Révolte syrienne de 2011

Révolte syrienne de 2011
Révolte syrienne de 2011
Hama Al-Assy Square 2011-07-22.jpg

Manifestation de l'opposition à Hama, le 22 juillet 2011.

Date 15 mars 2011-en cours
Localisation Drapeau de Syrie Syrie
Caractéristiques
Groupes organisateurs manifestations spontanées, CNS
Participants Syriens[1]
Revendications Liberté, levée de l'état d'urgence, réforme de l’État,
puis départ du président Bachar el-Assad
Actions Manifestations, rassemblements, sit-in permanents[2].
Répression
Arrestations au moins 26 000[3] (conflit en cours)
Morts 3 500 morts (conflit en cours)

La révolte syrienne de 2011 est une vague de contestations populaires sociales et politiques sans précédent sous le régime baasiste, débutées à partir de février 2011 en Syrie. Il s'inscrit dans un contexte de protestations dans les pays arabes. Comme en Tunisie ou encore en Égypte, les manifestants demandent le départ de leur dirigeant.

Alors que le printemps arabe s’étend à tout le Moyen-Orient, le régime de Damas prend d’intenses mesures de prévention, maniant la carotte et le bâton. Plusieurs appels à manifester sont lancés à partir du 4 février[4], mais les moukhabarat répriment sévèrement toute tentative d’opposition.

Cependant, des manifestations quotidiennes se succèdent à Deraa à partir du 18 mars[5]. Plusieurs bâtiments symboliques du pouvoir (siège du Parti Baas, tribunaux) sont incendiés[5]. Le vendredi 18 mars, des manifestations de plusieurs milliers de personnes ont lieu à Damas, Homs, Banias et surtout Deraa. Le pouvoir réprime dans le sang ces manifestations, faisant des centaines de morts et des milliers de blessés ; Human Right Watch parle de véritable massacre[6]. Des dizaines d’opposants sont arrêtés[4]. À partir du 25 mars, malgré la répression et des concessions du gouvernement, le mouvement s'étend à toutes les principales villes du pays.

Ce mouvement se poursuit jusqu'à l'été, conduisant le 3 août 2011 le Conseil de sécurité de l'ONU à condamner à l'unanimité de «violations généralisées des droits de l'homme et l'emploi de la force contre des civils» par les autorités syriennes[7].

Ce type de protestations dépasse par son ampleur et sa durée le soulèvement qui avait mené au massacre de Hama en 1982, d'autant que les membres de différentes communautés se sont soulevées, créant un sentiment de solidarité nationale[1].

Fin août est créé le CNS (Conseil national syrien) à l'image du CNT libyen. Il est lancé officiellement les 1er et 2 octobre 2011 à Istanbul, en Turquie.

Sommaire

Contexte

La tête d'une statue déboulonnée de l'ancien président Hafez el-Assad.

Le président Bachar el-Assad est au pouvoir depuis le 17 juillet 2000. Il a succédé à son père Hafez el-Assad qui avait été au pouvoir de 1971 à 2000, après avoir pris le pouvoir grâce au soutien d'une partie du Parti Baas. Ce parti domine actuellement la vie politique syrienne, et notamment le Parlement. Le Front national progressiste est la seule coalition du Parlement, composée principalement du Parti Baas (134 députés), et de neuf autres partis politiques représentant 35 députés.

La population syrienne est composée de diverses ethnies et confession religieuses différentes. Le sunnisme est largement majoritaire dans le pays, mais le président Bachar el-Assad est de confession alaouite, une branche de l'islam chiite largement minoritaire en Syrie, mais par contre qui est majoritaire au sein de l'armée et de l'appareil d'état.

De nombreux opposants politiques sont emprisonnés, comme Kamal Labouani.

Protestations

Appels à manifester non suivis

Suivant l'exemple de la révolution égyptienne, des appels à manifester sont lancés sur Facebook, invitant les Syriens à se mobiliser les 4 et 5 février, notamment devant le siège du parlement à Damas. L'appel ne fut pas suivi, en raison notamment de l'important dispositif de sécurité, des intimidations des forces de sécurité et de l'arrestation des principaux organisateurs[8].

