Henri-Alexandre Tessier

Henri-Alexandre Tessier
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Henri-Alexandre Tessier

Henri-Alexandre Tessier, à Angerville (Essonne) le 16 octobre 1741 et mort à Paris le 11 décembre 1837, est un médecin et agronome français.

Biographie

Fils dun notaire dÉtampes, qui, père de dix enfants et dépourvu de fortune, ne peut leur donner une haute éducation, Tessier reçoit dabord de son père les premiers éléments de linstruction. Le jeune Tessier est remarqué par Madame Goislard, châtelaine d'Andonville, une localité voisine, actuellement dans le département du Loiret. Elle obtient en sa faveur une bourse d'études attribuée par l'archevêque de Paris. Tessier peut ainsi entrer au collège parisien de Montaigu, dont les élèves sont destinés à l'état ecclésiastique. De ce fait il prend le petit collet, et on lui donne le titre d'abbé, qui figure en tête de ses ouvrages jusqu'à la Révolution, mais il n'entre jamais dans les ordres.

Ses études sont brillantes. À sa sortie du collège, il se livre à l'étude des sciences naturelles, et surtout à celle de la médecine. Étudiant à la Faculté de médecine de Paris, il a pour condisciple Antoine-Laurent de Jussieu (1748-1836), avec qui il se lie d'une amitié que seule la mort devait rompre. Jussieu, d'une famille de botanistes célèbres, l'introduit dans la communauté scientifique parisienne. Tessier soutient en latin plusieurs thèses de médecine dont l'une sera traduite en anglais, sur lInfluence de la douce égalité de lâme sur la santé, sur limportance de lhygiène. Il est reçu docteur régent (c'est-à-dire professeur) de la Faculté de Médecine de Paris. Lors de la formation de la Société royale de Médecine en 1776, il en devient un des premiers membres.

En 1777, Tessier est envoyé en Sologne par la Société royale de Médecine pour y étudier l'ergot de seigle et l'ergotisme, maladie alors très répandue dans cette province. Les travaux qu'il publie à la suite de cette mission attirent l'attention sur lui et en font un spécialiste de l'ergot de seigle au sujet duquel il se livre à diverses expériences. De ce fait il entre à l'Académie des sciences en 1783. Il devient alors également, avec Lavoisier et Fougeroux de Bondaroy, membre de la Société dAgriculture de Paris. Par l'intermédiaire de Chrétien Guillaume de Lamoignon de Malesherbes, Tessier est mis en relation avec l'entourage royal, ce qui lui vaut d'être nommé directeur de la ferme royale de Rambouillet, Louis XVI se rend fréquemment. Il s'y livre à diverses expériences, principalement sur les ovins. Il y introduit le mouton mérinos, et œuvre pour sa diffusion dans tout le royaume.

Cest à Rambouillet que Tessier répète ses expériences sur la culture des prairies artificielles et sur toutes les variétés de froments français et étrangers quil peut se procurer. Il y fait aussi des essais sur un grand nombre de semences envoyées de la Chine, des îles Canaries et de la Morée. Il rédige alors un ouvrage sur les maladies des grains, dans lequel il fait connaître leur origine, les produits quon en obtient par analyse, leurs causes et linfluence quelles peuvent avoir sur la santé des hommes et sur celle des bestiaux, enfin le tort quelles font au cultivateur, et les meilleurs moyens de sen préserver. Il fait imprimer à part, en 1785, les résultats des expériences quil a faites sous les yeux du roi sur la carie du blé, et prouve, par des essais multipliés, quil nest pas nécessaire de changer la semence des blés nouveaux. Mais le plus important de ses travaux à Rambouillet concerne le beau troupeau de mérinos qui, en 1786, est envoyé dEspagne à Louis XVI. Déjà les avantages de la naturalisation des mérinos en France étaient pressentis ; déjà Daubenton, appuyé par Trudaine, avait, dans sa propriété de Montbard, élevé des moutons dEspagne, comparativement avec ceux de Maroc, du Tibet, dAngleterre, de Flandre, du Roussillon, etc. MM. de la Tour-dAigues, Heurtaut-Lamerville et de Barbançois avaient obtenu des produits avantageux de quelques moutons espagnols élevés dans leurs propriétés. Mais ces résultats restaient inconnus des agriculteurs, et ne pouvaient se propager parmi eux, faute dun nombre suffisant de mérinos de pure race, dont la sortie était sévèrement prohibée en Espagne. DAngivilliers et Tessier assurent le succès de lentreprise.

