nous encourageas dans les moments pénibles de la guerre et qui guides le Généralissime, nous venons proclamer nos convictions catholiques et nationales face aux négations judaïsantes et cosmopolites."[1]
Guerre civile
Les prêtres et les religieuses sont en effet parmi les victimes des massacres ayant eu lieu, au début de la guerre civile, dans les zones loyalistes et notamment en Catalogne [2].
Selon l'historien Benoît Pellistrandi, « l'essentiel des assassinats de prêtres et religieux a eu lieu en août, septembre, octobre 1936, à un moment où l'appareil d'Etat s'effondrait et faisait place à des règlements de comptes de villages et de quartiers, où on tuait autant d'instituteurs républicains, humanistes et laïcs, que de curés. »[1]
D'après Antonio Montero[3], 13 évêques, 4 184 prêtres, 2 365 moines et 283 religieuses ont été assassinés pendant cette période [4]. Selon l'historien Guy Hermet [5], les victimes qui ne portent pas l'habit religieux sont plus nombreuses encore et « le simple fait d'être repéré comme catholique notoire constitue une preuve de culpabilité ».
Selon l'historien Bartolomé Bennassar, « le soulèvement du 18 juillet ne fut pas la source de la persécution ». Dès 1931, des centaines d'églises avaient été détruites. Pour cet universitaire, « il existait bel et bien un projet de destruction de l'église catholique et de la religion » [6] et impute une grande responsabilité aux anarchistes, particulièrement actifs en Aragon, Catalogne et à Valence. Cette affirmation est contredite par l'historien Benoît Pellistrandi selon lequel, "il n'y a pas eu en Espagne de plan concerté et organisé de persécution antichrétienne"[1].
Durant l'été 1936, de 7 000 à 8 000 religieux (prêtres, religieuses) ainsi que 2 000 phalangistes sont exécutés en zone républicaine, hors de tout combat ou représailles en raison de fusillade du camp adverse[7]. Le gouvernement légal ne condamne pas un seul instant ces crimes commis par ses propres partisans que ce soient par les milices syndicales - les patrouilles de l'aube - ou par de simples meneurs pour lesquels le simple fait de porter la soutane vaut arrêt de mort [8] [1].
Des actes d'une grande violence frapperont notamment les religieuses ou les jeunes filles des organisations catholiques tombées entre les mains des Républicains[réf. nécessaire]. La conséquence immédiate sera le ralliement de nombreux centristes catholiques aux militaires insurgés [9] .
En septembre 1936, l'archevêque de Salamanque est le premier hiérarque catholique à apporter son soutien aux rebelles nationalistes soulignant qu'en soutenant Franco, il s'agit de défendre « les valeurs chrétiennes contre les Sans-Dieu »[10]
Reconnaissance officielle du Vatican
Après la guerre civile, de nombreuses causes de béatification sont ouvertes dans les diocèses espagnols et plus particulièrement dans celui de Valence, où les massacres de catholiques ont été nombreux. Chaque cas est étudié individuellement par une commission spéciale qui est chargé de vérifier l'exemplarité de la vie des personnes proposées, mais également, dans le cas présent, les circonstances de leur mort. En effet, pour qu'une personne soit déclarée martyr, il faut prouver qu'elle a été tuée uniquement par haine de la foi, et non du fait de convictions politiques ou des hasards de la guerre. Jean-Paul II a ainsi précisé le 11 mars 2001 que « les bienheureux qui sont élevés à l'honneur des autels n'étaient pas impliqués dans des luttes politiques ou idéologiques, et ne voulaient pas y entrer. (…) Ils ont vécu en aimant et sont morts en pardonnant » [11].
Lors de onze célébrations, entre 1987 et 2001, Jean-Paul II reconnait officiellement comme martyrs 471 victimes de la guerre civile, parmi lesquels on dénombre 4 évêques, 43 prêtres séculiers, 379 religieux et 45 laïcs[12]. Ces actes de reconnaissance sont poursuivis par Benoît XVI, quoique d'une manière moins solennelle puisque le pape n'assiste désormais plus au cérémonies de béatification, ce qui porte désormais à 977 le nombre de martyrs de la guerre d'Espagne reconnus comme tels par l'Église. Selon la Conférence épiscopale espagnole, 6 832 catholiques sont martyrisés au cours de la guerre civile[12].
Béatifications et canonisations des martyrs
Pontificat de Jean-Paul II
- 29 mars 1987 : Jean-Paul II béatifie à Rome trois carmélites de la province de Guadalajara, martyrisées le 24 juillet 1936 [13].
- 1er octobre 1989 : Jean-Paul II béatifie à Rome vingt-six religieux passionistes de Daimiel, martyrisés entre le 23 juillet et le 23 octobre 1936 [14].
