Grands arrêts du Conseil d'État (France)

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Les grands arrêts du Conseil d'État sont les décisions qui ont joué un rôle majeur dans l'évolution de la jurisprudence en France.

Le droit administratif français étant largement de formation prétorienne, la jurisprudence, spécialement celle du Conseil d'État et celle du Tribunal des conflits, a été déterminante pour les règles de procédures et de fond qui se sont progressivement dégagées, celles-ci étant bien sûr pour une part d'origine législative ou règlementaire, mais pour une part non moins importante construites ou dégagées par le juge lui-même.

On comprend dès lors l'importance des « grands arrêts » du Conseil d'État en ce domaine.

Sommaire

La légalité et la hiérarchie des normes

  • 1er mai 1822 : Lafitte :

Les actes dits « de haute politique » sont des actes de gouvernement, qui ne sont pas susceptibles d'être discutés par la voie contentieuse. C'est la théorie du mobile politique.

Abandon de la théorie de l'acte de haute politique (ou de l'acte pour mobile politique) : il existe toujours des actes de gouvernement, mais ceux-ci ne peuvent se définir simplement par l'existence d'un mobile politique. Aujourd'hui, le Conseil d'État considère comme acte de gouvernement les actes ayant trait au rapport entre l'exécutif et le législatif ou à la conduite des relations internationales. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement David à l'audience et l’analyse sur le site du Conseil d’État.

Théorie de la loi-écran. Le juge administratif ne contrôle pas la constitutionnalité d'une loi. Étant le juge du pouvoir exécutif, il ne peut, au nom de la séparation des pouvoirs, contrôler le travail du législateur.

Article détaillé : Arrêt Arrighi.
  • 26 octobre 1945 : Aramu :

Affirmation de l'existence de principes généraux du droit. Ceux-ci s'imposent à l'administration, mais pas au législateur. Il est généralement admis qu'ils ont valeur législative, même si certains auteurs leur assignent une valeur « supra-décrétale mais infra-législative » (René Chapus). Toutefois, on peut quand même se demander si certains PGD ne sont pas une mise en forme juridique de droits naturels imprescriptibles, et supérieurs à toutes formes de lois et de constitutions. En effet, dans un cas extrême, on voit mal comment le juge pourrait se conformer à une loi ou à une Constitution, même régulièrement votée ou plébiscitée, qui prévoirait par exemple l'interdiction de faire valoir son droit à se défendre. Le juge aurait alors le devoir de créer un PGD sur le droit à la défense, qui serait par conséquent supra-constitutionnel ou supra-législatif.

  • 30 mai 1952 : Dame Kirkwood :

Un acte administratif doit être conforme à un traité. Pour la première fois, le juge contrôle l'application par l'administration du droit international, qui n'était jusqu'alors qu'une règle de conduite ne faisant pas grief.

Le Conseil d'État se refuse à faire prévaloir le traité sur la loi postérieure. Par cet arrêt, le Conseil d'État cherche à concilier la suprématie des traités sur la loi (article 55 de la constitution) avec son refus de censurer les actes du législateur.

  • 20 octobre 1989 : Nicolo :

Le Conseil d'État indique qu’il appartient au juge administratif de contrôler la compatibilité entre les traités internationaux et les lois françaises même postérieures, revenant ainsi sur sa jurisprudence « semoules » de 1968. Il se rallie ainsi à la solution dégagée en 1975 par la Cour de cassation dans son arrêt Société cafés Jacques Vabre et suivie par le Conseil constitutionnel (dans sa fonction de juge électoral) lors de sa décision n° 88-1082/1117 du 21 octobre 1988 sur les élections législatives dans le Val-d'Oise.

Article détaillé : Arrêt Nicolo.
  • 3 juillet 1996 : Koné :

En vertu d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République, l’extradition doit être refusée lorsqu’elle est demandée dans un but politique. Une convention internationale d’extradition doit être interprétée conformément à ce principe de valeur constitutionnelle. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement Jean-Marie Delarue à l'audience.

Suprématie des dispositions constitutionnelles sur les normes internationales mêmes régulièrement intégrées en droit interne (décret organisant la consultation des populations sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie).

Conciliation entre la suprématie de la Constitution dans l’ordre juridique interne et les exigences liées à la participation de la France à l’Union européenne[1]. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement Mattias Guyomar à l'audience. Voir aussi le communiqué de presse.

