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Le Rivage des Syrtes
Le Rivage des Syrtes Auteur Julien Gracq Genre roman Pays d'origine France Éditeur José Corti Date de parution 1951 Nombre de pages 322 ISBN 2-7143-0359-5 Le Rivage des Syrtes est un roman de Julien Gracq (1951, éditions José Corti). Il est le roman le plus connu de son auteur.
Julien Gracq avait déjà dénoncé, dans son pamphlet La Littérature à l'estomac (1949, même éditeur), les compromissions commerciales du monde littéraire de cette époque. Il refusera donc le prix Goncourt décerné à son roman l'année de sa parution.
Un roman de l'attente[réf. nécessaire]
Le Rivage des Syrtes est avant tout un roman de l'attente, avec un personnage essentiellement seul, dans un lieu désert et quasiment abandonné. Aldo est un militaire envoyé sur un poste-frontière, sur le rivage des Syrtes, pour surveiller la mer qui sépare sa ville Orsenna du Farghestan, lieu inconnu et mystérieux.
Le récit a posteriori de l'attente d'un événement est l'occasion pour le narrateur de discerner toutes les possibilités du destin : l'histoire se met en marche au moment où le roman s'arrête ; le narrateur n'a d'autre raison d'être que dans l'expression paradoxale d'une non-histoire (forme de prétérition), l'histoire d'une immobilité devant l'inconnu du rivage d'en face et devant l'inconnu du destin. Que croire face au néant ? Doit-on agir ? Doit-on laisser le monde en l'état, sans intervenir, sans essayer de donner plus de sens à sa propre vie, comme le voudrait le supérieur d'Aldo ?
Le récit se construit autour du mouvement de l'attente vers l'évènement. Le rivage, figure centrale du récit, délimite l'espace licite de l'espace illicite. La frontière réaliste qui existe entre les deux pays en guerre devient à travers les yeux du personnage un seuil limite, métaphorique, l'ouverture vers un monde poétique et onirique.
Un roman surréaliste[réf. nécessaire]
La poétique de ce roman peut être considérée comme surréaliste dans la mesure où elle tend à décrire un monde onirique selon les préceptes qu'indique André Breton dans le Manifeste du Surréalisme.
Très loin de l'écriture blanche de Blanchot, le caractère surréaliste du roman est assuré par l'apparente divagation des souvenirs du narrateur et du récit de ses impressions passées face au vide existentiel.
L'attente, la promesse de l'inconnu et la verve narrative qu'ils permettent sont des thèmes éminemment surréalistes.
L'attente du lecteur se voit satisfaite par des descriptions du paysage infini, contemplations du héros face à son destin, qui sont l'occasion pour l'auteur de mettre en scène le moment où l'Histoire se met en marche et où le héros décide. Le décor mystérieux et flou constitue à lui seul tout le roman, ou presque : la raison d'être des personnages est dans leur attente d'un événement.
En effet, les contours habituels d'un roman (lieux, époque, caractères) sont ici volontairement insatisfaisants.
En dehors du roman, Syrte est une ville de Libye. Dans la géographie antique, ce terme, d'origine grecque, désignait deux golfes formés par la Méditerranée sur la côte nord de l'Afrique entre Cyrène et Carthage, Syrtis minor (ou petite Syrte, aujourd'hui golfe de Gabès) à l'ouest, et Syrtis maior (ou grande Syrte, aujourd'hui golfe de Sidra) à l'est. La navigation y était dangereuse, à cause de la présence de nombreux hauts-fonds, ce qui explique que le mot était utilisé en latin pour désigner des "bas-fonds", des "bancs de sable". La région comptait toutefois quelques villes et ports de grande importance, comme Sabathra, Leptis Magna, Oea ou Tacape. Ils servaient de débouchés pour l'arrière-pays aride et aussi pour le commerce transsaharien. Mais la cité-État à laquelle appartient Aldo s'appelle Orsenna et fait face au Farghestan : les noms évoquant l'Italie, l'Asie centrale ou d'autres régions, ainsi que l'attirail des militaires (mélangeant les époques) situent l'histoire dans un espace imaginaire, reprenant divers lieux. En outre, le roman reçoit son caractère surréaliste de ce qu'il renvoie à des éléments indicibles du monde réel (impressions du narrateur face à la mer, intimité des sensations face au néant) tout en laissant inachevés l'intrigue comme les personnages. Julien Gracq qualifiera son roman de « rêve éveillé ».
Une réécriture du Désert des Tartares de Dino Buzzati ?
Le Désert des Tartares a été écrit en 1938 et publié en Italie en 1940. En revanche, en France, ce roman a été publié en 1949, alors que Gracq a écrit son œuvre en 1948 (publiée en 1951). On peut donc voir, à travers ces dates, que Gracq n'a pas plagié Buzzati.
Par ailleurs, contrairement à Giovanni Drogo, lieutenant envoyé dans la garnison du fort Bastiani dans Le Désert des Tartares (1945), Aldo aura l'occasion de marquer l'histoire de son empreinte. Dans ce sens, le roman est une vaste contemplation du fait même d'agir, de l'appel à la transgression et de l'état de non-retour.
Mais y a-t-il une différence entre le néant catastrophique déclenché à la fin du roman par le héros et le néant qui le précédait ? L'auteur laisse entendre que l'attente sans fin est, à l'instar de toute expérience, une forme d'existence possible et digne d'être élevée en roman. De là le caractère universel de l'intrigue du Rivage des Syrtes. Surtout, Gracq met bien en avant que dans l'évènement, c'est l'attente qui est magnifique : la fin de l'attente marque toujours une catastrophe.
« (...) et je savais pour quoi désormais le décor était planté . »(derniers mots de l'œuvre qui montrent bien quelle est la quête du héros du roman de l'attente).
Cette citation de Breton représente une partie de ce que Gracq a voulu faire comprendre dans ce roman :
« Au-delà de ce qui arrive ou n'arrive pas, l'attente est magnifique. »Précédé par Le Rivage des Syrtes Suivi par Les Jeux sauvages de Paul Colin Prix Goncourt 1951 Léon Morin, prêtre de Béatrix Beck - Portail de la littérature
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