Lintroduction des mérinos et le perfectionnement des laines tiennent sans doute une place importante dans la vie scientifique de Tessier, mais ces occupations ne lempêche pas dexécuter encore un grand nombre de travaux. Ainsi, en médecine humaine et vétérinaire, il étudie le traitement de la clavelée, la topographie médicale de la Sologne, il observe diverses maladies épidémiques. En physique végétale, il rédige des notices sur la force de végétation de quelques plantes, sur les maladies des grains et linfluence quelle peut avoir sur la santé des hommes et sur celle des bestiaux. En économie rurale, il donne des mémoires sur limportation des girofliers des Moluques à lisle de France et à la Guyane, sur la culture du coton, sur celle du cyprès chauve de la Louisiane dans la tourbe et dans les marais. En outre, ce sont des observations sur létablissement de Fellenberg, à Hofwyl, quil a visité daprès linvitation du ministre de lIntérieur.

Tessier publie aussi des mémoires sur linfluence que pourraient exercer, sur les progrès de lagriculture, la protection du gouvernement et le séjour prolongé des propriétaires dans les campagnes. Cependant la révolution loblige à séloigner de Rambouillet, le souvenir des bontés et de lestime de Louis XVI aurait suffi pour le perdre. Il se rend à Fécamp comme médecin de lhôpital militaire, ville dans laquelle il rencontre Georges Cuvier, biologiste, promoteur de lanatomie comparée et de la paléontologie (1769-1832).

En quittant Rambouillet, Tessier a emporté la douloureuse pensée que la ferme serait détruite ; heureusement il nen fut pas ainsi. En effet, un bureau dagriculture est créé par la Convention, et Cels, Gilbert, Huzard, Parmentier, Vilmorin, Tessier en font partie, les établissements agricoles sont sauvés et soumis à la direction de ce bureau. Tessier est alors nommé inspecteur général des bergeries nationales. Il publie, depuis cette époque, des mémoires sur lutilité dont les arts et les sciences peuvent être à léconomie rurale, sur labus des défrichements, sur les avantages quon a retirés des communications fréquentes des agronomes entre eux ; des instructions sur la culture de la betterave et du pavot, sur la durée de la gestation dans les femelles des animaux domestiques.

En 1791, il fonde, à lusage des habitants des campagnes, le Journal dagriculture ; imprimé à linstitution des Sourds-Muets par les élèves de cette école. En 1798, il commence la publication des Annales de lagriculture françoise, qui, interrompue momentanément, est reprise 3 ans plus tard et continuée avec le concours de MM. Bosc et Huzard fils. Tessier, pendant 50 ans, est lun des rédacteurs du Journal des Savants ; il contribue aussi à la partie rurale de lEncyclopédie méthodique, au Dictionnaire dagriculture de labbé Rozier, et à celui qui a été publié depuis par Déterville, mais encore au Manuel des maires, à la collection de mémoires de la Société dagriculture et de ceux de lAcadémie des sciences, dont il est membre pendant 55 ans, depuis 1795. Les Mémoires de la Société de médecine contiennent beaucoup darticles rédigés par lui, et il a fourni dutiles observations au conseil supérieur dagriculture, dont il faisait partie, et au Bulletin de la Société dencouragement pour lindustrie nationale, dont il a été un des fondateurs. Il a également travaillé à la rédaction du Code rural, et a fourni de précieuses notes à la nouvelle édition dOlivier de Serres (1804-1805).