Autres grands arrêts du Conseil d'État

De 1873 à 1914

  • 30 juillet 1873 : Arrêt Pelletier : voir le texte de l'arrêt ici. Dans une affaire qui suivait la guerre de 1870, le Tribunal des conflits pose la distinction entre faute de service et faute personnelle au sujet de la responsabilité de l'administration (saisie de journaux par l'autorité militaire).
  • 13 décembre 1889 : Cadot : Abandon de la théorie du ministre-juge : compétence générale du juge administratif. Voir les célèbres conclusions du commissaire du gouvernement Jagerschmidt à l’audience et l’analyse sur le site du Conseil d’État.
  • 18 avril 1902 : Commune de Néris-les-Bains : Pouvoirs de police municipale des maires. Recevabilité d’un REP du maire contre une décision de l’autorité de tutelle.
  • 11 décembre 1903 : Lot : Intérêt pour agir d’une personne contre une décision qui porte atteinte aux droits qu’elle tient de son statut, de ses titres ou des prérogatives de sa fonction.
  • 10 février 1905 : Tomaso Grecco : Responsabilité en matière de police.
  • 4 août 1905 : Martin : Recours des tiers contre les actes détachables d’un contrat. Ainsi contre les clauses réglementaires (C.E., 10 Juillet 1996, Cayzeele). Voir aussi 16 juillet 2007, Société « Tropic Travaux Signalisation ».
  • 19 février 1909 : Abbé Olivier : Pouvoir de police et liberté des cultes.
  • 7 août 1909 : Winkell : La grève dans la fonction publique est un acte illicite. Voir 7 juillet 1950, Dehaene (plus bas).
  • 4 mars 1910 : Thérond : Compétence de la juridiction administrative pour un contrat de service public.
  • 3 février 1911 : Anguet : Cumul de la faute personnelle et de la faute de service.
  • 10 mai 1912 : Abbé Bouteyre : Pouvoir d’appréciation du ministre de l'instruction publique refusant d'admettre un prêtre catholique à concourir à l'agrégation de philosophie.
  • 22 mai 1912 : Malinge contre Gérardin : Sur les pouvoirs de police en matière d'ébriété sur la voie publique.
  • 31 juillet 1912 : Société des granits porphyroïdes des Vosges. Un contrat conclu par l'administration peut l'être selon les « règles et conditions des contrats intervenus entre particuliers » et le juge judiciaire est alors compétent. En revanche, un contrat comportant une clause exorbitante du droit commun est administratif et le juge administratif est compétent dans ce cas.
  • 29 novembre 1912 : Boussuge : Tierce-opposition à une décision contentieuse rendue suite à un REP.
  • 20 juin 1913 : Téry : Respect des droits de la défense : droit du prévenu à être entendu.
  • 4 avril 1914 : Gomel : Contrôle par le juge de la qualification juridique des faits à laquelle se livre l'administration.

De 1915 à 1939

  • 14 janvier 1916 : Camino : Contrôle de l’exactitude matérielle des faits par le juge de l’excès de pouvoir.
  • 28 juin 1918 : Heyriès : Théorie des circonstances exceptionnelles.
  • 26 juillet 1918 : Epoux Lemonnier : Responsabilité de l'administration à raison de fautes commises par ses agents. Célèbres conclusions du commissaire du gouvernement Léon Blum à l’audience.
  • 28 février 1919 : Dames Dol et Laurent : Pouvoirs de guerre et circonstances exceptionnelles justifiant une police des moeurs plus rigoureuse.
  • 8 août 1919 : Labonne : Existence d'un pouvoir réglementaire de police au plan national.
  • 10 juin 1921 : Commune de Monségur : Entretien d’une église, dommages se rattachant à l’exécution ou l’inexécution de travaux publics.
  • 3 novembre 1922 : Dame Cachet : Pouvoir de retrait d'une décision individuelle créatrice de droits pendant le délai de recours contentieux. Voir 26 octobre 2001, Ternon (plus bas).
  • 26 janvier 1923 : De Robert-Lafrégeyre : Emploi de direction d’un service public industriel et commercial (SPIC).
  • 30 novembre 1923 : Couitéas : Responsabilité pour rupture de l'égalité devant les charges publiques.
  • 26 décembre 1925 : Rodière : Effet rétroactif de l'annulation contentieuse.
  • 10 janvier 1930 : Despujol : Recours dans le cas d’un changement de circonstances faisant qu’un acte réglementaire est devenu illégal.
  • 9 décembre 1932 : Compagnie de tramways de Cherbourg : Le bouleversement définitif de l'économie du contrat extérieur à la volonté des parties est un cas de force majeure. La résiliation du contrat peut être demandée au juge par les cocontractants.
  • 7 avril 1933 : Deberles : Révocation irrégulière d'un fonctionnaire : en l’absence de service fait, droit à une indemnité et non à un rappel de traitement.
  • 19 mai 1933 : Benjamin : Contrôle des atteintes portées par le pouvoir de police à la liberté de réunion. Le Conseil met en place le contrôle de proportionnalité.
  • 7 février 1936 : Jamart : Pouvoir réglementaire du chef de service pour organiser ses services.
  • 3 juillet 1936 : Demoiselle Bobard : Égalité des sexes dans l’accès aux fonctions publiques et restrictions pour des exigences spéciales du service.