- 29 avril 1990 : Jean-Paul II béatifie à Rome huit frères des Écoles chrétiennes ainsi que leur directeur spirituel, religieux passioniste, martyrisés à Tùron en 1934 (canonisé le 21 novembre 1999) [15], un autre frère des écoles chrétiennes, Jacques Hilaire Barbal Cosan martyrisé à Tarragone le 18 janvier 1937 (également canonisé le 21 novembre 1999) [16] et une religieuse de la Compagnie de sainte Thérèse, Marie Mercedes Prat, martyrisée à Barcelone le 24 juillet 1936 [17].
- 25 octobre 1992 : Jean-Paul II béatifie à Rome soixante-et-onze religieux de l'Ordre hospitalier de Saint Jean de Dieu, martyrisés entre le 25 juillet et le 14 décembre 1936 à Tolède, Tarragone, Barcelone et Madrid [18] et cinquante-et-un religieux clarétains de Barbastro martyrisés entre le 2 et le 18 août 1936 [19].
- 10 octobre 1993 : Jean-Paul II béatifie à Rome Mgr Medina Olmos, évêque de Guadix [20], et sept frères des écoles chrétiennes martyrisés entre le 29 août et le 13 septembre 1936 à Almería [21], ainsi qu'un prêtre, Pierre Poveda Castroverde, martyrisé le 28 juillet 1936 à Madrid (canonisé le 4 mai 2003) [22] et une laïque, Victoria Díez, martyrisée le 12 août 1936 près de Cordoue [23].
- 1er octobre 1995 : Jean-Paul II béatifie à Rome quarante-cinq martyrs, tués entre 1936 et 1939, parmi lesquels on trouve un évêque, vingt-cinq prêtres et religieux, dix-sept religieuses et un laïc [24].
- 4 mai 1997 : Jean-Paul II béatifie à Rome Mgr Asensio Barroso, évêque de Barbastro [25] et Zéphyrin Gimenez Malla, premier gitan à être béatifié [26], martyrisés tous les deux le 9 août 1936.
- 5 mai 1998 : Jean-Paul II béatifie à Rome sept religieuses visitandines martyrisées le 18 novembre 1936 à Madrid [27], deux religieuses des sœurs de la charité du Sacré-Cœur de Jésus, Fransisca Aldea y Araujo[28] et Rita Dolores Pujalte y Sanchez [29], fusillées le 20 juillet 1936 à Canillejas et une carmélite, Elvira Moragas Cantarero [30], martyrisée le 15 août 1936 à Madrid.
- 7 mars 1999 : Jean-Paul II béatifie à Rome sept Augustins Récollets martyrisés entre juillet et août 1936 à Motril [31], et le curé de cette paroisse, l'abbé Manuel Martin Sierra, martyrisé le 26 juillet de la même année [32].
- 11 mars 2001 : Jean-Paul II béatifie à Rome deux cent trente-trois martyrs [33], tués entre 1936 et 1939, parmi lesquels on trouve un grand nombre de prêtres, de religieux et de religieuses mais aussi des laïcs, pour la plupart ayant appartenu à l'Action catholique [34].
Pontificat de Benoît XVI
Le 29 octobre 2005, Benoît XVI béatifie à Rome, lors d'une cérémonie présidée par le cardinal Saraiva Martins, préfet de la Congrégation pour les causes des saints, une religieuse de la Congrégation des Zélatrices du Culte eucharistique, Maria Ginard Marti, martyrisée le 26 août 1936 à Dehesa de la Villa [35] et sept prêtres du diocèse d'Urgell, fusillés le 13 août 1936 à Salas de Pallars [36].
Le 28 octobre 2007, Benoît XVI béatifie à Rome quatre cent quatre-vingt-dix-huit martyrs de la guerre d'Espagne parmi lesquels deux évêques, vingt-quatre prêtres, quatre cent soixante-deux religieux, trois diacres ou séminaristes et sept laïcs. Il s'agit de la plus importante messe de béatification de l'histoire [37] à laquelle ont assisté plus de trente mille fidèles et soixante-et-onze évêques espagnols, soit la quasi-totalité de ceux-ci [38]. Le pape rend hommage aux martyrs, « ces témoins héroïques de la foi qui, motivés exclusivement par l'amour du Christ, ont payé de leur sang leur fidélité au Christ et à son Église. Que leurs paroles et leurs gestes de pardon envers leurs persécuteurs nous poussent à travailler inlassablement à la miséricorde, la réconciliation et la coexistence pacifique. [...] le témoignage suprême du sang n'est pas une exception réservée à quelques individus, mais une éventualité pour tout le peuple chrétien. [...] Certes, tous ne sont pas appelés au martyr du sang [mais il existe aussi un] martyr de la vie ordinaire [...] un témoignage particulièrement important dans la société sécularisée de notre temps » [39] Le ministre des Affaires étrangères Miguel Angel Moratinos et le rapporteur du projet de loi, le socialiste Jose Torres Mora, représentaient le gouvernement à la messe. Sur la place Saint-Pierre, la célébration a été présidée par le représentant du pape, le cardinal portugais José Saraiva Martins, préfet de la congrégation pour les causes des saints. Le pape s'est ensuite adressé aux pèlerins de la fenêtre de son bureau, à l'occasion de la prière de l'angélus [39].
