- La compagnie des loups
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La Compagnie des loups
La Compagnie des loups Titre original The Company of Wolves Réalisation Neil Jordan Acteurs principaux Sarah Patterson
Angela Lansbury
David Warner
Stephen ReaScénario Neil Jordan
d'après Angela CarterGenre Horreur
FantastiquePays d’origine Royaume-Uni La Compagnie des loups (The Company of Wolves) est un film britannique de Neil Jordan sorti en 1984.
Ce film s’inspire de différents contes : Le Petit Chaperon rouge de Charles Perrault ou des frères Grimm principalement, ainsi que Barbe bleue, La Belle et la Bête, Le Chat botté, etc.
Sommaire
Synopsis
L’histoire du film est elle-même tirée du livre du même nom d'Angela Carter (scénariste du film).
Dans le livre, l’auteur (féministe) reprend une suite de 10 contes célèbres pour opérer une subversion et un renversement des valeurs patriarcales que ce genre de conte expose. Y dominent ici l’érotisme et la féminité, et la femme en général, qui n’est plus offensée mais supérieure ; comme dans le film, pour l’histoire du Chaperon, qui du loup ou du chaperon est le plus séducteur ? Ou pour l’histoire de la Belle et la Bête, ce n'est pas cette dernière qui change d’apparence, mais la Belle.
Donc renversement des valeurs ; c’est la découverte des vérités profondes de l’homme et de la femme qui les éveille à une vie authentique, à l’accomplissement de soi.
Analyse linéaire du film
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Ce qui suit dévoile des moments clés de l’intrigue.
La première scène du film montre un chien qui court dans la forêt : cette image peut rappeler celle de The Thing de John Carpenter où de la même façon un chien-loup court dans un désert de neige. Le lieu est certes différent, ce qui définit par ailleurs l’atmosphère et l’histoire même du film (ici celle du conte, et pour l’autre celle de film d’horreur « scientifique »), mais on trouve deux choses assez évidentes en commun : la présence protagoniste d’un animal et l’indétermination sur sa provenance et sur son but. D’où vient-il ? Où va-t-il ? Est-il poursuivi, chassé ou au contraire est-ce lui qui poursuit quelqu’un ?
Peu à peu, on découvre que le chien suit la voiture de ses maîtres jusqu’à la maison et se dirige vers la chambre de Rosaleen, la jeune fille protagoniste. Trouve-t-on une réponse aux questions précédentes ici ? Peut-être : le chien va à la rencontre fidèle et aimante de sa petite maîtresse. La sœur plus âgée la traite de peste parce qu’elle reste enfermée dans sa chambre et qu’elle lui a volé son rouge à lèvres (notons à titre de préambule au thème du sang et par extension à celui de la sexualité féminine, la couleur rouge de l’onguent).
Nous sommes dans un monde contemporain : la voiture et les courses, mais déjà empreint d’un étrange anachronisme : la demeure semble dater du XVIIIe ‑ XIXe siècle et la sœur porte une robe de gaze. D’entrée la ligne de fond du film se dessine quand la mère demande au père de parler à Rosaleen de son comportement, lequel réplique qu’il ne comprend rien aux histoires de filles : il s’agit, on l’a compris, du passage de l’enfance à l’adolescence. Rosaleen dort et fait un rêve. Quoi de plus simple et de plus familier que d’associer le rêve au monde des contes et les contes au monde de la psychanalyse (voir Bettelheim et Freud, La Psychanalyse des contes de fées et La Psychanalyse des rêves respectivement), encore faut-il voir ce qu’en fait Jordan et sa scénariste!
Le rêve commence dans le lieu même de la chambre où dort Rosaleen et l’envahit peu à peu, comme une sorte de vent qui souffle sur le quotidien (voir peut-être l’image du souffle, de la magie) et transforme subrepticement le monde réel en un monde de l’étrange où tous les objets inertes semblent pris de vie : objets de l’enfant, imagerie populaire(le singe, les marionnettes, les poupées, le tambour, l’ours en peluche). Il s’ouvre ensuite sur un paysage fantastique, une forêt dense dans le crépuscule ; on a ici la représentation du lieu préromantique par excellence, celui de la nature obscure et inquiétante, un monde où la raison n’a pas demeure, celui aussi des peurs, des interdits et de l’inconscient. On notera d’ailleurs que toute l’esthétique du film rappelle des peintres anglo-saxons comme Füßli, Blake, et le romantique allemand Caspar David Friedrich, tous influencés par la peinture de l’Antiquité grecque, Michel-Ange, et les thèmes du sublime et des ténèbres.
Ne peut-on pas penser d’ailleurs que les films fantastiques, d’épouvante ou d’horreur sont la continuation contemporaine et cinématographique d’un certain romantisme? Je pense à des films comme The Thing, Sleepy Hollow, Nosferatu, Le Fantôme de l'opéra…
Si l’on comprend le romantisme comme appropriation de figures populaires ou de thèmes qui représentent la face cachée de l’homme et de sa condition, qu’elle soit universelle ou plus ancrée dans une époque (voir le préromantisme comme réponse et fissure à la pensée des Lumières).