De 1940 à 1979

  • 31 juillet 1942 : Monpeurt : Compétence du Conseil d’État pour les actes administratifs d’un organisme chargé d’un service public.
  • 2 avril 1943 : Bouguen : Compétence du Conseil d’État pour statuer sur certaines décisions des ordres professionnels.
  • 2 février 1945 : Moineau : Nature et étendue du rôle du juge de cassation.
  • 22 novembre 1946 : Commune de Saint-Priest-la-Plaine : Responsabilité sans faute en raison d’un accident survenu à des collaborateurs occasionnels d’un service public.
  • 7 février 1947 : D'Aillières : Possibilité du recours en cassation en l’absence de texte législatif clairement contraire...
  • 21 mars 1947 : Compagnie Générale des Eaux et Veuve Aubry : La date d'évaluation du préjudice, dans le cas des dommages aux biens, est la date où il peut être procédé aux réparations et, dans le cas des dommages aux personnes, la date de la décision juridictionnelle.
  • 27 mars 1949 : Véron-Réville : Réintégration du fonctionnaire illégalement évincé de l'administration et reconstitution de carrière.
  • 24 juin 1949 : Consorts Lecomte : Responsabilité du service de police, même sans faute lourde, en cas d’utilisation d'armes et d’engins comportant un risque exceptionnel pour les personnes et les biens.
  • 18 novembre 1949 : Demoiselle Mimeur : Responsabilité de l'administration en cas de faute non dépourvue de tout lien avec le service (cumul de responsabilités).
  • 7 juillet 1950 : Dehaene : Droit de grève des fonctionnaires. Pouvoir des chefs de service de réglementer le droit de grève de ceux-ci.
  • 22 juin 1951 : Daudignac : Pouvoirs de réglementation du maire et liberté du commerce et de l'industrie.
  • 28 juillet 1951 : Laruelle et Delville : Responsabilité des agents publics : action récursoire de l'administration.
  • 13 mars 1953 : Tessier : Limites de la liberté d’expression des fonctionnaires et sanction disciplinaire.
  • 17 avril 1953 : Falco et Vidaillac : Compétence de la juridiction administrative en ce qui concerne l'organisation du service public judiciaire, ici pour des élections au Conseil supérieur de la magistrature (CSM).
  • 29 janvier 1954 : Institution Notre-Dame du Kreisker : Recevabilité du recours pour excès de pouvoir contre les circulaires qui ajoutent des règles nouvelles. Voir 18 décembre 2002, Mme Duvignères (plus bas).
  • 28 mai 1954 : Barel : Principe de l'égalité d'accès aux fonctions et emplois publics. L'administration ne saurait, sans méconnaître ce principe, écarter un candidat en se fondant exclusivement sur ses opinions politiques.
  • 24 juin 1960 : Société Frampar : Saisie des journaux, distinction entre police administrative et police judiciaire.
  • 2 mars 1962 : Rubin de Servens : Le chef de l'État a la possibilité d'exercer le pouvoir législatif, au titre de l'article 16 de la Constitution (pleins pouvoirs), sans contrôle du juge administratif.
  • 19 octobre 1962 : Canal, Robin et Godot : Principes généraux du droit pénal. Annulation d'une ordonnance du Président de la République pour atteinte aux droits et garanties essentielles de la défense.
  • 26 janvier 1968 : Société « Maison Genestal » : Le contrôle de la légalité d'une décision économique reposant sur des motifs imprécis peut exiger un complément d'instruction.
  • 28 mai 1971 : Ville Nouvelle-Est : Contrôle de l’utilité publique d’une opération d’expropriation, par la théorie du bilan coût-avantage.

