- Énergie sombre
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En cosmologie, l'énergie sombre, ou énergie noire (dark energy en anglais) est une forme d'énergie inconnue en laboratoire emplissant tout l'Univers et dotée d'une pression négative, qui la fait se comporter comme une force gravitationnelle répulsive. L'énergie sombre est indirectement mise en évidence par diverses observations astrophysiques, notamment l'accélération de l'expansion de l'univers.
L'énergie sombre est, en termes de densité d'énergie, la composante majeure de l'univers. Elle représente 65% à 80% de la densité d'énergie totale de l'univers (72 % d'après le site de la NASA[1]). En 2011, sa nature reste un mystère. Le terme d'énergie sombre est un terme générique qui englobe tout phénomène physique imitant une forme d'énergie à pression suffisamment négative.
Sommaire
Bref historique
Historiquement, la seule forme d'énergie (hypothétique) se comportant comme de l'énergie sombre était la constante cosmologique, proposée dans un autre contexte par Albert Einstein en 1916, et les seuls modèles faisant appel à de l'énergie sombre utilisaient en réalité une constante cosmologique. La motivation initiale d'Einstein restait cependant fort éloignée de celles qui motivent l'intérêt actuel pour l'énergie sombre. En effet, en 1916, date à laquelle l'expansion de l'univers n'était pas connue, Albert Einstein considérait que l'univers devait être statique, aussi lui fallait-il introduire une nouvelle force s'opposant à l'attraction gravitationnelle. Le candidat idéal fut trouvé avec la constante cosmologique, qui permettait, dans certaines conditions très particulières de contrebalancer exactement l'effet attractif de la force gravitationnelle.
Ce n'est que bien plus tard, en 1988, que fut proposé par les astrophysiciens Jim Peebles et Bharat Ratra un autre modèle d'énergie sombre, qui fut plus tard appelé quintessence. L'intérêt pour l'énergie sombre ne prit son essor qu'à partir de la fin des années 1990, époque où fut mise en évidence la réalité de l'énergie sombre par le phénomène d'accélération de l'expansion de l'univers. Par la suite, d'autres modèles furent proposés, parmi lesquels l'énergie fantôme, la k-essence, et le gaz de Chaplygin. Tous possèdent la même caractéristique essentielle, celle de posséder une pression suffisamment négative pour permettre d'expliquer, au moins qualitativement, l'accélération de l'expansion de l'univers.
Les recherches astrophysiques actuelles sur le sujet ont pour but principal de mesurer avec précision l'histoire de l'expansion de l'univers afin de déterminer la manière dont l'expansion varie avec le temps et en déduire les propriétés de l'énergie sombre, en particulier son équation d'état.
Origine
L'énergie sombre (à ne pas confondre, comme c'est souvent le cas, avec la matière sombre) est une notion directement reliée à la constante cosmologique Λ. Cette dernière apparaît dans le second membre de l'équation d'Einstein « modifiée » : Gαβ = 8πTαβ + Λgαβ
Cette constante fut ajoutée par Albert Einstein à son équation primitive pour permettre à un univers statique de la satisfaire (il sera prouvé par la suite que l'univers statique d'Einstein est instable). Elle introduit une sorte d'énergie (un champ scalaire constant) présente en tout point du continuum spatio-temporel, qui, avec un choix convenable de signe et de valeur, peut s'opposer à la gravité et modifier le profil d'évolution de la « taille de l'univers » (facteur d'échelle dans la métrique FLRW).
Lors de la découverte de l'expansion de l'univers (cf. Edwin Hubble), Einstein renia cette verrue (« l'erreur la plus patente de ma vie ») au profit de l'équation originelle (où Λ ne figure pas), jugée plus « esthétique » et conforme avec les observations de l'époque. Jusque dans les années 1980, la constante cosmologique a été plus ou moins ignorée en cosmologie « conventionnelle ».
Dans les années 1970, Alan Guth a avancé que la constante cosmologique provoquerait l'inflation cosmique dans l'univers primordial (via un modèle de Lemaître d'univers « hésitant »). Cette théorie fut abandonnée au profit des modèles inflationnaires.
Naissance de la notion d'énergie sombre
À la fin des années 1990, les satellites et les télescopes ont permis des mesures très précises des supernovas distantes et du rayonnement fossile micro-onde. Plusieurs caractéristiques observées, notamment l'accélération de l'expansion de l'univers, conduisent à supposer qu'il existe effectivement une sorte d'énergie (baptisée sombre) dont l'équation d'état violerait la version forte du principe d'énergie, c'est-à-dire : 3P + ρ > 0, mais non sa version relaxée P + ρ > 0. Une énergie qui violerait les deux principes est appelée énergie fantôme.
