Église du purgatoire

Église du purgatoire

Purgatoire

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Le purgatoire, folio 113v des Très Riches Heures du duc de Berry

Suivant la théologie catholique, le purgatoire est un processus de purification de l'âme après la mort et qui suit le jugement particulier, et presque tout le monde y passe avant d’entrer au Ciel faute de s'être préoccupé de réparer les dommages causés de son vivant.

Sommaire

Théologie catholique

Depuis la naissance de l'Église catholique, les chrétiens présentent à Dieu des prières en faveur de leurs morts ; on trouve trace de sacrifices offerts en faveur des morts dans la Bible juive mais le sort des personnes décédées n'était pas clairement établi.

Une confusion est souvent faite entre la perfection d'une âme et le fait que toutes ses cicatrices soient effacées. Chaque péché engendre une plaie à l'âme alors que chaque acte d'amour accroît sa perfection.

La perfection ne peut s'accroître que parce que les personnes disposent de leur libre arbitre pour poser des actes d'amour ou des actes de haine (les péchés), après la mort, l'âme perd l'usage de son libre arbitre, il n'est donc plus question pour elle de progresser en perfection, elle est comme statufiée au degrés d'amour ou de haine qu'elle a atteint durant son existence.

Les plaies causées par les péchés sont effaçables pendant la vie par : la prière, l'aumône, le jeûne, les actes de pénitence corporelle, le désir d'aller au ciel, un grand dévouement pour ses frères, un grand amour pour les autres, et enfin par la tristesse et le regret intérieur d'avoir commis ces péchés "si je pouvais je reviendrais en arrière et ne ferais pas ces actes", le plus important étant de regretter non par apitoiement sur soi mais par amour de Jésus. Tous ces actes effacent les conséquences nuisibles du péché, ce que la théologie nomme "la peine due pour le péché." Si les personnes n'ont pas travaillé à réparer de leur vivant le tort qu'elles se sont causé par leurs péchés, le purgatoire exerce une action purificatrice par le feu et par l'état de non vision de Dieu, qui est une souffrance incomparablement plus aigue que l'action du feu.

Pour les chrétiens catholiques, le Purgatoire (du latin purgare, « purifier, nettoyer ») désigne l'ensemble des moyens par lesquels les âmes mortes en état de grâce mais non encore entièrement purifiées des conséquences de leurs péchés, accède à la vision directe de Dieu, vision qui cause une jouissance infinie et éternelle, "le paradis", ou "le ciel".

Le mot désignant le lieu purgatoire était inconnu avant le XIe siècle mais pas ce qu'il désigne : un des premiers documents à mentionner ce nom est une lettre du bénédictin Nicolas de Saint-Alban au cistercien Pierre de Celle en 1176 (Haggh, 1997).

Un des témoignages les plus anciens est le récit de la passion de Perpétue et Félicité: en prison Perpétue voit en songe son jeune frère mort avant elle, sortir d'un puits sombre, à la suite de ce songe, elle va offrir des prières pour lui et ensuite une autre songe le montrera heureux "je vis qu'il avait été soustrait à sa peine" (cf. Jacques Le Goff, La Naissance du Purgatoire, Gallimard, coll. « Folio », Paris, 1991 (1re édition 1981) ISBN 2-07-032644-6, p. 74-75 Si la localisation du purgatoire ne gênait pas les premiers chrétiens, ni le fait d'avoir un nom pour désigner ce lieu, la réalité de secourir par la prières et l'ascèse les défunts est clairement établi dès l'antiquité chrétienne.

Grégoire de Nysse (IVe siècle):

« Quand il a quitté son corps et que la différence entre la vertu et le vice est connue il ne peut pas s'approcher de Dieu avant que le feu de purification ait ôté les taches dont son âme était infestée. Ce même feu chez d'autres effacera la corruption de la matière et l’inclination au mal.»

