Glycoprotéine P

Glycoprotéine P
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La glycoprotéine P, aussi appelée PGP, est une glycoprotéine provoquant un phénomène de multirésistance aux médicaments (multi-drug resistance en anglais).

Découverte dans les années 1980, l’existence de cette protéine a été révélée lors d’expérimentation sur les causes de la résistance aux agents chimiothérapeutiques de certaines tumeurs.

Sommaire

Ses caractéristiques

Schéma de la glycoprotéine P

La glycoprotéine P est un récepteur transmembranaire de la membrane plasmique. Elle appartient à la superfamille des transporteurs ABC; ABC signifiant ATP Binding Cassette. Cette famille regroupe, chez l’humain, 48 protéines codant des récepteurs possédant un ou plusieurs domaines de liaison de l’adénosine triphosphate (ATP) et où se domaine présente une homologie entre les différentes protéines. La glycoprotéine P est synthétisée par le gène ABCB1. Dans la littérature, la glycoprotéine P possède de nombreux synonymes tel le récepteur MDR1 et le récepteur ABC20.

La glycoprotéine P (souvent nommé par son abréviation P-gp) a se retrouve principalement au niveau des cellules du tubule contourné proximal du rein, des cellules de l’intestin, des trophoblastes du placenta et de l’endothélium de la barrière hémato-encéphalique et hémato-testiculaire. De plus, des études plus récentes ont démontré la présence de glycoprotéine P à la surface des lymphocytes du système immunitaire.

Membres de la superfamille des récepteurs ABC
ABCA ABCB ABCC ABCD/E/F/G
ABCA1 ABCB1 ABCC1 ABCD1
ABCA2 ABCB2 ABCC2 ABCD2
ABCA3 ABCB3 ABCC3 ABCD3
ABCA4 ABCB4 ABCC4 ABCD4
ABCA5 ABCB5 ABCC5 ABCE1
ABCA6 ABCB6 ABCC6 ABCF1
ABCA7 ABCB7 CFTR ABCF2
ABCA8 ABCB8 ABCC8 ABCF3
ABCA9 ABCB9 ABCC9 ABCG1
ABCA10 ABCB10 ABCC10 ABCG2
ABCA12 ABCB11 ABCC11 ABCG4
ABCA13 ABCC12 ABCG5
ABCG8

Ce transporteur est constitué d’un seul monomère, formé de 12 domaines transmembranaires et de deux sites de liaisons nucléotidiques. Ces derniers sont situés entre les domaines transmembranaires 6 et 7 et après le domaine transmembranaire 12. Les parties amino et carboxyterminale de la protéine se situent dans le cytoplasme. Ces domaines interagissent ensemble pour former, dans la membrane plasmique, un pore, possédant sur sa face cytoplasmique, les deux domaines de liaison à l’ATP. Les substrats de la glycoprotéine P sont nombreux, mais ils sont caractérisés par leur nature hydrophobe ou amphiphile et un poids moléculaire entre 80 et 1000 kDa. Les substrats se lient aux domaines 6, 11 et 12 du pore, provoquant l’exposition des sites de liaison nucléotidique. Un ATP vient ainsi se lier sur un de ces domaines, provoquant un changement de conformation des domaines transmembranaires résultant en l’ouverture du pore et l’expulsion du substrat. Les domaines nucléotidiques fonctionnent de façon alternée, la liaison de l’ATP a un des sites inhibant le deuxième. Ainsi, la glycoprotéine P nécessite un ATP par substrat pour l’éjecter.

Ses fonctions

La protéine agit en tant que pompe ATPase, soit une pompe capable d’expulser, grâce à l’énergie fournie par l’ATP, des substrats spécifiques. Ces substrats sont soit des molécules endogènes de la cellule comme des hormones ou des substances exogènes xénobiotiques. Ces dernières sont souvent des agents chimiothérapeutiques, des inhibiteurs de la protéase virale du VIH ainsi que de nombreux médicaments (Voir la référence 4 pour un tableau détaillé des différents substrats)

Ses impacts

La glycoprotéine P, de par sa fonction, a plusieurs répercussions cliniques.

  • Tout d’abord, elle a un rôle dans la maladie d'Alzheimer. Il a été démontré que la bêta-amyloïde est un des substrats de la glycoprotéine P et que le récepteur contribue ainsi à l’évacuation de cette substance neurotoxique reconnue pour induire la maladie.
  • Il a également été démontré que la glycoprotéine P est présente à la surface des lymphocytes CD4+ et CD8+ et qu’elle entraînerait une résistance aux divers inhibiteurs de la protéase virale du VIH par excrétion de ceux-ci à l’extérieur de ces cellules. La protéine aurait donc un rôle dans l’échec de la trithérapie chez une portion des patients atteint du SIDA.
  • Elle influence la biodisponibilité de nombreux médicaments, par le pompage de ceux-ci vers la lumière du système digestif. Ceux-ci pénètrent donc dans l’organisme de façon réduite et de ce fait, ne sont pas en mesure d’effectuer leur action. Cela est notamment le cas de la digoxine, un médicament utilisé pour les troubles cardiovasculaires et du lopéramide, l’agent actif de l’Imodium™, un médicament utilisé pour traiter les désordres intestinaux. Il est important de spécifier que la glycoprotéine P possède un polymorphisme chez l’humain, amenant des variations interindividuelles de l’absorption de certains médicaments. Ce polymorphisme explique en partie la sensibilité accrue de certaines populations envers de nombreux médicaments.
  • Un des substrats de la glycoprotéine P est la ciclosporine A, un puissant immunosuppresseur utilisé notamment lors des greffes d’organe pour réduire les risques de rejet. La recherche scientifique a mis en évidence l’augmentation de l’expression dans la glycoprotéine P à la surface des cellules du tissu greffé et une augmentation du taux de rejet de ces organes.
  • La protéine est impliquée dans le phénomène de multirésistance des cellules cancéreuses aux agents chimiothérapeutiques conventionnels. Ce rôle a été confirmé par des études prouvant qu’une inhibition du récepteur provoquait une augmentation notable de la chimiosensibilité des cellules cancéreuses face à ces agents.