Un grand nombre de Sociétés départementales dagriculture et dindustrie ont inscrit son nom parmi leurs associés honoraires ; des Sociétés savantes étrangères ont imité cet exemple, et, parmi les diplômes de ce genre conservés dans ses cartons, on remarque ceux de Genève, de Turin, de Toscane, de Trèves et de Moscou.

Tessier, après les voyages quil avait faits pour assurer le succès des troupeaux mérinos que le gouvernement avait voulu placer sur différents points pour en faciliter la propagation, a acheté en Brie une propriété alors mal cultivée, et dans laquelle il a transporté son beau troupeau, qui devient la première cause de sa fortune. Il y donne lexemple de la culture des prairies artificielles et dun assolement bien entendu et approprié à la qualité des terres. Il fait de nombreuses plantations et engage les propriétaires de cette contrée à limiter. Ce domaine rural, quil fait valoir pendant 20 ans, a plus que doublé de valeur par ses soins.

De plus, les communications pour porter les denrées de Bazoches (Seine-et-Marne) au marché étant difficiles, il consacre une somme très forte à la construction dune route. Nommé maire de la commune, place quil conserve jusquà sa mort, il œuvre beaucoup pour son pays, contribue à la fondation dune maison déducation pour les jeunes filles du village, consacre à cet établissement une rente perpétuelle avec la jouissance dune maison et dun jardin, et donne enfin un presbytère au curé. Tessier a conservé, dans lâge le plus avancé, le souvenir de la littérature classique. Il en fait de fréquentes citations et se plait à répéter les plus beaux passages des poètes latins et français, notamment des odes dHorace et des fables de La Fontaine.

À 92 ans, et sur linvitation du préfet de Seine-et-Marne, il rédige une instruction sur les moyens déviter la propagation du blé noir, qui, cette année, est généralement répandu dans les récoltes. Cette instruction est publiée dans les actes administratifs du département. Jusquà ses derniers moments, Tessier soccupe à compléter son mémoire sur lintroduction des mérinos en France et sur linfluence de leur propagation. Peu de temps avant sa mort, il termine cet ouvrage, dont la Société dagriculture décide limpression dans ses mémoires.

Tessier avait épousé, en 1802, à 60 ans, une jeune personne qui en avait à peine 30, Mademoiselle de Monsure, et lunion dure 36 ans, jusquà sa mort. Décédé à Paris le 11 décembre 1837, il fut inhumé au cimetière de Beton-Bazoches.

Publications

  • Observations sur plusieurs maladies de bestiaux, telles que la maladie rouge et la maladie du sang, qui attaquent les bêtes à laine, et celles que cause aux bêtes à cornes et aux chevaux la construction vicieuse des étables et des écuries ; avec le plan dune étable, et celui dune écurie convenable aux chevaux de cavalerie, de fermes, de postes..., Paris : chez la Ve Hérissant et P. Théophile Barrois jeune, et chez Mme Huzard, 1782, in-8°, 200 p. ; louvrage a été traduit en allemand, inséré dans la collection de M. Ludwig
  • Traité des maladies des grains, Paris, 1783
  • Instruction sur les bêtes à laine, et particulièrement sur la race des mérinos, Paris, [1810] ; 2e éd. augmentée, Paris : Mme Huzard, 1811, in-8° , XVI-382 p.
  • Instruction sur la manière de cultiver la betterave, Paris, 1811
  • Instructions sur la manière de cultiver la betterave..., Paris : Mme Huzard, 1811, 2 parties en 1 vol. in-8°, 26 p., et Anvers : chez les Orphelins de Vos, 1811, 3 parties en 1 vol. in-8°, 64 p. (texte français suivi de la traduction flamande) ; 2e éd., Paris : Impr. Impériale, 1811, in-8°
  • Instruction abrégée sur la culture de la betterave, à lusage des cultivateurs du département de la Seine [imprimée par ordre de M. le Préfet du département, le comte Frochot], Paris : Impr. de Ballard, 1812, in-8°, 8 p.

