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Guy Hocquenghem
Guy Hocquenghem (3 décembre 1946 - 28 août 1988) était un essayiste, romancier et militant homosexuel français.
Sommaire
Aperçu biographique
Il a été élève[1] au lycée Lakanal à Sceaux. Sa famille habitait alors Châtenay-Malabry (92)[2]. Sa mère était enseignante au lycée Marie-Curie de Sceaux.
Hocquenghem entre à l'École normale supérieure en 1965, participe à l'occupation de la Sorbonne en mai 1968 et, dans les années 1970, à divers mouvements de libération gaie, essentiellement le Front homosexuel d'action révolutionnaire (FHAR)[3]. Il se lia d'amitié avec beaucoup d'étudiants étrangers, tunisiens notamment, qui participèrent au mouvement d'émancipation des homosexuels.
Le 10 janvier 1972, il publie une longue lettre dans le Nouvel Observateur dans laquelle il annonce publiquement qu'il est gay. Il fut ainsi le premier homosexuel à faire dans la presse française un coming out pour afficher publiquement son orientation sexuelle. Sa mère lui répond par une lettre ouverte dans le même magazine le 17 janvier 1972. C'est cette même année qu'il publie Le désir homosexuel, livre-manifeste de la révolution homosexuelle. Il contribue à l'édition, en 1973, sous la direction de Félix Guattari, d'un numéro de la revue Recherches intitulé Trois milliards de pervers : grande encyclopédie des homosexualités[4].
En 1979 il collabore au journal Libération et, entre 1979 et 1986, il est chargé de cours de philosophie à l'Université de Vincennes-Paris-VIII, aux côtés de René Schérer.
Hocquenghem meurt des suites du sida en 1988, à l'âge de quarante et un ans. Ses cendres sont conservées au colombarium du cimetière du Père-Lachaise.
Portée de certaines de ses œuvres
L'Amour en relief
Hocquenghem pousse la logique d'un relativisme social et historique de l'homosexualité, ce qui revient à une analyse de civilisation plutôt qu'à une analyse politique des années 1970 et 1980. Il fallait découvrir des pistes menant hors des impasses léguées par la modernité et ses catégories du soi, du sujet, de l'identité, de la raison et de la nation. Ses plus beaux romans suivent cette logique. L'Amour en relief (1982) remet en question une société occidentale dominée par l'image et par le culte du visuel et de la visibilité en créant un conte philosophique autour des aventures intercontinentales d'un jeune Tunisien aveugle.
La Colère de l'Agneau
La Colère de l'Agneau (1985) est une vie de Saint Jean, une épopée du monde méditerranéen du premier siècle de l'ère chrétienne.
Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary
« Avant de mourir, à 41 ans, Guy Hocquenghem a tiré un coup de pistolet dans la messe des reniements. Il fut un des premiers à nous signifier que, derrière la reptation des « repentis » socialistes et gauchistes vers le sommet de la pyramide, il n’y avait pas méprise, mais accomplissement, qu’un exercice prolongé du pouvoir les avait révélés davantage qu’il les avait trahis. On sait désormais de quel prix – chômage, restructurations sauvages, argent fou, dithyrambe des patrons – fut payé un parcours que Serge July résuma un jour en trois mots : « Tout m’a profité. » Cet ouvrage qui a plus de quinze ans ne porte guère de ride. L’auteur nous parle déjà de Finkielkraut, de BHL, de Cohn-Bendit, de Bruckner. Et déjà, il nous en dit l’essentiel. On ignore ce qu’Hocquenghem aurait écrit d’eux aujourd’hui, on sait cependant que nul ne l’écrira comme lui. Lui qui appartenait à leur très encombrante « génération » - celle des André Glucksmann, des Goupil, des Plenel et des Kouchner – se hâtait toutefois de préciser : « Ce mot me répugne d’instinct, bloc coagulé de déceptions et de copinages. » Il aurait souhaité qu’elle fût moins compromise, en bloc, par les cabotinages réactionnaires et moralistes de la petite cohorte qui parasita journaux et « débats ». Il aurait essayé d’empêcher qu’on associât cette « génération »-là aux seuls contestataires qui ouvrirent un plan d’épargne contestation avec l’espoir d’empocher plus tard les dividendes de la récupération. Renonçant aux apparences de la bienséance, de la suavité bourgeoise propres à ceux qui monopolisent les instruments de la violence sociale, Guy Hocquenghem a usé de la truculence, de la démesure. Il a opposé sa clameur à la torpeur des temps de défaite. Son livre éclaire le volet intellectuel de l’ère des restaurations. Les forces sociales qui la pilotaient il y a vingt ans tiennent encore fermement la barre ; les résistances, bien qu’ascendantes, demeurent éparses et confuses. Nous ne sommes donc pas au bout de nos peines. Les repentis ont pris de l’âge et la société a vieilli avec eux. L’hédonisme a cédé la place à la peur, le culte de l’« entreprise » à celui de la police. Favorisés par l’appât du gain et par l’exhibitionnisme médiatique, de nouveaux retournements vont survenir. Lire Guy Hocquenghem nous arme pour y répondre avec ceux qui savent désormais où ils mènent. » (Serge Halimi – Quatrième de couverture)
L'Âme atomique : pour une esthétique d'ère nucléaire
Dans L'Âme atomique, co-écrit avec René Schérer en 1986, le baroque, et surtout l'allégorie baroque, se montre capable de dépasser le spectacle postmoderne en y réinsérant un sens (non-linéaire) de l'histoire, ainsi qu'une nouvelle croyance dans le monde.
