Phases (mouvement artistique)

Phases (mouvement artistique)
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Le mouvement Phases, ou Phases convertisseur d’énergie, est un mouvement de réflexion et d’expression artistique né dans les années 1950 en France et mené par un groupe élargi de peintres, poètes et écrivains européens.

Phases est aussi le nom de la revue éditée par le groupe entre 1954 et 1975.

Sommaire

Genèse

En 1951 les deux revues européennes Cobra (fondée en 1948) et Rixes (fondée en 1949), nées de la rencontre du surréalisme et de l’abstraction lyrique, revues consacrées à l’exaltation des nouvelles formes d’expression libre, éditent leurs derniers numéros. Leur disparition inspire un regroupement au dessinateur et poète Édouard Jaguer[1].

Dans le respect de la tradition du Surréalisme commune aux deux revues, Édouard Jaguer envisage, dès 1952, la mise en route d’un programme d’édition et d’expositions réunissant les différents groupes ou mouvements disséminés en Europe Occidentale, en Égypte, au Japon, en Amérique du Nord[2] et en Amérique du Sud. En Belgique où Phases s'implante très tôt sous l'impulsion du peintre et poète Jacques Lacomblez, sont organisées deux expositions au musée d'Ixelles (Bruxelles) en 1964 puis en 1974 et une autre au musée de Mons intitulée « Phases belgiques - courant continu » en 1990.

La revue Phases

Parallèlement à ces manifestations naît la revue Phases.

Son premier numéro paraît en janvier 1954 et son titre ne tarde pas à désigner l’ensemble des peintres et écrivains participant aux expositions ou à la rédaction de cette nouvelle revue et des revues amies. En 1953, des expositions sont organisées en France comme à l’étranger. Cette activité provoque dans certains pays la naissance de revues nouvelles étroitement liées à Phases : ainsi Salamander à Malmö, en 1955 ; Il Gesto à Milan, en 1956, sous la direction d’Enrico Baj ; Edda à Bruxelles, sous la direction de Jacques Lacomblez, en 1958 ; Boa à Buènos-Ayres, en 1958, sous la direction de Julio Llinas ; Documento-Sud à Naples, sous la direction de Guido Biasi.

Tant sur le plan poétique que sur le plan pictural, Phases et les publications qui s’en inspirent attirent l’attention de certaines œuvres oubliées ou méconnues des pionniers du dadaïsme, de l’abstraction, du futurisme... Certains peintres, collaborateurs de la première heure de Phases, tels qu’Alechinsky, Bryen, Corneille, Claude Georges, K. O. Götz, Asger Jorn, Arnal[Qui ?]... sont aujourd’hui reconnus comme des chefs de file. Il en est de même en Italie avec Enrico Baj, Giuseppe Capogrossi, Lucio Fontana, Gianni Dova, Emilio Scanavino, Sergio Dangelo. Chaque numéro de ces revues se veut une preuve concrète de la continuité de l’avant-garde, selon des principes généraux qui demeurent à peu près constants depuis l’époque de La Révolution surréaliste.

Collaborations et divergences

À partir de 1959, la collaboration avec le mouvement surréaliste se fait de plus en plus fréquente et étroite[3], suite à la rencontre entre André Breton et Jacques Lacomblez en 1958 qui accélère le processus. De nombreux artistes de Phases participeront à l'exposition internationale de New-York, à la galerie D'Arcy, en 1960, intitulée « Le Domaine des Enchanteurs ». Cette importante exposition a été montée par Duchamp et Claude Tarnaud à New-York et par André Breton et Edouard Jaguer depuis Paris.

Le 30 mars 1960, Jean-Jacques Lebel publie dans la revue Arts un article sous-entendant que « la jeunesse des pères spirituels n’était pas éternelle[4]. » Il s’ensuit une mise au point des surréalistes et des phasistes, le 14 avril 1960, qui s’étonnent de cette déclaration de Lebel ainsi que de sa volonté d’associer le nom Phases « aux stupéfiantes élucubrations qui encadrent sa photographie. » Le différend s’amplifie entre Lebel et les surréalistes joints aux phasistes quand ce dernier organise les manifestations de l’Anti-procès, prenant position contre la guerre d'Algérie et contre la torture, manifestations co-produites par Lebel et Alain Jouffroy.

