Siege de Saint-Jean-d'Acre (1191)

Siege de Saint-Jean-d'Acre (1191)

Siège de Saint-Jean-d'Acre (1191)

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Siège de Saint-Jean-d'Acre
Siege of Acre.jpg

Informations générales
Date août 1190 à juillet 1191
Lieu Saint-Jean d'Acre
Issue reddition de la ville
Belligérants
Armoiries de Jérusalem.svg Royaume de Jérusalem
England COA.svg Royaume d'Angleterre
Blason pays fr FranceAncien.svg Royaume de France
Cross of the Knights Templar.svg Ordre du Temple
Flag of Ayyubid Dynasty.svg Ayyoubide
Commandants
Armoiries de Jérusalem.svgGuy de Lusignan
England COA.svgRichard Cœur de Lion
Blason pays fr FranceAncien.svgPhilippe Auguste
Flag of Ayyubid Dynasty.svg Saladin

Qarâqûsh

Al-Meshtûb
troisième croisade
Batailles
Hattin — Jérusalem — Saint-Jean-d'Acre — Arsouf

Le Siège de Saint-Jean-d'Acre en 1191 est une opération militaire de la troisième croisade (1189-1191). Après la défaite écrasante de Hattin, la prise de Saint-Jean-d'Acre est la première opération de reconquête du royaume de Jérusalem, qui permettra à ce dernier de se maintenir encore un siècle.

Sommaire

Contexte

Le 4 juillet 1187, Saladin écrase l’armée franque conduite par Guy de Lusignan, roi de Jérusalem. Le roi et la plupart de la noblesse qui a survécu à la bataille est faite prisonnière. Le lendemain, il prend le château de Tibériade, puis, plutôt que s’attaquer immédiatement à Jérusalem, il préfère prendre les différents ports du royaume de Jérusalem pour couper les Croisés d’éventuels renforts.

Le 8 juillet, il arrive devant les murs de Saint-Jean d'Acre, défendue par Josselin III de Courtenay. Ce seigneur, il est vrai sans grands moyens militaires, mais aussi sans grand courage, ne cherche pas à résister et négocie dès le lendemain la reddition de la ville avec Saladin. Malgré l’hostilité des bourgeois et du bas peuple de la ville, qui faillit dégénérer en émeute, cette dernière est livrée à Saladin le 10 juillet.

Les termes de la reddition prévoient la vie sauve aux habitants chrétiens de la ville ainsi que la conservation de leur possession, Saladin voulant garder intact ce comptoir commercial qui apporte la richesse à ses états, mais la plupart des habitants chrétiens refusent d’y rester et émigrent, sans être inquiétés[1]. Saladin part ensuite à la conquête des autres cités côtières, puis de la ville de Jérusalem, qu’il prend le 2 octobre 1187.

Le 13 juillet, un navire amenant un croisé, Conrad de Montferrat, se présente devant Saint-Jean-d’Acre. Etonné de voir la ville aux mains des musulmans, il parvient à échapper aux galères égyptiennes et aborde à Tyr alors assiégé et sur le point de se rendre. La venue de Conrad redonne du courage aux habitants, Conrad organise la résistance et tient en échec Saladin, qui doit se résoudre à lever le siège (2 janvier 1188)[2].

Saladin comprend rapidement le danger que représente Conrad pour ses projets de conquête du royaume. Aussi remet-il en juillet 1188 en liberté Guy de Lusignan, après lui avoir fait jurer solennellement de ne plus prendre les armes contre les musulmans, espérant que la médiocrité de Guy allait neutraliser l’intelligence et la bravoure de Conrad. A deux reprises (1188 et avril 1189), Guy tente de prendre le commandement des forces croisées, Conrad de Montferrat refuse de lui ouvrir les portes de Tyr.[3].

Le début du siège

Guy de Lusignan, devenu roi sans royaume[4], discrédité auprès des barons de Terre Sainte, renie la parole qu'il a donné à Saladin et, le 20 août 1189, prend avec quelques chevaliers fidèles prend la direction du port de Saint-Jean-d'Acre pour l'assiéger. Saladin n'aurait eu aucune peine à écraser la petite armée mais il assiégeait le château de Beaufort, âprement défendu par Renaud de Sidon et croit à une manœuvre de diversion destiné à lui faire lever le siège. Il se ravise le 26 août, mais quand il atteint Acre le 29 août, les croisés sont solidement retranchés dans un camp à moins d'un kilomètre de la ville[5].

