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Stockage d'énergie
Le stockage de l'énergie est l'action qui consiste à placer une quantité d'énergie en un lieu donné pour permettre son utilisation ultérieure. Par extension, le terme "stockage d'énergie" est souvent employé pour désigner le stockage de matière qui contient cette énergie.
On s'intéressera ici principalement à l'opération consistant à créer un stock à partir d'énergie disponible, et non directement de la gestion des stocks (notamment des stocks d'énergie fossile) ou du déstockage.
Sommaire
Intérêt
Le stockage d'énergie est un enjeu à la hauteur de la consommation d'énergie : primordial.
Pour les états, l'indépendance énergétique est stratégiquement et économiquement essentielle. Pour les individus et les entreprises, une énergie disponible à la demande, sans coupure inopinée, est un confort et une commodité pour la production.
Même pour la "production d'énergie", le stockage est essentiel : en réalité, ce qu'on appelle couramment et économiquement "production d'énergie" n'est pas, physiquement, de la production, mais de la transformation d'un stock d'énergie potentielle (charbon, eau stockée en hauteur, matière fissible ...) en une énergie directement utilisable pour un travail (électricité, travail mécanique). Le stockage consiste donc à reconstituer un stock d'énergie potentielle à partir d'une énergie immédiatement disponible, mais dont on préférait disposer plus tard, parce qu'on sait que les besoins seront plus importants. Cela est en particulier indispensable quand l'énergie immédiatement disponible est variable dans le temps, comme c'est le cas de toutes les énergies renouvelables (solaire, éolienne, biomasse, ...).
Rendement d'un stockage d'énergie
L'opération de stockage d'énergie est toujours associée à l'opération inverse consistant à récupérer l'énergie stockée (le déstockage). Ces deux opérations de stockage/déstockage constituent un cycle de stockage. À la fin d'un cycle, le système de stockage retrouve son état initial (idéalement "vide"). On a alors régénéré le stockage. Le rendement d'un cycle correspond au rapport entre la quantité d'énergie récupérée sur la quantité d'énergie que l'on a cherché initialement à stocker. En effet, chacune des deux opérations de stockage et de déstockage induit invariablement des pertes d'énergie ou de matière : une partie de l'énergie initiale n'est pas réellement stockée et une partie de l'énergie stockée n'est pas réellement récupérée. Le rendement d'un cycle de stockage d'énergie dépend énormément de la nature du stockage et des systèmes physiques mis en œuvre pour assurer les opérations de stockage et de déstockage.
Les grandes formes de stockage
Le stockage est directement lié à l'usage qu'on fait de l'énergie. La combustion est, de loin, l'usage énergétique le plus courant, et par conséquent le stockage de combustible est aussi le plus développé. Tous les états disposent de stocks stratégiques de pétrole, mais, même en excluant ces éléments fossiles, il faut rappeler l'importance pratique du bois-énergie, dont on fait des stocks pour l'hiver, et le développement des bio-carburants.
Le stockage sous forme d'énergie potentiel de chute est très utilisé pour la régulation et l'équilibrage des réseau électrique.
A petite échelle, le stockage d'énergie (chimique dans les piles, électro-chimique dans les batteries, électrique dans les condensateurs) en vue de la production d'électricité est bien moindre en termes de quantité d'énergie, mais très important sur le plan pratique.
Le stockage sous forme de chaleur existe également. A l'échelle domestique, des habitations de grande inertie thermique (murs épais, bonne isolation) permettent de lisser les besoins de chauffage, ce qui limite les besoins de chauffage et de rafraichissement, permettant des économies directes.
Une autre forme de stockage de l'énergie thermique est l'utilisation de Matériaux à Changement de Phase (MCP). Les MCP peuvent être utilisés dans les bâtiments mais aussi pour accumuler l'énergie solaire thermique dans des chauffe-eau solaires individuels (CESI). L'utilisation des MCP permet de lisser la production d'énergie gratuite par le soleil mais aussi d'augmenter la capacité de stockage grâce à leur grande densité énergétique volumique. La société Kaplan Energy est le premier fabricant a équiper ses CESI et SSC (Système solaire combiné) de batteries solaires thermiques constituées de MCP.A l'échelle industrielle, on peut stocker la chaleur solaire dans des réservoirs, comme intermédiaire avant la production d'électricité, pour lisser l'apport solaire. Ce type d'usage reste marginal.
