Squatt (lieu)

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Squat (lieu)

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Graffiti en catalan proclamant : « Lorsque vivre est un luxe, "occuper" est un droit »

Le squat (de l'anglais « s'accroupir ») est l'action de s'installer illégalement dans un lieu inoccupé ; par extension, il s'agit aussi du lieu ainsi occupé. A partir du XVIIe siècle, le terme squat apparaît pour désigner les occupations illicites de terres (sans titre légal de propriété et sans payer de redevance) par des paysans anglais, les Diggers. Le 1er avril 1649 aux alentours de Londres à lieu la première occupation connue, elle est menée par Gerrard Winstanley.

Sommaire

Une réalité polymorphe

Le squat peut héberger une personne seule comme plusieurs dizaines, dans un petit appartement du centre-ville comme dans une friche industrielle de banlieue. Les conditions d’habitat y sont très variées, de l’insalubrité totale à un confort comparable à celui d’un logement « moyen » (eau et électricité, chauffage, espace suffisant, isolation…). Les habitants des squats sont aussi divers que leurs motivations : jeunes fugueurs refusant d’intégrer un foyer, migrants africains ou est-européens, artistes sans atelier, truckers nomades, gens du voyage privés d’aires d’accueil, toxicomanes sans domicile fixe, militants de la cause libertaire

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Espaces et collectivité

Pour une grande majorité de squatteurs, l’occupation s’inscrit donc dans un parcours résidentiel marqué par la précarité. C'est pourquoi beaucoup de squats prévoient un espace explicitement dédié à l'hébergement des gens de passage : le sleep'in. En outre, ceux-ci concilient souvent lieu d'habitation et espace d'activité : ils essaient de développer une gestion collective du quotidien, à travers la réhabilitation du lieu, l'organisation de rencontres et de débats, la création et la diffusion culturelles, la mise en place d'ateliers (ou workshops), et bien sûr l'information et l'action politiques. Il y a aussi des squats qui hébergent des magasins gratuits, qu'on appelle couramment free-shops ou « zones de gratuité » (friperies, accès internet, etc.).

La difficulté à trouver des immeubles « disponibles » et l'état souvent insalubre de ces immeubles posent parfois des problèmes de surpeuplement et d'hygiène, bien que cela ne soit pas toujours le cas.

Pourquoi squatter ?

Par nécessité

On peut ainsi considérer que le squat participe à la construction d'un modèle d'économie alternative. Et de fait, l'occupation a souvent pour première cause des raisons pécuniaires : des individus, familles ou groupes de personnes cherchent un endroit où vivre, alors qu'ils ne peuvent pas payer de loyer.

Par exemple, en France, les premiers squatteurs apparaissent après la Seconde Guerre mondiale. Pour protester contre les obstacles administratifs qui freinent la mise en œuvre de la loi de réquisition, ils procèdent à l'occupation de logements vides. Issu du Mouvement populaire des familles, lui-même proche de la Jeunesse ouvrière chrétienne, ce mouvement naît à Marseille avant de gagner d’autres villes de province. En cinq ans, quelque 5 000 familles sont ainsi relogées. Ces occupations s'accompagnent d'une campagne dans la presse, notamment catholique (Esprit), et d'une action militante qui sensibilise l'opinion publique à la question de la crise du logement.

Cet exemple montre clairement que les problématiques économiques et politiques ne sont, en dernière analyse, pas dissociables. Et donc, de l'abbé Pierre à l'Organisation communiste libertaire (OCL) en passant par Droit au logement (DAL), nombreux sont ceux qui définissent le fait de squatter comme l'expression d'un mouvement social revendiquant le droit à une vie digne.

Par conviction

Symbole du Mouvement européen des squatteurs

Certains squatteurs sont proches de l'ultragauche, de l'anarchisme ou du mouvement autonome et mettent en pratique l'idée de refus de la propriété privée. Ils soutiennent qu'en abolissant le loyer, et en permettant de partager les ressources et les frais, le squat peut réduire la dépendance à l'argent et permettre de se réapproprier son temps de vie. Surtout, ils cherchent à promouvoir des alternatives culturelles et politiques par le biais de l'autogestion. L'ensemble des habitants se réunit aussi souvent qu'il est nécessaire, pour prendre et assumer collectivement les décisions engageant le fonctionnement ou le développement du lieu. Ce mode d'organisation a, selon ses partisans, l'avantage de ne pas favoriser l'apparition de leaders.

Enfin, dans les squats les plus stabilisés, on observe des systèmes d’entraide et de solidarité qui protègent les individus d’une trop grande vulnérabilité. Le squat peut ainsi jouer un rôle de soupape de sécurité, et accueillir des populations pour lesquelles il n'y a pas vraiment de place ailleurs. Par exemple, à l’image du bidonville des années 1970, il permet aux immigrés de fraîche date de bénéficier des apprentissages effectués par ceux qui les ont précédés. Ou bien encore, il peut constituer une alternative acceptable à l'internement psychiatrique pour certains psychotiques.

