Siège de tripoli

Siège de tripoli

Siège de Tripoli

Siège de Tripoli
Informations générales
Date 1102 - 12 juillet 1109
Lieu Tripoli
Issue Victoire des croisés
Belligérants
Croisés Seldjoukides
Commandants
Raymond de Saint-Gilles
Guillaume de Cerdagne
Bertrand de Toulouse
Fakhr al-Mulk
Forces en présence
inc inc
Pertes
inc inc
Première croisade
Batailles
Nicée — Dorylée — Antioche — Jérusalem — Rama (1e) — Ascalon — Rama (2e) — Haran — Rama (3e) — Tripoli

Le siège de Tripoli en Syrie[1], est un siège commencé en 1102 par Raymond de Saint-Gilles, et qui prend fin le 12 juillet 1109 avec la prise de la ville. La prise de la ville permet la constitution du comté de Tripoli.

Sommaire

Contexte

Lémirat de Tripoli

À larrivée de la première croisade en Orient, la ville de Tripoli et ses environs appartiennent à Fakhr al-Mulk AbûAliAmmâr, de la famille des BanûAmmâr. Cette famille possédait Tripoli depuis quelques générations et avaient réussi en 1070 à prendre son indépendance en pratiquant une politique de souplesse en jouant des rivalités entre les turcs seldjoukides et les égyptiens fatimides. Fakhr al-Mulk poursuivit cette politique, lorsque les Croisés quittent Antioche pour de rendre vers Jérusalem, il a eu le bon sens de ne pas les traiter en ennemis, même lors du siège deArqa, qui lui appartenait, et alla même jusquà les ravitailler. Après la fondation du royaume de Jérusalem, il sapprête à continuer cette politique déquilibre, cette fois entre les nouveaux états émergents, le royaume de Jérusalem, dune part et les émirats dAlep et de Damas dautre part. Jusquen 1102 ce calcul se révèle profitable, car Antioche et Jérusalem nont pas de vues particulières sur Tripoli et sa région, mais est remis en question par le retour du comte de Toulouse, dont lobjectif est de se tailler une principauté entre la principauté dAntioche et le royaume de Jérusalem[2].

Le siège deArqa

Après la prise dAntioche, lanimosité entre Bohémond de Tarente, qui revendique la ville pour son propre usage, ayant été linstrument principal de la prise de la ville, et Raymond de Saint-Gilles, qui se fait le défenseur des droits de lempire byzantin sur la ville. La prise de Maarat (13 janvier 1099) ne fait quaggraver les dissensions, car Bohémond sest emparé de la plus grande partie du butin. Finalement, Bohémond reste à Antioche, tandis que les autres croisés, Godefroy de Bouillon, Raymond de Saint-Gilles. Tancrède de Hauteville, Hugues de Vermandois et Robert Courteheuse continuent la route vers Jérusalem[3].

Une ambassade est envoyée à lémir de Tripoli pour lui demander un tribut et un ravitaillement pour les Croisés pendant leur traversée de lémirat. Mais les envoyés, constatant lopulence de la ville, persuadent le comte de Saint-Gilles quun tribut plus important peut-être réclamé. Raymond de Saint-Gilles décide alors dassiégerArqa[4], afin de faire céder Fakhr al-Mulk. Dautres membres de son armée parcourent le pays pour le piller, et prennent également le château de Tortose (17 février 1099), puis Maraqiya[5]. Pendant ce temps, Godefroy de Bouillon met le siège devant Jabala[6]. Pour tenter de les inciter à quitter sa principauté, lémir de Tripoli fit courir le bruit de larrivée imminente de larmée du khalife de Bagdad, ce qui incite les croisés à se regrouper devantArqa. La nouvelle savère fausse et Godefroy de Bouillon, furieux davoir abandonner son siège décide de repartir sur Jérusalem, obligeant le comte de Toulouse à faire de même, le 13 mai 1099[7].

Raymond de Saint-Gilles

Après la prise de Jérusalem (15 juillet 1099), certains des chefs de la croisade se sont taillés des fiefs, tels Bohémond de Tarente, devenu prince dAntioche et Baudouin de Boulogne, devenu comte dÉdesse. Les barons qui ont pris Jérusalem élisent lun des leurs pour conserver la ville : ils choisissent Godefroy de Bouillon et évincent Raymond de Saint-Gilles. Tancrède de Hauteville reste à Jérusalem et conquit la principauté de Galilée, tandis quHugues de Vermandois et Robert Courteheuse rentrent en Europe[8].

