Carte de piri reis

Carte de piri reis

Carte de Piri Reis

La carte de Piri Reis.
La carte de Piri Reis restaurée.

La carte de Piri Reis est une carte ancienne, découverte en 1929 lors de la restauration du Palais de Topkapı à Istanbul. Elle est attribuée à l'amiral et cartographe ottoman Piri Reis qui l'aurait tracée en 1513. Dessinée sur une peau de gazelle, elle détaille les côtes occidentales de l'Afrique et les côtes orientales de l'Amérique du Sud.

Sommaire

Principales caractéristiques de la carte

La carte de Piri Reis n'est que le fragment d'une carte plus grande représentant le monde connu à l'époque où elle a été réalisée, et dont le reste est aujourd'hui perdu. L'amiral turc dit s'être inspiré d'une vingtaine d'autres cartes, allant de cartes antiques grecques[1] à celles alors très récentes établies par le pilote de Christophe Colomb, capturé en Méditerranée par l'oncle de Piri Reis, ou encore à celles établies par d'autres navigateurs portugais. Il s’agit d’une carte très complète pour l'époque.

L'une des caractéristiques de cette carte est la figuration détaillée d'une côte connectée à la zone australe de l'Amérique du Sud, dont certains disent qu'elle ressemble à la côte de l'Antarctique, continent qui n'a été découvert officiellement qu'en 1818. Cette interprétation est soutenue notamment par Charles Hapgood, professeur américain d'histoire des sciences, dans son livre Cartes des Anciens Rois des Mers[2]. Certains auteurs considèrent la carte comme un « OOPArt », estimant qu'elle a été réalisée 300 ans avant la découverte de l'Antarctique et qu'elle montre la côte telle qu'elle se présente sous la glace (ce qui ferait remonter les informations à 10 000 ans). Des études scientifiques remettent en question cette interprétation.

Interprétations alter-scientifiques

La carte de Piri Reis a excité l’imagination de beaucoup de monde, ce qui a contribué à la discréditer aux yeux des scientifiques : certains l’ont considérée comme un faux grossier établi au plus tôt au XVIIIe et au plus tard durant l'entre-deux-guerres par les nazis, en collaboration avec leurs alliés turcs. Les théories les plus folles sont nées après la Seconde Guerre mondiale, principalement sous la plume d’auteurs américains :

  • Après 1945, la Navy américaine cartographie les côtes de l'Antarctique à l'aide de sonars qui déterminent les côtes terrestres continentales et les différencient ainsi des glaces polaires. En 1953, l’officier A. Mallery compare le relevé avec la carte de Piri Reis et conclut que la côte sud-américaine est similaire à la côte antarctique continentale.
  • Quelques années plus tard, le professeur Charles Hapgood de l’université catholique de Springfield College, diplômé d'histoire médiévale et moderne d'Harvard, est interpellé par la question d'un élève sur les origines du monde et la légende du continent Mu. Il se met à chercher des preuves de l'authenticité de cette légende. Il s’intéresse à la carte de Piri Reis et aux relevés marins de la Navy. Il en vient à la conclusion que seul un cataclysme à l'échelle de la planète a pu faire disparaître un continent de manière brutale. Pour lui, les plaques tectoniques se sont déplacées de plusieurs milliers de kilomètres faisant ainsi sombrer le continent Mu au sein de la croûte terrestre (ce qui va à l'encontre des théories établies). Il cherche ensuite à trouver des traces de ce continent perdu : il la retrouve dans l’Atlantide et dans les légendes liées au Déluge, rapportées par différentes religions (égyptienne, chrétienne, tibétaine, etc.). Son livre remet en cause le darwinisme et réhabilite les fois religieuses et le créationnisme. Il rencontre un très grand succès aux États-unis et est traduit en plusieurs langues dont le français [3].

Aucune de ces thèses n'est réellement cautionnée par la communauté scientifique ; toutefois, le fait que Albert Einstein ait préfacé en 1958 le premier livre de C. Hapgood, dans lequel il échafaudait sa théorie des plaques tectoniques[4], réussit à rendre crédible son hypothèse aux yeux du grand public. Continuant son œuvre de réhabilitation des écrits bibliques, Hapgood se tourne ensuite vers le paranormal et la foi en Jésus Christ, publiant des ouvrages avec un médium célèbre[5].

  • Suite au succès de ses ouvrages, C. Hapgood entre en correspondance avec son lectorat. Il entre ainsi en contact avec Rand Flem-Ath qui publie When the Sky Fell [6] et avec Colin Wilson, auteur de The Atlantis Blueprint[7] dans lequel il aborde la question de l' Atlantide.
  • Jacques Bergier[8] affirme que la carte n'a pu être établie qu'à partir d'engins volants... renforçant ainsi la thèse de l'origine extra-terrestre du monde.
  • Ces thèses sont relayées sur internet par des sites défendant l’existence d’un complot extra-terrestre[9] et sur lesquels on peut encore lire que les mesures précises de distances entre les continents américain et africain impliquent la connaissance des longitudes. Ceci est impossible puisque les longitudes ne seront mesurées qu’à partir du XVIIIe siècle.