Le 17 février, le gouvernement annonce des mesures sociales prévoyant la baisse de taxes sur les produits alimentaires de première nécessité, l'augmentation des subventions pour le fioul et la création d'un fonds social qui aidera 420 000 personnes en difficultés[9],[10]. D’autres augmentations de prix et l’instauration de la TVA sont reportées ; le gouvernement annonce également le recrutement de 67000 fonctionnaires, multiplie les rencontres avec des représentants de la société civile et des dignitaires religieux[10]. Des dizaines de fonctionnaires corrompus sont mutés ou renvoyés[10]. Le gouvernement apporte son soutien diplomatique, mais aussi matériel, et envoie des renforts en Libye, soutenir le colonel Kadhafi, en manière d’avertissement sur ses intentions en cas de révolte[11]. Fin février, le pouvoir rétablit l'accès à Facebook et Youtube pensant apaiser d'éventuelles tensions. Certains analysèrent le geste comme un moyen de mieux repérer les activistes[12]. Le pouvoir multiplie également les mesures sécuritaires : renforcement des écoutes, plan de rupture des moyens de communications pour isoler des régions ou des villes du reste du pays, ordre donné aux moukhabarat de répression ferme de toute agitation, interdiction de messagerie instantanée et de Skype, nombreuses arrestations préventives ou non, comme celles d’enfants tagueurs[10].

Le 17 février, les violences policières contre un commerçant entraîne le soulèvement d'un quartier de Damas[13].

Le 7 mars, grève de la faim par 13 prisonniers politiques[14].

Révolte de Deraa

Manifestations à Homs.

Le 13 mars, quinze écoliers sont arrêtés pour avoir taggé les slogans de la révolution égyptienne de 2011, puis transférés à Damas. Un nouvel appel est lancé sur Facebook, appelant les Syriens aux soulèvement à partir du 15 mars dans toutes les villes de Syrie. Une manifestation eut lieu le jour prévu à Damas[2],[15], avec quelques dizaines de personnes rassemblées au souk Al Hamidia (ou Hamidiyé) criant des slogans tels que : « Dieu, la Syrie, la liberté et c'est tout ! » ; la foule fut rapidement dispersée par les forces de l'ordre. Selon les organisateurs, des manifestations eurent aussi lieu à Deir ez-Zor, Alep et Hassakeh[16]. Le lendemain, 200 personnes, pour la plupart des proches de prisonniers politiques, manifestent près du ministère de l'Intérieur à Damas pour demander leur libération. Ils sont violemment dispersés par la police. Selon des témoins, des intellectuels ont été sauvagement battus, Amnesty International condamne la répression de manifestants pacifiques et affirme que 30 personnes ont été arrêtées, dont les activistes des droits de l'homme Mazen Darwish et Suhair Al-Attassi et le philosophe Tayyeb Tizini[17].

Les auteurs de l’appel organisent le 18 mars un « vendredi de la dignité ». Des manifestations ont lieu à Damas[2], Alep, Homs, Hama, Banias[2] et surtout à Daraa[2] (ville du sud, d'environ 80 000 habitants)[15]. Les manifestations partent des mosquées (le vendredi est jour de prière) ou des stades où des matches ont lieu ce jour-là (ce qui entraîne la suspension de toutes les compétitions de football)[18]. Les manifestations ont un caractère tribal et confessionnel limité : ainsi, la croix et le croissant ont été brandis au sein de la mosquée des Omeyyades à Damas[19]. Pour l’ancien diplomate Ignace Leverrier, il est même absent[20]. À Dara, les forces de l’ordre ont tiré à balles réelles sur les manifestants, tuant quatre d'entre eux[21] et en blessant des centaines. Parmi les blessés transportés à l'hôpital, certains sont enlevés par la police[22]. Le même jour, la composition d’un « conseil national de transition temporaire », virtuel, est publié sur Facebook pour manifester l’existence d’une alternative[23].

Le lendemain, 19 mars, à Daraa, les funérailles des manifestants tués la veille se transforment en manifestations, les forces de sécurité dispersent la foule par des tirs de gaz lacrymogènes, occasionnant plusieurs blessés[24].