Dès le 1er septembre, des flottes de croisés arrivent autour d’Acre, renforçant la petite armée de Guy de Lusignan et assurant aux croisés la maîtrise des mers et interdisant aux musulmans le ravitaillement de la ville par mer. Faute d’effectifs suffisant, les croisés ne peuvent cependant pas empêcher une armée commandée par Taqi ad-Din, neveu de Saladin, de pénétrer dans la ville, le 15 septembre 1189. Le 18, Saladin tente une attaque contre les Francs mais ceux-ci, solidement retranchés dans leur camp repoussent les assaillants et ne se laissent pas attirer en rase campagne. Le 4 octobre, les Francs attaquent le camp de Saladin, mais aucun des deux camps n’obtiennent de succès décisif.

Les cadavres s’accumulant entre les deux camps génèrent des épidémies et Saladin atteint de dysenterie, éloigne son camp pour se protéger de ces maladies. Les croisés, maintenant en effectif suffisant, en profitent pour entourer complètement la ville, interdisant son ravitaillement terrestre. Une guerre de tranchée s’installe alors entre les deux armées, et donne parfois l’occasion à une fraternisation relative entre les deux camps. Cependant, Saladin décide d’appeler l’ensemble du mode arabe au jihad, pour en finir définitivement[6]. L’hiver 1189-90 se montre particulièrement rude pour les assiégeants, chez qui sévit la disette et Conrad de Montferrat entreprend d’assurer des convois de ravitaillement pour les croisés, malgré sa rivalité avec Guy de Lusignan.

Au printemps, les croisés entreprennent la construction de tours mobiles qui sont envoyé à l’assaut de la ville le 27 mai 1190. Les défenseurs de la ville, ne pouvant pas empêcher leur avancée, envoie un messager, nageur intrépide[7] qui traverse les lignes croisées et prévient Saladin. Le 5 mai, ce dernier réussit à faire détruire les tours. L’annonce de la venue de l’armée de Frédéric Barberousse, empereur germanique, avec de 200 à 260 000 hommes, oblige Saladin à envoyer une partie de son armée pour le contrer. Des sergents croisés en profitent pour attaquer le camp et mettent en déroute les troupes, mais ils s’attardent à piller le camp et ne peuvent résister à un retour de Saladin qui a rassemblé ses troupes, et la moitié d’entre eux sont tués (25 juillet 1190).

Frédéric Barberousse, victorieux des Turcs à Iconium en mai 1190, se noie en Cilicie en traversant le Selef (10 juin). Eprouvée par les difficultés du chemin, puis par une épidémie qui se déclare à Antioche, son armée se disperse. Quelques centaines de chevaliers seulement participent avec Frédéric de Souabe au siège d’Acre.

L’arrivée de la troisième croisade

Le 27 juillet, le comte Henri II de Champagne arrive avec un premier détachement de croisés et annonce la future arrivée des rois Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion. Frédéric de Souabe et Henri de Champagne font construire une tour mobile et tentent un nouvel assaut en septembre et en octobre, mais la tour est détruite vers le 15 octobre, incendié par des feux grégeois.

Une tentative d’attaque du camp de Saladin se solde par un échec en novembre, et une galère égyptienne réussit en février 1191 à forcer le blocus maritime, à entrer dans le port d’Acre et à renouveler la garnison.

Le 20 avril 1191, le roi de France Philippe Auguste débarque au voisinage d’Acre avec ses troupes. Le roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion le rejoint le 8 juin, avec 25 galères, après s’être emparé de Chypre. Richard qui désire rencontrer Saladin, entre en contacts avec son frère al-Adel, mais sans résultats.

Malgré la rivalité entre les deux rois français et anglais, amplifiée par la querelle qui oppose Guy de Lusignan à Conrad de Montferrat, plusieurs assaut sont tentés, les 14, 17 et 22 juin et les 2 et 11 juillet. Le 15 juillet, la flotte de Richard Cœur de Lion coule le dernier navire égyptien, interdisant définitivement le ravitaillement de la ville. Le 3 juillet,avertit par les habitants d’Acre qu’il ne peuvent plus tenir longtemps, Saladin tente de forcer le blocus en attaquant les camps croisés, mais échoue.

La reddition de la ville

reddition de la ville

Dès le 3 juillet, les commandants de la ville, Qarâqûsh et Al-Meshtûb, savent qu’ils ne peuvent plus résister longtemps au siège et enjoignent Saladin à négocier la reddition de la ville. Ce dernier, d’abord réticent, veut tenter une ultime attaque contre les Francs, mais la plupart de ses émirs refusent de continuer le combat et la ville risque de se mutiner contre le sultan. Il accepte les négociations, mais refusent les exigences des croisés, qui veulent la restitution de la Vraie Croix et du royaume de Jérusalem dans ses frontières antérieures à 1187, contre la libre sortie de la garnison, ainsi que la restitution de la Sainte Croix, le payement d'une rançon et la libération des prisonniers chrétiens. Une négociation s’engage entre les croisés et la garnison qui, malgré l’opposition de Saladin, ouvre les portes de la ville[8].

