- Charles Parnell
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Charles Stewart Parnell
Pour les articles homonymes, voir Parnell.Charles Stewart Parnell, dit « le roi sans couronne d'Irlande », né à Avondale (comté de Wicklow) le 27 juin 1846 et mort à Brighton le 6 octobre 1891, est un homme politique irlandais, figure de proue du nationalisme.
La grande famine qui eut lieu entre 1845 et 1849 coûta la vie à plus d'un million d'Irlandais et provoqua une grande vague d'émigration les dix années suivantes. Ce désastre eut pour conséquence de faire prendre conscience au peuple irlandais que le gouvernement britannique l'avait abandonné pendant cette période où il avait besoin de lui et qu'il devait prendre sa destinée en main.
Sommaire
Une grande famille bourgeoise
Charles Stewart Parnell était le troisième enfant d'une famille qui en comprenait six. Son père, John Henry Parnell, était un riche propriétaire terrien d'Avondale. Sa mère, Delia Stewart, une Américaine, était la fille d'un héros de la marine américaine, le commandant Charles Stewart. La mère parenté avec la famille royale britannique. John Henry Parnell était lui-même le cousin d'un des principaux aristocrates irlandais, Lord Powerscourt.
Par conséquent, Charles Stewart Parnell était lié aux différentes catégories de la société : à l'Église d'Irlande (composée essentiellement d'unionistes), dont il était membre, à l'aristocratie par ses cousins, les Powerscourt, aux combattants américains de la guerre d'indépendance américaine, et la guerre de 1812 (où le Congrès des États-Unis avait octroyé à son grand-père une médaille d'or du courage), et même, de manière lointaine, à la famille royale. Cependant, c'est en tant que leader du nationalisme irlandais qu'il bâtit sa réputation.
Le jeune Parnell étudia au Magdalene College de Cambridge et, en 1874, devint sheriff du comté de Wicklow.
Son entrée au parlement
Parnell fut élu pour la première fois au parlement dans le comté de Meath, en avril 1875, puis il rejoignit le parti indépendantiste irlandais, le Home Rule Party, dirigé par Issac Butt. Parnell avait seulement 29 ans quand il fit son entrée au parlement.
Il avait étudié surtout en Angleterre, et, plus tard, il tomba amoureux d'une Anglaise, Mme O'Shea. Pourtant, il semble qu'il ait méprisé tous les Anglais. À son entrée au parlement, Parnell exprima ses sentiments anti-Anglais en adoptant l'entreprise d'obstruction de Joseph Biggar, à la Chambre des communes. Cette tactique, qui revenait à faire des discours extrêmement longs et ennuyeux sur n'importe quel sujet qui arrivait à la Chambre, leur attirait de nouvelles voix en Irlande, et les obstructionistes devinrent très populaires.
Le 21 octobre 1879, à Dublin, Davitt fonda l'Irish National Land League (la Ligue pour un territoire national irlandais), avec Parnell, qui en devint le président. Les principaux objectifs de la ligue étaient d'assurer aux locataires de terres une rente équitable, avec une titularisation fixée, et sans taxe. L'objectif à long terme était de permettre aux paysans d'accéder à la propriété des terres. La Land League devint bientôt un mouvement très populaire, qui apprenait aux paysans irlandais les moyens de revendiquer leurs droits.
Parnell était convaincu que résoudre la question des terres devait être le premier pas vers une autonomie de l'Irlande. Lors d'un discours à Ennis, le 19 septembre 1880, Parnell déclara : « Quand un homme a pris une ferme d'un autre qui a été renvoyé, [...] vous devez l'éviter dans les rues du village, vous devez l'éviter dans les boutiques, vous devez l'éviter dans le parc et sur la place du marché, et même au lieu de culte, en le laissant seul, en le mettant en « quarantaine morale », en l'isolant du reste de son pays comme s'il était le lépreux de nos ancêtres, vous devez lui montrer votre dégoût pour le crime qu'il a commis. » Ce type de « quarantaine morale » fut mené dans la lutte contre le capitaine Boycott, le régisseur du comté de Mayo, qui fut isolé par les habitants, jusqu'à ce que ses nerfs aient lâché.