La contestation s’amplifie le dimanche 20 mars, avec environ 10 000 manifestants descendant de nouveau dans les rues de Daraa (selon les organisateurs), rejetant la tentative de médiation d’une délégation gouvernementale. Les forces de l’ordre répriment violemment les contestataires en tirant des gaz lacrymogènes et des balles réelles, tuant un manifestant et en blessant une centaine. La manifestation tourne alors à l’émeute, les protestataires incendient le siège du parti Baas au pouvoir, le Palais de Justice ainsi que deux succursales de deux compagnies de téléphonie mobile, dont l’une appartient à Rami Makhlouf, cousin du président Bachar el-Assad[25].

Les manifestations continuent le 22 mars à Daraa et s’étendent à la ville voisine de Djassem[26]. Le 23, un millier de personnes manifestent de nouveau à Daraa, où on compte plus de cent morts[2],[15]. La révolte s'étend à la ville de Nawa avec 2 500 manifestants scandant des slogans contre le pouvoir et se dirigeant vers le commissariat de la ville, et à Jassem[27].

Le 24 mars, vers 1 h 30 du matin, une unité de l'armée prend d'assaut la mosquée Omari à Daraa où s'étaient retranchés certains manifestants, en tuant au moins six. Plus tard dans la journée, la police ouvre le feu lors des funérailles de manifestants qui rassemblaient 20 000 personnes selon les protestataires. D'autres incidents ont lieu entre opposants et forces de l'ordre dans les villages avoisinants. Au total, 15 personnes sont tuées tout au long de la journée[28]. Malgré cette violente répression, le gouvernement annonce des mesures le soir du 24 mars, comprenant des hausses importantes de salaires dans l'administration (de 20 à 30 %), la libération des protestataires arrêtés durant les troubles et une potentielle abrogation de la loi sur l'état d'urgence (en vigueur depuis 1963). De plus, la conseillère du président juge les revendications des manifestants « légitimes[29] ».

Extension à tout le pays

Manifestations à Damas.

Du 25 au 27 mars, le mouvement s'étend dans plusieurs grandes villes du pays. Après les concessions annoncées par le gouvernement, et la libération de plus de 200 prisonniers politiques, les manifestations se renforcent à Deraa où une statue de Hafez el-Assad est déboulonnée. La contestation s'étend à deux villes proches de Derra, Tafas et Sanamein et dans la capitale Damas (1,4 million d'habitants). Les troubles éclatent aussi à Hama (500 000 habitants), qui avait été victime d'une violente répression en 1982. Des locaux du Parti Baas ont été incendiés dans plusieurs villes. Les manifestants scandent des slogans tels « le peuple veut la chute du régime » ou « nous nous sacrifierions pour Deraa ».

Le 26 mars, Lattaquié (700 000 habitants) commence de participer au mouvement de contestation[15] où la répression fait au moins dix morts. Le lendemain, l'armée est envoyée dans la ville. Ce même jour, le gouvernement annonce qu'il abrogera la loi sur l'état d'urgence, après avoir évoqué cette possibilité trois jours auparavant, et le président Bachar el-Assad devrait prochainement s'adresser à la nation. Deux cent quatre-vingt prisonniers politiques sont libérés[2].

Au 5 avril, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme recense 123 personnes tuées entre le 18 mars et le 1er avril en Syrie[30]. Le 8 avril, on compte 26 nouveaux morts à Deraa[2].

Une manifestation de cinq cent personnes a lieu le 13 à Alep[2],[15]. Un nouveau gouvernement est nommé le 14 avril[15], mais sans calmer la contestation, qui rassemble 10 000 personnes à Lattaquié le 17. Le 18, 20 000 personnes font un sit-in à Homs[2], huit sont tuées[15]. Le 20 avril, d'autres manifestations ont lieu à Alep et Homs, et le 21, l'état d'urgence est levé et la Cour de sûreté de l'État, un tribunal d'exception, est abolie[2],[15]. Le 22, après la mort de 25 nouvelles personnes à Deraa et Damas, deux députés et le mufti de Deraa démissionnent[15].

C’est à cette période que la dissidence, totalement inorganisée, constitue un "comité de coordination pour le changement démocratique en Syrie[31],[32]".

Répression militaire

Militaires à Deraa.

Le 25 avril, les 4e et 5e divisions mécanisées, commandées respectivement par Maher Al-Assad et Muhammad Saleh Al-Rifai, et le 132e bataillon, attaquent la ville rebelle de Deraa. Des sources encore insuffisantes pour avoir des certitudes font état de mutineries individuelles, voire d’unités entières, qui occasionneraient un arrêt de la progression de l’armée dans la ville[33],[34],[35]. Pour rendre la défense de la ville plus difficile, l’eau, l’électricité et les communications téléphoniques ont été coupées[36]. L’ampleur de la répression provoque la démission de plus de 230 membres du parti au pouvoir[15]. De la même façon, les communications par téléphone satellite sont coupées[37].