En mai 1100, Raymond de Saint-Gilles se rend à Constantinople, et en mars 1101, il décide daccompagner à travers lAnatolie une croisade de secours qui vient darriver. Mais les croisés, principalement des Lombards, nécoutant pas les conseils de leur guide, prennent Ankara, puis se font massacrer le 5 août 1101 par les troupes de Kiliç Arslan [9].

Les États Latins d'Orient en 1102.
Le comté de Tortose correspond au futur comté de Tripoli.

Cest lannée suivante, en 1102, que Raymond de Saint-Gilles décide de se consacrer à la constitution dun fief pour son compte. Il ne dispose plus que de trois cent hommes et de lhostilité du régent dAntioche, Tancrède de Hauteville. Mais il reste une zone non occupée par les Croisés, il lui est possible de fonder une principauté, autour de Tripoli[10].

Le siège

En février 1102, Raymond profite du passage dune armée de Croisés pour prendre le port de Tortose. Ce port, déjà pris en février 1099, avait été repris par les Musulmans en 1101, pendant que le comte accompagnait une croisade en Anatolie. Une fois la ville prise, le 18, les croisés lui laissent la ville, et se dirigent ver Jérusalem. Raymond y installe son quartier général en entreprend la conquête des environs de Tripoli[11].

En 1103, une escadre génoise permet à Raymond de semparer dune autre port, situé au sud de Tripoli, celui de Gibelet, qui se rend le 28 avril 1104. La ville sera par la suite confiée à un génois, Hugues Embriaco qui en fera une colonie génoise[12].

Avec Tortose et Gibelet, le comte de Saint Gilles possède maintenant les deux places fortes qui délimitent le futur comté de Tripoli, dont il reste à conquérir la capitale. Afin de contrôler laccès terrestre de la ville, Raymond fait édifier, avec laide que lempereur Alexis Ier Comnène lui envoie, un château situé sur un éperon rocheux en face de la ville : le Mont-Pèlerin, ou Qalat Sanjîl (« Le château de Saint-Gilles ») comme le nomment les musulmans. Durant ces évènements, Elvire de Castille, lépouse de Raymond, donne naissance à un fils, Alphonse Jourdain. Au mois daoût ou en septembre 1104, Fakhr al-Mulk tente une sortie pour détruire le château, mais ne parvient quà incendier les faubourgs du Mont-Pèlerin[13]. Raymond de Saint-Gilles meurt six mois plus tard, le 28 février 1105[14].

La mort de Raymond ne met pas fin au siège, bien au contraire, car son cousin Guillaume Jourdain, comte de Cerdagne prend sa succession. Comme son prédécesseur, il dispose du soutien de Byzance, qui le ravitaille par voie maritime et dont la flotte met en déroute celle de Tripoli en 1106. Les Francs en profitent pour semparer de places fortes dans larrière-pays. Lémir de Tripoli sait maintenant quil ne peut pas se sortir seul de cette situation, mais se refuse à demander de laide à Tughtekîn, lémir de Damas avec qui il est brouillé, ou aux Fatimides qui revendiqueraient la suzeraineté, voire même lannexion de la ville. Son choix se porte sur Soqman ibn Ortoq, lancien cadi de Jérusalem mais vainqueur de la bataille de Harran (printemps 1104), avant que cette dernière ne soit prise par les Croisés. Mais Soqmân meurt subitement à Palmyre, alors quil conduisait une importante armée sur Tripoli[15].

Le blocus de la ville est de plus en plus étroit, et son ravitaillement se fait de plus en plus difficile. Fakhr al-Mulk fait saisir tous les vivres de sa ville pour les partager entre tous les habitants et impose les richesses pour financer la défense de la ville. Mais les bourgeois de la ville voient ses richesses partir ainsi, ses activités commerciales paralysées par le siège et certains dentre eux quittent la ville, prêtent allégeance aux Francs et leur indiquent par quels sentiers la ville est ravitaillée. Le blocus devient total et lémir, après avoir demandé lextradition des traîtres, les fait assassiner (1106)[16].

Au printemps 1108, le cadi Fakhr el-Moulk, lassé dattendre les secours du sultan Saljûqide Muhammed Ier, se rend à Bagdad, escorté de 500 cavaliers et de nombreux serviteurs chargés de cadeaux (fin mars). Il passe par Damas, dominée à la mort de Dukak par latabek Tughtekin, qui laccueille à bras ouvert. À Bagdad, le sultan le reçoit en grande pompe, mais préfère régler en premier lieu le problème de Mossoul. Fakhr el-Moulk, de retour à Damas en août, apprend que Tripoli a été donnée par les notables, las de lattendre, au vizir dÉgypte Al-Afdhal [17],[18].