Controverse
Ces béatifications, et en particulier celle du 28 octobre 2007, ont soulevé des critiques de la part des partis de gauche et d'une partie de la droite en Espagne, qui accusent le Vatican de s'immiscer dans la politique intérieure du pays. En effet, la béatification intervient quelques jours avant le vote d'une loi mémorielle, proposée par le gouvernement de José Luis Rodríguez Zapatero en place, visant à réhabiliter la mémoire des victimes autres que franquistes de la guerre civile (lire l'article Loi sur la mémoire historique).
Références
- ↑ a , b , c , d et e Espagne : le pape et son lugubre cortège, Henri Tincq, Le Monde, 24 octobre 2007.
- ↑ Article de La Croix La Catalogne fut "l'une des provinces les plus touchées par les massacres : 1189 prêtres, 794 religieux et 50 religieuse"
- ↑ Antonio Montero, Historia de la persecución religiosa en España (1936-1939).
- ↑ Payne S. et Tusell J., p. 592-596.
- ↑ Guy Hermet dans Les collections de l'Histoire n°31, avril-juin 2006, p 74
- ↑ Article de La Croix du 25 octobre 2007
- ↑ D'après l'historien Guy Hermet dans Les collections de l'Histoire n°31, avril-juin 2006, p 73 et s.
- ↑ Guy Hermet, ibid, p 73 et s.
- ↑ Guy Hermet, ibid, p 71. et Bartolemé Bennassar cité dans le journal La Croix du 25 octobre 2007, ibid
- ↑ Article de La Croix, interview de B. Bennassar, ibid, 25 octobre 2007
- ↑ Homélie du 11 mars 2001, paragraphe 3.
- ↑ a et b (es) Site de la Conférence épiscopale espagnole.
- ↑ Fiche sur les trois Carmélites martyres de Guadalajara.
- ↑ Fiche sur les 26 martyrs d'Espagne (1936).
- ↑ Fiche sur les neuf martyrs d'Espagne de 1934.
- ↑ Fiche sur saint Jacques Hilaire Barbal Cosan.
- ↑ Fiche sur la bienheureuse Marie Mercedes Prat.
- ↑ Fiche sur les soixante-et-onze martyrs d'Espagne (Hospitaliers - 1936).
- ↑ Fiche sur les cinquante-et-un martyrs d'Espagne (Clarétains - 1936).
- ↑ Fiche sur le bienheureux Emmanuel Medina Olmos.
- ↑ Fiche sur les huit martyrs d'Espagne (1936).
- ↑ Fiche sur saint Pierre Poveda Castroverde.
- ↑ Fiche sur la bienheureuse Victoria Díez.
- ↑ Fiche sur les 45 martyrs d'Espagne (1936-1939).
- ↑ Fiche sur le bienheureux Florentin Asensio Barroso.
- ↑ Fiche sur le bienheureux Zéphyrin Gimenez Malla.
- ↑ Fiche sur les sept Visitandines martyres d'Espagne (1936).
- ↑ Fiche sur la bienheureuse Françoise du Cœur de Jésus.
- ↑ Fiche sur la bienheureuse Rita de la Vierge des douleurs et du Cœur de Jésus.
- ↑ Fiche sur la bienheureuse Marie du Sanctuaire de Saint Louis de Gonzague.
- ↑ Fiche sur les huit martyrs de Motril (Grenade-Espagne - 1936).
- ↑ Fiche sur le bienheureux Manuel Martin Sierra.
- ↑ (es)Liste sur le site du Vatican.
- ↑ Fiche sur les 233 martyrs d'Espagne (1936-1939).
- ↑ Fiche sur la bienheureuse Maria Ginard Marti.
- ↑ Fiche sur les 7 martyrs d’Espagne (13.08.1936).
- ↑ Le Vatican béatifie 498 Espagnols tués durant la Guerre civile, Le Monde, 28 octobre 2007.
- ↑ Guerre civile espagnole : martyrs béatifiés, TSR, 28 octobre 2007.
- ↑ a et b Informations reprises par le Salon beige.
Voir aussi
- (es)Beatificación de 498 mártires del siglo XX en España sur le site de la Conférence épiscopale espagnole.
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