Ou encore Augustin d'Hippone:

« Certains subissent des punitions temporelles dans cette vie seulement, certains après la mort, pour certains avant et après, mais tous avant le jugement dernier, le plus rigoureusement mené. Mais ceux qui subissent des punitions temporelles après la mort n’encourront pas tous les punitions éternelles, qui doivent suivre ce jugement. »

Une explication concise de la doctrine catholique sur le Purgatoire a été présentée par le cardinal Julien Cesarini aux pères Orientaux Orthodoxes assemblés au Conseil de Ferrara-Florence, lors de la Session VI, en juin (1438 ?) :

«Dès le temps des Apôtres» a-t-il dit, «l'Église catholique enseignait que les âmes parties de ce monde, pures et franches de tout péché - c’est-à-dire les âmes des saints - entrent immédiatement dans la félicité. Les âmes de ceux qui après leur baptême ont péché, mais qui se sont ensuite sincèrement repentis et ont avoué leurs péchés, quoiqu'incapables d’exécuter l'epitimia prescrite par le confesseur, ou d’apporter des fruits de repentir suffisants pour expier leurs péchés, ces âmes sont épurées par le feu du purgatoire, tantôt rapidement, tantôt plus lentement, selon leurs péchés; et ensuite, après leur purification, elles partent pour les lieux de bonheur éternel. Les prières du prêtre, les offices liturgiques et les actes de charité concourent dans une grande mesure à leur purification. Les âmes de ceux qui sont morts dans le péché mortel, ou dans le péché originel, vont directement à la damnation.» [1]

Un décret canonique contenant une doctrine semblable est incorporé au « Décret d'Union » rédigé avant la clôture du Concile de Florence, lequel avait donné un court instant l’espoir de mettre fin au Grand Schisme d'Orient.

Un développement de la doctrine sur le Purgatoire se retrouva par la suite dans les canons du Concile de Trente (Session XXV), qui tire l’idée de Purgatoire « des Écritures saintes [I Co 3, 12-17 et II Ma 12, 43-45] et de la tradition ancienne des Pères enseignée dans les Conciles. » Les Églises protestantes rejettent presque toutes cette conception. (voir ci-dessous).

Le catéchisme pour adultes, publié par la Conférence des évêques de France en 1991 avec l'accord de la Congrégation pour la doctrine de la foi qui a donné le 23 janvier 1991 l'approbation du Saint-Siège, indique simplement ce qui suit :

"...Pour parvenir à cette contemplation de Dieu, une "étape" de purification, appelée purgatoire, peut être nécessaire. Il ne s'agit ni d'un lieu, ni d'un temps ; on peut parler plutôt d'un état. En tout cas, le purgatoire, qui est bien une peine, n'est pas à concevoir comme une punition, par laquelle Dieu se vengerait en quelque sorte de nos infidélités. La communion avec Dieu, dans laquelle nous introduit la mort, nous fait prendre conscience douloureusement de nos imperfections et de nos refus d'aimer, et du besoin de nous laisser purifier par la puissance salvatrice du Christ.

C'est Dieu lui-même qui purifie et transforme. Mais la Tradition de l'Église catholique affirme que ceux qui sont au purgatoire bénéficient des prières et des supplications adressées en leur faveur à Dieu par leurs frères, et aussi de l'intercession des saints déjà introduits dans la béatitude de la vision de Dieu".