De 1980 à aujourd'hui

  • 17 mai 1985 : Mme Menneret : Pouvoir du juge de condamner à une astreinte.
  • 1er avril 1988 : Bereciartua-Echarri : Principe général du droit selon lequel un réfugié politique ne doit pas être remis à son pays d'origine.
  • 3 février 1989 : Compagnie Alitalia : Obligation pour l'administration d'abroger un réglement illégal (ici, contraire au droit communautaire).
  • 20 octobre 1989 Nicolo : Le traité international prime sur la loi même si elle a été promulguée postérieurement à la ratification du traité
  • 6 avril 1990 : Cofiroute : Avis sur renvoi. Préjudice commercial indemnisable du fait d’attroupements.
  • 29 juin 1990 : GISTI : Compétence du juge administratif pour interpréter une convention internationale sans renvoi préjudiciel au ministre des affaires étrangères.
  • 28 février 1992 : S.A. Rothmans International France et S.A. Philip Morris France : Contrôle par le juge administratif de la compatibilité entre les objectifs d'une directive européenne et une loi même postérieure. Voir aussi 3 décembre 1999, Association ornithologique et mammalogique de Saône-et-Loire (plus bas).
  • 10 avril 1992 : Epoux V. : Responsabilité du service public hospitalier. Application d'un régime de responsabilité pour faute simple.
  • 17 février 1995 : Hardouin et Marie : Restrictions sur la notion de mesures d'ordre intérieur. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement Patrick Frydman à l'audience.
  • 27 octobre 1995 : Commune de Morsang-sur-Orge : Le respect de la dignité de la personne humaine est une composante de l’ordre public. Le Conseil d'Etat l'élève au rang de PGD. De fait le lancer de nain est interdit. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement Patrick Frydman à l'audience.
  • 6 décembre 1996 : Société Lambda : Contrôle du recrutement de fonctionnaires par des entreprises privées.
  • 6 juin 1997 : Aquarone : Les règles coutumières du droit international public sont applicables en droit interne mais ne prévalent pas sur la loi en cas de conflit entre ces deux normes. Voir aussi les conclusions du commissaire du gouvernement Gilles Bachelier à l'audience.
  • 9 juillet 1997 : Association Ekin : Le juge administratif effectue un contrôle normal sur la décision du ministre de l'intérieur d'interdire la diffusion d'une publication étrangère. Voir finalement 7 février 2003, GISTI (suite à l'arrêt de la CEDH, Association Ekin, 17 juillet 2001)...
  • 5 mars 1999 : Président de l'Assemblée nationale : La juridiction administrative est compétente pour connaître des litiges relatifs aux marchés conclus par les assemblées parlementaires.
  • 3 décembre 1999 : Didier : Droit à un procès équitable et principe d'impartialité devant les autorités administratives indépendantes. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement Alain Seban à l'audience.
  • 18 janvier 2001 : Commune de Venelles et 5 mars 2001 : Saez : Conditions de recevabilité et d'admission du référé.
  • 26 octobre 2001 : Ternon : L’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. Cette jurisprudence remplace partiellement celle issue de l'arrêt Dame Cachet de 1922. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement François Séners à l'audience (pp. 20-31). Cette jurisprudence a été prolongée par l'arrêt Mme Soulier (6 novembre 2002), en matière de décisions pécuniaires, et par l'arrêt M. C. (6 mars 2009), pour l'abrogation des décisions créatrices de droit.
  • 12 avril 2002 : Papon : Responsabilités de l'État et des fonctionnaires pour les dommages causés sous le régime de Vichy.
  • 18 décembre 2002 : Mme Duvignères : Les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire peuvent faire l’objet d’un recours contentieux.
  • 27 février 2004 : Mme Popin c/ Université de Strasbourg : La justice étant rendue de manière indivisible au nom de l'État, responsabilité de celui-ci pour des dommages résultant de l'exercice de la fonction juridictionnelle relevant d'une autre personne morale.
  • 8 février 2007 : Gardedieu : Responsabilité de l'État du fait des lois contraires aux engagements internationaux. Voir les conclusions du commissaire du gouvernement Luc Derepas à l'audience.
  • 30 octobre 2009 : Mme Perreux : Effet direct des directives communautaires, y compris à l'égard d'un acte administratif non réglementaire. Voir les conclusions du rapporteur public Mattias Guyomar à l'audience. Voir aussi le communiqué de presse.
  • 9 juillet 2010 : Mme Cheriet-Benseghir : revirement de la jurisprudence du CE Chevrol-Benkeddash de 1999 relatif au contrôle de réciprocité des conventions internationales : désormais, le juge administratif est seul compétent pour contrôler la réciprocité des conventions internationales, et n'a plus besoin de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du ministre des affaires étrangères.