Les débris de lémirat de Tripoli échappent alors à Fakhr el-Moulk, à qui il ne reste que Gabala. La ville est occupée par les Fatimides et Toghtekin assiègeArqa. En mars 1108, Guillaume Jourdain attaque larmée de Damas, qui lève le siège dArqa, puis continue le siège pour son compte et prend la ville au bout de trois semaines de siège. Durant lété 1108, quatre mille chevaliers et sergents provençaux arrivent en renfort, mais ils sont conduits par Bertrand de Saint-Gilles, le fils de Raymond IV, qui revendique le comté[19].

Pour éviter que les dissensions ne fassent échouer le siège, Baudouin de Boulogne, roi de Jérusalem vient en personne arbitrer le litige, avec mille chevaliers et soldats. Tancrède de Hauteville, prince dAntioche, ne souhait pas être en reste et vient également avec sept cents soldats. Le roi décide que le comté doit être partagé en deux, la partie nord, avec Tortose etArqa revenant à Guillaume et la partie sud, avec Tripoli et Gibelet revenant à Bertrand [20].

Ce litige et sa résolution permettent la plus grande concentration de soldats autour de Tripoli depuis le début du siège. De plus, une escadre de soixante dix navires génois croise au large de la ville. Ce sont les meilleures conditions pour tenter un assaut de la ville, d'autant plus que les Égyptiens, après s'être emparés de la ville, n'avaient pas cherché à y envoyer une armée de secours. Voyant cela, les habitants de Tripoli décident de négocier la reddition de la ville, plutôt que d'attendre l'assaut final. Ils obtiennent de Baudouin la vie sauve, ainsi que la possibilité de quitter la ville librement, pour ceux qui le désirent, ou d'y rester, moyennant un impôt à payer aux Francs. Les forces terrestres, conduites par Baudouin, Bertrand et Tancrède respectent ces conditions, au contraire des Génois qui pillent la ville, détruisent sa bibliothèque, le Dar-em-Ilm, et massacrent une partie de la population[21].

Conséquences

Avec la prise de la ville, c'est le comté de Tripoli qui prend possession de sa capitale. Le comté devait être divisé en deux, mais l'assassinat de Guillaume Jourdain peu après donne la totalité du comté à Bertrand. Les dernières forteresses musulmanes sont prises, telles Banyas et Jabala, prises par Tancrède en revenant sur Antioche. Bertrand tente de prendre Baalbek, mais y renonce face à l'arrivée de l'armée de Toghtekîn[22].

Notes et références

  1. Au Moyen Âge, la Syrie désigne la façade méditerranéenne du proche Orient, lAnatolie exceptée. Elle correspond à lactuelle Syrie, le Liban, Israël et la Jordanie. Tripoli se trouve actuellement au nord du Liban.
  2. Grousset 1934, p. 386.
  3. Grousset 1934, p. 173-189.
  4. nommée Arcas par les Francs.
  5. nommée Maraclée par les Francs.
  6. nommé Gibelet par les Francs.
  7. Grousset 1934, p. 195-6.
  8. Grousset 1949, p. 195-9.
  9. Grousset 1934, p. 368-379.
  10. Grousset 1934, p. 383-5.
  11. Grousset 1934, p. 386.
  12. Grousset 1934, p. 390.
  13. Des chroniques arabes prétendent que Saint-Gilles est mort des suites de cette attaque et peu après, mais elles sont fautives, car il nest mort que six mois plus tard et les sources chrétiennes sont muettes sur ce point. Peut-être a-t-il été blessé pendant cet assaut.
  14. Grousset 1934, p. 390-2.
  15. Grousset 1934, p. 394-5.
  16. Grousset 1934, p. 395-6.
  17. Grousset 1934, p. 397-8.
  18. Maalouf 1981, p. 98-100.
  19. Grousset 1934, p. 398-402.
  20. Grousset 1934, p. 401-2.
  21. Grousset 1934, p. 404-6.
  22. Grousset 1934, p. 409-410.

Annexes

Bibliographie

  • René Grousset, Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem - I. 1095-1130 L'anarchie musulmane, Perrin, Paris, 1934 (réimpr2006), 883 p. 
  • René Grousset, L'Empire du Levant : Histoire de la Question d'Orient, Payot, coll. « Bibliothèque historique », Paris, 1949 (réimpr1979), 648 p. (ISBN 2-228-12530-X) 
  • Jean-Luc Déjean, Les comtes de Toulouse (1050-1250), Fayard, 1979 (réimpr1988) (ISBN 2-213-02188-0) [détail des éditions] 
  • Amin Maalouf, Les croisades vues par les arabes, Jai lu, 1983 (ISBN 978-2-290-11916-7) 

Articles connexes

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