Il s'engage alors une discorde entre les anciens habitants chrétiens de la ville et les croisés qui occupent leur maison. Philippe Auguste tranche le litige en ordonnant que les maisons soient restituées à leurs propriétaires s'ils sont en mesure d'en prouver la possession, mais en contrepartie, devront loger les soldats croisés.

Conséquences

Philippe Auguste quitte la Palestine en août. Par rapport à Richard Cœur de Lion, c'est un roi croisé qui faisait preuve de sens politique et de retenue, qualité dont Richard est dépourvu. D'une part, Philippe n'accorde que peu d'importance à la Terre Sainte, d'autre part il ne peut politiquement pas se permettre de laisser le royaume de France trop longtemps sans son roi.

Alphonse de Neuville (1835-1885) : Massacre des défenseurs d'Acre, ordonné par Richard Cœur de Lion.

Le 20 août, trouvant que l'exécution des conditions de reddition s'éternisant et craignant une traitrise, Richard fait massacrer la garnison de la ville, 2700 soldats, avec près de 300 femmes et enfants de leur famille, ce qui entraîne la cessation du versement de la rançon, la restitution de la Croix et la libération des prisonniers. Le lendemain, il quitte Acre pour marcher sur Jaffa, laissant la garde de la ville et du trésor à deux de ses familiers, Bertram de Verdun et Etienne de Longchamps.

Richard marche vers le sud, le long de la côte, tandis que Saladin lui barre la route de Jérusalem. Il obtient quelques succès, notamment dans la plaine côtière d’Arsouf, au nord de Jaffa (septembre), mais ne sait pas exploiter son succès, par exemple en marchant sur Jérusalem qui n’était pas en état de se défendre. Ses hésitations permettent à Saladin de réparer les murailles de la ville et de l’approvisionner. Soucieux de rentrer en Angleterre, il insiste pour parvenir à un accord rapide auprès d’al-Adel. Il réclame Jérusalem, le territoire à l’ouest du Jourdain et la vraie croix, que les musulmans ont prise à Hattin. Saladin refuse en bloc, mais ouvre les négociations. Richard propose alors de donner sa sœur, veuve du roi de Sicile, en mariage à al-Adel. Il donnerait les terres qu’il contrôle, d’Acre à Ascalon, à sa sœur, tandis que Saladin céderait ses possessions du littoral à son frère. La croix leur serait confiée, et les prisonniers des deux camps seraient libérés. L’accord plait à al-Adel. Saladin accepte, conscient qu’il s’agit d’une ruse. Son refus aurait déplu à al-Adel, et provoqué la discorde entre les frères. Richard, démasqué, doit reculer : sa sœur refuse d’épouser un musulman !

Saladin, de son côté, engage des pourparlers avec Conrad de Montferrat qui entretient des rapports tendus avec Richard, le soupçonnant de vouloir le priver de ses possessions, et qui va jusqu’à proposer au sultan une alliance contre Richard. Il sera assassiné peu après par des ismaëliens de la secte des Assassins. Les négociations entre Richard et Saladin traîneront encore un an.

Notes et références

  1. Grousset 1935, p. 757-760.
  2. Grousset 1936, p. 47-51
  3. Grousset 1936, p. 62
  4. Seul Tyr et Beaufort sont aux mains des croisés, et Conrad de Montferrat, on l'a vu, lui refuse l'accès de Tyr.
  5. Grousset 1936, p. 64
  6. Une ambassade est même envoyée au sultan almohade du Maroc et de l’Espagne (Grousset 1936, p. 70-75).
  7. peut-être Issa al awwam
  8. Grousset 1936, p. 94-95.

Annexes

Quelques personnalités mortes durant le siège

Bibliographie

  • René Grousset, L'Empire du Levant : Histoire de la Question d'Orient, Payot, coll. « Bibliothèque historique », Paris, 1949 (réimpr. 1979), 648 p. (ISBN 2-228-12530-X) 
  • René Grousset, Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem, Perrin, Paris, 1936 (réimpr. 1999)  :
    • II. 1131-1187 L'équilibre, 1935.
    • III. 1188-1291 L'anarchie franque, 1936.

Articles connexes

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