Notes

  1. Voici le considérant de principe de l'arrêt Arcelor : « Considérant que si, aux termes de l’article 55 de la Constitution, « les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie », la suprématie ainsi conférée aux engagements internationaux ne saurait s’imposer, dans l’ordre interne, aux principes et dispositions à valeur constitutionnelle ; qu’eu égard aux dispositions de l’article 88-1 de la Constitution, selon lesquelles « la République participe aux Communautés européennes et à l’Union européenne, constituées d’États qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d’exercer en commun certaines de leurs compétences », dont découle une obligation constitutionnelle de transposition des directives, le contrôle de constitutionnalité des actes réglementaires assurant directement cette transposition est appelé à s’exercer selon des modalités particulières dans le cas où sont transposées des dispositions précises et inconditionnelles ; qu’alors, si le contrôle des règles de compétence et de procédure ne se trouve pas affecté, il appartient au juge administratif, saisi d’un moyen tiré de la méconnaissance d’une disposition ou d’un principe de valeur constitutionnelle, de rechercher s’il existe une règle ou un principe général du droit communautaire qui, eu égard à sa nature et à sa portée, tel qu’il est interprété en l’état actuel de la jurisprudence du juge communautaire, garantit par son application l’effectivité du respect de la disposition ou du principe constitutionnel invoqué ; que, dans l’affirmative, il y a lieu pour le juge administratif, afin de s’assurer de la constitutionnalité du décret, de rechercher si la directive que ce décret transpose est conforme à cette règle ou à ce principe général du droit communautaire ; qu’il lui revient, en l’absence de difficulté sérieuse, d’écarter le moyen invoqué, ou, dans le cas contraire, de saisir la Cour de justice des Communautés européennes d’une question préjudicielle, dans les conditions prévues par l’article 234 du Traité instituant la Communauté européenne ; qu’en revanche, s’il n’existe pas de règle ou de principe général du droit communautaire garantissant l’effectivité du respect de la disposition ou du principe constitutionnel invoqué, il revient au juge administratif d’examiner directement la constitutionnalité des dispositions réglementaires contestées... »
  2. Voici le considérant de principe de l'arrêt Association AC ! : « Considérant que l'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu ; que, toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation ; qu'il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine »

Bibliographie

Ouvrage thématique

  • Jean-Louis Mestre, Introduction historique au droit administratif français, Paris, Presses universitaires de France, 1985 

Recueils de jurisprudence

  • Jean-Claude Bonichot, Paul Cassia, Bernard Poujade, Les Grands Arrêts du contentieux administratif, Dalloz, 2006 (ISBN 978-2-2470-7095-4) 
  • Marceau Long, Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvové, Bruno Genevois, Les Grands Arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 2007 (ISBN 978-2-2470-7424-2) 

Contentieux administratif

  • Bernard Asso, Frédéric Monera, avec la collaboration de Julia Hillairet et Alexandra Bousquet, Contentieux administratif, Studyrama, 2006 (ISBN 2-84472-870-7) 
  • René Chapus, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 2006 (ISBN 978-2-7076-1441-4) 

Articles

  • Guy Braibant, « Qu'est-ce qu'un grand arrêt ? », dans L'actualité juridique. Droit administratif, 2006, p. 1428 

« Actes du colloque du 29 novembre 2006 de l'Association Française pour la recherche en Droit Administratif (AFDA) sur le cinquantième anniversaire des Grands arrêts de la jurisprudence administrative », dans Revue française de droit administratif, no 2, mars-avril 2007 

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Jurisprudence
Grands arrêts
Conclusions

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