Le stockage mécanique est un élément pratiquement obligatoire de tous les moteurs, sous forme de volant d'inertie, pour régulariser le mouvement à des échelles de temps très courte, inférieure à la seconde. Il n'est pratiquement pas utilisé pour le stockage à long terme.
Stockage chimique et biologique
Cette forme de stockage est, de loin, la plus importante
Photosynthèse et biomasse
La production de molécules riches en énergie et facilement utilisable pour libérer cette énergie est à la base de la vie. L'homme récupère cette énergie stockée naturellement essentiellement sous deux formes, toutes deux combustibles :
- le bois
- l'huile
Le stockage d'énergie sous forme de biomasse est long (typiquement plusieurs mois), compliqué et cher, et d'un rendement faible (la photosynthèse ne récupère qu'environ 1% de l'énergie solaire disponible). De plus, l'usage de la biomasse comme carburant ne tire pas profit des intéressantes propriétés des molécules produites par les être vivants, à commencer par leur qualité alimentaire. Pour toutes ces raisons, la biomasse est un mode de stockage accessoire (ce qui ne signifie pas négligeable), et qui le restera (pour autant qu'on s'autorise un pronostic).
Potentiel électrochimique
Article détaillé : Accumulateur électrique.Le stockage de grandes quantités d'électricité avec des accumulateurs électrochimiques géants n'a jamais été réalisé. Les accumulateurs électrochimiques sont généralement lourds, chers, ont une durée de vie limitée et posent des problèmes de pollution (acides et métaux lourds) lors de leur fin de vie.
Par contre, de nombreux systèmes domestiques déconnectés du réseau de distribution d'électricité sont basés sur l'utilisation de batterie d'accumulateurs ou de piles. En pratique, elles sont utiles pour les petits appareils électroménagers ; récemment un regain d'intérêt pour les véhicules produisant peu ou pas de gaz polluants a relancé la création de véhicules automobiles fonctionnant complètement grâce à ce type d'énergie ou de manière hybride (électricité en complément d'énergie fossile).
Les condensateurs de moyenne et grosse capacité, dits condensateurs chimiques sont une autre utilisation des couples électrochimiques pour stocker de l'énergie. Leur utilisation est très courante dans les appareils et machines électriques avec ou sans électronique embarquée.
Gaz
L'énergie disponible peut être utilisée pour synthétiser des gaz combustibles, à partir de molécules moins riches en énergie (ou moins pratique à utiliser). Le méthane ou l'hydrogène, ou même un produit intermédiaire comme l'ammoniac, sont envisagés.
Hydrogène
Article détaillé : Stockage d'hydrogène.L'hydrogène comme carburant a été proposé comme solution dans les problèmes d'énergie.
Le stockage peut être réalisé sous plusieurs formes, qui ont toutes un faible rendement :
- Stockage d'hydrogène gazeux :
Ce mode de stockage est le plus simple technologiquement, mais il présente des inconvénients. La plupart des matériaux sont en effet poreux vis-vis de l'hydrogène, ce qui génère des pertes lors d'un stockage de longue durée. De plus, ce mode de stockage nécessite un volume important, et une compression fort couteuse sur le plan énergétique
- Stockage d'hydrogène liquide :
La liquéfaction de l'hydrogène permet de pallier le problème de volume du stockage gazeux, mais nécessite de refroidir l'hydrogène et de le conserver à très basse température : ce stockage est compliqué, très consommateur d'énergie, et éventuellement dangereux.
- Stockage sous forme solide :
L'hydrogène n'est pas solidifiable, mais il est possible de stocker des molécules solides capables libérer facilement des quantités notables d'hydrogène. Ce mode de stockage n'est pas avantageux, par rapport aux carburants liquides classiques
Stockage de l’énergie mécanique
Stockage sous forme d’énergie potentielle
Stockage hydraulique
Les barrages hydrauliques constituent des réserves d'eau qui, en tombant, fait tourner des turbines génératrices d'électricité.
Une optimisation du système consiste à réutiliser l'eau qui a été libérée. Le stockage par pompage-turbinage est utilisé par endroits pour égaliser la charge quotidienne (c'est-à-dire le besoin en électricité) : de l'eau est pompée et remontée vers des barrages d'altitude quand la demande sur le réseau est faible (pendant les heures creuses et le week-end par exemple), en utilisant la production excédentaire des dispositifs non réglables (nucléaire, solaire, éolien,...) ; pendant les pics de consommation, cette eau redescend et produit à nouveau de l'électricité.