Dans le rêve la sœur de Rosaleen court dans les bois. Son visage exprime d’abord la surprise, puis l’inquiétude au fur et à mesure qu’elle découvre un univers de plus en plus onirique ; elle rencontre des éléments du réel, les jouets de Rosaleen vivants et démesurés, qui semblent lui vouloir du mal et essaient de l’attraper ; elle s’échappe et fuit plus profond dans la forêt. Elle trouve au détour du chemin une miniature de sa maison où il y a un rat qu’elle rejette dégoûtée puis se voit soudain entourée d’une meute de loups aux yeux rouges.
Le rêve se poursuit et l’histoire à proprement parlé commence ; en s’enfonçant dans le rêve, on s’enfonce aussi dans le temps : on retrouve les personnages de la réalité transportés à une époque médiévale, dans un village enfoui au cœur de la forêt. La sœur est morte, on assiste à son enterrement et deux nouveaux personnages essentiels pour la suite du récit font leur entrée en scène, la grand-mère et le jeune voisin qui fait la cour à Rosaleen.
Sur le chemin qui va jusque chez la grand-mère de Rosaleen, où elle va passer la nuit de deuil, la grand-mère entame un discours moralisateur sur le danger qu’il y a à sortir des sentiers battus ; elle lui interdit de dévier de sa route car cela pourrait la mener à la perdition. Tout un discours sur des archétypes liés à la prohibition, au devoir, au péché (par exemple la pomme avec le ver). Rosaleen est si intrépide, si impétueuse et innocente qu’elle pourrait s’égarer à la vue de la moindre chose qui excite sa curiosité !
C’est pourquoi (bien qu’elle soit encore trop jeune pour écouter ou comprendre cela) la grand-mère lui raconte une histoire qui permettra à Rosaleen d’être plus consciente des dangers qui peuvent assaillir une jeune fille en fleur ; le récit se développe comme une mise en abîme, une sorte de rêve dans le rêve ou de conte dans le rêve. Ici le conte joue son rôle de capteur des peurs ancestrales et d’imposition d’une morale ; comme une fable presque. C’est donc l’histoire d’une jeune femme du pays qui se marie avec un vagabond ou un errant. Ce jour de noces semble absolument heureux, chatoyant, lumineux, bucolique. La nuit, alors qu’ils se retrouvent seuls dans leur maison, la femme, voyant que son mari semble bien timoré, l’invite à s’approcher d’elle. « Sors de l’ombre », lui dit-elle.
Fiche technique
- Titre : La Compagnie des loups
- Titre original : The Company of Wolves
- Réalisation : Neil Jordan
- Scénario : Neil Jordan, d'après une histoire d'Angela Carter
- Production : Chris Brown, Nik Powell, Stephen Woolley et Stephen Woolley
- Sociétés de production : Cannon Films et Incorporated Television Company
- Budget : 2 millions de dollars (1,51 millions d'euros)
- Musique : George Fenton
- Photographie : Bryan Loftus
- Montage : Rodney Holland
- Décors : Anton Furst
- Costumes : Elizabeth Waller
- Pays d'origine : Royaume-Uni
- Format : Couleurs - 1,66:1 - Dolby - 35 mm
- Genre : Horreur, fantastique
- Durée : 95 minutes
- Dates de sortie :
- 15 septembre 1984 Canada (festival de Toronto)
- 21 septembre 1984 Royaume-Uni
- 23 janvier 1985 France
- 19 avril 1985 États-Unis
Distribution
- Sarah Patterson : Rosaleen
- Angela Lansbury : la grand-mère
- David Warner : le père
- Tusse Silberg : la mère
- Micha Bergese : le chasseur
- Graham Crowden : le vieux prêtre
- Kathryn Pogson : la jeune mariée
- Stephen Rea : le jeune marié
- Georgia Slowe : Alice, Girl Killed by Wolves
- Shane Johnstone : le garçon amoureux
- Brian Glover : le père du garçon amoureux
- Susan Porrett : la mère du garçon amoureux
- Dawn Archibald : la sorcière
- Richard Morant : le riche marié
- Danielle Dax : la femme-loup
Autour du film
- Le tournage s'est déroulé à Burnham Beeches, ainsi qu'aux studios de Shepperton.
- À noter, une petite apparition de Terence Stamp, dans le rôle non crédité du démon.
Distinctions
- Prix du meilleur film, meilleurs effets spéciaux (Christopher Tucker) et prix de la critique internationale, lors du Festival international du film de Catalogne en 1984.
- Nomination au Grand Prix, lors du Festival international du film fantastique d'Avoriaz en 1985.
- Nomination au prix des meilleurs décors, meilleurs costumes, meilleurs maquillages (Jane Royle, Christopher Tucker) et meilleurs effets spéciaux (Christopher Tucker, Alan Whibley), lors des BAFTA Awards en 1985.
- Mention spéciale, lors du Fantafestival en 1985.
- Prix du meilleur film, prix du jury, prix de la critique et prix des meilleurs effets spéciaux, lors du festival Fantasporto en 1985.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Vidéographie
- zone 2 : La Compagnie des loups, GCTHV « collection Frissons », [2004], EAN 3-348467-849716.
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