Le 29 avril, les forces de sécurité ont ouvert le feu vendredi sur des milliers de personnes marchant sur la ville de Deraa, foyer de la contestation situé près de la frontière jordanienne[38]. Des manifestations ont eu lieu dans tout le pays[2], avec un bilan d'au moins 48 civils ont été tuées lors des manifestations[39].

Cependant il y a aussi eu, six personnes qui ont péri samedi 30 avril dans le pilonnage de l'armée et les tirs de francs-tireurs à Deraa, foyer de la contestation contre le régime en Syrie, où l'eau, la nourriture et les médicaments manquent depuis l'intervention des troupes lundi[40]. Mais aussi le même jour, près d'une centaine de personnes se sont rassemblées devant les locaux de la chaîne satellitaire qatarie Al-Jazira, accusée de "mensonges" et d'"exagération" dans sa couverture du mouvement anti-régime débuté mi-mars[41]. Les forces syriennes ont arrêté deux personnalités de l'opposition, Hassan Abdel Azim et Omar Kachach[42].

Le 1er mai, de nouvelles manifestations ont lieu à Deraa, Qamisbli, Douma, Lattaquié[2].

Le soir du 4 mai, 161 véhicules blindés commencent le siège de deux villes du centre du pays, Al-Rastan et Talbisseh[43]. À Alep et Damas, des sit-in ont lieu dans les universités[15].

Le 5 mai, l’armée se retire de Deraa[15]. Le 6 mai, comme chaque vendredi, des manifestations ont eu lieu un peu partout en Syrie pour demander la fin du régime de Bachar al-Assad. Comme chaque vendredi, les forces de l'ordre ont ouvert le feu sur les contestataires. Selon les militants des droits de l'Homme, il y aurait ainsi au moins 26 morts, la plupart à Homs, dans le centre du pays.

Par ailleurs, Riad Seif, l'un des leaders de l'opposition, a été arrêté[44].

Le 7 mai, 6 manifestantes tuées près de Banias[45].

Le 9 mai, les manifestations continuent, des coups de tirs se multiplient, et les communications téléphoniques ont été coupées[46]. Selon Human Rights Watch, les bilans en morts, en blessés comme en arrestations sont invérifiables[34]. L’ONG Insan indique un bilan de 632 morts et 8000 arrestations entre le 15 mars et le 6 mai, mais en indiquant que les identités de 5000 personnes arrêtées n’ont pas encore pu être vérifiées[18].

Le 11 mai, 21 personnes tuées dont deux soldats, un enfant et une infirmière[47].

Le 13 mai, comme tous les vendredi des manifestations pacifiques se déroulent dans tout le pays, notamment à Deraa, Homs, Hama, Bou Kamal, Lattaquié, Qamishli, Amouda et Alep. Au moins deux manifestants sont tués à Homs[48].

Le 14 mai, au moins quatre personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées à Tall Kalakh, près de Homs, par des tirs des forces de l'ordre[49].

Le 20 mai, des milliers de personnes manifestent. Ils répondent à l'appel de l'opposition pour la liberté et l'unité nationale. Damas, la capitale, et Alep, la deuxième ville pays, jusque-là globalement épargnées par les défilés, sont cette fois concernées.les forces de sécurité ont tiré à de nombreux endroits, notamment Homs, Sanamein ou Maaret al Noumane. Il y aurait au total au moins 44 morts[50].

Le 12 juin, l'armée syrienne pénètre dans Jisr al Choughour pour « déloger les groupes armés » après avoir pilonné et tiré à la mitraillette au hasard sur les habitants depuis des hélicoptères[51],[52].

Manifestations à Hama le 22 juillet.

Le 21 juin, la coordination nationale des comités locaux de jeunes révolutionnaires publie son programme politique, Vision des comités locaux de coordination pour l'avenir politique de la Syrie, qui formule l'avenir de la Syrie sous forme de démocratie parlementaire[53]. Cette réunion est suivie le 27 juin d'une réunion entre intellectuels de l'opposition dans un hôtel à Damas, alors que 400 étudiants d'Alep étaient jugés pour sabotage et insulte au président[54].