Du fait de sa nature répulsive, l'énergie sombre a tendance à accélérer l'expansion de l'univers, plutôt que la ralentir, comme le fait la matière « normale ». Un univers accélérant est exactement ce que l'on constate en observant les supernovas les plus lointaines. D'une manière remarquable, ces observations semblent indiquer que l'énergie sombre doit représenter environ 70% de la densité d'énergie. Ainsi, en additionnant les différentes énergies, on arrive exactement à ce qu'il faut pour avoir un univers de courbure quasi-nulle, ce qui correspond aux observations actuelles (2007).
Nature de l'énergie sombre
La nature exacte de l'énergie sombre fait largement partie du domaine de la spéculation. Certains estiment que l'énergie sombre serait l'énergie du vide quantique, modélisée par la constante cosmologique de la relativité générale. C'est l'explication la plus simple et poser une constante cosmologique signifie que la densité de l'énergie sombre est uniforme, et constante dans tout l'univers, invariable en fonction du temps. C'est la forme introduite par Einstein, et cette forme est cohérente avec nos observations actuelles de l'univers. Si l'énergie sombre prend effectivement cette forme, cela signifie qu'il s'agit d'une propriété fondamentale de l'univers.
D'autres hypothèses ont été avancées. Ainsi, l'énergie sombre pourrait elle être induite par l'existence de particules inconnues. Ces modèles sont appelées quintessence. Certaines théories affirment que ces particules ont été créées en quantité suffisante lors du big bang pour remplir tout l'espace. Néanmoins, si cela était le cas, on s'attendrait à ce qu'elles se regroupent, de la même manière que la matière ordinaire, et on observerait des variations de densité en fonction du temps. Aucune preuve n'en a été observée, mais la précision des observations ne permet pas d'exclure cette hypothèse. Toutefois, ce genre d'hypothèse se rapproche fortement des théories obsolètes de l'éther, précisément abandonnées car elles présupposaient l'existence d'une substance masquée emplissant tout l'univers.
L'inflation
Article détaillé : Inflation cosmique.On peut remarquer qu'une forme ou l'autre de l'énergie sombre est l'explication la plus plausible de l'inflation cosmique qui eut lieu peu après le big bang. Cette inflation est un mécanisme essentiel des théories cosmologiques actuelles expliquant tout à la fois la formation des structures et l'isotropie de l'univers à grande échelle. Il n'est pas établi si l'énergie sombre actuelle est reliée à l'énergie sombre qui aurait provoqué l'inflation.
Implications sur le destin de l'Univers
Si l'énergie sombre continue de dominer la balance énergétique de l'univers, l'expansion observée de l'espace va continuer à accélérer. Les structures qui ne sont pas liées gravitationnellement finiront par s'éloigner les unes des autres à des vitesses apparentes supérieures à celle de la lumière. Ainsi, cette accélération nous empêchera finalement d'observer des portions importantes de l'univers qui sont aujourd'hui visibles ; notre horizon cosmologique, plutôt que de reculer, finira par se rapprocher de nous.
Si la densité de l'énergie sombre n'augmente pas, l'existence des systèmes liés par la gravitation, tels les galaxies ou les systèmes planétaires, n'est pas menacée. Ainsi le système solaire ou la Voie lactée demeureront essentiellement identiques à ce qu'ils sont aujourd'hui, alors que le reste de l'univers, au-delà de notre super-amas local, semblera s'éloigner constamment.
En revanche, si l'énergie sombre augmente avec le temps, on se retrouve dans un scénario de type Big Rip, où toute la matière de l'univers, jusque dans ses atomes mêmes, se désintégrerait, laissant un univers infini et totalement vide.
Finalement, l'énergie sombre pourrait se diluer avec le temps, voire s'inverser. Les incertitudes sur les observations laissent la porte ouverte sur le fait que la gravité puisse un jour dominer un univers, qui se contracterait alors sur lui-même et disparaîtrait dans un Big Crunch. Ce scénario est néanmoins considéré comme le moins probable.
En mai 2004, la publication de travaux réalisés avec le satellite Chandra et consistant à mesurer les distances de 26 amas de galaxies lointains semblent confirmer que l'expansion a commencé à accélérer il y a 6 milliards d'années, et que l'énergie sombre semble rester constante, ou alors varie très lentement. Ces résultats sont toutefois en désaccord avec ceux obtenus par le satellite européen XMM.
Cela est compatible avec l'existence d'une constante cosmologique et rend le scénario du Big Crunch très improbable.
Notes et références
- 1 site de la NASA
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