Approches scientifiques

Terra australis sur la carte de Mercator
Interprétation possible de la partie sud de la carte de Piri Reis

Différentes études scientifiques remettent radicalement en question les interprétations faisant intervenir des phénomènes paranormaux. Ainsi, suivant une proposition d'Aristote développée par Ptolémée dont s'inspiraient les cartographes de la Renaissance, les cartes à partir du XVe siècle représentent une Terra australis qui, selon l'opinion géographique commune de l'époque, devait logiquement exister pour équilibrer la masse continentale de l'hémisphère nord. Ce serait ce continent imaginaire qui figureraient en bas de la carte de Piri Reis et la ressemblance avec l'Antarctique serait pure coïncidence.

D'autres scientifiques comme Steven Dutch[10] pensent que l'assemblage de cartes réalisé par Piri Reis aurait comporté une distorsion au niveau de Curitiba au Brésil, et que le dessin ne représenterait pas l'Antarctique mais la côte sud du Brésil, de l'Uruguay et de l'Argentine.

Diego Cuoghi a démontré que la carte n'était que la compilation de celles de Christophe Colomb et que la représentation de l'Antarctique n'était qu'un fantasme de la part de C. Hapgood.

Gregory C. McIntosh, dans son livre The tale of two admirals - Columbus and the Piri Reis Map of 1513[11] a examiné en détail les énigmes posées par la carte de Piri Reis et a démontré qu'elle correspondait à un assemblage de plusieurs cartes de Christophe Colomb ; par exemple, on remarque que les Îles Vierges, qui ont dû être reprises sur deux cartes distinctes, sont représentées en double ou encore que les noms des ports et îles sont directement empruntés aux cartes de Colomb[12]. Cette démonstration a été reprise par Diego Cuoghi[13].

Les expertises scientifiques de la carte infirment les supputations des non-scientifiques (Hapgood, Bergier, etc.). La carte ne montre pas de longitudes, pas plus que l'Antarctique, et encore moins les Andes ou le Lama. Le support de la carte a été daté par le carbone 14 et il remonte bien au XVIe siècle. L'encre a également été testée chimiquement et date aussi du XVIe siècle. Tous ces tests ont été effectués par W. Mc Crone un spécialiste qui a déjà travaillé sur le suaire de Turin [14].

La carte de Piri Reis est donc authentique et montre que les Turcs, bien qu'étant loin de l'océan Atlantique et de l'Amérique, se tenaient au courant des dernières découvertes de l'époque.

Notes

  1. Il ne cite pas de noms, mais on connaît ceux de Ptolémée, Hécatée de Milet, Anaximandre, etc. qui établirent en leur temps des cartes. On connaît également le voyage de Pythéas et les voyages des Phéniciens Hannon et Himilcon, ou encore l'expédition de Néchao II ; Piri a peut-être eu accès aux récits de ces voyages et aux cartes qu'ils ont permis d'établir.
  2. Maps of the Ancient Sea Kings
  3. Cartes des Anciens Rois des Mers
  4. Les mouvements de l'écorce terrestre avec la collaboration de James H. Campbell. Préface d'Albert Einstein. Introduction à l'édition française par yves Rocard - Payot Paris 1962 333p
  5. Babbitt, Elwood D., with Charles Hapgood (editor) Talks with Christ and his teachers : through the psychic gift of Elwood Babbitt, 1981 ; Babbitt, Elwood D., with Charles Hapgood (editor) God Within, A Testament of Vishnu.
  6. 1995, St. Martin's Press
  7. 2000, Time Warner, Little, Brown and Company
  8. Les extra-terrestres dans l'histoire, éditions J'ai lu, « L'Aventure mystérieuse », 1972, n° A250.
  9. dinosaura, www.ldi5.com, ufo.com
  10. The Piri Reis Map
  11. Mercator's World, mai-juin 2000
  12. résumé
  13. The mysteries of the Piri Reis map, Diego Cuoghi.
  14. (en) Walter McCrone, « The Vinland Map », dans Analytical Chemistry, vol. 60, no 10, mai 1988, p. 1009–1018 [lien DOI] 

Liens externes


Les premières cartes du Nouveau Monde
Juan de la Cosa (1500) · Cantino, King-Hamy (1502) · Pedro Reinel (1504) · Caverio, Pesaro (1505) · Contarini, B. Colomb, Waldseemüller (1506) · Waldseemüller (1507) · Ruysch (1508) · Sylvanus (1511) ·Piri Reis, Tabula Terre Nove (1513) · Apianus (1520)
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