C'est le même dispositif électromécanique réversible, qui produit de l'électricité ou remonte l'eau par pompage. Le rendement est excellent (plus de 90%). Cependant, relativement peu d'endroits ont la place pour les barrages de stockage par pompage avec une ligne à haute tension à proximité.
On utilise aussi ce type de dispositif dans la centrale marémotrice de la Rance (en France) : à marée haute, on ne se contente pas de stocker passivement de l'eau, on pompe aussi pour augmenter la réserve, eau qui sera relâchée avantageusement à marée basse (on monte l'eau de quelques mètres, par contre on utilise son potentiel de chute sur une dizaine de mètres de plus).
Air comprimé
On sait utiliser de l'air comprimé pour produire un travail mécanique, par conséquent il est possible de stocker de l'énergie en comprimant un gaz (en général avec un compresseur mu par une énergie électrique disponible). Le rendement sera médiocre, car la compression s'accompagne d'un échauffement du gaz, et l'énergie correspondante ne sera pas récupérable.
A grand moyen, on peut utiliser des vieilles mines. Quand il y a une grande demande d'électricité, on utilise l'air qui a été comprimée pour mettre en mouvement une turbine qui grace à un alternateur produit de l'électricité. Des projets de ce type ont été mie en place en Alabama et en Allemagne, bien que le rendement soit de 40 %.
A plus petite échelle, les recherches continuent, par exemple sur des batteries à base d'huile.
Stockage sous forme d’énergie cinétique
Stockage par volant d'inertie
Article détaillé : Volant d'inertie.L'énergie est stockée sous forme d'énergie cinétique sur un disque lourd. Pour accumuler l'énergie, un moteur accélère le disque. Pour utiliser l'énergie, on branche un générateur électrique ; en pratique, le générateur peut être le moteur (le même engin électrique peut faire office de moteur ou de frein/générateur).
Un disque lourd tournant est actionné par un moteur électrique, qui agit en tant que générateur lorsque l'on a besoin d'énergie, ralentissant le disque et produisant l'électricité.
Le frottement doit être minimal pour éviter les déperditions. C'est possible en plaçant le volant dans le vide et sur des paliers à lévitation magnétique, systèmes rendant la méthode chère. De plus grandes vitesses de volant permettent une plus grande capacité de stockage mais exigent des matériaux ultra résistants pour résister à l'éclatement et éviter les effets explosifs d'une panne du système, au cours de laquelle l'énergie cinétique de rotation serait convertie en énergie cinétique de translation (autrement dit, le disque se transformerait en projectile...)
En pratique, ce type de stockage est d'un usage très courant mais il se limite pratiquement aux « volants d'inertie » au sein des appareils de production d'énergie, qui opèrent un lissage à très court terme pour régulariser la fourniture. C'est notamment le cas de tous les moteurs thermiques, surtout des moteurs turbo Diesel dont les à-coups sont importants.
Il y a déjà plusieurs décennies que des autobus urbains ont fonctionné avec un volant d'inertie disposé à plat sous le plancher. Ce système permet de faire plusieurs kilomètres sans pollution et en silence avant une "recharge", qui s'effectue lors des arrêts prolongés de quelques minutes dans les stations équipées à cet effet. À l'époque, la relance de l'unique gros disque se faisait par un système pneumatique ou par un moteur électrique disposé dans la chaussée. La complexité technique de cette solution (la taille, le poids de l'équipement, la complexité d'utilisation et l'effet gyroscopique qui déséquilibrait les véhicules) associé à un faible intérêt économique (comparaison du coût avec celui de l'utilisation d'autres énergies) a stoppé son utilisation.
L'évolution technique remet ce système au goût du jour. L'utilisation de deux disques contrarotatifs plus légers mais tournant à très grande vitesse, grâce à de nouveaux matériaux plus résistants, et lancés par un moteur électrique intégré, permet une nette amélioration du rapport poids à vide / charge utile. Ceci permet également une utilisation dans les villes en pente, où le poids est encore plus pénalisant.
Le rendement de ce système, appelé parfois "batterie mécanique", est supérieur à l'utilisation d'accumulateurs chimiques.
Des applications dans le domaine ferroviaire ont également été tentées.
Cette technologie est aussi utilisée dans des alimentations sans interruptions statiques (ASI) et dynamiques (ADI) (Uninterruptible Power Supply en anglais) permettant de pallier la rupture de l'alimentation électrique pendant plusieurs secondes et de permettre le démarrage d'un groupe de secours.
