Johann Weyer

Johann Weyer

Jean Wier

Johann Weyer

Jean Wier (ou Johann Weyer, Johannes Weier, en latin Joannes Wierus ou le pseudonyme Piscinarius)[1] (né en 1515 ou 1516 à Grave dans le Duché de Brabant et mort en 1588 à Tecklenburg) était un médecin et opposant à la chasse aux sorcières[2].

Sommaire

Biographie

Fils d'un prospère marchand en gros de charbons, d'ardoises et de houblon, il suivi à partir de 1532 des études de latin à Bois-le-Duc, Louvain et à partir de 1532 à Bonn. L'influence de son professeur Henri-Corneille Agrippa de Nettesheim se retrouve dans toute son œuvre[2]. Il poursuivit par des études de médecine à Paris, avant 1535, et fit un séjour à Orléans. On ne sait pas de quelle université il tient son diplôme de médecine, ni même s'il l'a effectivement obtenu]][2]. Il exerce en tout cas la médecine à son retour de France dans la région de Grave, puis à partir de 1545 à Arnheim, où en 1548 il intervient pour la première fois comme médecin dans un procès en sorcellerie contre un voyant[2].

Sur la recommandation de l'humaniste Konrad Heresbach, il devint en 1550 le médecin personnel du duc Guillaume de Clèves. Au sein de cette la cour ouverte à l'influence humaniste d'Érasme, et religieusement tolérante on ne sait pas si Wier resta catholique ou devint calviniste.

Dans sa position de médecin de cour Jean Wier rédigea et publia en 1563 à Bâle son oeuvre principale, le De praestigiis daemonum, puis d'autres traités de pharmacologie, de psychiatrie et de médecine. En 1578 il laissa sa position du médecin personnel du Duc à son fils Galenus. Il continua néanmoins à reprendre ses ouvrages jusqu'à sa mort en 1588.

Le De praestigiis daemonum

Commencées dans la première moitié du XVe siècle, les grandes chasses aux sorcières eurent une pause à partir les années 1520 du fait des troubles liées la Réforme protestante, et reprirent dans les années 1560. Un des enjeux est la question qui opposent alors ceux, majoritaires qui tiennent au « transport réel et corporel » des adeptes du démon lors du Sabbat, et ceux qui, s'appuyant sur un texte du IXe siècle le Canon Episcopi, affirment sur les sorcelleries ne sont que des illusions du Diable[3].

Dans son De Praestigiis daemonum et incantationibus ac venificiis libri V, publié en 1563, dans lequel il s'oppose au au Malleus Maleficarum (Le marteau des sorcières), Jean Wier y fait la distinction entre les « magiciens infâmes », réellement coupables de crimes diaboliques, et les sorcières, qui sont elles la proie d'illusions maladives[3].

Pour le médecin Jean Wier, les illusions des sens sont le résultat d'un dérèglement des « humeurs», en particulier de la bile noire supposée être à l'origine de la mélancolie et « qui infecte le siège de l’esprit », et ce qu'il appelle leur «vertu imaginative», « phantasie » ou « imagination ». Les « mélancoliques » croient voir des « monstres phantastiques » pendant leur rêves, ou même éveillés en plein jour dans les pires des cas[3]. Cette théorie médicale des rèves remonte au XIIe siècle et le Liber de spiritu et anima d'Alcher de Clairvaux, et se retrouve également chez d'autres auteurs de la même époque [4]. Dans certains cas, reprenant des idées émises par Marsile Ficin c'est même la seule « force de l'imagination » qui peut être la source des illusions[3].

L'influence du diable est cependant loin d'être systématiquement niée, car les humeurs ou l'imagination seule peuvent engendrer ces fantasmes, « Le diable donc n’en poura-il pas bien faire autant, luy qui est esprit, lequel se peut par la permission de Dieu, entremesler dedans les instruments des sens, esmouvoir les humeurs & vapeurs qui luy sont commodes, ou envoyer un vent idoine dedans les instruments, principalement apres avoir choisi la complexion, l’age, le sexe, ou autres causes interieures & exterieures[...] ». Le démon profite dans sa malice des faiblesses humaines et s'attaque donc surtout aux mélancoliques, aux hérétiques, aux méchants, et surtout aux femmes : « Le diable […] induit volontiers le sexe féminin, lequel est inconstant à raison de sa complexion, de legere croyance, malicieux, impatient & melancolique pour ne pouvoir commander à ses affections : & principallement les vieilles debilles, stupides & d’esprit chancellant »[3]. C'est cette origine commune qui explique les similarités des aveux des prétendus sorcières, croyant de façon illusoire se rendre Sabbat. Cette thèse se trouvait déjà à la fin du XVe siècle chez Ulrich Molitor, qui s'inspirait du Commentaire des Sentences ((1252-1254) de Thomas d’Aquin [5]