Tessier a rédigé la plupart des articles du volume consacré à l'Agriculture dans l'Encyclopédie méthodique, et de nombreux autres dans le Dictionnaire d'agriculture et d'économie rurale (Paris, 1787-1816, 6 volumes). Des dizaines de ses articles ont enrichi des revues telles que le Journal des savants, le Code rural, le Manuel des Maires, le Bulletin de la Société d'encouragement, le Bulletin de la Société de la Faculté de médecine, les Mémoires de la Société royale d'agriculture et surtout les Annales de l'agriculture françoise.

  • Journal dagriculture, à lusage des habitans de la campagne, Paris : Impr. de linstitution des sourds et muets, du 1er avril 1791 au 15 mars 1792, in-8°, 410 p.
  • Annales de lAgriculture Françoise, contenant des Observations et des Mémoires sur lagriculture en général ; sur la culture de la carotte, du turneps, du maïs, du lin, de la soude, etc. ; sur les plantations, la culture des arbres et le dépérissement des bois en France ; sur les platanes, les érables, le pommier, la fabrication du cidre ; sur les bêtes à laine superfine, lamélioration des laines, les buffles, les ânes, les chevaux, les chèvres, les cochons, les lapins, etc. ; sur la destruction des insectes nuisibles, les épizooties, la clavelée ; sur les grandes et petites fermes, les engrais, les rapports des finances avec lagriculture ; enfin, ce quil fat faire chaque mois dans les jardins utiles ; par une Société dAgriculteurs ; rédigées par le C. Tessier, de lInstitut national, de la Société de médecine, de celle dAgriculture du département de la Seine, etc., Paris : M. R. Huzard (‘librairie vétérinaire de la citoyenne…’, en lan VI, ‘imprimeur de la Société dAgriculture du Département de la Seine’, en lan IX), 1798, 1801-1864

Sources et bibliographie

  • Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne. Supplément, Paris, 1853 ; Supplément, 1855, tome LXXXIII, p. 425-429
  • M. le baron de Silvestre, « Notice biographique lue le 13 décembre 1837, au nom de lAcadémie royale des sciences et de la Société royale et centrale dagriculture, lors de linhumation de M. Tessier, chevalier des ordres de Saint-Michel et de la Légion dHonneur, membre de lInstitut de la Société royale et centrale dagriculture, etc. », Mémoires de la Société royale et centrale dagriculture, Paris : Mme Huzard, 1837, p. 145-151
  • M. le baron de Silvestre, « Notice biographique sur feu M. Tessier, ancien membre de la Société », Mémoires de la Société royale et centrale dagriculture, Paris : Mme Huzard, 1839, p. 190-206
  • Étienne Pariset, Éloge de Tessier, lu dans la séance publique annuelle de l'Académie royale de Médecine du 17 décembre 1840, Paris : J.-B. Baillière, 1840
  • Ernest Menault, Souvenirs de Beauce. Biographie des hommes remarquables d'Angerville : Cassegrain, Blanchet, Tessier, Paris : A. Aubry, 1859 Texte en ligne
  • Christian Poitou, « Une enquête de 1777 sur l'ergot de seigle en Sologne : l'abbé Tessier à La Ferté-Imbault », Bulletin du Groupe de Recherches Archéologiques et Historiques de Sologne, janvier-mars 2004
  • Florian Reynaud, Les bêtes à cornes (ou l'élevage bovin) dans la littérature agronomique de 1700 à 1850, Caen, thèse de doctorat en histoire, 2009, annexe 2 (publications) et annexe 22 (biographie) ressources liées
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