Le 15 juillet, des centaines de milliers de Syriens manifestaient vendredi, notamment dans les villes de Deir Ezzor (350.000 personnes), Hama (150.000) et Damas (7.000), pour demander la libération des détenus et la chute du régime, plusieurs civils ont été tués à Damas et à Idleb, dans le nord-ouest du pays, par les forces de sécurité[55].

Le 17 juillet, des affrontements entre partisans du régime et opposants à Homs (centre) ont fait au moins 30 morts au cours des dernières 24 heures[56].

Le 19 juillet, treize civils ont été tués par des tirs de l'armée syrienne à Homs[57].

Le 31 juillet est la journée la plus meurtrière avec 140 personnes tuées par l'armée[58].

Une escalade de la répression est constatée après la déclaration début août du Conseil de sécurité des Nations Unies[59]

Fondé fin août et lancé les 1er et 2 octobre 2011 à Istanbul, en Turquie, le CNS (Conseil national syrien) a pour but de pour coordonner les opposants et mener des opérations contre le régime de Bachar el-Assad. Son analogue libyen, le CNT, est le premier à le reconnaitre comme unique représentant du peuple syrien[60]. La France lui apporte son soutien le 10 octobre[61].

Après une relative accalmie, des protestations reprennent le vendredi 14 octobre, avec notamment des manifestations de soutien aux soldats ralliés à la contestation, et 12 personnes sont tuées[62] par les forces de l'ordre loyalistes.

Opposition armée

Devant la poursuite de la répression, des défections se produisent et une frange de l'armée semble se constituer à l'automne 2011 en opposition armée au régime. Deux groupes de soldats séditieux, l'Armée syrienne libre et le Mouvement des officiers libres, se constituent[63], et pourraient avoir tué plusieurs centaines de membres des forces de sécurité[64].

Mi-octobre 2011, le développement de ces défections de nombreux soldats des forces armées, dont certains se rebellent pour retourner leurs armes contre les forces de répression, fait craindre à l'ONU un mouvement de guerre civile, d'autant plus que les attaques de déserteurs contre forces loyalistes au régime semblent se multiplier[62],[65], les déserteurs rejoignant les rangs de l'Armée syrienne libre mouvement armé d'opposition créee en juillet 2011 par le colonel Riad al-Asaad[66], laquelle intensifie ses opérations contre les piliers du régime. Ainsi, le 16 novembre 2011, le centre des services de renseignements aériens situé à l’entrée de Damas est attaqué à l'aube à la roquette et à la grenade par un commando armé[67]. Quatre jours plus tard, le 20 novembre, c'est le siège du Parti Baas à Damas qui est la cible d'attaque à la roquette[68].

Réactions internationales

Dès le mois de mars, l'Union européenne, le Canada, les États-Unis et la Turquie ont condamné les violences[69],[70],[71],[72].

En Europe

L'Union européenne a pris des sanctions à plusieurs reprises contre le régime de Bachar El-Assad. Tout au long du mois d'aout 2011, Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne, a annoncé une série de sanctions contre la Syrie. Une vingtaine de personnes faisant parti du régime de Bachar El-Assad ont été interdit de visa et ont eu leurs avoir gelées. Cinq entreprises militaires impliquées dans les violences sont interdites de relations commerciales. Un embargo de l'UE sur les exportations de pétrole syriennes est également instauré[73],[74],[75].

Le 23 mars, le Ministère des Affaires étrangères français a appelé le pouvoir syrien à « renoncer à tout usage excessif de la force » et a condamné « les violences qui font des morts et des blessés ». Il a également invité Bachar al-Assad à engager des réformes politiques. La France s'est aussi jointe à la demande du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme de « procéder à une enquête transparente sur les événements » des jours précédents[76].

Le 17 novembre, la France rappelle l'ambassadeur français en Syrie, Éric Chevallier, à Paris et ferme les consulats généraux d'Alep et de Lattaquié[77].

Aux États-Unis

Le 10 août, le gouvernement des États-Unis prend des sanctions économiques contre les sociétés de télécommunication syriennes et les banques liées à Damas. Les sanctions empêchent les citoyens américains de mener des affaires avec la Banque Commerciale de Syrie, la Banque Syrienne Libanaise Commerciale ou Syriatel. Les avoirs situés aux États-Unis de ces sociétés ont été gelés[78].