Théologie protestante/évangélique

Les églises chrétiennes issues de la Réforme (luthérienne, calviniste), ainsi que les évangéliques, rejettent l'existence du purgatoire étant donné qu'il n'est pas cité nommément dans la Bible. Le Canon protestant de l'Écriture considère les livres des Maccabées comme apocryphes. En fait l'Eglise catholique n'a reconnu officiellement les livres deutérocaniques qu'à partir du Concile de Trente au XVIe siècle. Si les Catholiques voient dans le texte de 2 Maccabées 12.39-45 une justification pour la prière au mort ainsi que les germes de la doctrine du purgatoire, le protestantisme, de son côté, ne voit dans ce texte qu'une déviation dans la pratique de la prière. En effet, le reste des écrits bibliques "inspirés" ne reprend jamais ce thème. (2 Maccabées 12, 39-45 Le jour suivant, on vint trouver Judas (au temps où la nécessité s'en imposait) pour relever les corps de ceux qui avaient succombé et les inhumer avec leurs proches dans le tombeau de leurs pères. Or ils trouvèrent sous la tunique de chacun des morts des objets consacrés aux idoles de Iamnia et que la Loi interdit aux Juifs. Il fut donc évident pour tous que cela avait été la cause de leur mort. Tous donc, ayant béni la conduite du Seigneur, juge équitable qui rend manifestes les choses cachées, se mirent en prière pour demander que le péché commis fût entièrement pardonné, puis le valeureux Judas exhorta la troupe à se garder pure de tout péché, ayant sous les yeux ce qui était arrivé à cause de la faute de ceux qui étaient tombés. Puis, ayant fait une collecte d'environ 2.000 drachmes, il l'envoya à Jérusalem afin qu'on offrît un sacrifice pour le péché, agissant fort bien et noblement d'après le concept de la résurrection. Car, s'il n'avait pas espéré que les soldats tombés dussent ressusciter, il était superflu et sot de prier pour les morts, et s'il envisageait qu'une très belle récompense est réservée à ceux qui s'endorment dans la piété, c'était là une pensée sainte et pieuse. Voilà pourquoi il fit faire ce sacrifice expiatoire pour les morts, afin qu'ils fussent délivrés de leur péché.).

Pour ce qui est du texte de saint Paul sur le salut "comme à travers un feu", le feu représente le jugement dans les Écritures, lequel est unique, c'est-à-dire réservé pour chaque homme une seule fois, et à l'issue duquel Dieu l'accepte ou non dans sa présence (Hébreux 9:27).

Mais la préparation pour ce jugement se fait uniquement pendant la vie sur terre, par la foi (sola fide). Après la mort, plus rien ne peut être changé. cf. 2 Pierre 3:7-14. Verset 9 "Le Seigneur (...) use de patience envers vous ne voulant pas qu'aucun périsse, mais voulant que tous arrivent à la repentance."

Le jour du jugement est aussi appelé le jour de la colère de Dieu, dont on ne peut être épargné que par la justice, qui s'obtient par la foi dans l'œuvre rédemptrice de Christ. cf. Proverbes 11:4 "Au jour de la colère, la richesse ne sert à rien. mais la justice délivre de la mort."

Voir aussi

Bien que le nom technique de "Purgatoire" soit absent de la Bible, au même titre que celui de "Trinité", de nombreux passages de l'Écriture Sainte évoquent l'existence d'un feu purificateur intervenant après la mort corporelle. Voir par exemple :

1 Corinthiens 3 : 12 Or, si quelqu'un bâtit sur ce fondement avec de l'or, de l'argent, des pierres précieuses, du bois, du foin, du chaume, 13 l'œuvre de chacun sera manifestée; car le jour la fera connaître, parce qu'elle se révèlera dans le feu, et le feu éprouvera ce qu'est l'œuvre de chacun. 14 Si l'œuvre bâtie par quelqu'un sur le fondement subsiste, il recevra une récompense. 15 Si l'œuvre de quelqu'un est consumée, il perdra sa récompense; pour lui, il sera sauvé, mais comme au travers du feu. 16 Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous ? 17 Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira; car le temple de Dieu est saint, et c'est ce que vous êtes.

Le livre des Maccabées (admis uniquement dans le canon catholique) parle aussi d'un sacrifice accompli en faveur de défunts, ce qui laisse entendre l'existence d'un lieu de purification distinct de l'Enfer et du Paradis.

2 Maccabées 12: 43 Puis, ayant fait une collecte d'environ 2.000 drachmes, il l'envoya à Jérusalem afin qu'on offrît un sacrifice pour le péché, agissant fort bien et noblement d'après le concept de la résurrection. 44 Car, s'il n'avait pas espéré que les soldats tombés dussent ressusciter, il était superflu et sot de prier pour les morts, 45 et s'il envisageait qu'une très belle récompense est réservée à ceux qui s'endorment dans la piété, c'était là une pensée sainte et pieuse. Voilà pourquoi il fit faire ce sacrifice expiatoire pour les morts, afin qu'ils fussent délivrés de leur péché.

