- Le Coup d'Etat permanent
-
Le Coup d'État permanent
Le Coup d’État permanent Auteur François Mitterrand Genre Essai politique Pays d'origine France Éditeur Plon Collection Les Débats de notre temps Date de parution 1964 Nombre de pages 285 Le Coup d'État permanent est un essai de l'homme politique français François Mitterrand, et publié par l'éditeur Plon en 1964 pendant la présidence de Charles de Gaulle.
Dans ce livre, F. Mitterrand dénonce la pratique du pouvoir personnel par le général de Gaulle. Il ne se contente pas de critiquer la lettre de la Constitution : il reprocherait plutôt au général de Gaulle d'avoir trahi la promesse de 1958, selon laquelle le président est un arbitre. Le chef de l'État est devenu tout-puissant. Il montre la faiblesse du gouvernement et du Parlement, marginalisés par le président de la République. François Mitterrand insiste aussi sur les abus en matière de justice et de police. Il dénonce par exemple l'utilisation de provocateurs, la multiplication des bavures et brutalités policières, les officines en tous genres (comme le SAC et les réseaux Foccart), les tribunaux d'exception (Haut Tribunal militaire, remplacé par une Cour militaire de justice puis par la Cour de sûreté de l'État, cette dernière ayant été supprimée dès l'été 1981 par la gauche), le mépris du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État, le recours abusif au délit d'offense au chef de l'État, etc.
Sommaire
Extraits
IIe partie, chapitre 1
« J'appelle le régime gaulliste dictature parce que, tout compte fait, c'est à cela qu'il ressemble le plus, parce que c'est vers un renforcement continu du pouvoir personnel qu'inéluctablement, il tend, parce qu'il ne dépend plus de lui de changer de cap. Je veux bien que cette dictature s'instaure en dépit de De Gaulle. Je veux bien, par complaisance, appeler ce dictateur d'un nom plus aimable, consul, podestat, roi sans couronne, sans chrême et sans ancêtres. Alors elle m'apparaît plus redoutable encore. »
IIe partie, chapitre 2
« Le “secteur réservé” viole la Constitution. En interprétant abusivement l'article 15, qui fait de lui le “chef des armées” et l'article 52, qui l'autorise à négocier et à ratifier les traités, de Gaulle a fait passer sous sa seule autorité la Défense nationale et les Affaires étrangères. »
« L'art suprême de la diplomatie gaulliste est de tirer justification du fait accompli, fût-il accompli contre ou sans elle. Après avoir encouragé la résistance des ultras en Algérie, après avoir construit la communauté franco-africaine pour stopper l'indépendance, de Gaulle, ses spéculations démenties par l'événement, se fait le héraut de ce qu'il n'a pu empêcher et y pose au champion de la décolonisation. Mais là où il n'est pas obligé de décoloniser [...], le gaullisme se rattrape d'avoir dû, ailleurs, changer de visage sans changer de nature. »
« J'ai voté contre la Constitution de 1958 parce qu'elle exprimait un fâcheux contexte politique. De l'auteur d'un coup d'État, il me paraissait vain d'attendre les scrupules d'un légiste. J'apercevais sur la patte blanche que les conjurés victorieux exhibaient la trace mal lavée d'une sale besogne salissante. [...] Je pressentais que la Constitution, au même titre et au même rang que la conspiration, ne serait pour eux qu'une étape dans la voie qu'ils s'étaient tracée. »
« Il y a en France des ministres. On murmure même qu'il y a encore un Premier Ministre. Mais il n'y a plus de gouvernement. Seul le président de la République ordonne et décide. Certes les ministres sont appelés rituellement à lui fournir assistance et conseils. Mais comme les chérubins de l'Ancien Testament, ils n'occupent qu'un rang modeste dans la hiérarchie des serviteurs élus et ne remplissent leur auguste office qu'après avoir attendu qu'on les sonne. »
IIIe partie« Je n'accuse pas la Ve République d'être un régime policier parce qu'elle entretient des nuées de policiers, mais parce que son origine, ses mœurs, ses ambitions, son système politique, la condamnent à contrôler par des moyens qui lui sont propres les rouages chaque l'État, chaque cellule du pays. [...] Son vrai Premier ministre, c'est la police. [...] Elle [la population] sait d'expérience que non seulement la police écoute au téléphone, lit le courrier, tend ses filets, organise ses guet-apens, mais aussi qu'elle cogne et qu'elle tire. Les rafales de mitrailleuses sur la foule d'Alger, les matraquages sanglants du boulevard Saint-Marcel en octobre 1961, les huit morts du 6 février 1962, à Paris, ne résultent pas du hasard mais de la tactique réfléchie d'un pouvoir qui pour gagner l'initiative force toujours l'événement. »
Conclusion
« J'aurais atteint mon but si j'ai contribué à démystifier le phénomène gaulliste en montrant comment par un extraordinaire subterfuge le nouveau pouvoir au lieu de consolider l'État le démantèle, comment au lieu de restaurer le respect de la loi il pervertit l'esprit civique, comment au lieu de confier au peuple la maîtrise de son destin il le confisque. »
Histoire de l'ouvrage
Le succès du livre est survenu un an après sa sortie lorsque François Mitterrand a atteint le second tour de l'élection présidentielle de 1965. Le livre est épuisé. Il est réédité en livre de poche chez 10/18, en 1965 puis en 1993, et en 1984 par les éditions Julliard.
En 2004, pour le quarantième anniversaire de sa parution, l'ouvrage est rappelé par le socialiste Arnaud Montebourg et son groupe de la Convention pour la VIe République (C6R). Ils estiment que la présidence de Jacques Chirac est une démonstration des idées de Mitterrand de 1964. La C6R tiendra son université d'été à Jarnac en 2004 en en 2005, dont le maire est membre de la C6R.
Suites
En 2000, le conseiller régional socialiste Bertrand Mertz lui fera écho en intitulant son livre Le coup d'état rémanent, dans lequel il critique également la Cinquième République, mais prend acte de l'attachement, selon lui, définitif à l'élection au suffrage universel du président.
En 2009, l'essai Abus de pouvoir de François Bayrou, qui critique la présidence de Nicolas Sarkozy en dénonçant des pratiques et des discours qu'il estime contraires à la République, est comparé par les journalistes au célèbre ouvrage de Mitterrand[1].
Références
- ↑ Sophie Landrin, « Copé, Paillé, Bayrou, Villepin : la guerre des droites aura bien lieu en librairie », Le Monde, 21 avril 2009.
« Dans un livre-brûlot, Bayrou accuse Sarkozy d'abus de pouvoir », L'Express, 29 avril 2009.
AP, « François Bayrou publie une charge contre "l'égocratie" sarkozyste », NouvelObs.com, 30 avril 2009.
Catégories : Essai de langue française | Livre politique - ↑ Sophie Landrin, « Copé, Paillé, Bayrou, Villepin : la guerre des droites aura bien lieu en librairie », Le Monde, 21 avril 2009.
Wikimedia Foundation. 2010.