Dans une déclaration écrite publiée le 18 août, le Président Obama dit explicitement pour la première fois que Bashar El-Assad devrait démissionner : « le futur de la Syrie doit être déterminé par son propre peuple, mais le Président Bashar al-Assad s'est mis en travers… Pour le bien du peuple syrien, le moment est venu pour le Président Assad de s'éloigner." Il a condamné à nouveau la répression brutale, mais répété que les États-Unis n'interviendraient pas dans les affaires syriennes au-delà des pressions politiques et économiques pour que Assad quitte le pouvoir. Le même jour, Hillary Clinton a annoncé un embargo total sur les importations de pétrole et de produits pétroliers syriens aux États-Unis[79].

En Amérique du Sud

Le président vénézuélien, Hugo Chavez, apporte dans ce contexte son soutien à « son ami » Bachar el-Assad, et le décrit comme « un humaniste[80] ».

En Russie et en Chine

La Russie et la Chine s'opposent à toute résolution ou sanctions envers la Syrie :

  1. pour des raisons intérieures : craintes de voir le Printemps Arabe faire tâche d'huile[81],
  2. pour des raisons de principes : ces 2 pays sont traditionnellement opposés à tout droit d'ingérance[81],
  3. pour des raisons d'intérêts : la Russie notamment est le premier fournisseur d'armes au régime syrien qui reste le seul allié de Moscou dans la région, y compris du point de vue militaire grâce à la base navale de Tartous, la dernière qui, en Méditerranée, accueille encore en permanence des navires de la flotte militaire russe[82],[83],[81].

En conséquences :

  • Ces 2 pays ont boycotté, en juin 2011, les discussions à l'ONU destinées à établir un projet de résolution condamnant la répression sanglante en Syrie[84].
  • Moscou se déclare par la suite opposé aux sanctions prises par l'Union européenne au cours du mois d'aout[85],
  • Début octobre 2011, Russes et Chinois opposent leur veto à une résolution déposée par des pays européens[86] à l'ONU.

Alors qu'une demande d'intervention de la Turquie par des réfugiés syriens se fait de plus en plus pressante, la Russie prévoit en retour de déployer une importante flotte militaire dans les eaux territoriales syriennes pour empêcher une éventuelle attaque de l'OTAN[87],[88].

En Afrique et au Moyen-Orient

Plusieurs capitales arabes condamnent finalement le pouvoir syrien, se joignant aux pays occidentaux pour provoquer une session spéciale du Conseil des droits de l'homme de l'ONU le 22 août 2011[89],[90]. Le 12 novembre 2011, le Ligue arabe vote la suspension de l'adhésion de la Syrie à toutes ses réunions à compter du 16 novembre et prône des sanctions politiques et économiques contre le pouvoir syrien[91]. Cependant, le roi du Bahreïn, qui vient de réprimer la contestation massive dans son propre pays apporte son soutien régime de Damas[92].

L'appartenance de la famille El-Assad à la secte chiite des alaouites a permis depuis plusieurs années un important rapprochement du régime iranien des Mollahs avec le régime syrien qui devînt ainsi le principal allié de Téhéran dans le monde arabe. D'autant que Damas assurait un important soutien logistique au Hezbollah, la milice libanaise chiite pro-iranienne, dans sa lutte acharnée contre Israël. Au fil de l'évolution de la situation, Téhéran semble avant tout préoccupé de préserver ses intérêts dans la région en adoptant une attitude assez ambigüe. D'un côté la capitale iranienne prend quelques distances avec le régime de Damas en ouvrant la dialogue avec l'opposition syrienne[93], tout en désapprouvant les sanctions prises par la Ligue arabe craignant que celle-ci n'attise la violence, et ne débouche ainsi sur une guerre civile[94].

Aux Nations unies

Les 7, 20 et 31 juillet 2011, le secrétaire général Ban Ki-moon appelle à mettre un terme à la répression[95],[96],[97]. Le 3 août 2011, le Conseil de sécurité condamne la répression par les autorités syriennes[98]. Puis le 5 août 2011, des experts de l'ONU exhortent la Syrie à cesser la répression contre les civils[99].

