Repas gastronomique des Français

Repas gastronomique des Français
Le repas gastronomique des Français *
UNESCO logo.svg Patrimoine culturel immatériel
de l’humanité
Le repas des canotiers, Auguste Renoir, 1881
Le repas des canotiers, Auguste Renoir, 1881
Pays * Drapeau de France France
Région * Europe et Amérique du Nord
Liste Liste représentative
Fiche 00437
Année d’inscription 2010
* Descriptif officiel UNESCO

Le Repas gastronomique des Français est l'intitulé sous lequel l'histoire, l'originalité et l'identité des repas gastronomiques français ont été inscrits sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité le 16 novembre 2010 par l'UNESCO. Avec l’art du pain d'épices en Croatie du Nord, la cuisine mexicaine (« La cuisine traditionnelle mexicaine - culture communautaire, vivante et ancestrale, le paradigme de Michoacán ») et la diète méditerranéenne, inscrites le même jour, c'est la première fois que des traditions culinaires sont enregistrées dans cette liste.

Sommaire

Identité du repas gastronomique des Français

Le repas gastronomique des français que l'UNESCO a inscrit sur sa liste représentative comporte au moins quatre services pour célébrer l’art du « bien manger » et du « bien boire ». Un apéritif, une entrée, un mets de poisson et/ou de viande accompagné de légumes, fromage, dessert, digestif. Les produits doivent être de qualité, les recettes choisies avec soin en accord avec les vins et les mets dégustés avec une gestuelle spécifique au niveau de l’odorat et du gout doivent être présentés sur une table décorée.

Le repas : héritage et moment de convivialité

Comme héritage immatériel, le repas gastronomique ne concerne pas des productions concrètes, produits agricoles et/ou alimentaires ou réalisations culinaires, blanquettes, cassoulet et autres pot-au-feu qui seraient les plats préférés des Français. Comme héritage commun à tous les Français — qui le reconnaissent, à 95,2% d’entre eux comme élément de leur patrimoine culturel et de leur identité (enquête CREDOC, 2009) —, il ne concerne pas les savoir-faire des professionnels des métiers de bouche ou des cuisiniers, qui appelleraient pour leur part des candidatures spécifiques. Comme héritage vivant, il n’est ni figeable, ni muséïfiable, mais demeure une pratique en évolution et en constante recréation. Une pratique sociale, vivante et partagée, qui fait même sens pour tous et qui renforce le lien social.

En France, il est d’usage, quand on souhaite célébrer et témoigner ensemble d’un événement important et heureux de la vie (naissances, anniversaires, mariages, succès, retrouvailles) d’organiser un repas gastronomique – ou, dans le langage populaire, « festin », « bon gueuleton », « bonne bouffe ». Ce repas festif réunit un groupe de convives – famille, amis, membres d’associations, relations professionnelles, parfois villages entiers – qui partagent, ensemble et pour l’occasion, le plaisir de bien manger et de bien boire. Une culture immatérielle, c’est-à-dire des usages, des savoir-faire, des représentations, des attentions, des rituels, hérités de l’histoire et recréés de génération en génération… Le repas gastronomique s’inscrit dans un système d’usages, de savoirs, de savoir-faire, de rituels et de représentations, qui se sont, au cours de l’histoire, enracinés dans toute la société pour former des éléments de culture commune. Il s’agit ici de la culture gastronomique, une culture fondée sur l’attachement, populaire et familier, au bien manger, à la convivialité, au bien être ensemble par le partage du plaisir du goût. Le repas gastronomique ne comporte pas de plats particuliers. Son contenu s’adapte aux circonstances, aux cultures régionales et familiales, aux pluralités sociales et aux moyens dont chacun dispose, aux convictions religieuses et philosophiques, aux influences étrangères et aux apports migratoires. Mais, dans tous les cas et pour tous, il se différencie du repas quotidien: toutes ses étapes demandent une mobilisation de savoirs et de savoir-faire particuliers, l’association d’un ordre réfléchi de préparation et de présentation des mets, un rituel de consommation, une disponibilité de temps. Ces attentions, destinées à honorer l’Autre du mieux possible, s’inscrivent dans le système du don et du contre don, et constituent les composantes immatérielles et symboliques de ce repas :

  • Anticiper un menu et s’approvisionner en bons produits, parfois longtemps à l’avance, en prévision des occasions à venir. Imaginer et inventer, pour faire plaisir à l’autre, une harmonie des saveurs ;
  • Respecter, en l’adaptant aux modes de vie contemporains, une structure du repas, en réference à une tradition évolutive dont les racines remontent au XVIIème siècle, avec la naissance d’une cuisine française et la mise en place de nouvelles règles de gouvernance du service du repas. C’est l’origine des fameux trois services – entrée, plat, dessert. Selon les circonstances, plus ou moins formelles, les générations, les milieux sociaux, le nombre de services varie – il peut aller

jusqu’à cinq ou six services, chacun s’accompagnant d’un vin différent ;