La Pseudomonarchia Daemonum

Article détaillé : Pseudomonarchia Daemonum.

En 1577, Jean Wier ajoute en appendice à son ouvrage, la Pseudomonarchia Daemonum.

Postérité

Le livre fut brûlé par l'Université luthérienne de Marbourg et mis a l'Index par le catholique gouverneur des Pays-Bas le duc d'Albe Ferdinand Alvare de Tolède[6]. Il fut attaqué par le juriste français Jean Bodin et par le jésuite espagnol Martín Antonio Delrío qui le surnomma « Wierus hereticus »[7].

Pour Rolley il s'agit d'« un texte singulier, aux conclusions audacieuses ; mais la postérité a eu tendance à exagérer le caractère radical et novateur des arguments, au point de caricaturer quelquefois son auteur et d’en faire le précurseur des aliénistes du XIXème siècle ou des psychiatres modernes. »[3]

À partir du XIXe siècle Wier fut vu comme un champion de l'humanisme contre l'obscurantisme et comme un précurseur ou un fondateur de la psychiatrie. Freud affirma que le De praestigiis daemonum était l'un des 10 livres les plus importants jamais écrits[8]

Notes

  1. « Wier » (ou « Wihr ») est une forme ancienne, antérieure à la diphtongaison bavaroise (dite en allemand neuhochdeutsche Diphthongierung), de l'actuel « Weiher », qui signifie en allemand moderne « étang ». Elle s'est conservée dans de nombreux dialectes, comme l'alsacien : le toponyme « Riquewihr » correspond à « Reichenweier » de l'époque allemande. Pour ce phénomène compliqué on consultera chez Thorsten Roelcke, Sprachtypologie des Deutschen: historische, regionale und funktionale Variation, pp. 62 et suiv. la section « Monophthonge und Diphthonge ». Éd. Walter De Gruyter Inc, 1997, ISBN 3-11-015276-2.
  2. a , b , c  et d (de) Thomas Meyer, « Weyer,Johann », dans Biographisch-Bibliographisches Kirchenlexikon (BBKL) , Band 20, Nordhausen 2002 (ISBN 3-88309-091-3), Sp.1537–1544.
  3. a , b , c , d , e  et f Thibaut Maus de Rolley Jean Wier et la fabrique de l'illusion diabolique Tracés. Revue de Sciences humaines, n° 8, L’illusion, avril 2005
  4. Scipion Dupleix Les causes de la veille et du sommeil, des songes, & de la vie & de la mort, Paris, Sonius, 1606 - Anselme Julian, De l’Art et jugement des songes, & visions nocturnes […], Lyon, Benoist Rigaye, 1572 - Pierre de La Primaudaye, Suite de l’Academie françoise […], Paris, Guillaume Chaudiere, 1580
  5. Ulrich Molitor De lamiis et phitonicis mulieribus (« Des sorcières et des devineresses », Cologne, 1489)
  6. John Waller p. 170
  7. Binz pp 167-168
  8. John Waller p. 170

Bibliographie

sources anciennes

  • Edition de 1579 : Histoire, disputes et discours des illusions et impostures des diables, des magiciens infâmes, sorcières et emprisonneurs ; des ensorcelez et démoniques et de la guérison d'iceux : item de la punition que méritent les magiciens, les empoisonneurs et les sorciers ; Le tout comprins en sex livres (augmentez de moitié en ceste dernière édition. Deux dialogues touchant le pouvoir des sorcières et la punition qu'elles méritent par Thomas Erastus, pour Jacques Chovet, 1579, 2 vol. (source Michel Collée dans frénésie n°3 Coche-mare, printemps87)</ref>

Études historiques

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