Quant à l'évangile de Matthieu, il évoque la possibilité de « péchés remis » dans l'autre monde, c'est-à-dire après la mort:

Matthieu 12 : 32 Quiconque parlera contre le Fils de l'homme, il lui sera pardonné; mais quiconque parlera contre le Saint-Esprit, il ne lui sera pardonné ni dans ce siècle ni dans le siècle à venir.

On peut cependant ici douter que Matthieu fasse allusion directement au purgatoire, mais plutôt au fait que tout homme ne doit pas salir le Saint-Esprit quels que soient l'époque, les siècles. D'ailleurs en Hébreux 9:27 il est clairement énoncé qu'"il est réservé aux hommes de mourir une seule fois, après quoi vient le jugement".

Purgatoire et contexte économique du Moyen Âge

Le passage par le purgatoire à partir du XII siècle a permis le développement du commerce (grâce au prêt à intérêt) dans le monde chrétien, avant cela, l’usure était considérée comme un péché mortel. Les usuriers expiaient ainsi leurs fautes (l'usure) avant de pouvoir rejoindre le Paradis (ils n’étaient plus systématiquement condamnés à l’enfer), d’où l’apparition de la notion de péché véniel. Voir [1]

Bibliographie

  • Giordano Berti, "Purgatoire", dans "Les mondes de l'Au-Delà", Gründ, Paris 2000.
  • Guillaume Cuchet, Le crépuscule du purgatoire, Paris, Armand Colin, 2005.
  • Philippe Ariès, L'Homme devant la mort, 2 vol. « Le temps des gisants » et « La mort ensauvagée », Seuil, coll. « Points », 1985 (ISBN 2-02-008944-0 et ISBN 2-02-008945-9) ;
  • Adriaan H. Bredero, « Le Moyen Âge et le purgatoire », Revue d'histoire ecclésiastique, 78 (1983), p. 429–452 ;
  • Claude Carozzi, Le voyage de l'âme dans l'au-delà d'après la littérature latine (Ve-XIIIe siècle), Bibliothèque de l'École française de Rome, no 189, Rome, 1994 ;
  • Ste Catherine de Gênes, Traité du Purgatoire, 1571. Traduction française aux Éditions de l'Emmanuel, 1993. (ISBN 2-914083-59-9)
  • Henry Donneaud, Dictionnaire du Moyen Âge, s. dir. Michel Zink, Alain de Libera et Claude Gauvard, PUF, coll. « Quadrige », 2004 (ISBN 2-13-054339-1) ;
  • Aaron J. Gourevitch, « Au Moyen Âge : conscience individuelle et image de l'au-delà », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 37 (1982), p. 255–275 ;
  • Jacques Le Goff, La Naissance du Purgatoire, Gallimard, coll. « Folio », Paris, 1991 (1re édition 1981) (ISBN 2-07-032644-6).
  • Charles Journet, La doctrine catholique sur le purgatoire. Ouvrage en téléchargement gratuit sur le site [2]
  • Catéchisme pour Adultes de la Conférence des évêques de France aux éditions Centurion, Cerf, CERP, CRER, Decanord, Desclée, Droguet-Ardant, de Gigord, Mame, Ed. Ouvrières, Éditions Privat, Tardy, Zech éd.
  • Jean-Marc Bot, Le temps du Purgatoire, Emmanuel éditions, 2002
  • Jean Mathieu-Rosay, Dictionnaire du Christianisme, Marabout, 1995

Le purgatoire est un élément essentiel dans la disposition du monde en trois parties que l’on trouve dans dans La Divine Comédie de Dante, écrite au début du XIVe siècle.

Liens internes

  • Basilique Notre-Dame de Montligeon, immense basilique, avec les dimensions d'une cathédrale, qui s'élève à la Chapelle-Montligeon, petit village de moins de sept cents habitants. Elle est due à un certain abbé Buguet, fondateur de l'« Œuvre Expiatoire pour la délivrance des âmes délaissées du Purgatoire ».

Liens externes

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