Antimatière
Bien que le stockage d'énergie par antimatière ne soit pour l'instant qu'une vue théorique, et soit impossible à réaliser (faute de maitriser le phénomène de recombinaison spontanée de matière et d'antimatière), le principe serait le suivant:
- La phase "stockage" pourrait être réalisée en concentrant un photon très énergétique en un point précis, ce qui aurait pour effet de produire deux particules (une de matière, l'autre d'antimatière).
- La phase "déstockage" serait réalisée en mettant en contact ces deux particules, qui en se rencontrant produiraient une formidable décharge d'énergie (Certains chercheurs ont estimés que 1g de matière combiné à 1g d'antimatière produirait autant d'énergie que l'explosion atomique d'Hiroshima)
Cette possibilité théorique de stockage d'énergie ne peut être utilisée pour l'instant, car il est impossible de stocker de l'antimatière, par exemple pour la transporter jusqu'au lieu d'utilisation de l'énergie.
Stockage de chaleur
Le stockage de chaleur peut être réalisé à travers deux phénomènes différents associés aux matériaux qui assure le stockage. On parle alors de stockage par chaleur sensible et de stockage par chaleur latente.
Le stockage par chaleur sensible
Dans le stockage par chaleur sensible, l'énergie est stockée sous la forme d'une élévation de température du matériau de stockage. La quantité d'énergie stockée est alors directement proportionnelle au volume, à l'élévation de température et à la capacité calorifique du matériau de stockage. Ce type de stockage n'est limité que par la différence de température disponible, les déperditions thermiques du stockage (liée à son isolation thermique) et l'éventuel changement d'état que peut être amené à subir le matériau de stockage (fusion ou vaporisation).
Le stockage par chaleur latente
Dans le stockage par chaleur latente, l'énergie est stockée sous la forme d'un changement d'état du matériau de stockage (fusion ou vaporisation). L'énergie stockée dépend alors de la chaleur latente et de la quantité du matériau de stockage qui change d'état. Contrairement au stockage sensible, ce type de stockage peut être efficace pour des différences de températures très faibles. Dans le cas changement de phase solide/liquide, et pour une quantité d'énergie stockée et un matériau de stockage donnés, le stockage latent nécessite moins de volume que le stockage par chaleur sensible du fait que la chaleur latente est généralement beaucoup plus élevée que la capacité calorifique.
Ces deux types de stockage peuvent être utilisés pour stocker du froid.
Quelques exemples de stockage de chaleur :
- Dans les systèmes de chauffage domestiques, on utilise parfois la grande inertie thermique de certains matériaux briques, huile pour restituer lentement la chaleur accumulée au cours de périodes où la chaleur a été produite ou capté. Mais le plus souvent, le stockage est assuré par un ballon d'eau chaude isolé.
- Dans les fours à feu de bois, en brique et terre réfractaire, la capacité de la voûte du four à emmagasiner la chaleur est utilisée pour la cuisson d'objets (poterie, émaux, etc.) ou de plats (pain, pizza, etc.).
- Des matériaux à changement de phase (MCP) sont actuellement étudiés pour améliorer l'inertie thermique des parois des bâtiments.
Stockage de l'électricité
L'électricité est une énergie secondaire, c'est-à-dire qu'elle résulte de la transformation d'énergie primaire. Autre caractéristique : cette énergie n'est pas stockable (sauf dans un condensateur): l'électricité produite est instantanément consommée ou perdue. Le problème de stocker ce type d'énergie est en fait celui de la produire rapidement sur des systèmes autonomes (non reliés à un réseau de production). C'est ce qu'on obtient par exemple en utilisant le principe de la pile ou de la batterie, basé sur une réaction chimique : une pile stocke des produits chimiques qui vont réagir et produire de l'électricité à la demande. Ces technologies présentent des inconvénients majeurs qui limitent leur utilisation : leur poids, leur coût, leur faible productivité et, dans certains cas, la dangerosité des composants ou leur aspect polluant (acides, plomb).
- Condensateur
- Stockage magnétique à supraconducteur (SMES)
Voir aussi
Liens externes
- Quelques chiffres en fonction du mode de stockage Est-ce facile de stocker l'énergie ? par Jean-Marc Jancovici
- Portail de l’énergie
Catégorie : Stockage d'énergie
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