  • Préparer une « belle » table, en référence aux cultures familiales mais aussi à une esthétique commune souvent diffusée par les médias ;
  • Accompagner la consommation d’une gestuelle et d’expressions ritualisées: aérer et décanter les vins, humer et goûter les vins et les mets, découper à table les grosses pièces de viande – rôtis, volailles, gigots – les fromages, les gâteaux pour symboliser le partage.
  • Parler à table de ce que l’on mange et de ce que l’on boit – avec les mots du goût, des produits, des recettes, de la cuisson, de l’assaisonnement – pour signifier qu’on apprécie le repas.

Le repas gastronomique est ainsi construit historiquement, sur des apports qui se sont déployés, ont circulé dans tout le corps social, et ont été sans cesse recréés. Certains remontent autant aux usages de la société de Cour, qu’à ceux des célébrations festives des familles paysannes traditionnelles ou des familles bourgeoises du XIXe siècle, enrichis constamment des apports des découvertes et des migrations. Il se déroule selon un ensemble de rites d’attention, d’accueil, de partage et de générosité qui caractérise les repas festifs donnés dans toutes les cultures et qui renvoie à autant d’expressions du bien manger.

La gastronomie française

Article détaillé : Gastronomie.
Article détaillé : Cuisine française.

Histoire du classement au patrimoine de l'UNESCO

Dès 2006, l'Institut européen d'histoire et des cultures de l'alimentation (IEHCA) de Tours est à l'initiative du projet d'inscription, par l'UNESCO, du Repas gastronomique des Français sur la liste du patrimoine culturel immatériel.

Lors de sa première inauguration du Salon international de l'agriculture en 2008, le président de la République française, Nicolas Sarkozy, exprime le souhait que la France dépose une demande de classement de sa gastronomie au patrimoine culturel immatériel de l'humanité.

En février 2008 est créée la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires (MFPCA) elle est présidée par Jean-Robert Pitte. Cette mission est chargée de préparer le dossier de candidature pour l'inscription du patrimoine culinaire français sur la liste représentative du patrimoine immatériel de l'UNESCO (suivant ainsi l'idée de l'IEHCA).

Le repas gastronomique des Français intègre, le 16 novembre 2010, grâce à un comité intergouvernemental de l'UNESCO réuni à Nairobi au Kenya, le patrimoine culturel immatériel de l'humanité. Le 19 novembre 2010, une conférence de presse, à Tours, annonça officiellement cette inscription.

Cadre, objectifs et mesures de cette inscription

Les textes de la convention pour la sauvegarde du PCI sont sans équivoque ; pour rester vivant, le patrimoine culturel immatériel doit être pertinent pour sa communauté, recréé en permanence et transmis d’une génération à l’autre. Il est donc permis de rassurer ceux qui ont craint la muséification de la gastronomie française. Sauvegarder ne signifie pas fixer ou figer le patrimoine culturel immatériel sous quelque forme « pure » ou « originelle » mais au contraire créer, inventer, favoriser les conditions du transfert des connaissances, des savoir-faire et des significations. La candidature française a donc préparé au cours des dernières années en concertation avec les acteurs engagés des mesures susceptibles de répondre aux exigences de l’UNESCO et d’assurer au « repas gastronomique des Français » les conditions de sa mise en valeur et de sa transmission aux générations futures.

Le plan de gestion qui a été retenu et qui devra être mis en œuvre afin d’honorer les engagements de la candidature[1] s’oriente autour de quatre axes principaux :

  • Renforcer la transmission par l'éducation ;
  • Développer la documentation et la recherche ;
  • Créer des outils et des équipements de sensibilisation et d'information au plus grand nombre à l’instar de la Cité de la gastronomie ;
  • Contribuer au renforcement du dialogue interculturel par la coopération internationale.

Mesures relatives à la transmission par l'éducation en milieu scolaire et extra scolaire

Pour transmettre la pratique du repas gastronomique qui contribue au renforcement des liens sociaux et familiaux, au plaisir du goût partagé, l'État instituera des « ateliers de découverte » dans le cadre des mesures d'accompagnement éducatif mises en place dans les écoles. Des repas pourront être régulièrement préparés et consommés dans les écoles primaires, associant élèves, enseignants, personnels d'encadrement et parents. Ces repas auront pour objet, d'une part, la mise en valeur du sens donné au repas (bien être ensemble et partage du plaisir du goût) et, d'autre part, l'apprentissage des rites du repas gastronomique (choix des bons produits, recours au vaste corpus des recettes, esthétisation de la table). Ces repas participeront à la découverte de l'Autre et permettront de valoriser l'estime de soi. Ces mesures, élargies aux centres de loisirs, favoriseront la transmission intergénérationnelle en invitant les personnes âgées, authentiques passeurs de connaissances, à expliquer les rites du repas et leur évolution.