Les participants à ces manifestations affirment notamment que « tout créateur est, jusqu’à nouvel ordre un insoumis. » Les surréalistes et les membres de Phases ripostent par le tract Tir de barrage[5] le 28 mai 1960, tract où ils affirment que leur éthique n’est en rien « policière » contrairement à ce qu’avancent Jouffroy et Lebel. Dans ce tract, signé de nombreux peintres, notamment par Paul Revel[6], les Phasistes définissent leur mouvement :

« le rôle d’un mouvement comme « Phases » demeure plus que jamais celui d’un convertisseur d’énergie, dont la tâche essentielle consiste à capter les échos de forces éparses et à les diffuser de telle façon que leur nécessaire anarchie native se fonde dans un courant d’idées. »

Le 1er septembre 1960, les membres du Mouvement surréaliste et ceux du Mouvement Phases, entre autres, signent la Déclaration sur le droit à l’Insoumission dans la guerre d’Algérie, plus connu sous l’appellation Manifeste des 121. Ce texte a été rédigé au début du mois de juillet 1960. Après le 1er septembre la liste des signatures reste ouverte. La deuxième publication du 27 octobre 1960 est cosignée par 246 personnes.

En 1963, des divergences apparaissent entre les membres de Phases et certains surréalistes à propos du Pop art. Du 30 janvier au 15 mars, dans le cadre des manifestations de Phases, la galerie du Ranelagh (Paris) organise l’exposition Vues imprenables. Cette exposition réunit divers artistes dont James Rosenquist, un des promoteurs du Pop art, ou Hervé Télémaque. Elle entraîne un débat théorique sur l’attitude à adopter face à l’offensive que représente le Pop Art. Rapidement, les membres de Phases déclarent y déceler une « composante d’acceptation de la société telle qu’elle est, incompatible avec [leurs] propres aspirations.[7] » Des divergences importantes apparaîtront dès lors entre le mouvement Phases et certains éléments du groupe surréaliste à Paris quant à leur attitude vis-à-vis du Pop Art. Ces divergences persistant et des problèmes d'ordre personnel de Simone et Edouard Jaguer envers certains membres du Mouvement surréaliste étant apparus, l’alliance organique entre les deux mouvements se voit rompue « de facto »[8].

Le dernier numéro de la deuxième série de la revue Phases paraît en 1975. Le mouvement Phases se prolongera néanmoins, l’exposition du centre culturel Noroit à Arras en 2000 portait le titre « Le Mouvement Phases de 1952 à l'horizon 2001 ».

Une certaine activité se poursuit, notamment au Québec à travers l'activité du poète Gilles Petitclerc et de Pierre Boulay et la publication de leur revue La Tortue-Lièvre, ou, à Paris, de celle de Richard Walter qui a fondé la revue Infosurr, organe d'informations sur le Surréalisme et ses alentours.

Le peintre Jean-Claude Charbonel a organisé deux expositions à Saint-Brieuc (Bretagne) : « 26 images du mouvement Phases » (galerie Frédéric Thibault), en septembre 2002, et « Phases à l'ouest », en hommage à Edouard Jaguer, en mars et avril 2008.

Articles connexes

Notes et références

  1. (fr) Biographie d’Edouard Jaguer. Site Editions Syllepse. Consulté le 11 mars 2010.
  2. Des expositions du mouvement Phases sont organisées à Mexico :
    * Phases, 23 juin - 16 juillet 1955, galerie Protéo, organisée par Goeritz et Édouard Jaguer.
    * Grupo Phases, nov. 1964, Sala del Arte de l'O.P.I.C., Deuxième confrontation internationale d'art expérimental, organisée par Miguel Alvarez Acosta et Jaguer.
    * Phases – dessins, Sala del Arte de l'O.P.I.C., organisée par Alberto Gironella.
    * Presencia viva de Paalen, 1979, musée Carrillo Gil, organisée par Saül Kaminer, exposition avec Giovanna, Onslow-Ford.
  3. In Catalogue : Gruppo Phases, galleria Schwarz, 2-14 maggio 1961 : mostra collettiva.
  4. Fabien Danesi in « Au sein de la nébuleuse surréalisante : Enrico Baj et le mouvement d’art nucléaire », Mélusine n° XXVIII, 2008.
  5. Tracts surréalistes et déclarations collectives, tome 2 1940-1969, dirigé par José Pierre, E. Losfeld 1982.
  6. (fr) « Tracts surréalistes et déclarations collectives, 1922-1939 et 1940-1969 », Ouvrage de José Pierre. Éditeur Terrain vague, 1980. Référence à la signature de Paul Revel page 410. Site Google Book. Consulté le 11 mars 2010.
  7. Le mouvement Phases, revue, affiches, documents depuis 1952 peintures, dessin, objets, assemblages. Ville de Nice Galerie des Ponchettes, 8 septembre au 11 novembre 1972.
  8. Le mouvement Phases, revue, affiches, documents depuis 1952 peintures, dessin, objets, assemblages. Ville de Nice Galerie des Ponchettes, 8 septembre au 11 novembre 1972.

Wikimedia Foundation. 2010.

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