Le chef du mouvement nationaliste irlandais
Parnell, bien que médiocre orateur à la Chambre des communes, se révéla un habile organisateur. Depuis 1880, il remplaçait Isaac Butt et William Shaw à la présidence du Irish Parliamentry Party, anciennement Home Rule Party. Sous sa présidence, l'Irish Parliamentary Party devint probablement la première formation politique organisée professsionellement de toute la Grande-Bretagne et de l'Irlande. Il instaura la sélection professionnelle des candidats, avec des délégués élus au sein du parti, qui s'était jusque-là distingué par son manque d'unité.
Parnell devint le leader incontesté du mouvement nationaliste irlandais durant les années 1880-1882 ; on l'appelait alors le « roi sans couronne d'Irlande ». Il reçut des soutiens financiers considérables, en provenance des États-Unis. (Parnell se rendit aux États-Unis avec John Dillon en 1880 et y collecta plus de 26 000 livres).
L'agitation autour de la question des terres grandit, déclenchant des vagues de violence. Parnell et d'autres chefs, dont John Dillon, Tim Healy et William O'Brien, furent arrêtés en octobre 1881, et les autorités s'appuyèrent sur une nouvelle loi votée par le gouvernement britannique, le « Coecition Act », pour combattre la ligue. Le premier ministre libéral William Ewart Gladstone trouva finalement un accord avec Parnell en mars 1882, par le traité « Kilmainham », du nom de la prison où Parnell était retenu. Les prisonniers furent libérés, l'agitation s'interrompit et la politique de réforme des terres commencée avec le Land Act de 1881 put se poursuivre. À la libération de Parnell, et afin de marquer une nouvelle ère de paix, Lord Frederick Cavendish fut envoyé en Irlande en tant que secrétaire en chef. Mais, le jour de son arrivée, il fut assassiné, ainsi que son sous-secrétaire, dans le Phoenix Park par des membres d'une société secrète, les Invincibles. Parnell condamna les meurtres et, malgré ce revers, l'attitude de Gladstone resta inchangée.
Le bloc irlandais unifié de Parnell parvint à dominer la scène politique britannique, dans le milieu des années 1880, faisant et défaisant les gouvernements libéraux et conservateurs, afin d'aboutir à la reconnaissance d'un gouvernement autonome de l'Irlande au sein du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande, le « Home Rule » (qu'on pourrait traduire par « autonomie »). À cette époque, le chef du parti libéral, William Ewart Gladstone engagea son parti à soutenir la cause de l'« Irish Home Rule », en proposant la première loi dans ce sens en 1886, la « Home Rule Bill », qui rencontra une vive opposition de la part des Conservateurs, qui voyaient là une trahison envers l'empire, ainsi qu'envers les loyalistes et les protestants d'Irlande. Gladstone perdit son poste lors des élections générales de 1886, devenant ainsi le premier, en Grande-Bretagne, à être battu sur la question de l'autonomie. Cela marqua un tournant capital dans les relations entre la Grande-Bretagne et l'Irlande : pour la première fois, un parti politique important s'était battu pour accorder à terme un gouvernement autonome à l'Irlande.
Les faux Piggot
En mars 1887, une série de lettres, publiées dans The Times sous le titre accusateur « Le parnellisme et le crime », accusèrent Parnell d'avoir été impliqué dans le meurtre de Lord Frédérick Cavendish et de son sous-secrétaire, T.H. Burke, qui avait eu lieu le 6 mai 1882. The Times publia des fac-similés de lettres signées de la main de Parnell, dont l'une semblait excuser ou fermer les yeux sur les meurtres qu'il avait à l'époque publiquement condamnés. Immédiatement, Parnell dénonça ses lettres comme des faux. Le gouvernement créa une commission spéciale pour examiner les charges à son encontre et à l'encontre de son parti. La commission siégea pendant près de deux ans. En février 1889, l'un des témoins, Richard Piggott, avoua avoir contrefait les lettres ; il s'enfuit peu après à Madrid, où il se suicida. Parnell fut totalement blanchi, et The Times lui versa une importante somme d'argent, en dédommagement. Cette affaire est restée sous le nom de « Piggot Forgeries » (les faux Piggot).