Le phénomène MDR

Il s'agit de la capacité de résistance aux agents anticancéreux que présente certaines tumeurs. Ce phénomène peut être de type primaire ou secondaire. Le type primaire est caractérisé par une résistance initiale des cellules cancéreuses à tout agent chimiothérapeutique. Le type secondaire est quant à lui induit par l’exposition des cellules cancéreuses, initialement chimiosensibles, à un agent chimiothérapeutique. Cette exposition provoque l’apparition de la multirésistance aux agents chimiothérapeutiques. Une exposition à une seule molécule anticancéreuse suffit pour induire une résistance contre toute une classe de molécules. La littérature scientifique s'entend pour affirmer que la glycoprotéine P est l'une des protéines responsables de ce phénomène, le phénomène ayant été observé tant chez la souris que chez l'humain.

Depuis sa découverte, de nombreux inhibiteurs de la glycoprotéine P ont été recensés. Cependant, le principal obstacle à leur utilisation est lié au fait que leur pouvoir inhibiteur sur la glycoprotéine P est lié à de forts effets secondaires ou qu’il nécessite une importante concentration cellulaire, cytotoxique in vivo. De nombreuses molécules sont à la fois des substrats et des inhibiteurs de la glycoprotéine P. C’est le cas du vérapamil, qui est le premier inhibiteur de la glycoprotéine P à être découvert. Cependant, il s’agit d’un médicament utilisé dans la régulation du rythme cardiaque et ayant donc des effets sur le système cardiovasculaire, son utilisation en tant qu’inhibiteur de la glycoprotéine P s’avère impossible.

Le jus d'orange contient des molécules inhibitrices de la P-gp

Certains produits naturels sont reconnus pour contenir des molécules inhibitrices de la glycoprotéine P. Il s’agit notamment du jus de pamplemousse, du jus de raisin et des herbes chinoises. Cependant, il n'existe à l'heure actuelle aucune donnée démontrant clairement les effets chimiosensibilisants d'un régime alimentaire à haute teneur en ces différents produits.

Les axes de recherche

La recherche sur la glycoprotéine P est présente surtout dans le domaine pharmacologique, où il y a une recherche de molécules capable d’inhiber spécifiquement cette pompe sans causer d’effets secondaires sévères. Une des molécules à l’essai est le PSC833, une molécule analogue de la ciclosporine A n’ayant aucun pouvoir immunosuppresseur.

De façon plus spécifique, la recherche de l’impact du polymorphisme de la glycoprotéine P sur l’absorption des médicaments chez certaines populations est un des sujets étudié en pharmacogénomique, le domaine de la pharmacologie se destinant à l’analyse des divergences pharmacologiques induites par les caractéristiques génomiques des individus.

Bibliographie et références

1. Nutrition, Metabolism and Genomics group – Division of Human Nutrition, Wageningen University (2006). Human ABC Tranporters. Page consultée le 15 décembre 2007 de http://nutrigene.4t.com/humanabc.htm

2. Cheol-Hee, C. (2005). ABC transporters as multidrug resistance mechanisms and the development of chemosensitizers for their reversal. Cancer Cell International, 5 :30. Consulté le 16 décembre 2007 de http://www.cancerci.com/content/5/1/30

3. Dean, M. (2002). The Human ATP-Binding Cassette (ABC) Transporter Superfamily. National Library of Medecine, NCBI. Consulté le 13 décembre 2007 de http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/bv.fcgi?rid=mono_001.TOC&depth=2

4. Jerdi, C., Desmeules, P., Dayer, P. La glycoprotéine P : un transporteur de médicaments à ne pas négliger. Revue Médicale Suisse No-524, article 23776. Consulté le 17 décembre 2007 de http://titan.medhyg.ch/mh/formation/article.php3?sid=23776

5. W. Loo, T., Bartlett, C., Clarke, D. M. (2003). Substrate-induced conformational changes in the transmembrane segments of human P-glycoprotein. The Journal of Biological Chemistry 278(16), page 13603-13606.

6. Adams, M., Mahringer, A., Kunert, O., Fricker, G., Efferth, T., Bauer, R. (2007). Cytotoxicity and P-Glycoprotein Modulating Effets of Quinolones and Indoloquinazolines from the Chinese Herb Evodia rutaecarpa. Planta Medica 73(15), page 1554-1557.


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Glycoprotéine P de Wikipédia en français (auteurs)

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