Légalisation et pérennité

Expulsion du squat Montsouris à Paris dans le XIVe le 2 septembre 2005

Les squats représentent un phénomène européen en pleine expansion, à la suite du durcissement des conditions d'accès à un logement, et à l'augmentation parallèle du nombre de logements vacants. Des villes comme Barcelone comptent chacune près d'une centaine de squats, en renouvellement permanent. En France, malgré l'existence depuis le 11 octobre 1945 d'une loi dite de réquisition des logements vides (qui visait à régulariser les squats de fait consécutifs à la crise du logement de l'après-guerre) et la loi Besson de 1990, l'occupation reste en principe illicite ; c'est un délit permanent, ce qui signifie que chaque jour d'occupation constitue un flagrant délit. Sur requête du propriétaire, et au terme d'une procédure plus ou moins longue, il n'est donc pas rare que la police intervienne pour procéder à l'exclusion des occupants. La question de la légalisation se pose donc à ceux-ci. À ce titre, on peut distinguer schématiquement deux factions parmi eux :

  • Les partisans de la légalisation, qui veulent négocier le droit d'occuper les lieux sur le long terme. Comme, en France, certains squats d'artistes (par exemple la friche à Lyon) ou même politique (comme les Tanneries à Dijon), ils négocient avec les pouvoirs publics en faisant valoir les bénéfices culturels et politiques de leur présence dans le quartier ou obtiennent parfois leur légalisation à l'issue d'un rapport de force (manifestations, occupation de mairie, etc...). C'est une solution parfois viable, puisqu'en Hollande ou en Italie (centres sociaux), de nombreux squats ont été ainsi légalisés.
  • Les partisans de l'illégalisme, qui sont dans une logique de confrontation avec l'autorité et refusent toute négociation. Ils considèrent que les squats légalisés et leurs habitants participent à la répression contre les autres squats, moins « acceptables » et de fait moins acceptés par les pouvoirs en place (squats politiques, de « sans-papiers », de « pauvres » en général, etc.).

Mouvance des squats en France

La mouvance politique

Selon Le Squat de A à Z (1999), guide issu des mouvances des squats politiques :

« Squatter, c’est entre autres, pas de loyer à payer, pas d’interrogatoire à subir pour savoir si on peut repeindre sa chambre en vert pomme. C’est être libre et responsable dans son lieu de vie. C’est aussi un moyen de survie quotidienne qui peut mener à se questionner sur nos façons de vivre, sur le travail, la famille, la vie collective, le train-train quotidien, sur les possibilités de vivre nos idées dans une telle société… »
« Chaque squat est différent. Les pratiques et la théorie développées par les occupants dépendent largement des contextes politique, socio-économique, juridique, inter-relationnel, etc., mais tout squat est « politique », dans la mesure où il bouleverse, même parfois involontairement, l’ordre social et la propriété privée. »
« Le squat est dépendant des espaces laissés à l’abandon par la bourgeoisie et le système capitaliste en général. Sachant cela, il ne peut être considéré comme un but, mais tout au plus comme un moyen. Mais pas n’importe quel moyen. Le squat peut être un lieu de résistance et d’expérimentation. En squattant, la recherche d’autonomie permet de rendre certaines de nos idées effectives. Squatter, c’est prendre une part de l’interdit, c’est se placer un minimum en rupture au niveau socio-économique. »
« La lutte au quotidien des squats peut se retrouver ainsi dans des pratiques diverses : autogestion, gratuité, récupération/recyclage, réquisitions en tout genre, ouverture sur l’extérieur et confrontation des façons de vivre, débats en tous genres… »

Un livre, publié en 2008, évoque cette scène squat parisienne : Parisquat - Des squats politiques à Paris 1995-2000, il s'agit d'un recueil de documents et de témoignages de squatteurs des années 1990 (avec un chapitre sur l'histoire des squats).

La mouvance artistique

Dans une démarche différente, les squats artistiques sont apparus en nombre à Paris et dans les grandes villes de France dès les années 1980, dénichant des lieux plus ou moins vastes, établissant des liens avec des rapports plus ou moins bons avec les propriétaires. Ce sont en général des lieux de création et d'accueil de manifestations (concerts rock alternatif, expos, fêtes, etc.) ouvertes au public. Les lieux sont autogérés et parfois réhabilités par les artistes dont certains peuvent habiter ou non sur place. Quelques squats artistiques français (dont la plupart n'existent plus) : Art-Cloche, Soccapi (rue Picasso), l'Usine Pali-Kao, Les Récollets, Squat de la Bourse, Squat de La Grange aux Belles, Électron libre rue de Rivoli, La Forge à Paris, L'Usine à Montreuil, Mix-Art Myris à Toulouse, les Diables Bleus à Nice… Certains se transforment parfois en lieu officiel dédié à la culture (notamment La Forge ou le squat de la rue Rivoli à Paris), ce qui entre en contradiction avec la démarche contestataire du squat (lire notamment Interface ou Intersquat, une histoire de chartes).

Voir aussi

Liens externes

Thèmes généraux

Thèmes particuliers

Expériences particulières

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