Développer la documentation

L'État français engagera une action de recensement et de collecte à l'égard de ce patrimoine culturel immatériel qu'est le « repas gastronomique des Français » et des rites qui le composent : gestes et savoir-faire, célébrations festives, expressions orales (proverbes, chansons), représentations (littérature, images), objets et artéfacts. Cette documentation issue des archives familiales, des entreprises et des médias sera réunie dans un Centre de ressources. Il favorisera par la mise à disposition des informations collectées (base de données en ligne) la visibilité et la transmission des pratiques et des rites qui composent le repas gastronomique. Le Centre pourra constituer le pôle « archives et documentation » de la Cité de la gastronomie.

Encourager la recherche sur le repas gastronomique et son contexte socio-culturel

L'État encouragera la création, en accord avec le Centre National de la Recherche Scientifique, d'une Unité Mixte de Recherche « Patrimoines et cultures alimentaires et gastronomiques » dont l'objectif sera notamment l'étude du repas gastronomique et de son contexte. Cette Unité aurait pour siège l'Université de Tours qui a développé depuis plusieurs années de nombreux travaux dans ce domaine. Afin de constituer un réseau national, cette Unité serait dotée d'«antennes » dans les universités Lyon II, Paris I et Paris IV, Dijon, ou Toulouse, par exemple.

L'équipe d'enseignants chercheurs de Tours sera renforcée en faisant appel à des spécialistes de différentes disciplines des sciences humaines et sociales.

Plus largement, une Chaire et un réseau UNESCO associant des universités du Monde seront proposés sur les patrimoines et pratiques alimentaires pour favoriser la coopération internationale.

Sensibilisation et information

La Cité de la gastronomie est un établissement culturel pluridisciplinaire entièrement dédié aux cultures culinaires de France et du Monde. Il s’agit de prolonger les réflexions entamées avec l’ensemble des acteurs concernés, privés comme publics (notamment les collectivités territoriales), afin de réunir les conditions favorables à la création d'un équipement culturel à dimension nationale et internationale. Il contribuera à sensibiliser le public à l'histoire, aux fonctions et valeurs du repas et de la gastronomie dans son ensemble, ainsi qu'à la vitalité de ses expérimentations en France et dans le monde. La Cité de la gastronomie est un espace vivant favorisant par des activités pédagogiques (ateliers, production éditoriale), artistiques et documentaires (expositions, rencontres et discussions), une meilleure connaissance de la pratique culturelle et sociale du « repas gastronomique des Français », de ses rites, et plus largement des traditions des repas des communautés partout dans le monde.

Afin de renforcer l'intégration de l'élément dans le champ culturel, l'État encouragera les grandes manifestations culturelles nationales à intégrer un volet dédié au repas gastronomique. L'État aura soin d'étendre les « Journées Européennes du Patrimoine », événement populaire annuel de mise en valeur du patrimoine bâti, au repas gastronomique et plus largement aux éléments du patrimoine culturel immatériel.

La conception et la diffusion d'une émission télévisée de sensibilisation du grand public sont envisagées. Elle portera sur la pratique sociale du repas gastronomique en France et plus largement sur la richesse des cultures alimentaires du monde.

Favoriser la coopération internationale

La France entend faire partager son expertise en matière d'identification, de documentation, de transmission des savoirs, des savoir-faire et participer activement à la valorisation des pratiques sociales et rites du repas comme témoignages importants de la diversité culturelle.

Organismes spécifiques de veille et de suivi des mesures de sauvegarde

L'IEHCA et la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires (MFPCA) assurent en lien avec l'État la veille et le suivi des mesures de sauvegarde. Sera ainsi garantie la mise en œuvre des mesures appropriées aux termes et à l'esprit de la Convention de 2003. L'organisme alertera l'État sur les risques éventuels d'utilisation dévoyée de l'inscription sur la liste de l'UNESCO, tels que l'instrumentalisation ou la labellisation mercantiles.

Fête et Cité de la gastronomie

Suite à cette reconnaissance mondiale, le Secrétariat d'État au Commerce, à l'Artisanat, aux PME, au Tourisme, aux Services, aux Professions libérales et à la Consommation lance à partir de 2011 la « Fête de la gastronomie » fixée chaque année le 23 septembre[2] et prévoit la création d'une « Cité de la gastronomie », établissement culturel devant exposer la variété des pratiques et des cultures culinaires[3].

Références

Voir aussi

Liens internes

Liens externes


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