- Théorème de Wantzel
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Le théorème de Wantzel, énoncé par Pierre-Laurent Wantzel en 1837[1], précise les conditions nécessaires et suffisantes pour qu'un nombre soit constructible. Il peut s'énoncer de la manière suivante
Le réel a est constructible si et seulement s'il existe une suite finie de corps Li tels que
- L0 =
- Li+1 est une extension quadratique de Li
- le réel a appartient à Ln .
Wantzel donne alors une condition nécessaire pour qu'un nombre a soit constructible :
- Si le réel a est constructible alors son polynôme minimal est de degré 2n
Cette condition nécessaire permet (par sa contraposée) de démontrer que la duplication du cube et la trisection de l'angle ne sont pas réalisables à la règle et au compas.
Toutefois, cette condition nécessaire n'est pas suffisante. Par exemple, le polynôme x4 + 2x - 2 est bien irréductible de degré 4 mais ses racines ne sont pas constructibles.
Sommaire
Quelques pistes pour comprendre
Article détaillé : nombre constructible.Les Grecs ne pouvaient imaginer que des nombres positifs constructibles. Il faut pour suivre la démonstration élargir le champ des nombres constructibles en ajoutant la condition : si a est constructible alors - a est constructible.
D'où une nouvelle définition des nombres constructibles : est constructible toute coordonnée d'un point constructible.
La démarche est alors la suivante : si K est un corps de nombres constructibles, on considère, dans le plan, tous les points dont les coordonnées appartiennent à K, l'ensemble EK. Quels sont les points que l'on peut construire à la règle et au compas à partir des points de EK ?
- Le point d'intersection de deux droites
- Le point d'intersection d'un cercle et d'une droite
- Le point d'intersection de deux cercles
Intersection de deux droites
Deux droites (AB) et (CD) dont les points A, B, C, D sont dans EK ont pour équation
- ax + by + c = 0 et ux + vy + t = 0 où a, b, c, u, v, t sont des éléments de K
Trouver les coordonnées (x, y) du point d'intersection I de ces deux droites revient à résoudre un système d'équations linéaires dans K. Les réels x et y sont éléments de K. Le point I appartient à EK.
Intersection d'une droite et d'un cercle
La droite (AB) a pour équation ax + by + c = 0 et le cercle de centre C passant par D a pour équation x² + ux + y² + vy + t = 0.
Trouver les coordonnées des points d'intersection du cercle et de la droite revient, par substitution, à résoudre une équation du second degré sur K : P2(x) = 0 ou P2(y) = 0. Si le point d'intersection existe, ou bien cette équation possède des solutions dans K, ou bien cette équation est irréductible sur K mais possède des solutions dans l'extension quadratique L = K(X)/P2. Alors tous les réels de L sont aussi constructibles car ils s'écrivent a + bx où a et b sont dans K et x est solution de P2(x) = 0
Intersection de deux cercles
Trouver l'intersection de deux cercles revient à trouver l'intersection d'un cercle avec une droite car le système
- x² + ax + y² + by + c = 0 et x² + ux + y² + vy + t = 0
équivaut au système
- x² + ax + y² + by + c = 0 et (a - u)x + (b - v) y + c - t = 0.
Les coordonnées des points d'intersections appartiennent alors soit à K, soit à une extension quadratique de K constituée de nombres constructibles.
Conclusion
Un nombre est constructible si et seulement si on peut le construire en n étapes comme intersection de deux cercles, de deux droites ou d'un cercle et d'une droite, en partant de points dont les coordonnées sont rationnelles.
À chaque étape, ou bien les coordonnées restent dans le corps K de nombres constructibles d'origine, ou bien elles « sautent » dans une extension quadratique de celui-ci. Il existe bien une suite d'extensions quadratiques vérifiant les conditions requises.
Conséquences
Article détaillé : tour d'extensions quadratiques.La force du théorème de Wantzel est de dire que, puisque a appartient au dernier maillon d'une chaîne d'extensions quadratiques, il est solution d'une équation de degré 2n sur . Mais il démontre aussi[2] que le degré du polynôme minimal de a est nécessairement de la forme 2m.
En conséquence, comme le polynôme minimal du nombre 3√2 est x3 - 2 = 0 de degré 3, ce nombre n'est pas constructible.
Enfin, réaliser la trisection de l'angle revient à construire, à partir du point de coordonnées (a, b)
- a=cos(θ) et b =sin(θ),
le point de coordonnées
- (cos(q),sin(q)) avec q = θ/3.
En utilisant la formule trigonométrique
- cos(3q) = 4cos3(q) - 3cos(q)
on s'aperçoit que cos(q) doit être solution de l'équation :
- 4x3 - 3x = a.
La trisection de l'angle θ est donc réalisable si et seulement si le polynôme 4X3 - 3X - a est réductible sur , autrement dit s'il admet une racine qui est une fonction rationnelle de a, ce qui n'est jamais le cas si a est transcendant (en particulier si θ est algébrique non nul), et n'est même pas toujours le cas si a est algébrique : par exemple[3] pour θ = π/3, et 4X3 - 3X - 1/2 n'a pas de racine rationnelle, donc est irréductible sur .
Dans la même publication, Pierre-Laurent Wantzel complète les travaux de Gauss sur les polygones réguliers constructibles dans ce qu'on appelle désormais le théorème de Gauss-Wantzel.
Notes et références
- Pierre-Laurent Wantzel, « Recherches sur les moyens de reconnaître si un Problème de Géométrie peut se résoudre avec la règle et le compas », dans Journal de mathématiques pures et appliquées, 1re série, vol. 2, 1837, p. 366-372
- (de) le remarque et fournit un contre-exemple, ainsi que des références de preuves ultérieures correctes, dont Franz Lemmermeyer (de) signale que l'une était une rectification de celle de Wantzel. Une telle rectification est d'ailleurs relativement aisée : le polynôme de degré 2n dont a est racine est une puissance de son polynôme minimal, ce qui suffit pour conclure. John Conway considère que cette erreur ne discrédite pas Wantzel de « son » théorème. Contrairement à ce qu'il croit démontrer, m n'est pas nécessairement égal à n. Robin Hartshorne
- Michèle Audin, Géométrie, EDP Sciences, 2006 (ISBN 978-2-86883883-4), p. 134
Pour en savoir plus
- Jean-Claude Carrega, Théorie des corps - La règle et le compas [détail des éditions]
- Jean-Pierre Escofier, Théorie de Galois [détail des éditions]
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