Dans les derniers mois de 1889, la popularité de Parnell atteignit son apogée. Il reçut ainsi une standing ovation à la Chambre des communes, fut présenté à la foule à Édimbourg et fut reçu à Harwarden par Gladstone.
Madame O'Shea
En décembre 1889, alors que la popularité de Parnell atteignait son zénith, il fut révélé (bien que les faits étaient connus des politiciens de Westminster) que Parnell entretenait depuis des années une liaison avec Catherine O'Shea( généralement appelée Kitty O'Shea), épouse d'un parlementaire, le capitaine Willie O'Shea, avec lequel elle était en instance divorce, et qu'ensemble, ils avaient eu des enfants. Parnell ne se défendit pas, et la plupart des gens considérèrent cette nouvelle accusation comme une calomnie. Cependant, cette fois, l'information était exacte.
Mme O'Shea et Parnell s'étaient rencontrés en 1880 et avaient immédiatement entamé une liaison. Le couple O'Shea était en instance de divorce et, depuis 1886, Parnell et Catherine O'Shea vivaient ensemble. Il n'y a aucun doute sur le fait que le capitaine était au courant de la relation de Parnell avec sa femme. Les raisons pour lesquelles le capitaine O'Shea attendit décembre 1889 pour demander le divorce ne sont pas établies. D'après une hypothèse, il espérait un gros héritage, venant de l'oncle de sa femme, souffrant, mais qui tardait à trépasser. À sa mort, l'oncle laissa la totalité de sa fortune à Catherine, d'une certaine manière pour que son mari ne puisse pas en profiter. On dit que le capitaine O'Shea aurait fait du chantage à sa femme pour obtenir 20 000 livres, mais elle refusa de payer. C'est après cela qu'il demanda un procès.
Le procès pour divorce fit sensation en Grande-Bretagne et en Irlande. Les hommes politiques de tous bords étaient convaincus que le leader irlandais allait se retirer de la vie publique, au moins pour un court instant. Cependant, Parnell, trop fier, ne montra aucune intention de se retirer. Le chef du parti libéral, Gladstone, sous la pression du courant religieux de son parti, se trouva dans l'obligation d'annoncer qu'il ne pouvait plus soutenir l'Irish Parliamentry Party tant que Parnell resterait son leader. Un meeting du parti dut même être annulé, durant la première semaine de décembre 1890. Le refus de Parnell d'abandonner son poste provoqua une rupture à l'intérieur du parti, entre les parnellites et les anti-parnellites. Quarante-quatre membres suivirent Justin McCarthy, le vice-président, et renouèrent une alliance avec le parti libéral, tandis que vingt-sept autres restaient aux côtés de Parnell.
Lors d'un meeting du parti, où Parnell avait rétorqué à l'intervention de Gladstone : « Qui est le maître du parti ? », un célèbre député, Tim Healy lui répondit : « Qui est la maîtresse du parti ? »
Ses dernières défaites
Parnell avait perdu la tête de son parti, mais il refusa d'accepter le verdict : il fit campagne lors de trois élections partielles en Irlande, en 1891, mais son candidat fut chaque fois battu. Par la suite, il engagea une guerre à outrance, contre ses détracteurs mais finit par s'épuiser.
Il se maria avec Catherine, peu après son divorce, le 25 juin 1891, à Steyning, dans le Sussex Ouest. Peu après, probablement à cause de la tension énorme, due aux meetings qui se succédaient, il mourut, à Brighton, le 6 octobre 1891. Il n'avait alors que quarante-cinq ans. Bien qu'il fut anglican, il fut inhumé dans le plus grand cimetière catholique romain de Dublin, Glasnevin.
Bibliographie
Il n'existe que des biographies en langue anglaise :
- Bew Paul, Charles Stewart Parnell, Gill & Macmillan Ltd, 1990
- Haney John, Charles Stewart Parnell, Chelsea House Publishers, 1990
- Robert Kee, The Laurel and the Ivy, Penguin, 1994
Filmographie
- Le film de John M. Stahl, La Vie privée d'un tribun, réalisé en 1937, avec Clark Gable, Myrna Loy… raconte une partie de sa vie.
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