Œuvres
- Le Désir homosexuel, 1972. Réédité en 2000 avec une préface de René Schérer.
- L'Après-mai des faunes : volutions, préface de Gilles Deleuze[5], 1974.
- Fin de section, 1975.
- avec René Schérer, Co-Ire : album systématique de l'enfance, revue Recherches, n°22, 1976.
- avec Jean-Louis Bory, Comment nous appelez-vous déjà ? : ces hommes que l'on dit homosexuels, 1977.
- La Dérive homosexuelle, 1977.
- La Beauté du métis : réflexions d'un francophobe, 1979.
- Race d'Ep ! : un siècle d'images de l'homosexualité, 1979 (livre accompagnant le documentaire de Lionel Soukaz[6])
- Le Gay voyage : guide et regard homosexuels sur les grandes métropoles, 1980.
- L'Amour en relief : roman, 1981.
- Les Petits garçons : roman, 1983.
- La Colère de l'Agneau : roman, 1985.
- Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary, 1986. Réédité en 2003 avec une préface de Serge Halimi (ISBN 2-74890-005-7)(Citations)
- Vienne, 1986.
- avec René Schérer, L'Âme atomique : pour une esthétique d'ère nucléaire, 1986.
- Ève : roman, 1987.
- Les Voyages et aventures extraordinaires du frère Angelo : roman, 1988.
- L'amphithéâtre des morts : mémoires anticipées, 1994. Posthume.
- Oiseau de la nuit, nouvelles, 1998. Reprend la nouvelle publiée initialement dans Comment nous appelez-vous déjà ?.
Citations
« A vrai dire, je ne connais qu'une question préalable digne d'attention : sous quelles espèces serai-je consommé ? Laquelle de ces illusions flottant autour de mon personnage sera retenue, quel moi va rester, effeuillé de tous les autres possibles – mâle ou femelle, sain ou vicieux, entreprenant ou se laissant faire... Toutes qualifications qui ne se recouvrent pas, les femelles peuvent très bien entreprendre. »— Oiseau de la nuit, 1977
« Bien sûr, nous payons notre avantage; le prix de la sexualité, c'est la mort. »— parole du héros du livre Eve, 1987
« Nous étions plus qu'une organisation politique ; et nous tâtonnions, comme des enfants dans le noir qui cherchent à s'attraper l'un l'autre, nous tâtonnions pour saisir l'évanescente idée d'un bonheur absolu, d'une vie réconciliée avec elle-même. Et ce que nous croyions saisir, ce fantôme de liberté, nous échappait toujours. Nous en discutions des heures durant, le soir, sans nous rendre compte que ce bonheur, il n'était pas à venir, après le Grand Bouleversement ; nous l'avions déjà, entre nous, saisi par surprise et même pas reconnu. »— L'amphithéâtre des morts, 1994
Études de l'œuvre
- (fr) Simone Debout-Oleskiewicz, Gérard Bach-Ignasse, Daniel Bensaïd, Maurice de Gandillac, Jean-Charles Jambon, Olivier Leclair, Roland Sauzzede, René Schérer, Rommel Mendès-Leite, Présence de Guy Hocquenghem, in Les Cahiers de l'imaginaire, n°7, L'Harmattan, 1992.
- (en) Guy Hocquenghem. Beyond Gay Identity par Bill Marshall, Duke University Press, 1996.
- (fr) Maxime Foerster, Penser le désir. À propos de René Schérer, H&O, 2007. (Un chapitre est consacré à la collaboration intellectuelle entre Schérer et Hocquenghem)
- (fr) Désir Hocquenghem, in revue Chimères, n°69, 2009.
Notes et références
- ↑ Une photo de classe de 4e le montre à l'âge de douze ou treize ans. Il est au centre de la photo au 3e rang.
- ↑ Non loin de la Vallée-aux-Loups, la maison de l'écrivain Chateaubriand.
- ↑ Le film Ma saison super 8 d'Alessandro Avellis (France, 2005) lui est dédié. Le même auteur a réalisé en 2006 le documentaire La Révolution du désir. Ce dernier film trace un portrait de Guy Hocquenghem, en montrant son rôle à l'intérieur du FHAR et l'influence qu'a exercée ce mouvement révolutionnaire sur son propre parcours.
- ↑ Version éditoriale numérique de Trois milliards de pervers, 2002
- ↑ Préface de Gilles Deleuze à L'Après-mai des faunes
- ↑ Guy Hocquenghem joue dans la séquence 4, Royal Opéra, du film Race d'Ep, de et réalisé par Lionel Soukaz.
Voir aussi
Liens externes
Textes en ligne
- Extrait de La Beauté du métis : Passion de l'étranger [pdf]
- Bonnes feuilles des Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary
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