Notes et références

  1. a et b Nora Benkorich, « Sanglant "printemps syrien" », Le Monde, 24 mai 2011, p. 20
  2. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l et m « Le mouvement de contestation ne fléchit pas en Syrie », RFI, publié le 5 mai 2011
  3. La répression syrienne a déjà fait 2000 morts Le Figaro
  4. a et b Saena Sadighiyan, Nicolas Brien, « Syrie : chronique d’une impossible révolution Twitter », Rue89, 19 mars 2011
  5. a et b AFP, « Des milliers de manifestants de nouveau à Deraa Des milliers de manifestants de nouveau à Deraa », France 2, 21 mars 2011
  6. Syrie: Les forces de sécurité ont tué des dizaines de manifestants, HRW, 25 mars 2011
  7. Syrie : Escalade de la répression après la déclaration du Conseil de sécurité des Nations Unies, HRW, 9 août 2011
  8. L'appel à manifester contre le pouvoir diffusé sur Facebook n'a pas été suivi sur France 24, le 4 février 2011. Consulté le 24 mars 2011.
  9. Damas baisse les taxes sur des produits alimentaires sur Le Monde, 18 février 2011. Consulté le 5 mars 2011
  10. a, b, c et d Ignace Leverrier, op. cit., p. 62
  11. Ignace Leverrier, op. cit., p. 61
  12. Syrie: les sites de Facebook et YouTube de nouveau accessibles, sur France24, 9 février 2011. Consulté le 22 mars 2011.
  13. Gilles Paris, « La Syrie n'est pas épargnée par la contestation », Le Monde, 19 mars, p. 13
  14. Syrie: 13 militants emprisonnés en grève de la faim sur TF1, 7 mars 2011
  15. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k et l AFP, « Retour sur deux mois de contestation », Le Nouvel-Observateur, publié le 6 mai 2011, consulté le 8 mai
  16. Premiers signes de contestation en Syrie, sur L'Express, 15 mars 2011. Consulté le 22 mars 2011.
  17. Amnesty.org
  18. a et b Cécile Hennion, « En Syrie, la résistance des militants du web face à la répression », Le Monde, 7 mai 2011, p. 6
  19. Gilles Paris, « En Syrie, la ville de Deraa est en état quasi-insurrectionnel », Le Monde, 24 mars 2011, p. 10
  20. Ignace Leverrier, « L’appartenance citoyenne au centre des revendications des manifestants syriens », Un Œil sur la Syrie, blog du Monde, publié le 3 mai 2011, consulté le 10 mai
  21. Syrie/manifestations: 4 morts sur Le Figaro, 18 mars 2011. Consulté le 22 mars 2011.
  22. AFP, « Syrie : quatre manifestants tués dans le Sud », Le Monde, 20-21 mars, p. 12
  23. Ignace Leverrier, « Il existe en Syrie une alternative à Bachar Al Assad », publié le 26 avril 2011, consulté le 10 mai
  24. Syrie: des blessés lors d'affrontements, sur Le Figaro, 19 mars 2011. Consulté le 22 mars 2011.
  25. Syrie : la contestation vire à l'émeute dans la ville de Deraa sur Le Monde, 20 mars 2011. Consulté le 24 mars 2011.
  26. Les manifestations gagnent une deuxième ville de Syrie, sur L'Express, 21 mars 2011. Consulté le 22 mars 2011.
  27. Syrie: 5e journée de manifestations contre le régime dans le sud sur Le Point, le 22 mars 2011. Consulté le 24 mars 2011.
  28. Syrie: au moins 15 morts dans des affrontements à Deraa sur L'Express, le 23 mars 2011. Consulté le 24 mars 2011.
  29. La Syrie libère des militants sur Le Figaro, 24 mars 2011. Consulté le 24 mars 2011.
  30. Une tension toujours très vive en Syrie sur Le Monde, 5 avril 2011
  31. Simplement pour preuve de son existence : Appel à la libération des prisonniers politiques en Syrie
  32. « Syrie : La fin de l'Etat de l'urgence ne résout rien », BBC, publié le 22 avril 2011, consulté le 10 mai 2011
  33. « Aljazeera.net »
  34. a et b RFI, « Répression en Syrie : des bilans invérifiables », RFI, publié le 10 mai 2011
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